Page images
PDF
EPUB

ministres inférieurs pour gouverner avec eux, et sous eux, des portions plus ou moins nombreuses du troupeau. S. Paul, après avoir placé Timothée à Ephese, lui recommanda de s'associer des coopérateurs qui pussent transmettre le dépôt de la saine doctrine qu'il avoit reçue de lui, qui idonei sint alios docere. En laissant Tite à Crète, comme pasteur en chef de toute l'isle, il le chargea de placer des prêtres dans les différentes villes, ut constituas per civitates presbyteros.

Lorsque les églises particulières furent assez multipliées, que l'on pût créer une discipline uniforme de gouvernement, et graduer les différens dégrés d'autorité, l'église établit certains siéges pour avoir une sorte de prééminence sur des siéges inférieurs: delà les métropolitains dans les villes plus considérables, ayant la supériorité sur plu-, sieurs évêques, qui formèrent un arrondissement, une province ecclésiastique. Tout devant se faire dans l'église avec subordination et concert, les évêques particuliers gouvernèrent avec leur clergé, qui délibéroit avec eux sur les affaires un peu importantes; et les évêques d'une même province se réunissoient avec le métropolitain et le presbytère pour former le concile provincial."

Jamais les souverains, même convertis,,. n'ont influé en rien d'une manière directe et immédiate dans cet arrangement domes-. tique, si on peut parler ainsi; jamais ils ne se sont ingérés d'établir un évêque dans,

une

une ville, ou de l'ôter d'une autre, d'unir ensemble deux diocèses, ou d'en partager un en deux. Ils ont compris que, comme l'église n'avoit point à se mêler de l'admi nistration temporelle, de la distribution des tribunaux civils, ils n'avoient pas plus le droit de donner à l'église une discipline, d'établir des pasteurs, des chefs dans l'ordre spirituel ou de les déplacer, d'investir un évêque de la jurisdiction sur tel territoire, ou d'en dépouiller un autre,

CE

'Sans doute, les princes en entrant dans l'église, ou la trouvant établie dans leur état, ont pu et dù examiner quelles étoient ses loix, son régime, sa discipline en un mot, pour s'assurer qu'elle ne renfermoit rien de contraire à leur autorité légitiine, au repos de leur empire; mais jamais ils n'ont imaginé qu'ils pussent lui en donner une, y faire des loix, ou organiser une forme de gouvernement; spirituel. 999 h

[ocr errors]

mais

De-là cette distinction, si connue, si vraie, entre l'autorité purement politique et l'autorité purement ecclésiastique, chacune ne indépendante dans son ressort, dans tous ses actes propres, quoique pouvant mutuellement s'aider et se secourir sans jamais se confondre dans leur exercice, Le bon ordre civil, la conservation des propriétés, le maintien de la tranquillité publique, le pouvoir coactif, appartiennent exclusivement à la puissance temporelle. La religion, le salut des ames, les moyens Coll. eccl. Tome I.

R

spirituels de le procurer, l'espèce d'autorité purement: morale, qui peut y concourir; tel est le département de la puissance spirituelle. Dès-lors exercer une jurisdiction sur les ames, remplir les fonctions religieuses, en déléguer les ministres, leur conférer le droit de se faire obéir dans cet ordre,ne pent jamais appartenir qu'à l'église. Le souverain peut inspecter cet exercice, voir s'il ne sort pas des limites qui lui sont prescrites, s'il re trouble point la société ; mais il ne peut jamais remplir des fonctions qui supposent un pouvoir qu'il n'a jamais reçu.

. il

De ce droit exclusif d'exercer une autonité toute spirituelle, dérive donc celui diétablir des pasteurs qui en soient les dépositaires, les agens, de fixer leur mission, de l'étendre, de la restreindre; droit qui n'a pubétre communiqué que par le fondatur même de la religion ; et pour le bien de cette religion; en sorte que l'instituou la suppression des établissemens ecclésiastiques he peut appartenit jure proprio, qu'à la puissance ecclésiastique comme celle des établissemens civils appartient jure proprio, à la puissance civile. Tout ce qui s'écarte de cette règle est usurpation.

tion

D'après ces principes, il est aisé de répondre à la demande de MM. les évêques de Cl. et du M. sur la compétence de l'autorité civile relativement à l'entreprise qu'elle tenteroit de se permettre. Dans ce

,

systéme, elle prétendroit pouvoir, par elle même, anéantir des siéges épiscopaux, réunir ensemble plusieurs évêchés, donner un chef au clergé et aux fidèles d'un canton, ôter à un autre la supériorité› spirituelle que l'église lui avoit donnée. Mais 1o il visible d'abord que c'est une prétention toute nouvelle, inconnue à tous les siè cles. Qui auroit donc si subitement changé toutes les notions d'autorité, ou créé un pouvoir inoui, dont on n'avoit pas encore eu l'idée? La nation se seroit donc subitement réveillée sur des droits qu'elle ne connoissoit pas, qu'on ne connoit dans aucun royaume chrétien; que les sectes même séparées de la communion catholique, ne se sont jamais attribués, lorsqu'elles ont conservé l'épiscopat.

2o. Mais ceux qui ont créé ce projet, et qui se sont flattés qu'ils pourroient le faire adopter à l'assemblée, entendent-ils bien ce qu'il prétendent faire ? Qu'est-ce qu'établir un évéché? C'est donner à un ministre une jurisdiction spirituelle sur tel territoire; c'est lui soumettre et les pasteurs et les fidèles de ce canton. Qu'est-ce que supprimer un évéché? C'est faire descendre un évêque de son siége, le dépouiller de l'exercice d'une jurisdiction qu'il tenoit de l église seule, et en investir un autre, à qui on réunit cette portion du troupeau. Que l'église puisse faire tout cela pour le bien, pour le plus grand avantage des peuples,

on le conçoit; mais qu'une assemblée civile le puisse, de qui donc en auroit-elle reçu le pouvoir ? Ce n'est pas de l'église certainement, elle en conviendra; elle l'auroit donc essentiellement, comme chose iuhérente à sa nature, ou elle se le seroit donc tout d'un coup donné à elle-même. Or, ces chimères peuvent-elles entrer dans des têtes raisonnables?

Lors de la grande querelle des investitures, toute la difficulté venoit de ce que les évêques craignoient, qu'en donnant le bâton pastoral, l'empereur ne prétendit revêtir de la jurisdiction. Quand une fois l'équivoque fut levée, qu'il fut convenu que cette cérémonie annonçoit seulement que l'évêque recevoit du prince la confirmation des seigneureries temporelles, et des fiefs attachés à son siége, alors la contestation Fut terminée; parce qu'il étoit avoué de part et d'autre que la puissance séculière, en communiquant des droits très-civils, ne pouvoit absolument rien dans cet autre ordre d'administration toute spirituelle.

« Les titres de bénéfice qui ont charge d'ames, dit l'auteur non suspect du droit des souverains, touchant l'administration de l'église, « emportent jurisdiction au for » intérieur, et un droit d'administration. » dans l'intérieur du sanctuaire. Or, ces >> droits et ces titres ne peuvent être donnés » ni ótės, multipliés ni supprimés, qu'avec le concours de la puissance spirituelle

« PreviousContinue »