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l'espèce suivante par un arrêt de la cour de cassation.

En juillet 1809, les sieur et dame de la Briffe, propriétaires d'un étang situé dans la commune de Villeneuve-lès-Charleville, font citer le sieur Dergere devant le juge de paix du canton de Montmirail, pour faire cesser le trouble qu'il a, suivant eux, causé à leur possession, en s'emparant, depuis quelques mois, d'une partie des terres qui environnent cet étang.

Le 29 du même mois, la cause est portée à l'audience; et il intervient un jugement par lequel le juge de paix la renvoie à la quinzaine, en ordonnant au sieur Dergère de s'expliquer par oui ou par non sur l'usurpation dont se plaignent les demandeurs.

Le 12 août suivant, nouveau jugement qui, sans avoir égard à l'exception tirée par le sieur Dergère de ce qu'il n'est pas certain que la pièce de terre en litige soit située dans le canton de Montirail plutôt que dans celui de Sézanne, et que c'est aux demandeurs à le prouver, lui ordonne iterativement de dénier ou d'avouer le fait allégué par les sieur et dame de la Briffe, et renvoie, à cet effet, la cause au 21 octobre.

Le 21 octobre, le sieur Dergère persistant à soutenir que le terrain contentieux n'est pas situé dans le canton de Montmirail, mais dans celui de Sezanne, il intervient un jugement qui appointe les parties à faire preuve.

Enquête qui ne produit aucun résultat ; et par suite, nouveau jugement, du 18 novembre, qui renvoie les parties devant l'autorité administrative pour faire déterminer les limites du canton de Montmirail.

La cause revient à l'audience du 14 mars 1810. Les demandeurs y produisent un arrêté du conseil de préfecture qui décide que c'est du canton de Montmirail que dépend le terrain contentieux, et concluent 10. au rejet de l'exception déclinatoire du sieur Dergère; 2o. à l'adjudication de leur demande en maintenue dans leur possession annale.

Le sieur Dergere conclud, de son côté, à ce que l'instance soit déclarée périmée, aux termes de l'art. 15 du Code de procédure, par les quatre mois et plus qui se sont écoulés depuis le jugement du 18 novembre 1809, qu'il qualifie d'interlocutoire.

Jugement du même jour qui rejette cette de mande, ainsi que l'exception déclinatoire du sieur Dergère, et statuant au fond, prononce en faveur des sieur et dame de la Briffe,

«Attendu (en ce qui concerne la demande en Péremption) que les jugemens des 21 octobre et 18 novembre 1809 n'ont pour objet que de vérifier si le terrain en litige est, ou non,

situé dans le canton de Montmirail; que cette question du fait de la situation du lieu contentieux est indépendante du fait de la possession que présente la demande ;

» Qu'ainsi, la question relative à la possession du terrain contentieux, est jusqu'ici réellement intacte; que le sieur Dergère n'a encore avoué ni dénié celle prétendue par le sieur de la Briffe; d'où il suit que les jugemens précités n'ayant rien ordonné qui préjuge le fond de la demande, lesdits jugemens ne sont que preparatoires, et ne peuvent être réputés interlocutoires, suivant la définition établie par l'art. 452 du Code de procedure;

» Que l'art. 15 du même Code ne déclare l'instance périmée après quatre mois, que dans le cas où un interlocutoire aurait été ordonné; que la loi n'a point prononcé la Péremption des jugemens préparatoires, et qu'on ne peut transporter l'application de la loi d'un cas à un autre; que cette transposition serait d'autant plus injuste dans l'espèce, que l'exécution du jugement préparatoire du 18 novembre dernier, dépendait de l'action de l'autorité administrative, qu'aucune des parties n'a le moyen d'activer ni de contraindre ».

Appel de ce jugement au tribunal civil d'Epernay, de la part du sieur Dergère; et le 19 juillet 1811, jugement qui déclare l'instance périmée, attendu que le juge de paix ayant, par son jugement du 12 août 1809, épuisé son pouvoir sur la competence territoriale, il n'a pas pu remettre ce point en question à l'audience du 14 mars 1810; que l'instance s'est prorogée devant lui jusqu'à cette audience; et qu'alors il était hors des délais fixés par les art. 13 et 15 du Code de procédure civile, pour statuer sur le fond.

Mais sur le recours en cassation des sieur et dame de la Briffe, arrêt du 31 août 1814, au rapport de M. Cochard, et sur les conclusions de M. l'avocat général Lecoutour, par lequel,

« Attendu 1o. que le sieur de la Briffe s'étant pourvu par action en maintenue possessoire devant le juge de paix du canton de Montmirail, contre le sieur Dergère, une pareille instance ne pouvait, aux termes de l'art. 15 du Code de procédure civile, être périmée qu'après un intervalle de quatre mois, à compter du jour où un jugement interlocutoire aurait été rendu dans cette cause, relativement à l'instruction du fond du procès;

» Attendu 20. que le sieur Dergère, sans vouloir s'expliquer sur l'objet principal de la demande dirigée contre lui, avait affecté, dès ses premières défenses, de décliner la juridiction du juge de paix de ce canton, sous le prétexte que le terrain litigieux n'était pas assis dans

l'étendue du territoire de Villeneuve-lèsCharleville, ce qui l'aurait placé dans les limites du canton de Montmirail, mais qu'il était incertain qu'il ne fût pas situé dans l'enclave du canton de Sézanne, dont faisait partie ledit lieu de Montgiroux ;

» Attendu 30. que toutes les procédures préliminaires, faites dans la vue de parvenir à la connaissance du fait qui consistait à savoir préalablement dans l'étendue duquel de ces deux cantons ledit terrain contentieux pouvait être situé, étaient independantes du proces principal, et étrangères à la question fixée au possessoire qui s'y trouvait agitée; d'où il suit que le délai de quatre mois pour consommer la Péremption de cette instance au principal, n'aurait pu courir que du jour où, en exécution de l'arrêté du conseil de préfecture du dé partement de la Marne, auquel cette question préjudicielle avait été renvoyée, et qui a décidé que ledit terrain était situé sur le territoire de Villeneuve-lès-Charleville, formant une dépendance du canton de Montmirail, il aurait été rendu par la justice de paix de ce canton, un jugement interlocutoire relatif au fond du procès;

» Attendu que le jugement du 12 août 1809, par lequel le juge de paix dudit canton avait simplement ordonné au sieur Dergère de déclarer s'il était ou n'était pas l'auteur du trouble à lui imputé par ledit sieur de la Briffe, loin de pouvoir être considéré comme un interlocutoire, n'est au contraire autre chose qu'un simple jugement préparatoire, puisqu'il ne préjuge rien sur le fond du procès;

» Attendu enfin, que, depuis l'arrêté du conseil de préfecture, il n'a pas été rendu à la justice de paix d'autre jugement que celui qui a prononcé définitivement sur le fond dudit procès; d'où il suit encore que la Péremption n'a pu courir au prejudice dudit sieur de la Briffe; et qu'en jugeant le contraire, le tribunal civil d'arrondissement d'Épernay a fait une fausse application dudit art. 15, auquel il a même directement contrevenu, en l'appliquant à un fait non prévu et étranger audit article;

» Par ces motifs, la cour casse et annulle.......

S. IV. Les lois qui veulent que certai nes affaires soient jugées dans un délai déterminé, sont-elles censées vouloir qu'après ce délai, les affaires non jugées soient périmées de plein droit?

La negative est établie dans deux plaidoyers et jugée par quatre arrêts de la cour de cassation, des 23 germinal an 11, 4 mars et 4 no

vembre 1807 et 19 juin 1809, qui sont rapportés aux mots Enregistrement ( Droit d' ), §. 23,no. 2, et §. 57; Interruption de poursuites, et Sommations respectueuses, no. 3.

C'est ce qu'a encore jugé le 5 mars 1812, un arrêt de la même cour, rendu au rapport de M. Rataud, et ainsi conçu :

« Vu l'art. 13 du tit. 4 de la loi du 9 floreal an 7;

mettre de nullité ou déclarer une déchéance » Attendu que les tribunaux ne peuvent add'action, que dans les cas où ils y sont autorisés par une disposition formelle de la loi ; que l'art. 13 ci-dessus cité n'a évidemment expedition dans le jugement des affaires des pour objet que d'assurer une plus prompte douanes; que l'obligation qu'il impose, est personnelle aux juges, et établie dans l'intérêt de l'administration; qu'il ne peut donc être interprété à son préjudice lorsque le jugement n'a pu être rendu dans le délai indique ;

» Que d'ailleurs la loi ne portant pas que, ce délai passé, l'action demeurera éteinte, le juge de paix qui a déclaré qu'il n'avait plus, dans l'espèce, le pouvoir de juger, et la cour prevôtale des douanes qui a confirmé ce juge. ment sur l'appel qui en avait été interjeté, ont fait une fausse application dudit art. 13, commis par suite un véritable deni de justice et un excés de pouvoir,en prononçant une extinction d'action qui n'est établie ni autorisée par aucune loi ;

» Par ces motifs, la cour casse et annulle l'arrêt rendu par la cour prévótale des doua. nes, seant à Florence, le 15 novembre dernier... ».

S. V. Lorsqu'une action a été mal intentée devant une juridiction qui a été supprimée avant qu'il y eût été fait droit, et que, sur la demande en Péremption formée contre le demandeur originaire devant le tribunal subrogé par la loi à cette juridiction, il intervient un jugement qui, sans s'arrêter à cette demande, ordonne que les parties instruiront au fond, la discontinuation de poursuites pendant les trois années qui suivent ce jugement, périme-t-elle l'instance ? Ou peut-on dire qu'il n'y a point encore d'instance engagée, et par conséquent point lieu à Péremption?

V. Le plaidoyer et l'arrêt du 10 janvier 1810, rapportés dans mon Recueil de Questions de droit, au mot Commune, S. 5, no. 3.

S. VI. La Péremption de l'instance sur l'opposition à un jugement par défaut, emporte-t-elle la Péremption de ce jugement et de l'instance sur laquelle il a été rendu ?

Cette question, qui se réduit, en d'autres termes, celle de savoir si l'opposition à un jugement par défaut forme une instance séparée de l'instance principale, ou n'est que la continuation de celle-ci, avait été décidée, sous l'ancienne jurisprudence, par un arrêt du parlement de Paris, du 2 avril 1727, arrêt, dit Denisart, au mot Péremption, par lequel il fut jugé que la Péremption anéan »tissait, non seulement l'opposition formée » dans la huitaine à une sentence par défaut; » mais qu'elle anéantissait tant la sentence et >> la procédure que la demande,tant il est vrai » que l'opposition continue l'instance et n'en » crée pas une nouvelle ».

Elle s'est représentée depuis la mise en activité du Code de procédure civile; mais dans une espece où elle ne pouvait être jugée que d'après l'ancienne loi, à laquelle d'ailleurs le Code de procédure civile ne change rien à cet égard; et elle l'a encore été de même par la cour de cassation.

Le 14 juin 1792, jugement par défaut du tribunal de district de Toulouse, qui con. damne le sieur Labastiole à payer au sieur Marcillac une somme de 800 francs.

Le 2 juillet suivant, ce jugement est signinifié au sieur Labastiole qui y forme opposition, le 10 du même mois.

Le..... 1794, Marcillac fait assigner le sicur Labastiole en debouté d'opposition.

Cette assignation reste sans poursuite pendant plus de trois ans.

Le 18 septembre 1807, le sieur Marcillac fait assigner le sieur Labastiole devant le tribunal civil de Toulouse, pour voir dire que son opposition est périmée, et qu'en consé quence le jugement par defaut du 14 juin 1792

sera exécuté selon sa forme et teneur.

Le sieur Labastiole soutient que l'effet de la Péremption ne peut pas être ainsi divisé ; et que, , si l'opposition est périmée, le juge ment par défaut l'est également.

Le 2 mai 1808, jugement en dernier ressort qui, laissant subsister le jugement par défaut, déclare l'opposition périmée.

Le sieur Labastiole se pourvoit en cassation contre ce jugement qu'il dénonce comme contraire à l'art. 15 de l'ordonnance de Roussillon de 1563.

« Cette ordonnance et le Code de procédure (dit il), en déclarant que toute instance dis

continuée durant trois ans, sera sans effet, et par conséquent périe, ont compris dans cette disposition la totalité de l'instance. La Péremption est absolue; elle anéantit tous les actes de l'instance; il n'est aucun cas où il soit permis de laisser subsister les premiers actes d'une procédure, et de ne déclarer périmés que les derniers.

» Marcillac et le tribunal civil de Toulouse ont inventé une subtilité : ils ont supposé que l'opposition du défaillant à un jugement par défaut, donne lieu à une instance nouvelle, à une instance autre que l'instance principale.

» Un jugement par défaut ne termine l'instance que conditionnellement, et en tant qu'il ne sera pas suivi d'opposition. Si l'opposition survient, il n'y a rien de terminé; et l'instance se retrouve existante.

» Voilà l'effet de l'opposition à un jugement par défaut.

» Aussi se forme-t-elle par simple requête signifiée à l'avoué de la partie qui a obtenu le jugement par défaut, sans qu'elle soit accompagnée d'aucune des formalités qui sont nécessaires pour

introduire une instance.

» La Peremption en cause d'appel a bien l'effet d'anéantir l'appel; mais pourquoi? Parceque l'appel est le principe d'une instance toute nouvelle et devant d'autres juges.

» Le tribunal civil de Toulouse a donc, en considérant l'opposition comme introductive d'une instance nouvelle, en faisant deux instances d'une seule, divisé ce qui était indivisible; il a donc fait une fausse application de l'art. 15 de l'ordonnance de 1563 ».

Le sieur Marcillac répond que le tribunal civil de Toulouse n'a point divisé les actes d'une même instance.

» Non (ajoute-t-il), ce procédé n'est point le sien. Il a uniquement déclaré que l'opposition est la cause productive, le principe d'une instance nouvelle dirigée contre le jugement par défaut : cette opinion n'a rien d'erroné ni d'arbitraire, rien qui ne puisse être aisément justifié. En effet, l'instance principale, introduite par le demandeur originaire en vertu de son assignation, a été instruite et terminée par le jugement de condamnation : ce jugement est le dernier terme d'une procé dure dont l'exploit de demande est le premier élément. Cela est incontestable; ce n'est point seulement l'usage local du ci-devant parlement de Toulouse qui autorise cette opinion, mais la raison seule l'autorise.

» L'assignation secondaire du défendeur, ou l'exploit d'opposition à ce jugement, est l'acte créateur d'une instance particulière entière

ment distincte de la précédente. Ainsi, cette instance ultérieure peut être infectée d'un vice radical dont l'effet soit exclusivement re. monté à celle-ci, sans être étendu à celle là. Cela est d'autant plus vrai, qu'indépendamment de l'opinion générale qui existe à cet égard, ainsi qu'on vient de le dire, dans l'étendue du ci-devant ressort du parlement de Toulouse, les principes concourent pour la confirmer. On n'ignore point en effet que, par le passé, l'action judicati resultant d'une décision judiciaire rendue, soit contradictoire. ment, soit par défaut, subsistait pendant trente ans ainsi, l'effet de ce jugement conservait l'instance comme partie intégrante et nécessaire de la décision. Si donc on admettait qu'une instance sur l'opposition ne fût qu'accessoire à la première, et qu'en frappant de nullité celle-ci, il fallût l'étendre à la prin. cipale, on tomberait dans l'inconvénient d'anéantir l'effet de cette action judicati, et de la réduire à trois ans, qui est le temps autorisé par la loi pour produire la Péremption. L'incoherence de ce système en démontre le vice. La véritable doctrine sur cette matière est de syncoper ce qui l'est naturellement, et de diviser en deux époques, ou pour mieux dire, de distinguer deux instances indépen. dantes; en telle sorte que l'interruption des poursuites sur l'opposition pendant trois ans, produise une exception peremptoire contre la dernière seulement, sans porter atteinte à la précédente, qui doit être efficacement protégée par le jugement productif de l'action judicati; c'est l'unique moyen de concilier les effets respectifs de ces deux causes séparées, l'instance du demandeur et celle du défendeur. C'est ainsi que cela a lieu sur l'instance d'appel, circonstance qui est en analogie parfaite avec la manière de procéder sur une opposition. Sur l'appel, en effet, le défendeur principal, en attaquant le jugement par défaut ou contradictoire, devient demandeur; et si cette instance est jugée périe, cet effet est limité aux actes faits devant le juge supérieur; ceux qui constituent l'instance principale, ainsi que le jugement attaqué, sont maintenus cela ne fait aucun doute. Pourquoi n'en serait-il point de même à l'égard de l'instance sur l'opposition à un jugement par défaut ? La parité, on le répète, est la même : il y a ici un jugement qui statue sur le fond de la demande; l'instance est terminée; l'exploit d'opposition produit, comme celui d'appel, un effet suspensif du jugement, et remet en question la décision du juge; c'est donc une instance particulière du défendeur, et cela est si généralement reçu dans le ressort du

parlement de Toulouse, que le défendeur, sur l'opposition comme sur l'appel, est tenu de plaider le premier; il attaque la décision du juge, comme on le fait sur l'appel. Il y a donc deux instances; et l'effet de l'une ne peut être confondu avee l'effet de l'autre. Qu'on n'invoque donc plus l'arrêt du parlement de Paris cité par Denisart; cet arrêt, outre qu'il est unique, ne pourrait former jurisprudence que dans son ressort; mais si elle était différente dans celui de Toulouse, c'est à tort qu'on veut s'en prévaloir. Il eût fallu prouver que cet arrêt était suivi dans ce dernier, ou que l'usage était autre qu'on ne l'a démontre; or, c'est ce qu'on ne peut établir ; il faut donc convenir qu'en jugeant comme ils ont fait, les juges du tribunal de Toulouse ont suivi les principes régulateurs de leur juridiction; qu'ils ont consacré une doctrine suivie et professée de tous les temps par les tribunaux qui les ont précédés, et qu'ils n'ont commis, ainsi qu'on le leur reproche, aucun excès de pouvoir ».

Par arrêt du 23 octobre 1810, au rapport de M. Sieyes,

« Vu l'art. 15 de l'ordonnance de 1563; » Et attendu que l'opposition formée par Labastiole, au jugement rendu contre lui par défaut, en premier et dernier ressort, le 14 juin 1792, a été introduite par une instance separée de celle sur laquelle ce jugement est intervenu, mais qu'elle en est la suite immédiate, et qu'elle se rattache à tous les actes antérieurs pour n'en former qu'une seule et même instance;

» Qu'aux termes de l'art. 15 de l'ordonnance de 1563, la Péremption devait s'appliquer, si elle était acquise, à tous les actes de l'instance, sans qu'il fût permis aux juges de la restreindre à certains actes particuliers;

» Qu'il suit de là que le tribunal civil de Toulouse, en scindant une même instance pour ne faire porter la Peremption que sur les derniers actes à partir de l'opposition, et au profit du demandeur Marcillac, a commis un exces de pouvoir, faussement appliqué et violé l'art. 15 de l'ordonnance de 1563; "La cour casse et annulle..... ».

SECTION II. De la Péremption des jugemens par défaut.

Cette espèce de Péremption était inconnue en France avant le Code de procédure civile ; c'est l'art. 156 de ce Code qui la introduite, mais seulement à l'égard des jugemens rendus par défaut contre une partie qui n'a pas constitué d'avoué, ou, en d'autres termes,

à l'égard des jugemens par défaut faute de comparoir.

« Tous jugemens par défaut contre une » partie qui n'a pas constitué d'avoué (porte»t-il), seront signifiés par un huissier com»mis, soit par le tribunal, soit par le juge »du domicile du défaillant, que le tribunal » aura désigné : ils seront exécutés dans les » six mois de leur obtention; sinon, seront » réputés non-avenus ».

L'art. 158 déclare, en conséquence, que l'opposition à ces jugemens sera recevable jusqu'à leur exécution, à la différence des jugemens par défaut contre une partie ayant un avoué, contre lesquels l'art. 57 n'admet l'opposition que pendant huitaine, à compter du jour de la signification à avoué.

Et l'art. 159 ajoute : «le jugement est répu» té exécuté, lorsque les meubles saisis ont » été vendus, ou que le condamné a été em

» prisonné ou recommande, ou que la saisie » d'un ou de plusieurs de ses immeubles lui » a été notifiée, ou que les frais ont été payés, » ou enfin lorsqu'il y a quelque acte duquel il » résulte nécessairement que l'exécution du ju »gement a été connue de la partie défaillante». Quels ont été les motifs de ces articles? L'orateur du gouvernement les a exposés en ces termes, dans le discours qu'il a prononcé devant le corps législatif, en les lui présen

tant:

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ne

Ici je dois découvrir sans ménagement une grande plaie de l'ordre judiciaire : il n'est que trop souvent arrivé qu'un huissier prévaricateur a manqué de donner une copie de son exploit à la personne qu'il assigne; c'est ce qu'on appelle, en langue vulgaire, souffler une copie. L'infortuné qu'on a dû citer, peut pas se montrer sur une interpellation qu'il ignore: on prend contre lui un jugement par défaut; si la prévarication se prolonge, on lui soustrait encore la copie de la significa. tion du jugement; il vit dans une sécurité profonde, et lorsque tous les délais pour se pourvoir sont écoulés, le malheureux peut être écrasé par une procédure dont il n'a pas même soupçonné l'existence.

» On a dù s'occuper sérieusement du remède à un mal qu'on n'a pu se dissimuler; je crois pouvoir annoncer que l'abus, plutôt le délit, est écarté sans retour

ou

» Une première précaution consiste à ordonner que les jugemens rendus par défaut contre des parties qui n'ont pas constitué d'avoué, seront toujours signifiés par un huissier commis à cet effet par le juge; et l'on peut sans témérité présager que les signifi. cations ne seront pas soustraites.

» Cette première mesure est suivie d'une seconde plus efficace encore.

» Les jugemens par défaut, quand il n'y a pas d'avoué constitué, devront toujours être exécutés dans les six mois; sinon, ils seront réputés non-avenus. Pourquoi s'empresset-on d'obtenir un jugement, si l'on ne veut pas s'en servir ?

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L'opposition, de la part du défaillant, sera recevable jusqu'à l'exécution. Pour couper court à toute espèce de subtilité, on a dû définir ce qu'on entend par exécuter un jugement. L'exécution n'est réputée faite qu'aprés un acte nécessairement connu de la partie défaillante. Jusque là, celle-ci peut se rendre opposante au jugement. La déclaration qu'elle s'oppose, suspend toute poursuite.

lité d'une procédure frauduleuse et clandes» Ainsi disparaîtra pour toujours la possibitine, dont l'effet était d'égorger un citoyen qui ne pouvait se défendre; ainsi sera exqu'à ce jour, avait résisté à tous les remèdes ». tirpé jusque dans sa racine, un mal qui, jus

à la rédaction des articles ainsi expliqués par Quelque soin que le législateur ait apporté l'orateur du gouvernement, ils n'ont pas laissé de faire naître un grand nombre de questions qui portent 10. sur les jugemens par défaut tribunaux de commerce; 30. sur les jugemens en général; 20. sur les jugemens par défaut des par défaut des justices de paix.

S. I. Questions sur la Péremption des jugemens par défaut en général.

I. Quel est, dans l'art. 156 du Code de procédure civile, le sens du mot exécuté ?

Un jugement n'est, à proprement parler, exécuté, que lorsqu'est rempli l'objet des condamnations qu'il prononce.

Si donc l'on s'en tenait à cette explication rigoureuse, il faudrait dire qu'en réputant non-avenus les jugemens par défaut faute de comparoir, qui n'auront pas été exécutés dans les six mois de leur obtention, l'art. 156 frappe de Peremption toute condamnation par défaut à payer une somme, à délaisser un immeuble, ou à restituer un effet mobilier, qui n'aurait pas été suivie, dans les six mois de sa date, de la restitution de l'effet mobilier, du délaissement de l'immeuble, du paiement de la somme.

Mais entendre ainsi l'art. 156, ce serait lui prêter un sens absurde; ce serait lui faire dire que la partie condamnée par défaut n'a besoin, pour neutraliser sa condamnation, que d'employer, pendant six mois, les subterfuges et les chicanes qu'elle juge les plus propres à

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