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refuler un culte, dont les livres font pleins de venin & de fiel & qui par le nombre de leurs profelites influençent l'opinion & les mœurs.

venons

Il feroit à defirer que tous les chefs de la Révolution Françoife, euffent les principes de l'ouvrage que nous d'examiner. La morale eut toujours été refpectée. Le roman d'Alcibiade à l'avantage de pouvoir être recommandé à toutes les claffes de lecteurs. Les femmes y trouveront de quoi nourrir leur fenfibilité, les jeunes citoyens des exemples de patriotisme, les guerriers des leçons de courage. Dans un roman, point de milieu entre le bien & le mal, ou fon but eft moral & alors il devient utile, ou fes maximes font épicuriennes, & alors il faut le rejetter comme un aliment qui cache un poifon dangereux. Rouffeau avoit raifon de dire qu'il ne devroit être permis qu'aux ames honnêtes mais fenfibles, qu'aux perfonnes dont le cœur puiffe, fans honte, fe peindre dans leurs écrits, de fe livrer à la compofition de ces fortes d'ouvrages. Malheureusement pour les mœurs & le goût, fon précepte n'a pas été fuivi. Beaucoup de gens fe. croyent en état de faire des romans, parce qu'ils croyent que leur principal mérite confifte à épuifer toutes les fubtilités de l'amour. Auffi eft-il peu de ces livres qui ne provoquent l'ennui par leur ton infipide,

neur,

su qui ne révoltent par leurs obfcénités. Ce font pour la plupart, des avantures galantes, entaffées fans efprit, des écoles pernicieufes, ou l'on s'inftruit dans l'art de fouler aux pieds toutes les regles de l'honmais finiffons là ces réflexions trop vraies elles ne doivent point être mêlées au tribut de louanges que la juftice nous commande de payer à l'auteur d'Alcibiade. Son livre n'eft point; à proprement parler, un roman. Tout le merveilleux du caractere principal eft l'hiftoire fans altération : & il me paroît que dans les inftans où les traits de caractere manquent, l'importance des événemens & l'agrément des épisodes foutiennent affez bien l'intérêt. Il faut un grand mérite, pour avoir mis chaque perfonnage dans fon attitude naturelle pour avoir placé, comme dans un tableau mouvant, fous les yeux du lecteur, tous les faits célebres qui illuftrerent la longue carriere de fon héros en y affociant Athênes & fes plus fameux citoyens. L'exécution de l'ouvrage eft eftimable, en général le ftile eft excellent. Point de jargon à la mode. Excepté quelques endroits foibles, il est toujours à la même hauteur. Et M. N***. doit être compté au rang de nos bons écrivains.

Il n'eft gueres poffible de penfer à Alcibiade, fans rencontrer le nom de ce defcendant d'un cardinal-miniftre dont la

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de

gloire eft aujourd'hui réduite à fi peu choles. Comme Alcibiade Richelieu avoit reçu de la nature les graces de la figure, les talens de l'efprit, une éloquence preftigieufe, l'art de la féduction & des conquêtes. Comme Alcibiade, il fe jetta de bonne heure dans la carriere de la galanterie & y remporta des prix dont le nombre & la qualité prouvent que la cour & la ville, à cette époque, ne faifoient pas beaucoup de cas de la décence & des mœurs. Comme Alcibiade, la trompette de la gloire l'éveille au fein des plaifirs, il vole au champ de l'honneur, la victoire l'accompagne & la beauté le couronne. Comme Alcibiade, il fut habile à tromper, peu délicat dans le choix de moyens, il infultoit à la pudeur, à la foibleffe & à la vertu. Comme Alcibiade, il chercha à couvrir la vie privée par des actions d'éclat, on cite de lui quelques traits de bienfaisance qui l'honorent. Mais toujours faudra-t-il qu'on dife, après avoir lu l'auteur d'Alcibiade, cet Alcibiade étoit en vérité un homme charmant & un grand homme: aulieu qu'après avoir lu les mémoires de Richelieu, on eft forcé de dire ce Richelieu fut heureux & comblé d'honneurs, mais a-t-il des droits à l'eftime de la postérité ?

ENIGME.

JE fuis au bal masqué dès que le jour com

mence,

Mais auquel on ne danfe pas;

Et c'eft la feule différence

Qu'entre moi j'apperçois, & ceux du mardi gras.

Je n'en fuis pas moins d'importance;
Car auffi-tôt que je parois

Le monde en ma faveur prodigue fes richeffes,
Ses complimens & fes carefies,

Enfin je marche avant tous les faints & les rois.

JE

LOGO GRYP HE.

A Madame ***

E fuis battu par deux femelles : De mes fept pieds mettez-en deux à bas Et je ferai ce dieu qui ne porte des alles. Que pour voltiger fur vos pas.

Le mot de l'Enigme & du Logogriphe au No. prochain.

Vers à FLORIAN.

LE prête de la nature,

Lafontaine, en eut les couleurs
La peignit fimple & fans parure,
Belle fans art, fans impoffure,

No. X. Tom. III. 10 Avril 1793. L

Sans autres ornemens que fes fruits & fes fleurs. · Ce favori de tous les âges,

Qui, par le charme de les vers
Sut, en fes immortels ouvrages,
Des animaux faire des fages,

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Et mieux qu'Efope encore éclaira l'univers :
Dans vos ingénieufes fables

Je le retrouve tout entier ;
Je revois les graces aimables
Ses traits naïfs, inimitables,

Et reconnoîs enfin fon heureux héritier.

Traducion libre de la fixieme Elégie du rer. livre de Tibulle. Par CLOTTEREAU.

Sæpe ego tentavi, &c.

J'AI fouvent effayé de noyer mon chagrin

Dans les flots bienfaisans de ton nectar divin, O Bacchus! mais l'amour & les fombres alar

mes

Corrompoient fa douceur & le changeoient en

larmes.

Auprès de vingt beautés, faciles à mes vœux Je cherchai le bonheur, & ne fut point heu

reux :

Emma, dans ces inftans, plus belle, plus ché

rie,

Occupoit ma pensée & mon ame attendrie;
Et ces vaines beautés dont je parus épris,
De cent propos moqueurs aiguilant leurs récits,
Font retomber fur moi le poids de leur colere.
Je ne redoute point leur ironie amere.
Je crains bien plus, Emma, tes regards fédui-
fans,

Et l'or de tes cheveux abandonnés aux vents.
Ceft ainfi que Thétis, à l'hymen appellée,

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