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extraire le suc par les moyens ordinaires. Le suc en s'écoulant était clair, légèrement jaunâtre, d'une odeur particulière, d'une saveur douce, légèrement sucrée ; il rougissait le papier bleu de tournesol; essayé par une solution de persulfate de fer, il passa au noir bleuâtre. Peu d'instants après que le suc est obtenu il devient trouble, une légère fermentation s'établit avec formation d'écume à la surface, tandis qu'il se forme un précipité assez volumineux. Je laissai la réaction continuer pendant vingt-quatre heures, je filtrai ensuite pour séparer la partie liquide.

A. Examen de la partie liquide.

La partie filtrée était claire, d'une teinte légèrement jaunâtre, de la même odeur et saveur que précédemment. Même action sur le papier de tournesol. Elle fut exposée à une température de 70 à 75° pendant une heure environ; l'albumine s'étant coagulée fut séparée par la filtration ; puis le liquide fut évaporé au bain marie jusqu'en consistance sirupeuse; traité par l'alcool il donna un précipité de nature. gommeuse et extractive. Pendant l'évaporation on remarquait çà et là surnageant, un liquide de couleur jaune brunâtre, d'apparence huileuse, d'une odeur assez forte, qui rappelle bien celle du savon blanc ranci ; ce liquide fut enlevé avec soin pour être examiné. La solution alcoolique était jaune paille, après vingt-quatre heures elle était claire; elle fut séparée du précipité seulement par décantation et soumise à une évaporation spontanée; après quelques jours on remarquait une foule de petits cristaux qui tapissaient les parois de la capsule; je les considérai de prime abord comme du sucre cristallisé, vu l'abondance du principe sucré ; pendant l'évaporation il s'était encore déposé sur les parois de la capsule de la matière gommeuse.

B. Examen de la matière restée sur le filtre.

Elle fut abandonnée pendant quelques jours sur le filtre pour faciliter la sortie de la partie liquide; de grise qu'elle était au moment de sa précipitation, elle passa au rouge vineux par son exposition à l'air, coloration qui est due, sans nul doute, à un principe qui se modifie principe qui se modifie par l'action de l'air, comme on a lieu de le remarquer pour quelques matières colorantes. Dans une autre circonstance, j'ai encore eu l'occasion d'observer ce fait de coloration, mais avec moins d'intensité. Un jour ayant mis à part de l'eau dans laquelle on avait fait bouillir des jeunes pousses de houblon, je remarquai après douze ou quinze jours, qu'elie avait acquis une belle couleur rose, coloration que j'avais attribuée à l'influence du chlorure de sodium, que l'on met d'habitude pour cuire à l'eau les légumes. La matière restée sur le filtre, jouissait à un haut degré de l'odeur de la substance huileuse déjà signalée, sa saveur était légèrement sucrée; elle fut traitée à plusieurs reprises et pendant plusieurs jours par de l'alcool à 0,837 de densité; ce dernier lui enleva le principe sucré et celui d'apparence huileuse; la partie qui est restée inattaquable par l'alcool était sans saveur et sans odeur; exposée pendant plusieurs jours au contact de l'air, elle s'était durcie et présentait la consistance d'une matière cornée; enfin, après un contact plus prolongé elle était noircie et devenue friable, elle résista à l'action de l'éther, et fut légèrement attaquée par l'acide acétique concentré et la potasse caustique; brûlée sur les charbons dans un tube de verre, elle donna des produits ammoniacaux. D'après ces caractères, je pus la considérer comme composée en grande partie d'albumine insoluble; je n'y ai point constaté la présence du principe amylacé.

C. Examen de la substance cristalline.

La substance cristalline qui fut remarquée pendant l'évaporation de l'alcool fut encore retrouvée dans une partie du suc qui avait été débarrassée par la chaleur de toute l'albumine; cette partie fut rapprochée par évaporation et abandonnée à elle-même pendant quelques jours; il s'y était formé un précipité cristallin qui fut séparé par filtration; la partie filtrée avait une saveur acide et sucrée; l'acide fut séparée par l'acétate neutre de plomb; j'obtins un précipité qui, lavé et décomposé par une quantité suffisante d'acide sulfurique, m'a présenté un produit qui offrait les caractères de l'acide malique. Ce qui était resté sur le filtre fut lavé avec une petite quantité d'eau, ensuite réuni aux cristaux obtenus pendant l'évaporation spontanée de la solution alcoolique. Ils furent redissous dans une suffisante quantité d'eau, la solution subit une légère évaporation, puis fut abandonnée pour la laisser cristalliser.Les cristaux sont durs, blancs, d'une limpidité parfaite, leur forme cristalline est celle du rhomboèdre; quelques cristaux se sont présentés sous la forme du prisme hexaèdre ; ils sont sans odeur, saveur presque nulle, solubles dans environ soixante fois leur poids d'eau, moins solubles dans l'alcool à 0,852 de densité; réduits en poudre et placés sur du papier de tournesol préalablement mouillé à l'eau distillée, ils le rougissent immédiatement; la solution aqueuse traitée par une solution de chlorure de barium, d'acétate neutre de plomb et de proto-sulfate de fer, n'a offert rien de bien remarquable. Brûlés dans un tube de verre à la lampe à alcool, ils dégagent presque aussitôt une odeur fortement ammoniacale; le papier de tournesol rougi plongé dans le tube est ramené immédiatement au bleu; ils laissent un résidu carboné qui

traité par l'acide azotique à froid n'a donné lieu à aucun phénomène appréciable.

Toutes les propriétés que j'ai reconnues à cette substance ne m'ont pas permis de douter que j'avais affaire à de l'asparamide.

L'asparamide n'a été rencontrée jusqu'ici que dans un petit nombre de végétaux; primitivement par MM. Vauquelin et Robiquet dans les pousses d'asperge; en 1826, par M. Bacon, professeur de chimie à Caen, dans la racine de guimauve : lequel la considéra de prime abord comme une combinaison d'acide malique et d'un alcali végétal particulier auquel il donna le nom d'althéine; mais Plisson l'ayant examinée, reconnut que c'était un principe semblable à celui retiré de l'asperge. Plus récemment M. Blondeau, pharmacien à Paris, a constaté la présence du même corps dans la racine de grande consoude. Vauquelin l'a encore constatée dans la pomme de terre, et M. Robiquet dans la racine de réglisse où elle porta le nom d'agédoïte; enfin sa présence fut encore constatée dans des ornithogalum.

D. Examen de la matière d'apparence huileuse.

La petite quantité de cette substance obtenue d'une certaine quantité de suc pendant l'évaporation, fut réunie à celle extraite, par l'alcool, du précipité; elle se présentait sous forme d'un liquide de consistance huileuse, d'une couleur jaune brunâtre, d'une saveur douce d'abord, puis légèrement amère, ne tardant pas à faire éprouver de l'àcreté à la gorge, tout à fait analogue à celle qu'on ressent en mangeant les jeunes pousses du houblon, mais d'une manière plus prononcée; son odeur rappelle bien celle du savon ranci; elle fut traitée par de l'éther hydrique, elle s'y est dissoute entièrement; la solution abandonnée à l'évaporation

spontanée laissa pour résidu, 1o une substance solide, blanchâtre, sous forme de petits grains ou mamelons; 2° un liquide huileux brunâtre, qui recouvrait la substance solide.

Ces deux substances étant également solubles dans l'alcool et l'éther, il est difficile de les isoler complètement. Cependant la partie solide étant spécifiquement plus pesante, j'eus recours à cette propriété. Je versai de l'eau sur le résidu de l'évaporation d'éther et j'agitai fortement; après un instant de repos la partie solide se tenait en suspension dans l'eau, les fragments plus volumineux occupèrent le fond; la partie liquide qui surnageait fut dissoute par de l'éther que je versai à la surface et que j'enlevai à l'aide d'une pipette.

E. Examen de la substance solide.

Elle est blanche, sa saveur est douce, analogue à celle du savon blanc, légèrement âcre, ce que j'attribue à la présence d'une certaine quantité de la substance huileuse liquide; son odeur est faible; elle est soluble dans l'alcool et l'éther; la solution alcoolique, lorsqu'elle est bien concentrée, laisse déposer sous forme de lames légèrement nacrées; cette solution rougit le papier de tournesol, elle précipite l'acétate neutre de plomb, le nitrate d'argent, le sulfate de cuivre. La substance solide exposée à une température de 70° à 75o ne s'est point liquéfiée, mais elle donna lieu à quelques dégagements de bulles, elle s'est ensuite brunie légèrement.

F. Examen du produit liquide.

Ce liquide a une couleur brune jaunâtre, une odeur assez pénétrante qui rappelle celle du savon blanc ranci, sa saveur douce d'abord, ensuite un peu amère, ne tarde pas à faire éprouver de l'âcreté à la gorge, âcretéqui a quelque

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