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cienne que la raison, plus ancienne que le monde. Viendront après ceux-ci d'autres législateurs armés des mêmes pouvoirs, remplis comme eux de l'ambition de signaler leur éphémère souveraineté par d'illustres réformes; des cas imprévus par la loi amèneront des interprétations nouvelles. Le cœur humain, nous dira-t-on, est une terre qu'il faut labourer sans relâche; autrement, livré à sa fécondité naturelle, il va reproduire toutes ces superstitions que la force de la révolution, dont nous sommes témoins, pou voit seule en arracher (1). Et alors quelle moisson pour nos philosophes! le desir des conquêtes croissant avec les succès, ce malheureux peuple boira goutte à goutte le poison de l'erreur, et dans son égarement il s'éloignera de la source où l'on puise la vie, pour se creuser des citernes fangeuses, incapables d'étancher la soif. (2) Ce ne sont point là de vaines terrreurs ; et Dieu sait combien nous voudrions nous tromper. Mais l'histoire des églises d'Angleterre, de Genève,

(1) V. Opinion de M. Treillard, sur la constitution civile du clergé.

(2) Jerem. 2. 13,

de Suède, nous fournissent là-dessus des témoignages aussi douloureux, qu'ils sont incontestables. Il faut avoir fermé les yeux à toute lumière, pour ne point voir les progrès de la conspiration dans l'histoire" des premières attaques. Et quel obstacle, je vous le demande, mettront désormais aux entreprises des conjurés les ministres qu'ils se sont choisis, ces ministres infidèles, dont ils ont su garrotter les consciences par les liens du serment, et plus encore par ceux de l'intérêt ? Ministres de Bâal, comme les appelle Jérémie (1), qui ont vu sans effroi l'église de J. C. réduite à une honteuse servitude, et le démon venir audacieusement s'asseoir sur le trône de Dieu. Pourquoi repousser du sanctuaire ceux dont les lumières et les vertus leur paroissoient redoutables à leurs desseins, si ce n'est qu'ils avoient besoin de s'assurer de loin des complices?

Après avoir mis dans la tête d'un peuple qu'il est maître de sa législation religieuse, comme de ses codes politiques, il n'y a pour l'achever, qu'à lui dire encore qu'il

(1) Ibid. v. 14.

peut se faire à son gré des conducteurs, déposer ceux qui sont établis, en établir d'autres, qui n'agissent que par le pouvoir qu'il leur a donné.....

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L'église catholique, poursuit l'immortel évêque de Meaux, parle ainsi au peuple chrétien vous êtes un peuple, un état et une société ; mais Jésus-Christ, qui est votre roi, ne tient rien de vous et son autorité vient de plus haut vous n'avez naturellement pas plus de droit de lui donner des ministres, que de l'instituer lui-même votre prince: ainsi, les ministres, qui sont vos pasteurs, viennent de plus haut comme lui-même, et il faut qu'ils viennent par un ordre qu'il ait établi. Le royaume de JésusChrist n'est pas de ce monde, et la comparaison que vous pouvez faire entre ce royaume et ceux de la terre, est caduque; en un mot, la nature ne vous donne rien qui ait rapport avec Jésus-Christ et son royaume, et vous n'avez aucun droit, que celui que vous trouverez dans les loix ou dans les coutumes immémoriales de votre

société.... C'est ainsi que les pasteurs s'en

(1) Bossuet hist. des Var. L. 15. N.o 119 sqq.

tresuivent;

tresuivent; Jésus-Christ, qui a établi les premiers pasteurs, a dit qu'il seroit toujours avec ceux à qui ils transmettroient leurs pouvoirs; vous ne pouvez prendre de pasteurs que dans cette succession; et vous ne devez non plus appréhender qu'elle manque, que l'église même, que la prédication, que les sacremens.

Voilà comme on parle dans l'église, et les peuples ne présument pas au-delà de ce qui leur est donné, mais la nouvelle constitution leur dit tout le contraire; en vous, leur dit elle, est la source du pouvoir spirituel et celeste.... C'est le droit naturel de toute société.... Prenez-y garde, ô peuples qui vous flattez de cette idée ! Pour se faire un maître sur la terre, il suffit de le reconnoître pour tel, et chacun porte ce pouvoir dans sa volonté. Mais il n'en est pas de même pour se faire un christ, un sauveur, un roi céleste, ni pour lui donner ses officiers. Et en effet, leur imposerezvous les mains, vous peuple à qui l'on dit qu'il appartient de les établir?.... N'importe, faites toujours, ô peuple, croyez que le pouvoir de lier et de délier, d'établir et de détruire, est en vous, et que vos pász

d

teurs n'ont de pouvoir que comme vos représentans, Que l'autorité de leurs synodes vient de vous, qu'ils ne sont que vos délégués; croyez dis-je toutes ces choses, encore que vous n'en trouviez pas un seul mot dans l'écriture. Voilà comme on prêche la réforme, c'est ainsi que l'on met en pièces le christianisme, et qu'on prépare.la voie à l'antechrist.

Un autre parallèle, dont nos adversaires ne manqueroient pas de tirer un grand parti, si l'avantage en étoit pour eux, c'est celui des ouvrages mêmes qui entreront dans cette collection. Nous n'en parlerons, nous, qu'avec la modestie qui sied à la victoire.

Arius, au rapport de Socrate, (liv. 10, chap. 6), ayant recueilli tous les écrits composés en faveur de ses opinions, saint Alexandre d'Alexandrie ramassa de son côté tous ceux qui soutenoient la doctrine catholique. A quoi saint Epiphane ajoute que ces matériaux servirent dans la suite de modèles et de fondemens à toutes les controverses agitées entre les catholiques et les diverses sectes d'Ariens. (Epiph. Hær. 69, n.. 4). Ainsi, dans le monument que nous offrons à la postérité, l'on viendra étudier

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