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tion bornée en serait la conséquence d'après la science1.

L'espèce humaine est le type de l'espèce dans le règne animal; c'est le seul degré parfaitement défini dans l'échelle de classification; le genre l'est moins; la famille, l'ordre, la classe, moins encore; pourquoi? si ce n'est que l'espèce seule intéressait le but et le terme de la création : l'homme, qui jamais ne devait et ne pouvait s'unir et se confondre avec le règne animal.

Il n'existe qu'une seule espèce humaine, qu'une race d'hommes; le droit le veut ainsi; en dehors de cet axiome, le nègre doit être esclave; il n'est plus notre frère'.

Au commencement du monde, disent les plus antiques traditions, Dieu créa l'homme mâle et femelle, et il dit: Ils seront deux dans une même

1. Je cherche et n'ai point de parti pris. Dans la race humaine, la civilisation est une et le droit est un. D'où vient l'invention de la boussole, de la poudre à canon et des étoffes de soie? des Chinois. A qui devons-nous les caractères alphabétiques qui contenaient l'avenir de la civilisation? aux races chamite et sémite les Égyptiens et les Phéniciens. L'usage du tabac et celui du quinquina, cette plante héroïque qui nous délivre de la fièvre et de tant d'autres maux, nous viennent des sauvages de l'Amérique.

Le droit est un et dans toutes les variétés humaines, blanche, jaune, rouge et noire, existent le mariage sacré, la propriété privée et les successions.

L'humanité est donc un organisme et le commerce fait circuler la vie dans ce grand corps qui couvre le globe, comme le sang circule dans les animaux, la sève dans les végétaux.

2. DE QUATREFAGES: Unité de l'espèce humaine; FLOURENS : L'origine des espèces, réfutation de Darwin.

chair (Genèse, II, 24). Cette parole est plus profonde que ne le supposent les théologiens; cette parole. est la base du droit naturel et le fondement des sociétés humaines. L'époux, l'épouse, les enfants, forment l'unité sociale; les peuples se composent de familles et non pas d'individus; s'il en était autrement, l'être humain ne serait qu'une variété de la brute.

L'existence sur la terre d'un seul couple primitif était indispensable à la sanction du droit sacré de mariage. Si plusieurs couples avaient été créés simultanément, si notre premier ancêtre eût été un singe, ainsi que le suppose l'étrange modestie de certains philosophes, la société humaine eût été tranchée dans sa racine. D'un seul couple naissent les relations de l'époux et de l'épouse, du père et de la mère, des frères et des sœurs. Supposez l'existence primitive de familles multiples comme le voudrait Agassiz ', et abandonnez l'homme à sa nature et à ses passions, dès lors la promiscuité remplace l'union légitime, perpétuelle et sacrée du mariage; le père est inconnu; la famille devient radicalement impossible, et l'homme, issu de la bestialité, croupit éternellement dans sa fange originaire. Mais si l'homme et la femme ne formaient qu'un seul couple à l'origine du genre humain, leur union ne pouvait être rompue; les rapports entre les parents et les enfants étaient consacrés et légitimés.

1. AGASSIZ: De l'espèce et de la classification en zoologie.

La longue enfance dans la race des hommes devait être une lente et providentielle initiation à la vie de famille; les descendants apprenaient à courber leur volonté sous la puissance de l'ancêtre; l'unité sociale, la famille, étaient fondées et ne pouvaient périr, car l'auteur de toutes choses avait placé l'instinct social dans le cœur de l'homme et l'avait contraint à le pratiquer dès son apparition sur cette terre.

La monogamie a donc été la grande institutrice du genre humain; elle a appris à l'homme les lois du mariage et de la famille; le lien sacré des époux et la légitimité des enfants.

Mais, dans la monogamie, deux droits coexistent le droit naturel et le droit civil: le droit naturel qui impose le mariage légitime comme base de toute société humaine, et le droit civil, émanation de la liberté humaine, qui transforme et, trop souvent, corrompt le principe de l'union sacrée des sexes.

La polygamie, la monogamie, sont des formes du droit civil du mariage; la génération de ces formes permet de remonter à leur origine. Chez les plus anciens peuples, la polygamie conserva le principe de la monogamie en altérant sa forme et ses applications.

Lorsque la pluralité des femmes s'établit, il n'y eut d'abord qu'une seule épouse légitime; les autres étaient des servantes comme Agar. Leurs enfants n'entraient dans la famille que par l'adoption de l'épouse seule légitime, qui pouvait les chasser

des tentes patriarcales comme Sara chassa Ismaël. Ainsi, par une sorte de fiction de la loi, la polygamie imitait la monogamie comme l'adoption imite la paternité. La monogamie était donc antérieure à la polygamie ".

Plus tard le père de famille put avoir deux épouses légitimes. Jacob épousa Rachel et Lia au même titre et elles occupèrent le même rang; plus tard encore, Mahomet autorisa quatre épouses légitimes; ainsi la polygamie s'éloignait de plus en plus de son principe.

Quelques auteurs prétendent que le mariage naquit de la promiscuité et que la polygamie fut antérieure à la monogamie; l'histoire du droit affirme le contraire. Si l'humanité eût commencé par la promiscuité ou par la polygamie, la monogamie n'aurait jamais existé. Les exemples ne manquent pas; les dernières tribus sauvages nous édifieront complétement sur cette question; là où le mariage sacré n'existe pas, il n'est plus de famille, plus de société ; les hommes s'entre-déchirent et se dévorent; là, il n'est plus d'êtres humains, mais des carnassiers, des anthropophages, que la civilisation anéantit par son seul contact, car le sauvage s'empare avec avidité de tous les vices de l'homme civilisé et ne sait comprendre aucune de ses vertus. Je le demande: Où sont les descendants des cannibales des Antilles?

1. Le plus ancien peuple connu, révélé par la linguistique, es Aryas, étaient monogames. (PICTET, les Aryas.)

Ainsi la famille est la loi de la nature humaine comme l'individualité est la loi de la nature animale.

La brute naît dans la science de sa vie avec l'instinct de la nutrition, de l'habitation, de la reproduction; l'homme naît dans l'ignorance complète de sa vie; tout ce qu'il sait, il le doit à l'éducation transmise par la famille. La pensée divine fonde l'unité des sociétés humaines sur l'unité de la famille, l'homme ne peut vivre isolé; durant plus d'un tiers de sa vie, il est soumis à la tutelle de l'éducation; même dans les classes les plus humbles, avant l'âge de quinze ans, chez le cultivateur, l'artisan, le marchand, les mineurs ne peuvent vivre de leur salaire; ils sont à la charge de leurs parents; chez le sauvage même, l'éducation est aussi indispensable et n'est pas plus hâtive.

Dans la classe animale la plus élevée, celle des mammifères, lorsque l'allaitement est terminé, au bout de quelques semaines ou de quelques mois, la mère ne connaît plus ses produits; tous les liens sont rompus. Les animaux inêmes qui vivent en société, ignorent aussi complétement le lien de la famille; leur instinct est tout, leur éducation, rien. Les abeilles, les fourmis vivent en essaims ou en troupes nombreuses; leur science innée nous étonne en nous montrant l'image abaissée des sociétés humaines; mais ces sociétés animales sont toujours et fatalement identiques; l'éducation n'existe point chez elles; le progrès ou la

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