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toujours obligés de condamner le prévenu à la peine déterminée par la loi, s'ils le trouvent coupable; et sur ce fondement, vous avez cassé, le 14 pluviose an 12, au rapport de M. Carnot et sur notre réquisitoire, deux arrêts de la cour de justice criminelle du département du Jura, qui, par une fausse application de l'art. 4 du code du 3 brumaire an 4, dont l'art. 1er. de celui de 1808 n'est que la répétition, avaient décidé que le ministère public, en concluant à décharge dans une procédure correctionnelle, ótait aux juges le pouvoir de condamner le prévenu aux peines qu'il leur paraissait avoir

encourues.

» Or, que faut-il pour que le ministère public soit cense agir? Est-il nécessaire qu'il prenne des conclusions contre le prévenu? Non certainement : il suffit qu'il paraisse dans la procedure; il suffit que la procédure lui soit com. muniquée.

» Supposons une plainte rendue par une partie civile devant le juge d'instruction. Le juge d'instruction ordonne que cette plainte sera communiquée au procureur (du roi). Le procureur (du roi) l'examine et met au bas des conclusions par lesquelles il estime qu'il n'y a pas lieu d'instruire. Ces conclusions lient elles les mains aux juges? Gardons nous de le penser; le juge peut, sans s'arrêter à ces conclusions, ordonner, soit que le corps du délit sera constaté par un procès-verbal, soit que les témoins seront entendus; et vainement au bas de chaque acte de la procédure qui lui sera ensuite communiquée, le procureur (du roi ) persistera t-il dans ses premières conclusions; le juge n'en ira pas moins en avant; et si, définitive, le prevenu est declaré coupable, il n'en sera pas moins condamné.

en

» La question, au surplus, n'est pas nouvelle, et déjà vous l'avez solennellement jugée, sous le code du 3 brumaire an 4, dans un sens diametralement opposé à l'arrêt de la cour de Metz qui vous est aujourd'hui dé

noncé.

» Le 28 vendémiaire an 11, Jeanne Moncel fait citer Jeanne Egrisniac devant le tribunal de police du canton d'Argental, et conclud à ce qu'elle soit condamnée a lui payer 50 francs de dommages-intérêts, pour avoir jetée et versé sur elle des immondices. Le 30 du même mois, jugement qui, attendu la dénégation de Jeanne d'Egrisniac, ordonne à Jeanne Moncel d'administrer, à l'audience du 15 frimaire, la preuve du fait qu'elle articule. Le 15 brumaire, Jeanne Moncel expose que les témoins qu'elle a fait citer, ne comparaissent pas, et demande la remise de la cause. L'adjoint du maire s'y oppose, et soutient qu'aux termes de l'art.

162 du Code du 3 brumaire an 4, l'affaire doit être jugée à cette audience même. Le tribunal n'a aucun égard à cette opposition, et ordonne que les témoins seront reassignés pour l'audience du 15 frimaire. A cette audience, les témoins comparaissent et constatent, par leurs dépositions, le fait dont se plaignait Jeanne Moncel. L'adjoint du maire déclare que tout ce qui s'est fait depuis le 15 brumaire, étant irrégulier et nul, il n'a point de conclusions à prendre pour faire condamner la delinquante. Par jugement du même jour, le tribunal de police condamne la délinquante à 50 francs de dommages-intérêts; et s'abstient de la condamner à l'amende, parceque le ministère public, dit il, a refusé d'y conclure. L'adjoint du maire se pourvoit en cassation, mais après le delai de la loi. Par arrêt du 24 nivôse suivant au rapport de M. Liborel, Attendu que l'adjoint du maire d'Argental n'a exercé son pourvoi qu'après les délais prescrits..., le tribunal l'y déclare non recevable; et faisant droit sur les réquisitions d'office du substitut du commissaire du gouvernement, vu l'art. 606 dudit Code, attendu que ledit jugement dudit tribunal de police du canton d'Argental a contrevenu à cet article, ne prononçant aucune condamnation d'amende; le tribunal casse et annulle ledit jugement en ce regard, pour l'intérêt de la loi.

en

» A l'autorité de cet exemple, se joint ici une considération qui prouve de plus en plus combien peu est reflechi l'arrêt sur le sort duquel vous avez à prononcer.

» D'après l'art. 3 du Code d'instruction criminelle, l'action privée du sieur Rolland dans les eaux duquel Antoine Brissac était prévenu d'avoir pêché, ne pouvait être portée devant le tribunal correctionnel, qu'accessoirement à l'action publique qui dérivait du délit commis à son prejudice. Il fallait donc que le tribunal correctionnel fût saisi de l'action publique, pour qu'il lui fut permis de statuer sur l'action privée du sieur Rolland Il ne pouvait donc statuer sur l'action privée du sieur Rolland, qu'en statuant sur l'action publique. La cour de Metz ne pouvait donc pas, en décidant qu'il n'avait pas été saisi de l'action publique, confirmer son jugement, en tant qu'il pronon cait sur l'action privée du sieur Rolland. Elle aurait donc, même dans le systeme erronné, qui fait la base de son arrêt, violé l'art. 3 du Code d'instruction criminelle; et par conséquent vous devriez casser son arrêt, même en adoptant son système.

» Mais il reste une question fort importante, quoique peu difficile : c'est de savoir si cet

arrêt peut être cassé, pour avoir refusé d'ap pliquer au prévenu les peines que la loi lui infligeait.

» La raison de douter résulte des art. 413 et 414 du Code d'instruction criminelle : Les voies d'annullation exprimées en l'art. 408 (est-il dit dans l'un) sont, en matière correctionnelle et de police, respectivement ouvertes à la partie poursuivie pour un délit ou pour une contravention, au ministère public et à la partie civile, s'il y en a une, contre tous arréts ou jugemens en dernier ressort, sans distinction de ceux qui ont prononcé le renvoi de la partie ou sa condamnation. La disposition de l'art. 411 ( continue l'autre ) est applicable aux arrêts et jugemens en der nier ressort, rendus en matière correctionnelle et de police. Or, que porte l'art. 408? Rien autre chose, si ce n'est que les arrêts de condamnation rendus par les Cours d'assises, peuvent être cassés, sur le recours de l'accusé, soit pour violation des formes prescrites à peine de nullité, soit pour incompétence, soit pour omission de prononcer sur une ou plusieurs demandes de l'accusé lui même, sur une on plusieurs réquisitions du ministère public. Que porte l'art. 411? Rien autre chose si ce n'est que, lorsque la peine prononcée sera la méme que celle portée par la loi qui l'applique au crime, nul ne pourra demander l'annullation de l'arrét, sous le prétexte qu'il y aurait erreur dans la citation du texte de la loi. Et comme vous le voyez, ni l'un ni l'autre article ne permettent de casser un arrêt, pour avoir exempté un coupable de la peine dont la loi voulait qu'il fût puni. Il est bien vrai que l'art. 410 ouvre la voie de la cassation, tant contre l'arrêt qui a prononcé une peine autre que celle appliquée par la loi à la nature du crime, que contre l'arrêt qui a prononcé une absolution sur le fondement de la non-existence d'une loi pénale qui pourtant existait. Mais la disposition de cet article qui, par elle même, est limitée aux matières de grand criminel, n'est pas, comme celles des art. 408 et 411, étendue par les art. 413 et 414, aux matières correctionnelles et de police; et, des-là, il semble que, dans les matières correctionnelles et de police, ni la fausse application, ni le défaut d'application d'une loi penale, ne peuvent donner lieu à la cassation d'un arrêt.

» Mais assurément on ne persuadera à personne que le Code d'instruction criminelle ait voulu fermer la voie de la cassation à un prévenu qui se trouverait condamné à cinq années d'emprisonnement pour un fait que la loi ne punit que d'un emprisonnement de six jours,

à un prévenu qui se trouverait condamné à 10,000 francs d'amende, pour un fait que la loi ne punit que d'une amende de 16 francs?

» Et cependant il faudrait aller jusques là, pour inférer des art. 413 et 414, que le ministère public ne peut pas, en matière correctionnelle ou de police, requérir la cassation soit d'un arrêt qui applique faussement, soit d'un arrêt qui refuse d'appliquer, une loi pénale; car l'art. 410 fait, à cet égard, marcher de front le droit du condamné et le droit du ministere public.

» Au surplus, si l'art. 410 n'est pas textuellement étendu par les art. 413 et 414, aux matières correctionnelles et de police, il l'est au moins d'une manière implicite, en ce que, par l'art. 414, l'art. 411 est déclaré applicable à ces matières.

» En effet, l'art. 411, en disant que, lorsque la peine prononcée sera la même que celle portée par la loi qui l'applique an crime, nul ne pourra demander l'annullation de l'arrêt, sous le prétexte qu'il y aurait erreur dans la citation de la loi, suppose bien clairement qu'il existe une règle générale d'après laquelle il y a ouverture à cassation toutes les fois que la loi pénale n'est point appliquée comme elle devrait l'être.

» L'art. 414 étend donc cette supposition aux matières correctionnelles et de police. Il adopte donc, pour ces matières, la règle générale que suppose l'art. 411. Il soumet donc à la cassation les arrêts qui, dans ces matières, n'appliquent pas ou appliquent faussement la loi penale aux faits reconnus par les juges.

» Mais après tout, si les art. 413 et 414 étaient insuffisans par eux-mêmes pour soumettre ces arrêts à la cassation, il y serait certainement suppléé par l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, aux termes duquel, comme vous le savez, les arrêts des cours (royales) peuvent, quoique revêtus des formes prescrites à peine de nullité, étre cassés pour une contravention expresse à la loi.

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» Il y a, en effet, contravention expresse la loi, dans tout arrêt qui, en matière correctionnelle, n'applique pas la peine que la loi determine. Cette contravention y existe même sous deux rapports.

» D'une part, l'arrêt contrevient à la loi qui détermine la peine.

» De l'autre, il contrevient aux art. 161 et 189 du Code d'instruction criminelle, qui veulent que, si le prévenu est convaincu de délit, le tribunal prononce la peine déterminée par la loi.

» Et sans doute, on ne prétendra pas que

cette double contravention ne porte que sur des formes, et que ces formes ne sont pas prescrites à peine de nullité : il est trop évident qu'elle porte sur le fond, rien n'étant plus étranger à ce que les jurisconsultes appellent ordinatoria litis, que la question de savoir si le prévenu est passible de telle ou telle peine.

» Nous estimons qu'il y a lieu de casser et annuler l'arrêt qui vous est dénoncé par le procureur général de la cour de Metz ».

Par arrêt du 27 juin 1811, au rapport de M. Busschop,

« Vu les art. 1, 2, 3, 161, 182 et 189 du Code d'instruction criminelle de 1808 et l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810....;

Considérant qu'il résulte des dispositions des art. 1, 2 et 3 ci-dessus cités, que les tribunaux de police correctionnelle ne sont autorisés à connaitre de l'action civile pour la reparation du dommage causé par un delit, que lorsqu'ils sont en même temps saisis de l'action publique pour l'application de la peine;

» Qu'il suit delà que, toutes les fois que ces tribunaux sont légalement et directement saisis de l'action civile, ils le sont aussi et en même temps de l'action publique ;

» Que conséquemment ils doivent, en cas de conviction, et aux termes des art. 161 et 189 ci-dessus cités du Code d'intruction criminelle, prononcer la peine due au délit, quelles que soient d'ailleurs les conclusions du ministère public;

» Que, suivant l'art. 182 dudit Code, les tribunaux de police correctionnelle sont légalement saisis de la connaissance des délits de leur compétence, par la citation directement donnée par la partie civile au prévenu ou à celui qui en est civilement responsa ble ;

Qu'ainsi lesdits tribunaux doivent, dans ce cas, statuer à la fois sur l'action publique et sur l'action civile ;

» Que, dans l'espèce, le tribunal de police correctionnelle de Metz a été légalement saisi de la connaissance du délit de Pêche dont était prévenu Brissac fils, par la citation directement donnée par le sieur Rolland, partie civile, à Brissac père, civilement responsable; que, dans cet état, ledit tribunal ayant reconnu la culpabilité du prévenu, a dû, comme il l'a fait, prononcer et les condamnations civiles et les condamnations pénales ;

» D'où il suit qu'en réformant ce jugement sous le seul rapport des condamnations pénales, et en reconnaissant néanmoins la

même culpabilité du prévenu, la cour de Metz a expressément contrevenu aux articles ci-dessus cités du Code d'instruction criminelle ;

» D'après ces motifs, la cour, faisant droit au pourvoi du procureur général, demandeur en cassation, casse et annulle l'arrêt de la cour de Metz, du 3 juin 1811... ».

V. le réquisitoire et l'arrêt du 27 décembre 1810, rapportés ci-après, no. 15.

La seconde question s'est élevée dans les circonstances que voici :

Un garde champêtre constate par un procès-verbal en bonne forme, « qu'il a rencon» tré Pierre Finfe et Henri Wirkay fils, pê» chant avec des filets appelés verveux, dans » la partie du ruisseau de Lizoche, qui arrose, » sur ses deux bords ou rives, des prairies » appartenant à M. Villensegne de Sorinne, » et dont par conséquent la Pêche lui appar>> tient aussi ».

D'après ce procès-verbal, Finfe et Wirkay sont cités par le procureur ( du roi) du tril'audience correctionnelle de ce tribunal. bunal de première instance de Dinant, à

Le 12 novembre 1806, jugement par lequel, « Considérant que les poissons qui se trouvent dans les eaux courantes, ne sont la propriété de personne en particulier; qu'il n'y a par conséquent pas de delit au cas présent, ni contre les propriétés, ni contre les personnes ; qu'il n'y aurait de délit que par rapport à la défense de pècher au préjudice de la faculté attribuée aux propriétaires riverains; que ceux-ci ne se plaignent pas ;

» Le tribunal aequitte les prévenus ».

Le procureur (du roi ) appelle de ce jugement; et le procureur général de la cour de justice criminelle du département de Sambreet-Meuse invoque, à l'appui de son appel, l'art. 18 du tit. 25 et l'art. 1 du tit. 31 de l'ordonnance de 1669, et l'art. 13 de la loi du 14 floréal an 10.

Par arrêt du 18 décembre 1806, la cour de justice criminelle,

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<< Considérant que les lois citées dans les conclusions du procureur général, ne con. cernent que la Pèche dans les eaux apparte. nant au domaine et aux communes, et qu'il n'existe point de lois pénales au cas dont il s'agit,

» Déclare, sans adopter les motifs du jugement dont est appel, qu'il a été bien jugé ».

Le procureur général se pourvoit en cascassion contre cet arrêt. Mais son recours est rejeté le 5 février 1807, au rapport de M. Seignette,

« Attendu qu'aucune loi ne classe au nombre des délits publics, l'action de pêcher dans un ruisseau qui est la propriété d'autrui, comme étant non navigable et ses deux rives appartenant à ce propriétaire ;

» Que Villensegne de Sorinne, propriétaire à ce titre, selon qu'il est dit au procès-verbal du garde-champêtre, de la portion du ruisseau de Lizoche, dans lequel, selon le même procès-verbal, Finfe et Wirkay ont été trouvés faisant la Pêche, ne se plaint pas de cette action ».

Il en est effectivement de la Pêche comme de la chasse; or, nous avons établi au mot Chasse, S. 7, que la chasse sur le terrain d'autrui, en temps non prohibé, n'est pas soumise à l'action du ministère public; et c'est ce que la cour de cassation a jugé par un arrêt du 10 juillet 1807, dont le Bulletin civil de cette cour retrace ainsi l'espèce et le dispositif :

«Il était constant au procès que Henri Garnier avait chassé, le 21 décembre 1806, sur le territoire de Vauchette; et que retournant à son domicile, il avait traversé celui de la commune de Craintillien. Il était également constant que le sieur Rostaing, maire de la commune de Vauchette, était occupé dans ce moment, avec des ouvriers, à la reconnaissance des réparations à faire dans ses propriétés rurales, tandis que le sieur Rostaing, son neveu, accompagné de plusieurs domestiques, tous armes, chassaient à la proximite; que les sieurs Rostaing, oncle et neveu, s'étant réunis avec leurs gens, avaient suivi Garnier de station en station, et que, parvenus près de lui, le sieur Rostaing neveu l'avait interpellé de rendre ses armes, le menaçant, à refus, de faire feu sur lui; que Garnier n'en avait pas moins suivi sa route, sans répondre, mais que se trouvant enfin serré de plus près, lorsqu'il fut parvenu sur les limites de la commune de Vauchette, il s'etait agenouillé, avait jeté son chapeau à terre devant lui, et avait dit, en portant son fusil en joue qui avance, meurt; que toujours poursuivi, quoiqu'arrivé sur le territoire de la commune de Craintillien, il avait tenu la même conduite et réitéré la mème menace ; ce qui avait décidé les sieurs Rostaing et leurs gens à retourner sur leurs pas.

» Lesieur Rostaing oncle avait dressé pro. cès-verbal de ce qui s'était passé, sans y parler de la provocation de son neveu, sans annoncer qu'il fût revêtu des marques distinctives de sa qualite de maire, sans dire qu'il eut agi en cette qualité, sans même déclarer qu'il se fut annoncé comme tel à Garnier, proprié.

taire, domicilié dans une autre commune ; ni que celui ci le connût comme maire.

Le sieur Rostaing se borna à rendre plainte de ce que Garnier s'etait permis de chasser sur ses propriétés particulières, sans son agrément; et de ce que l'ayant suivi, pour le connaitre, afin de le faire punir, il en avait été menacé de la manière dont il vient d'être dit.

» Mais le juge de paix, auquel le sieur Rostaing adressa son procès-verbal, ne voyant, à ce qu'il parait, dans cet acte, que le dire d'un simple particulier, quoique le sieur Rostaing s'y fut qualifié maire de Vauchette, exigea qu'il lui fit dénonciation officielle des faits requis au proces-verbal; et ce fut en vertu de cette denonciation, dans laquelle le sieur Rostaing refusa expressément de se rendre partie civile, que l'affaire fut suivie, à la requête du ministère public seul. Le magistrat de sûreté et le directeur du jury ayant l'un et l'autre pensé que les délits dont Garnier était prevenu, étaient de la compétence du tribunal correctionnel, la cause y fut por. tée et jugée.

» Sur l'appel du jugement, arrêt définitif est intervenu le 16 mars 1807, à la cour de justice criminelle du département de la Loire, qui condamne Garnier, sur le fait de la chas se, en 20 francs d'amende envers chacune des communes de Vauchette et de Craintillien ; et en 10 francs de dommages intérêts, avec confiscation de son arme.

» Le même arrêt condamne Garnier, surle fait des menaces, en les supposant faites à un fonctionnaire public dans l'exercice de ses fonctions, à une amende de quatre fois sa contribution mobilière, et en une année d'emprisonnement, avec dépens.

» La cour de justice criminelle du département de la Loire ne s'y occupa point de la provocation du sieur Rostaing neveu, quoi. que prouvée, et que Garnier l'eût présentée comme excuse légale, en ce qu'elle résultait de la défense expresse faite par la loi du 22-30 avril 1790, de désarmer les chasseurs.

» Cet arrêt fut rendu, comme toute la procédure avait été instruite, à la requête du ministère public seul, sur la dénonciation du sieur Rostaing, dans son intérêt personnel, et sans que les communes de Vauchette et de Craintillien eussent elles-mêmes rendu au cune plainte.

» La cour de cassation a été saisie du pourvoi de Garnier contre cet arrêt ; et le principal moyen que le réclamant a fait valoir à l'appui de son recours, a été le défaut de qualite du ministère public en pareille matiere,

et l'incompétence du tribunal correctionnel sous les deux rapports, de la chasse hors le temps prohibé, et de simples injures envers un particulier, quoique fonctionnaire public, lesquelles ne lui avaient pas été faites dans l'exercice de ses fonctions.

» La cour de cassation a adopté cette ouverture qui présentait effectivement une usurpation de pouvoir, tant de la part du minis tère public, que de celle des tribunaux correctionnel et criminel ; et pour la réprimer, elle a rendu l'arrêt qui suit :

» Oui le rapport de M. Carnot...;

» Vu l'art. 8 de la loi 22-30 avril 1790, et l'art. 456 du Code des délits et des peines, nos, i et 6;

» Et attendu que les réquisitoires du magistrat de sûreté et l'ordonnance de compétence ne portaient sur aucun fait qui pouvait autoriser la traduction du prévenu devant le tribunal correctionnel; que, quand il aurait été constant qu'il avait chassé, le 21 décembre 18c6, sur le territoire des communes de Vauchette et de Craintillien, comme il en a été déclaré convaincu, il n'aurait pu être actionné qu'à la requête desdites communes, qu'il n'avait pas chassé en temps prohibe;

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» Que, d'autre part, il résultait du procèsverbal dressé par le sieur Rostaing, et de la denonciation qu'il avait faite pardevant le juge de paix, que s'il avait été menacé, n'avait été que comme homme privé, et non en sa qualité de maire de sa commune;

ce

» Que, dès lors, les communes de Vauchette et de Craintillien n'ayant pas rendu plainte pour raison du fait de chasse, il ne pouvait y avoir lieu à poursuites d'office, d'après les dispositions de l'article cité de la loi du 22-30 avril 1790, qui n'autorise de pareilles poursuites que dans le cas où il a été chassé en temps prohibe; et que, dès lors aussi, il ne pouvait y avoir lieu à la traduction du préprévenu à la police correctionnelle, pour raison des menaces dont le réclamant a été prévenu, puisqu'elles n'avaient pas été faites à un fonctionnaire public dans l'exercice de ses fonctions;

» Que de ces faits bien acquis par la plainte elle-même, et par la dénonciation qui en a été la suite, comme aussi par les pièces de l'instruction, il résulte que la cour de justice criminelle du département de la Loire, par son arrêt du 16 mars dernier, a sanctionné des poursuites faites d'office pour un délit de chasse hors du temps prohibé, et qu'elle a autorisé la traduction devant le tribunal de police correctionnelle, d'un prévenu de sim.

ples menaces à un fonctionnaire public, à la vérité, mais qui n'était pas alors dans l'exercice de ses fonctions;

» Qu'ainsi, elle a violé l'art. 8 de la loi du 22-30 avril 1790, et fait une fausse application de l'art. 19 tit. 2 de la loi du 22 juillet 1791; ce qui a été de sa part un double exces de pouvoir;

» Par ces motifs, la cour, faisant droit sur le pourvoi de Henri Garnier, casse et annulle toute la procédure instruite contre lui sous l'un et l'autre rapport, spécialement l'arrêt rendu par la cour de justice criminelle du département de la Loire, le 16 mars dernier... ».

XIII. Mais le ministère public pourrait et devrait agir, indépendamment du propriétaire riverain, si le fait de Pêche avait eu lieu, soit en temps prohibé, soit avec des engins défendus.

Le 21 juillet 1811, procès-verbal du gardechampêtre de la commune de Saint MartinBelhizy, qui constate que le fils de Pierre Choron a été trouvé pêchant avec un épervier, dans la rivière d'Autanne, triage des Cavées.

Ce procès-verbal, duement affirmé', est transmis au procureur (du roi ) du tribunal de première instance de Senlis.

Le 20 août de la même année, ordonnance de la chambre du conseil de ce tribunal qui,

« Attendu que le fait de la Pêche imputé à Choron, est un délit privé qui ne pourrait intéresser l'ordre public qu'autant qu'il y aurait plainte de la part du propriétaire,

» Déclare qu'il n'y a lieu à suivre ».

Mais par arrêt du 21 février 1812, rendu, au rapport de M. Audier Massillon, sur un réquisitoire fait par M. l'avocat général Daniels,

« Vu l'art. 10 du tit. 31 de l'ordonnance de 1669;

>> Attendu qu'il était constaté par le procès. verbal du garde- champêtre, que le fils de René Choron avait été trouvé pêchant dans la rivière d'Autanne avec un engin appellé épervier, qui est du nombre de ceux dont l'emploiest prohibe par l'ordonnance de 1669; que la Pêche faite avec des engins defendus, est un délit qui intéresse l'ordre public, et dont la répression doit être poursuivie à la requête du ministère public, sans qu'il soit nécessaire de la plainte d'une partie inté ressée ;

» La cour, faisant droit sur le réquisitoire dans du procureur général, casse et annulle,

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