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leur développement. A cette époque de l'histoire des Israélites, ils sont encore pasteurs, mais non plus nomades; ils sont dispersés sur un vaste territoire, mais n'en changent pas. L'état de la grande tribu émigrante telle qu'elle eut lieu lors de l'invasion des pasteurs ou Hyksos en Egypte, des Tartares en Chine et des Barbares en Europe, commença pour les Beni-Israël à leur sortie d'Égypte. Ils étaient alors, d'après le livre des Nombres, plus de six cent mille combattants'.

Le rapprochement des hommes, le contact des familles amènent de nouveaux droits et de nouvelles coutumes; c'est ce que nous allons exami

ner.

Le principe politique qui s'impose sur les institutions civiles de la tribu et en dehors duquel elle tend à se dissoudre, exige le mariage dans la tribu et l'exclusion du mariage dans la proche parenté; ces deux dispositions sont en intime corrélation.

A l'époque patriarcale, la famille se perpétuait par des alliances entre proches parents; la tribu devenant la grande famille doit se perpétuer par des mariages dans son sein. Les unions dans la proche parenté affaibliraient les liens du sang, qui à chaque génération doivent unir entre eux tous les membres de la grande famille ou tribu. L'esprit qui anime les coutumes de cette époque de transformation sociale apparaît dans ce fait général qu'il n'existe pas d'autre nom de famille que

1. Nombres, I, 46.

le nom de la tribu, qui fut celui de l'ancêtre commun. Il en fut ainsi pour les douze tribus d'Israël, pour les Cent noms de la Chine, pour les clans de l'Écosse et dans toute l'Europe jusqu'au onzième siècle. Les tribus d'origines différentes étant alors confondues, la tribu n'existant plus, les noms de famille prirent naissance.

Nachor, frère d'Abraham et d'Haram épouse Milcha, fille d'Haram, par conséquent sa nièce, paternelle', degré d'union interdit par Moïse'. Hamram, père de Moïse avait épousé sa tante paternelle, alliance également prohibée par le législateur hébreu*.

Une révolution dans la législation civile indique une révolution dans l'état social.

La Genèse présente le tableau de la famille patriarcale; le Lévitique donne des lois à une nation composée de tribus nomades.

Dans ces grandes agglomérations d'hommes organisées pour les migrations et les invasions, les familles se rapprochent et les parentés paternelle et maternelle tendent à s'équilibrer. Le Lévitique interdit le mariage avec l'oncle, la tante, le neveu et la nièce, soit utérins ou consanguins; il n'en était pas ainsi dans l'état social antérieur ; l'union nuptiale, à ce degré de parenté, était permise du côté paternel, mais non du côté maternel. Nous n'avons, du moins, aucun exemple, dans la

1. Genèse, XI, 27, 29. — 2. Lévitique, XVIII, 14. 3. Exode, VI, 20.4. Lévitique, XVIII, 12.

famille patriarcale, du mariage d'un oncle avec sa nièce utérine, ou d'une tante avec son neveu utérin; la logique du droit le voulait ainsi.

La vénération pour la mère de famille se perpétua dans les coutumes des tribus nomades; l'oncle maternel était le tuteur des orphelins; il tenait lieu de la mère et du père; l'oncle paternel pouvait remplacer le père, mais ne pouvait jamais remplacer la mère dans le cœur des enfants. Telles étaient les mœurs des Germains d'après le récit de Tacite; les enfants de la sœur entraînaient à l'égard de l'oncle des devoirs plus sacrés que devoirs mêmes de la paternité.

les

II

GERMAINS FRANCS.

Tacite, dans sa description des mœurs des Germains, dit : « L'oncle a pour le fils de sa sœur la même affection que s'il était leur propre père; on considère même ce lien du sang comme plus sacré et plus étroit, et, dans les otages, on choisit préférablement les neveux comme plus près du cœur et plus intimes dans la maison1. »>

1. Sororum filiis idem apud avunculum, qui apud patrem

Dans la loi salique, le chapitre du Reipus, ou secondes noces de la veuve, est une conséquence du même principe:

<< Si un homme en mourant laisse une veuve et que cette veuve soit recherchée en mariage, il faut avant la célébration de ce mariage, que le Tonge ou le centenier indique une audience. A cette audience où l'on élèvera en l'air un bouclier, et où l'on appellera trois causes'; celui qui veut épouser la veuve se présentera avec trois sous d'or ayant exactement le poids et un denier, et amènera trois témoins dont l'approbation est nécessaire; après quoi, il peut épouser la veuve.

Si les formalités exigées par la loi ainsi qu'il vient d'être dit, ont été remplies et que les trois sous d'or et le denier aient été acceptés par celui qui devait recevoir le Reipus ou droit dû à raison des secondes noces, le mariage pourra être contracté légitimement.

<< Mais il faut discerner à qui appartient le Reipus.

S'il existe des neveux, fils de la sœur, l'aîné doit recevoir le droit.

« A défaut de neveu, l'aîné des fils de la nièce doit recevoir le droit.

honor. Quidam sanctiorem arctioremque hunc nexum sanguinis arbitrantur, et in accipiendis obsidibus magis exigunt, tamquam ii et animum firmius et domum latius teneant. (Germania, cap. XX).

1. Afin que le public soit plus nombreux, l'élévation du bouclier indique la solennité de la séance.

« A défaut de fils de la nièce, le fils de la cousine du côté maternel doit recevoir le droit.

« A défaut du fils de la cousine, l'oncle, frère de la mère doit recevoir le droit1. »

Le droit de Reipus était accordé à la famille comme un dédommagement de la perte qu'elle éprouvait dans la personne de la mariée. C'était toujours un homme qui recevait ce droit, mais cet homme devait être le chef de la ligne maternelle; c'était donc la mère dans la tradition des Francs Saliens qui était la principale source des liens de la parenté.

L'oncle maternel, ou, à son défaut, un parent dans la ligne utérine avait la garde des enfants mineurs ; tel était le droit des tribus patriarcales, mais, si, à la mort des père et mère, un des enfants, fils ou fille, était majeur, c'est à lui qu'appartenait la tutelle de ses puînés; c'est ce que nous enseignent les lois des Hindous et des Ibères.

1. Lex salica, tit. XLVI, ed. Lindenb. tit. XLVII, ed. Herold.

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