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» L'art. 156 ne distingue point; et dès que le caractère de la solidarité, le principal avantage qui en dérive pour le créancier, est de faire considérer ce qui est fait avec ou contre l'un des débiteurs, comme censé fait avec ou contre tous ses co-obligés, il nous semble que l'on doit en conclure que le jugement exécuté contre un d'eux, est censé l'être contre tous.

» Et pourquoi n'en serait-il pas ainsi ? Y at-il plus d'inconvénient dans cette espèce, que dans le cas où la simple reconnaissance d'un co-débiteur perpétue l'obligation des

autres ?

»Ne serait-il pas étrange que la caution condamnée par défaut avec le débiteur principal, se fit un grief de ce que le jugement exécuté contre celui-ci dans les six mois, ne l'eût pas été en même temps contre elle, au prejudice de son bénéfice de discussion; et à plus forte raison, ne doit on pas en dire autant du co débiteur solidaire »?

On voit qu'en raisonnant ainsi, M. Carre s'accorde avec l'auteur du Manuel du droit français, à supposer que le jugement obtenu contre un seul des débiteurs solidaires, n'est pas de plein droit exécutoire contre ceux qui n'y ont pas été parties.

Mais si cette hypothèse etait exacte, point sur lequel je m'expliquerai dans un instant, comment M. Carré pourrait-il être fondé à soutenir qu'un jugement par défaut doit être réputé avoir reçu son exécution contre tous les débiteurs solidaires qu'il condamne, par cela seul qu'il l'a reçue contre un seul?

Pour couper court, dans cette hypothèse, à tous les argumens de M. Carré, il suffirait de nous assurer qu'il est nécessairement dans l'esprit de l'art. 156 du Code de procedure,

que l'on n'applique pas à la Péremption la règle établie pour la prescription en général par l'art. 1206 du Code civil; et rien au monde ne serait plus facile.

L'esprit de l'art. 156 du Code civil est évidemment que tout jugement par défaut faute de comparoir, qui n'est pas exécuté dans les six mois de sa date, doit être considéré comme surpris sur une assignation soufflée.

Or, dans le cas où un jugement par défaut a été rendu contre deux prétendus débiteurs solidaires, comment cette présomption de la loi cesserait-elle à l'égard de l'un des deux, par l'effet de l'exécution que le jugement aurait reçue de la part de l'autre, dans les six mois de sa date? Cette exécution prouve bien que des deux condamnés solidairement, il y en a un qui a été véritablement assigne; mais elle ne prouve pas que l'autre l'ait été. Elle laisse donc, à l'égard de celui-ci, les choses dans le même état que si son consort eût été seul assigné et condamné. Et dès-lors, il faut évidemment de deux choses l'une: ou rejeter l'opinion de M. Carré, ou aller jusqu'à dire, ce qu'il n'admet pourtant pas, que le jugement obtenu contre un seul des débiteurs solidaires, est exécutoire contre les autres, bien qu'ils n'y ayent été ni parties, ni důment appelés.

Il n'y aurait qu'un moyen d'échapper à ce dilemme: ce serait de dire que l'exécution soufferte dans les six mois par l'un des condamnés solidairement, emporte la preuve qu'ils ont tous été assignés valablement. Mais ce ne serait certainement pas par l'art. 1206 du Code civil, que l'on parviendrait à justifier un pareil paradoxe. Pourquoi, suivant cet article, les poursuites exercées contre l'un des débiteurs solidaires, interrompentelles la prescription à l'égard des autres? Parcequ'il existe contre tous un titre d'obligation, parcequ'il s'agit d'empêcher que ce titre ne s'éteigne par une trop longue négligence à en provoquer l'exécution, et parceque ce titre existe indépendamment de ces poursuites qui, en effet, ne font que le présupposer, et n'en constatent ni l'existence ni l'efficacité. Mais ici la preuve, sinon de l'existence, au moins de l'efficacité du jugement par défaut, dépend tout-à-fait de l'exécution de ce jugement dans les six mois de sa date. Ce n'est que par cette exécution qu'il peut être censé avoir été rendu à la suite d'une assignation véritablement donnée à personne ou domicile. Otez cette execution, la loi le regarde comme surpris à la religion des juges, et elle le fait rentrer dans le néant dont elle présume qu'une machination frauduleuse l'a fait momentané. ment sortir. Eh! Le moyen de soutenir que

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l'exécution soufferte dans les six mois par l'un des condamnés solidairement, suffit pour prouver que les autres ont été valablement assignés avant la condamnation? Autant vau. drait-il soutenir qu'il résulte de l'art. 1206 du Code civil que les poursuites exercées contre deux personnes supposées débitrices soli daires, suffisent pour prouver qu'elles le sont réellement.

Mais il est temps de le dire, nous raisonnons ici sur une hypothèse absolument fausse. Oui, il est de toute fausseté que le jugement rendu contre un débiteur solidaire, même de choses divisibles, ne soit pas exécutoire contre ceux de ses co-débiteurs qui n'y ont pas été parties; c'est du moins ce que je crois avoir démontré dans mon Recueil de Questions de droit, aux mots Chose jugée, §. 18 (quatrième édition).

Cela posé, quel intérêt peuvent avoir, dans le cas sur lequel porte notre question, les débiteurs solidaires qui ont été condamnés par défaut conjointement avec leur co-débiteur, à soutenir que le jugement doit être considéré à leur égard comme non avenu, par cela seul qu'il n'a pas été exécuté contre eux dans les six mois? Bien évidemment il n'en ont aucun, puisqu'en mettant de côté la condamnation qui a été prononcée contre eux, il reste toujours celle qui a été prononcée contre leur co-débiteur; et que celui-ci l'ayant exécutée volontairement ou en ayant souffert l'exécution forcée dans les six mois, elle a conservé contre eux la même force exécutoire qu'elle aurait à leur égard, si primitivement elle n'avait été prononcée que contre lui sans qu'ils y eussent été appelés.

C'est donc à l'opinion de M. Carré qu'il faut s'en tenir, tout en rejetant, comme des hors-d'œuvre, les raisons sur lesquelles il la fonde.

Du reste, rien de plus futile que l'objection opposée à cette opinion par l'arrêt de la cour royale de Limoges, du 14 février 1822, et qui consiste à dire que, de l'admission de cette opinion, il résulterait les abus les plus graves; puisque, dans ce cas, le débiteur solidaire serait privé d'opposer les exceptions qui lui sont personnelles, aussi bien que celles qui résultent de la nature de l'obligation, faculté qui lui est accordée par l'art. 1028 du Code civil; qu'ainsi, il pourrait être con. damné définitivement sans avoir été appelé à se défendre, ce qui serait même contraire au droit positif et au droit naturel.

Eh! Vraiment oui, le débiteur solidaire peut être condamné sans avoir été appelé, en ce sens que le jugement rendu contre son

co-débiteur est exécutoire contre lui; et j'ai prouvé, à l'endroit cité de mon Recueil de Questions de droit, qu'il n'y a là rien de contraire à la loi, rien que de conforme aux principes de la solidarité. Dès-lors, rien d'étonnant que l'on puisse exécuter contre lui un jugement par defaut dans lequel il a été partie, et qui, à son égard, est périmé faute d'exécution dans les six mois, mais qui, à l'égard de son co-débiteur, a conservé toute sa force, au moyen de l'exécution qu'il a reçue dans les six mois de la part de celui-ci.

Mais ce qui tempère la rigueur de cette règle, c'est qu'encore que le jugement rendu par défaut contre deux débiteurs solidaires, soit mis à couvert de la Péremption, tant à l'égard de l'un qu'à l'égard de l'autre, par l'exécution volontaire ou forcée qu'il reçoit dans les six mois de la part de l'un d'eux, il ne laisse pas d'être soumis, en faveur de l'autre, à toutes les voies de droit qui sont ouvertes pour le faire réformer, retracter ou annuler, sans que celui-ci puisse en être privé, soit par l'acquiescement de son co-debiteur, soit par les diligences faites contre ce dernier. V. mon Recueil de Questions de droit, aux mots Acquiescement, §. 22, et Appel, §. 6, no. 8.

XIII. Le jugement rendu par défaut faute de comparoir contre un étranger non domicilié en France, est-il sujet à la Péremption, comme s'il était rendu contre un regnicole?

Cette question peut se présenter dans trois cas différens : ou l'étranger contre lequel a été rendu le jugement par défaut, ne reside pas en France et n'y possède rien; ou il n'y possède rien, mais il y réside de fait; ou il n'y réside pas, mais il y possède des propriétés.

Au premier cas, M. Carré pense, dans ses Questions de procédure civile, no. 907, que l'étranger ne peut pas invoquer l'art. 156.

la

Mais pourquoi ne le pourrait-il pas ? Seraitce parcequ'il n'offre, ni dans ses biens, ni dans sa personne, aucun moyen d'exécuter le jugement qui a été rendu contre lui, et que Joi n'entend pas exiger l'impossible de la part du porteur de ce jugement? Cela serait bon, si le porteur du jugement avait fait toutes les diligences nécessaires pour constater qu'il a été effectivement dans l'impossibilité de le mettre à exécution, c'est-à-dire, s'il l'avait fait signifier avec commandement au domicile du procureur du roi, s'il avait ensuite, par un acte notifié au même domicile, sommé le défaillant de lui indiquer des biens sur lesquels il pût asseoir une exécution, et protesté que, faute par lui de satisfaire à cette sommation,

elle vaudrait comme procès-verbal de carence: mais s'il n'a rien fait de semblable, à quel propos l'excepterait-on d'une règle que le legislateur a établie dans les termes les plus généraux, et qu'il n'appartenait qu'à lui seul de limiter par des restrictions? En excepterait-on celui qui, après avoir obtenu une condamnation par defaut contre un Français présumé absent, et n'ayant en France aucune propriété connue, n'aurait fait, dans les six mois, aucune espèce de diligence pour la faire exécuter? Non sans doute. Eh bien! Il y a ici la même raison de décider.

Au second cas, M. Carré convient, et je pense comme lui, que le jugement par défaut serait périmé, si, dans les six mois de sa date, la partie qui l'a obtenu, n'avait pas fait dresser un proces-verbal de carence dans la maison ou l'appartement qui sert de résidence à l'étranger.

Et à plus forte raison en serait-il de même, dans le troisième cas, si, dans les six mois de la date du jugement par défaut, la partie en faveur de laquelle il a été rendu, ne l'avait pas fait exécuter, soit par la saisie et la vente des meubles, soit par la dénonciation de la saisie réelle des immeubles que le condamné possederait en France. C'est d'ailleurs ce qu'a jugé un arrêt de la cour d'appel de Trèves dont voici l'espèce.

Le 14 decembre 1810, jugement par défaut du tribunal de premiere instance de Kayserslautern, qui prononce, au profit du sieur Gienanth, plusieurs condamnations contre le baron de Hacke, domicilié dans le grand duché de Bade.

Le 29 du même mois, le sieur Gienanth prend, au bureau des hypothèques de Kayserslautern, une inscription hypothécaire sur une forêt appartenant au baron de Hacke, et ne fait pas d'autres poursuites dans les six mois. Quelque temps après, le baron de Hacke vend cette forêt au sieur Nebel.

Le sieur Nebel demande la main-levée de l'inscription hypothécaire, et se fonde sur la Peremption du jugement en vertu duquel le sieur Gienanth l'a prise.

» au cas qu'un Français ait obtenu un jugement » par défaut contre un étranger dépourvu de » moyens d'exécution en France, la contes»tation actuelle ne présente pas le cas où l'im» pétrant d'un jugement par defaut se trou» verait dans l'impossibilité de le mettre à » exécution dans sa patrie; qu'il conste, dans » l'espèce, que le defendeur a obtenu un juge» ment par défaut contre le baron de Hacke, » le 14 décembre 1810; qu'il l'a fait inscrire au » bureau de la conservation des hypothèques, » le 29 du même mois, sur tous ses biens, très» considérables, situés dans cet arrondisse» ment; qu'il n'est pas contesté non plus que » le defendeur actuel n'a pas exécuté son jugc

Le sieur Gienanth repond que la Péremption n'a pas pu atteindre un jugement qui, etant rendu contre un étranger non-résidant en France, n'était susceptible d'aucun des moyens d'exécution déterminés par l'art. 156 du Code de procedure.

Mais par arrêt du 3 février 1813, confirmatif d'un jugement du tribunal de Kayserslautern, la radiation de l'inscription hypothécaire est ordonnée, « Attendu que, sans entrer dans » un examen de l'esprit et de l'effet de la loi, TOME XXIII.

ment dans les six mois de son obtention, » conformément aux dispositions expresses de » l'art. 156 du Code de procédure, vu qu'il » n'existe aucun acte suivant lequel le juge>ment serait réputé exécuté dans le sens de » l'art. 159 du même Code, et que le défendeur » a spécialement omis, ce qui était en son »pouvoir, de procéder à la saisie d'un ou de » plusieurs biens sur lesquels il a pris inscrip. » tion, et à la notification de cette saisie; d'où » il suit que le jugement par défaut dont il » s'agit, doit incontestablement, d'après ledit » art. 156 du Code de procédure, être réputé » comme non avenu; et par suite, tous les ac»tes basés sur ce jugement, deviennent nuls >> et sans effet; conséquemment, l'inscription » prise en vertu d'icelui, ne saurait plus sub» sister (1) ».

XIV. La Péremption atteint-elle le jugement rendu par défaut contre un défendeur qui n'a pas constitué d'avoué, mais qui a comparu, soit en personne, soit par un fondé de pouvoir, sur l'assignation qu'il a reconnu, par là, avoir reçue, et qui n'a ni plaidé ni conclu au fond, soit parceque la loi ne lui permettait pas de le faire sans l'assistance d'un officier ministériel, soit parcequ'il s'y est refusé.

Elle devrait l'atteindre sans difficulté, si l'on s'attachait judaïquement à la lettre de la loi; car, d'un côté, l'art. 149 du Code de pro. cédure porte que, si le défendeur ne constitue pas avoué, il sera donné défaut ; et de l'autre, l'art. 156 ajoute que tous jugemens par défaut contre une partie qui n'a pas cons titué d'avoué, sans distinction entre le cas où elle a comparu sans l'assistance d'un officier ministeriel, et le cas où elle n'a pas comparu du tout, seront exécutés dans les six mois de leur obtention ; sinon, seront réputés non

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Mais juger ainsi, ce serait, en respectant la lettre de la loi, en violer manifestement l'esprit; ce serait par conséquent faire ce que condamne formellement la loi 27, D. de legibus in fraudem (legis) facit, qui, salvis verbis legis, sententiam ejus circumve

nit.

Je l'ai déjà dit, l'esprit de l'art. 156 du Code de procédure est que tout jugement par défaut contre une partie non représentée par un avoué, qui n'a pas été exécuté dans les six mois de sa date, est présumé de droit avoir été surpris sur une assignation céléc au dé. faillant. Or, cette présomption exclud-elle la preuve contraire qui, dans l'hypothèse proposée, résulte de la comparution personnelle du défendeur? Il est évident que non, puisque amais la preuve contraire n'est exclue par une présomption de droit. à moins que la loi qui établit cette présomption, n'en fasse, sans réserver cette preuve, le fondement de l'annullation de certains actes, dès leur principe, ou de la dénégation de toute action en justice (1); ce que ne fait pas l'art. 156.

Qu'importe que la comparution du défendeur soit illégale? Toute illégale qu'elle est, elle n'en est pas moins constante, elle n'en prouve pas moins invinciblement que le dé fendeur a eu connaissance de l'assignation qui a précédé le jugement par défaut, et par conséquent elle n'en fait pas moins taire la présomption de droit sur laquelle la disposition de l'art. 156 repose tout entière.

Qu'importe encore que, comme on l'a vu plus haut, no. 2, la connaissance de l'existence du jugement par défaut, ne suffise pas, si elle n'est accompagnée de celle de son cxé cution, pour faire cesser l'application de l'art. 156? Ici, le défendeur n'a pas eu seulement connaissance du jugement par défaut qui a été rendu en sa présence, il a encore prouvé de la manière la moins équivoque, par sa comparution personnelle, qu'il avait connais sance de l'assignation; et encore une fois, c'est uniquement sur la présomption de l'ignorance de l'assignation, que se fonde l'art. 156, pour déclarer périmé le jugement par défaut non exécuté dans les six mois de sa date (2).

XV. Lorsque l'avoué constitué par un acte que la partie a fait notifier elle-même à son adversaire, déclare à l'audience qu'il n'a reçu

(1) V. l'article Présomption, S. 3, n°. 17. (2) V. les arrêts de la cour de cassation, des 16 janvier 1820, 26 décembre 1821, 13 novembre 1822 et 5 mai 1824, qui sont rapportés ci-après, §. 2, no. 2.

d'elle ni avis ni pouvoir, et refuse, par suite, de se constituer pour elle, le jugement qui intervient en conséquence par défaut, est-il sujet à la Péremption?

Cette question revient au même que celle de savoir si, en pareil cas, le jugement par défaut est susceptible d'opposition jusqu'à son exécution, ou s'il ne l'est que dans la huitaine de sa signification. Elle est traitée aux mots Opposition à un jugement, §. 3. art. 1, no. 6-4°.

XVI. La Péremption de six mois est-elle interrompue par l'opposition irrégulière et par conséquent nulle, que forme la partie condamnée au jugement rendu contre elle par défaut faute de comparoir, et qui, bien que signifie personne ou domicile, n'a encore été exécuté d'aucune des manières signalées par l'art. 159 du Code de procédure?

La négative est évidente; et voici un arrêt de la cour d'appel de Lyon qui la consacre formellement.

Le 24 août 1809, jugement qui prononce des condamnations contre Julien, au profit de Pénu. Le 20 novembre suivant, ce jugement est signifié à Julien par un huissier commis à cet effet. Le 3 février 1810, Julien y forme opposition par un acte extrajudiciaire, et omet de la renouveler par requête dans la huitaine. Le 16 du même mois, Pénu fait saisir les meubles de Julien, mais il en suspend la vente; et peu de temps après, il lui fait signifier un commandement tendant à la saisie de ses immeubles.

Julien demande la nullité de ce comman. dement, attendu la Péremption du jugement qui en constitue le titre.

Pénu répond que l'opposition formée par Jalien, le 3 février 1810, a interrompu la Pé remption établie par l'art. 156 du Code de procédure civile; qu'en effet, elle a rendu Julien non recevable à former une seconde opposition, quoique le jugement ne fût pas exécuté assertion manifestement fausse, comme on le verra aux mots Opposition à un jugement, §. 3, art. 1, no. 6-3o. ); qu'elle a donc imprimé au jugement par défaut toute la force et toute l'autorité d'un jugement contradictoire; qu'enfin, le jugement a été exécuté par la saisie mobilière du 16 avril 1810, proposition également insoutenable, puisque, dans le fait, la saisie mobilière n'avait ete pratiquée qu'après les six mois; et que, dans le droit, ce n'est pas la saisie, mais la vente des meubles, qui constitue un acte d'exécution, dans le sens de l'art. 159.

Le 21 juillet 1810, jugement qui déclare le jugement par défaut non périmé.

Mais sur l'appel, arrêt du 4 septembre de la même année, qui,

« Attendu qu'on ne peut pas regarder comme exécuté le jugement du 24 août 1809; n'a pas que l'opposition formée le 3 février, ete réitérée dans la huitaine par requête d'avoué; que le poursuivant, au lieu de continuer ses exécutions, est resté huit mois dans l'inaction, et s'est rendu par là non-recevable à soutenir le jugement du 24 août 1809 avait été exécuté;

que

» Met l'appellation et ce dont est appel au néant; emendant, déclare le jugement du 24 août 1809 périmé (1) ».

XVII. 1°. Les créanciers du défaillant peuvent-ils, en exerçant ses droits, exciper de ce que le jugement qui l'a condamné, n a pas été exécuté dans les six mois de sa date, et demander en conséquence qu'il soit déclaré périmé ?

2o. Le peuvent-ils notamment lorsque, par un acte sous seing - privé, portant une date antérieure à l'expiration des six mois, mais non devenue certaine avant cette époque fatale, la partie defaillante a, soit déclare tenir le jugement pour exécuté et renoncer à la faculté d'y former opposition, soit souscrit l'engagement de l'exécuter dans un délai quel

conque?

30. Le peuvent its, lorsque, postérieure ment à l'expiration des six mois, la partie défaillante a reconnu, par un acte authentique, qu'elle avait execute le jugement avant cette epoque par le paiement des frais?

4o. Le paiement des frais qui s'élèveraient à plus de 150 francs, peut-il être prouvé par témoins?

La première de ces questions, paraît devoir se résoudre d'un seul mot.

l'art.

L'art. 1166 du Code civil porte que « les > créanciers peuvent exercer tous les droits et » actions de leur débiteur, à l'exception de » ceux qui sont exclusivement attachés à la » personne ». Il faudrait donc que le droit d'exciper de la Peremption etablie par 156 du Code de procédure, fût exclusivement attaché à la personne du defaillant, pour que ses créanciers fussent non-recevables à l'exercer de son chef. Or, le moyen de considérer ce droit comme exclusivement attaché à la personne du defaillant? D'une part, le défaillant le trans met certainement à ses heritiers; et j'ai démontré dans mon Recueil de Questions, de droit, au mot Hypothèque,

(1) Jurisprudence de la cour de cassation, tome 14, partie 2, page 211.

S. 4, no. 4, que tout droit transmissible aux héritiers, est nécessairement susceptible d'être exercé par les créanciers. D'un autre cóté, qu'est ce que la Péremption établie par l'art. 156 du Code de procédure? Une vérita ble prescription (1). Eh. bien ! L'art. 2225 du Code civil porte en toutes lettres que « les » créanciers, ou toute autre personne ayant » intérêt à ce que la prescription soit acquise, » peuvent l'opposer, encore que le débiteur » ou le proprietaire y renonce ».

Cependant M. Carré, dans ses Questions de procédure civile, no. 913, soutien que « la Péremption dont il s'agit, n'est établie » qu'en faveur seulement de la partie con» damnée »; et que cela résulte « des disposi» tions des art. 158 et 159, des discours des >> orateurs du gouvernement au corps legisla»tif, en présentant le tit. 8, liv. 2, et des » principes reçus en matière de prescrip» tion ».

Que les principes reçus en matière de proscription, bien loin d'appuyer la doctrine de M. Carré, la détruisent de fond en comble, c'est ce que prouve clairement l'article du Code civil que je viens de transcrire. Il ne reste done plus qu'à savoir si cette doctrine peut être justifiée par les art. 158 et 159 du Code de procedure, et par la manière dont l'orateur du gouvernement a motivé l'art. 156, en le presentant au corps légis

latif

soit

L'art. 158 ne dit pas autre chose si ce n'est «qu'au cas que le jugement par défaut soit » rendu contre une partie qui n'a pas d'a» voué, l'opposition sera recevable jusqu'à » l'exécution »; et assurément il n'y a là rien dont on puisse argumenter, soit pour, contre le créancier qui prétend exercer, au nom de son débiteur, le droit de faire declarer perimé le jugement par défaut que n'a pas fait exécuter, dans les six mois de sa date, la partie au profit de laquelle il a été rendu,

tant

L'art. 159 dit quelque chose de plus : il déclare que le jugement sera réputé exécuté, lorsqu'il est intervenu, de la part du défaillant condamné, quelque acte duquel il résulte nécessairement que l'exécution du jugement a été connue de lui. Mais si l'on peut, si l'on doit même conclure de là, que, que la Péremption n'est pas encourue, l'accomplissement en est empêché par le fait du condamne qui reconnaît que le jugement a reçu le degré d'exécution nécessaire à cet effet, on ne peut certainement pas pousser cette consequence jusqu'à dire qu'une fois la Pé

(1). ci-dessus, no. 12.

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