DES HUMANISTES, OU PREMIERS PRINCIPES DE GOUT, Développés par des remarques sur les plus PAR L'ABBÉ TUET. NOUVELLE ÉDITION, AUGMENTÉE DES ÉLÉMENS DE POÉSIE LATINE, PAR LE MÊME. Optimè institutum est, ut à Virgilio lectio inciperet. Quintil. PARIS, DE L'IMPRIMERIE D'AUGUSTE DELALAIN, Libraire, rue des Mathurins Saint-Jacques, no 5. 1822.DIOLIOTHÈQUE S. J. 60-CHANTILLY En faisant imprimer mes Elémens de Poésie latine, je me suis engagé à y joindre une espèce de Manuel poétique pour les humanistes. C'est cet ouvrage que j'offre aujourd'hui au public. Les matières y sont plus approfondies dans que ma Prosodie; mais il s'en faut bien qu'elles le soient de manière à former un traité complet de poésiè latine. Ce n'a point été là mon intention mon but est de donner aux humanistes non pas un goût exclusif pour la poésie, mais des principes de ce goût général, qui apprend à distinguer le bon et le mauvais dans une composition littéraire quelconque. L'exemple du grand Bossuet (1), joint à une expérience de quinze ans, m'a fortement persuadé que l'étude particulière des bons poëtes latins pouvait faire germer ce goût dans l'esprit des jeunes gens; j'ai tâché de ne rien mettre dans cet ouvrage qui ne fût propre à le développer. Mes lecteurs décideront jusqu'à quel point j'ai réussi. Pour qu'ils puissent avoir sur-le-champ et sans fatigue une légère idée de ce Guide des Humanistes, j'en vais faire une courte analise. En quelque genre de littérature que l'on s'exerce, on doit observer trois choses, la pensée, l'expression et l'arrangement des mots d'où (1) Feu M. Le Beau l'aîné disait que Bossuet s'était formé dans sa propre langue par la lecture de l'Enéide. Voyez les Elémens de Poésie latine, page 8 de la Préface. LE GUIDE DES HUMAN. a résulte l'harmonie du discours. C'est sur cette progression naturelle que j'ai dirigé mon plan. Ce Guide est divisé en trois livres. Le premier est consacré à l'examen des pensées, dans toute espèce d'ouvrage d'esprit. Il renferme à peu près tout ce que le père Bouhours a dit de mieux sur cette matière intéressante; ainsi l'analise en est inutile. Je préviendrai pourtant qu'en mettant ce critique à contribution, j'ai souvent pris la liberté d'étendre ses principes. Je n'ai adopté que des exemples propres à faire saisir les préceptes faciles à apprendre, et dignes d'être retenus; et dans le dernier chapitre, j'ai parlé des différentes manières d'imiter les pensées d'autrui. On conviendra que l'objet de ce livre était une préparation nécessaire aux deux suivans. Le second livre traite du style poétique. J'examine d'abord l'expression, ensuite les tours, ce qui forme deux sections. Dans la première je considère, 1o les substantifs; j'établis plusieurs règles pour apprendre à distinguer un substantif poétique de celui qui ne l'est pas. Je fais ensuite quelques remarques sur les pronoms et les noms propres.... 2° Les épithètes. Quelles en sont les sources générales et particulières... 3o Les verbes. Je donne plusieurs règles, d'après lesquelles on puisse substituer un verbe poétique à un verbe prosaïque. Viennent ensuite des exemples de verbes poétiques, et pris les uns dans le proles autres dans le figuré., pre, Dans la seconde section je distingue trois sortes de tours; l'un d'image, l'autre de dé veloppement, et le troisième de figures. De là trois chapitres. Le premier ne renferme que des exemples... Je fais voir, dans le second, que l'on développe une pensée, 10 par extension de phrase, en jetant dans la phrase principale une expression incidente, ou une apposition; 2o par changement de phrase ce que j'appelle périphrase de pensée; 3o par addition de phrase, ce qui n'est autre chose que la paraphrase. Ce chapitre finit par des réflexions sur la terminaison des phrases relativement aux idées qui les composent, sur la manière de moraliser, et sur la cheville... Dans le troisième chapitre je fais connaître les figures les plus usitées en poésie; la métaphore, l'apostrophe, la répétition, la comparaison et l'antithèse. La cadence est l'objet du troisième livre. Après des notions préliminaires sur ce qui constitue la cadence en général, j'explique, conformément à la division de Rollin, ce qu'on entend par cadence suspendue, cadence coupée; en quoi l'élision contribue à la cadence ; quelles sont les cadences propres à peindre différens objets; comment on doit placer certains mots pour leur donner plus de force ou plus de grâce; enfin, jusqu'à quel point on peut enfreindre les règles de la versification quant à la cadence. Dans ce livre et le précédent j'ai été sévère sur le choix des exemples: et par cette raison, j'espère qu'on me pardonnera de les at oir multipliés. Pour faire variété, j'en ai pris assez souvent dans nos poëtes français; mais le plus grand nombre appartient à Virgile, et j'ose as |