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Feur propre bonheur, a fait fr fouvent le malheur des peuples.

« Sre, l'idée de l'abolition de la royauté n'eft allarmante pour la plupart des rois, que parce qu'ils s'aveuglent fur fes inconvéniens défaftreux pour eux mêmes, & fur la fatalité de leur existence. Quel eft le fort de la plupart des rois? Is font condamnés par leur haiffance & leur fuprématie fantastique, à une efpece d'enfance perpétuelle; à ne goûter jamais les douceurs de l'amitié; à ne connoître jamais la vérité; à être les jouets perpétuels de l'ignorance, de l'erreur, de l'adulation, de la fourberie, de l'impofture, de l'ambition, & de la cupidité de tous ceux qui les entourent: ils ont toujours les mains liées pour faire le bien de leurs peuples; ils ne font jamais libres que de faire le mal. Leur invio. labilité les rend odieux, en laiffant impunis tous les crimes qui le commettent en leurs noms; des millions d'hommes font les victi~ mes innocentes de l'orgueil, de l'ambition de la voracité d'une poignée de princes, de courtisans, & de miniftres. Le manteau royal ne couvre gueres que des automates qui n'af fiftent à leurs confeils, que pour y figner aveuglément tout ce qu'on leur préfente, & qui ne s'affeoient fur le trône que pour y faire quelques geftes & répéter quelques phrafes: préparées ».

« Ces phantômes de la royauté n'en font aucune fonction. Ils perdent le tems en déFauches & en frivolités. Ils ne font rois qu'en titre & pour la forme feulement. Enfin ils ae font réellement que les prête-noms & les efclaves de leurs courtifans & de leurs miniftres, jufqu'au moment où la haine des geuples, exaltée par l'excès de leur mifere, resraffe le tyran qui a fanétionné toutes les

caufes de leur défefpoir. Avouez, Sire, que ce tableau de la royauté eft d'une vérité affreufe.».

<< Il est donc exactement vrai que les rois ne perdroient par l'abolition de la royauté, fans effufion de fang, qu'un titre vain & onereux pour eux mêmes, & que cette fuppref fion ne feroit funefte que pour les courtisans & les miniftres qui perdroient tous les moyens qu'ils ont accumulés dans leurs mains pour dominer, pour piller, & pour s'enrichir. St quelques rois, en fe flattant préfomptueusement & vainement de rompre les chaines dont la royauté eft furchargée, s'intéreffoient encore à fa confervation, ce ne feroit certainement qu'à condition qu'elle refteroit revêtue du pouvoir ablolu de donner leurs volontés pour des loix, de ne mettre aucune borne à leurs defirs, à leurs dépenfes, de n'eprouver aucune résistance, de n'avoir aucun compte à rendre, & qu'avec le droit de laiffer cet injufte & funefte pouvoir à leur postérité. Mais fi les peuples, éclairés enfin fur leurs droits fur leurs forces, & depuis fi longtems victimes du defpotifme, les repouffent dans le néant, s'ils veulent que les chefs de leur gouvernement ne foient que des régiffeurs éclairés, laborieux, honnêtes, électifs, amovibles & refponfables, que feront les defpotes? Je le répete: C'est l'imprudent effai de l'Ultims ratio regum contre la liberté de la Nation Françoife, qui a brifé le fceptre de cette monarchie; & la même caufe pourra produire ailleurs les mêmes effets ».

On peut juger, par ces deux citations prifes au hazard, combien cet ouvrage eft riche en vérités effentielles au bonheur de l'homme, & en principes conformes à la

nouvelle politique de la République Fran çoise.

Enfin ces lettres font une légere efquiffe des vaftes connoiffances d'un véritable ami des hommes, qui, après avoir voyagé avec une bonne vue dans toutes les Cours de l'Europe, & après y avoir étudié les hom mes & les chofes, s'eft déclaré l'ennemi du defpotifme, & n'a pas ceffé depuis 20 ans de lui faire la guerre par fes écrits. Cette guerre & furtout le généreux dévouement de Gorani à la Nation Françoise, lui ont occafionné des perfécutions dans la patrie. On peut s'en inftruire dans la préface des Recherches de ce philofophe Jur la fcience du gouvernement. Bientôt il multipliera les preuves de fon favoir en publiant fes Tableaux hiftoriques & critiques des principaux gouvernemens de l'Italie. Cet ouvrage eft fous preffe.

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J. Gorani étoit mur pour la Révolution Françoile. Dès qu'il connut notre déclaration des droits, il accourut pour nous ai der à en faire la conquête. La patrie, reconnoiffante des facrifices qu'il nous a faits & des fervices qu'il nous a rendus, l'a reçu citoyen François, avec les hommes les plus célebres de l'Europe, par leurs lumieres & leur philantropie. Depuis ce moment, il -n'a pas ceffé de nous rendre aux rifques de fa vie, ou du moins de fa liberté, d'importans fervices, qui feront publiés auffitôt que la prudence le permettra.

Confeffion d'Eléonore de Guyenne, femme de Henri II, roi d'Angleterre. Imitation d'une ancienne ballade angloife. Par A. Labaume,

ELéonore au lit gifante:,

Voulant finir les jours en paix,
Fit chercher deux moines François
A qui, d'une voix repentante,
Elle pût faire en fûreté

L'aveu de fon iniquité..

Inftruit de fa pieuse envie
Le roi dit au lord maréchal
Endoffons l'habit monacal 2
Et nous faurons toute fa vie.
Le lord que cette offre étourdit
A deux genoux lui répondit :

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Ah! moult je crains, mon noble fire',
Qu'il n'en advienne grand méchef.
N'appréhendez rien de mon chef;.

-

Quoique las reine puiffe dire

Je m'engage ici par ferment
A n'en tirer nul châtiment.

La reine, en les voyant paroître,
Leur demande êtes-vous François ?
Si d'aventure êtes Anglois,

:

Pendus ferez fous ma fenêtre.

Nous fommes François tous les deux,

Arrivés d'hier en ces lieux.

Trois ans & plus de ma perfonne
Le lord maréchal difpofa.

C'est un grand pêché que cela,
Dit le roi. Que Dieu vous pardonne !!

Amen, Amen, cria le lord,
A qui le pouls battoit bien fort.
-Henri m'étoit infupportable;
J'effayai de l'empoifonner.
Dieu veuille auffi vous pardonner
Dit le roi ce crime exécrable!
Ainfi-foit-il, répond te lord,
Et tout bas il maudit fon fort..

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La belle & tendre Rofamonde:
Vivoit heureuse par l'amour;.
Je pénétrai dans fon féjour
Et ma rage en priva le monde.
Dieu fait grace au cœur repentant
Dit le monarque en fangloitant.

Voyez-vous, dans cette autre falles, Deux enfans livrés à leurs jeux ? Ils font à moi.. Celui des deux Qui vient de renvoyer la balle Doit la vie au lord mon amant; Auffi je l'aime tendrement.

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De mon mari l'autre eft l'ouvrage;
Je ne puis le voir fans horreur :
Il n'a point d'égal en laideur.
Soit. Je l'en aime davantage,
Dit le roi d'un ton furieux,
En fe découvranr à fes yeux.

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Quoi ! fire !.. Ah! Dieu !.. je fuis trahie: Dieu! quel ftratagême infernal !.

Paix, monftre ! & vous, lord maréchal

Vil complice d'une furie,

Si ce n'étoit de mon ferment
Je vous ferois pendre à l'inftant

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