Page images
PDF
EPUB

auelles il doit fe déterminer, s'il veut réuffir das la carriere dramatique oul, s'il fe rebute de tante tracafferies, il brife fa plume & ne fait plus rien."

Tel eft core le régime intérieur des fpectacles, régne que nous n'avons fait qu'efquiffer rapidement. Nous afons affurer que l'arbitraire le plus décourageant, que le defpotif me le plus ccablant y regnent d'une maniere tout auffi tylonique que du tems des gentilshommes de la ambre. Comment détruite ces abus monftrueux Quel régime peut-on fubf tituer à celui-ci qui foit plus digne de la liberté des arts & l'encouragement des artif test C'est ce que us laifons à méditer à nos lecteurs. S'ils on de bonnes idées à nous propofer, nous les rec & nous en regarderons la publicité comme un eillerons avec plaifir devoir, comme un fervice rendre aux mufes & à la fociété. En attendan vons que nous écrier jeunes,, uteurs! vous, qui faites le premier pas dans barriere drama tique, préparez vous à une spatiesce a toure épreuve: fongez bien qu'il eft plu, difficile de faire jouer une piece que de la connofers mais, en même tems, ne vous décougez point; déjouez les cabales de couliffes par ne noble fermeté; appellez-en, s'il le faut, a tribunal de l'opinion publique proficez, en un mot, pour régler votre conduite, du ta bleau que nous venons de vous tracer.o

nous ne pou

Et vous, adminiftrateurs, directeurs, ac.

examinateurs, régiffeurs, fouffleurs, &c. des théâtres de Paris! lifez ce même tableau avec da plus grande attention; rougiffez du peu de refpect que vous avez pour l'homme de génie qui fe préfente timidement devant yous! Votre devoir eft de l'écouter, de l'encourager, de le ménager, de le refufer. - TUXLV

[ocr errors]

avec douceur fi fon ouvrage ne vous plaît point, ou de lui applanir toutes les difficul. és, fi vous comptez fur fes fuccès. Songez que vous n'êtes rien fans lui, & que ce n'eft que pour lui, & par lui, que vous pouvez exifter.

DISCOURS. Combien il feroit effentiel, pour la gloire des lettres frarifes, de ranimer le goût de l'antiquité.

S

'IL eft vrai qu'il n'y a ni légiflation, ni politique fans lumieres que ceux qui éclairent leurs femblables font les bienfaiteurs des rois comme des peuples, que l'autorité de ceux qui commandent n'eft jamais plus forte que lorfqu'elle eft unie à l'autorité de ceux qui penfent, que le défaut de lumieres en obfcurciffant tout a quelques fois rendu tous les droits douteux & même les plus facrés, qu'un peuple ignorant devient néceffairement un peuple vil & fans reffort, deftiné à être la proie du premier qui daignera le vaincre, ou un peuple inquiet, & d'une activité féroce, que tous les princes qui ont obtenu l'eftime de leur fiecle & les regards de la postérité, depuis Alexandre jufqu'à Charlemagne, depuis Augufte jufqu'à Tamerlan né Tartare & fondateur d'une académie à Samar cande, tous dédaignant une gloire diftribuée par des efclaves abrutis, ont voulu avoir pour témoins de leurs actions des hommes de génie & relever partout la fplendeur du trône par celle des arts, s'il eft vrai, en général, que Jes lettres douces & bienfaifantes chaffent la barbarie, poliffent les mœurs, uniffent les hommes entr'eux en rapprochant & confon

dant leurs intérêts, fervent de liens aux na tions même les plus ennemies, montrent les abus politiques en indiquant les remedes, écartent les vices, établiffent le regne des ver. rus; s'il eft vrai que la France leur doit prefque toute fa renommée, quel concours de motifs puiffans pour les protéger? Peuples & rois, rappellez vous que nos écoles font la pépiniere de l'état,

Mais fi c'eft en fe formant fur les anciens que nos peres ont appris à écrire dans leur propre langue; fi c'eft en lifant les anciens qu'on apprécie mieux les bons modeles qui leur reffemblent, fi c'est avec eux que le jugement s'épure, que l'ame s'éleve & fe fortifie, que le fentiment du beau & l'amour du vrai s'accroiffent & s'affermiffent; fi aveć eux on fe confofe des progrès de la corruption, des noirceurs de la calomnie, des outrages de la haine & des perfécutions de la médiocrité; fi les anciens font dans la littérature ce que font les vétérans dans les armées des hommes éprouvés auxquels, fur la foi de leur gloire, on peut fe confier, & par lesquels on peut fe laiffer conduire, ahl réfufcitons les, évoquons leurs manes, faifons revivre la fimplicité de ces perfonnages antiques, qui parlent de la vertu comme s'ils étoient infpirés par elle: imitons le petit nombre des amateurs éclairés, qui fatigués des productions éphémeres de nos auteurs à la mode, alimentent par d'utiles travaux & des veilles favantes le feu pur & facré dont brillerent Athênes & Rome. Laiffons dire à l'impertinente fatuité: pourquoi étudier tous ces vieux écrivains qui font maintenant des barbares? Pourquoi le confumer pendant des années entieres fur des langues qu'on ne Parle plus? Trouve-t-on dans Virgile, ou

en

dans Cicéron un feul compliment à faire à nos Afpafies? Qu'ils foient d'excellens modeles pour penfer fagement, à la bonne heure. Mais quand on les fauroit par cœur, fauroit on mieux fe pré enter & donner la main avec plus de grace. Ce font là de trop fortes raifons pour entreprendre de les combattre.

Mais, ajoutera-t on, pourquoi glaner fur les pas des anciens " lorfque la plus abondanie moiffon comble nos voeux. Oferois je hafarder une comparaison pour réfuter cette frivole obfervation? Je me figure d'un côté un jeune homme aimable & brillant, ferré dans des parures étroites & mefquines que nous croyons élégantes & qui défolent nos peintres, lorsqu'il faut les mettre fur la toile, les traits fins les yeux vifs, la contenance légere & de l'autre côté un homme mur à moitié nud recouvert d'une draperie ondoyante, la phyfionomie noble & ouverte, le front élevé, des membres robuftes, un air d'infpiration dans les regards, des muscles prononcés enfin un ensemble qui attache & qui plaft davantage à mesure qu'on le confidere, voilà les modernes & les anciens. Je vois ici mes obferva teurs me livrer un nouvel affaut. Mais les diverfes langues de l'Europe ne méritent elles pas la préférence? Les Anglois, les Allemands, les Italiens, les Elpagnols nous environnent de toutes parts; nous entretenons avec eux un commerce presqu'habituel. L'étude de leurs idiômes ne feroit-elle pas plus utile que celle de la langue de deux nations qui ont difparu de deffus la furface de la terre! La difficulté eft fpécieuse, j'en conviens. Voici ma folution. Ceux qui la répétent oublient fans doute quel est le véritable objet de l'éduration. Ce n'est ni pour la commodité des

*

marchands & des voyageurs, ni pour faciliter nos liaisons avec les états voifins que les écoles publiques font ouvertes; c'eft pour former l'efprit & le cœur de nos éleves c'est pour les fixer fur le fpectacle le plus propre à nourrir leur ame, à leur inspirer de grandes penfées & des fentimens nobles; c'est pour diriger leur goû, pour leur donner des idées vraies fur les chofes les plus importantes à l'humanité & à la fociété. Que les habitans de l'Europe moderne font petits auprès des Grecs & des Romains.

A quoi fervent le grec & le farin? Queftion faftidieufe à laquelle je répondrai pour la derniere fois, en établiffant trois vérités deng ce difcours fera le développement. Tant que les ouvrages des anciens furent ignorés parmi nous, la nuit épaiffe de la barbarie regna fur la France. Le fiecle de Louis XIV a été le fiecle des arts par excellence, parceque nos orateurs & nos pcëtes étudioient les anciens. Depuis qu'on ne les lit plus, la littérature languit & tombe parmi nous. Je puis donc conclure: il feroit effentiel pour la gloire des lettres Françoifes de ranimer le goût de l'antiquité.

A l'égard des jugemens que nous allons porter, fi quelques-uns pouvoient déplaire, nous ne dirons qu'un mot : nous croyons avoir été justes. Mais ne resterai-je pas plutôt au deffous de la réalité, en difant d'Ho mere: fa fupériorité eft tellement reconnue qu'on n'eft pas plus jaloux de lui que du lefiol qui nous éclaire: d'Efchyle: il a conçu d'auffi grandes idées qu'on faifoit alors de grandes chofes peignons le comme il a peint le hé ros Hyppomédon: L'épouvante marcke devant lui, la tête élevée jufqu'aux cieux de Sophocle: c'est le génie le plus dramatique de l'an

« PreviousContinue »