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parvenus à nous rendre nous-mêmes intel-i ligibles pour tous nos lecteurs. Qu'ils en accufent en partie la nature abftraite du fujet, & en partie la néceffité où nous avons été de fupprimer des difcuffions, des expli cations qu'il nous étoit impoffible de rapporter fans transcrire prefque tout cet opufcule. Nous aurons beaucoup fait, fi nous avons infpiré aux métaphyficiens le defir d'approfondir les doctrines qui y font établies, & fi nous avons pu convaincre nos autres lecteurs que Spinofa, fi cruellement déchiré, fi injuftement calomnié, n'a pas plus mérité que Socrate le jugement qui a été porté contre lui.

Gefchiedenis der colonie von Surinam &c. C'eft-à-dire, Hiftoire de la colonie de Surinam. Par une fociété littéraire de Juifs Portugais, qui y réfident. In-8°. de 360 pages. A Amfterdam. 1791.

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Es Juifs s'adonnent rarement aux tra vaux littéraires. L'oppreffion où ils gémiffent depuis tant de fiecles fur toute la furface du globe, ne leur laiffe gueres que le tems de pourvoir par le commerce à leur propre fubfiftance; & l'on fçait avec quet fuccès, quelle conduite, quelle économie ils trafiquent dans les places où ils

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jouiffent de quelque tranquillité. La République Françoife leur a ouvert une nouvelle carriere, où, traités à tous égards comme le refte des citoyens › comme les membres d'un Peuple libre, ils pourront donner un grand effor à leur industrie & à leurs talens commerciaux. Cependant, dans l'état d'abjection & de mépris où ils vivent prefque partout ailleurs, la lumiere a pénétré jufqu'à eux; ils ont donné des preuves qu'ils font auffi propres à la culture des lettres qu'aux fpéculations du négoce. Il exifte d'excellentes productions forties de deur plume.. On connoît les lettres de quelques Juifs Portugais pour venger l'Ancien Teftament de l'incrédulité la défenfe de l'immortalité de l'ame rhétorique de Mendelshon; en médecine, les favans écrits de Marc, Harz, &c. &c. Celui que nous annonçons nous vient d'outre-mer. On nous apprend que l'idée en a été fuggérée par un Effai fur l'amélioration politique & civile des Juifs, publiée en 178 par C. G. Dohm, fecrétaire-privé du feu roi de Pruffe.

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Cette hiftoire eft divifée en deux parties. La premiere, qui remplic prefque tout le volume, eft un récit hiftorique de la colonie. Mais le principal objet des auteurs eft de faire voir l'origine & l'étendue des privileges, dont les Juifs ont joui depuis l'établissement de la colonic, de juftifier

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leur conduite comme bons & utiles citoyens; de prouver que la décadence de la colonie en général & de leur propre fociété en particulier, ne peut être attribuée à aucune inconduite de leur part, mais doit être rapportée aux infortunes communes, à tous les habitans, & qu'ils ne peuvent détourner faute de force & de crédit.

Il paroît qu'en 1609, David Naffy; Juif Portugais, & natif du Bréfil, obtint de la compagnie hollandoife des Indes Occidentales la permiffion de former une colonie dans l'ifle de Cayenne, où, lui & fes compatriotes qui l'accompagnoient devoient jouir de tous les privileges religieux & civils, à condition d'en faire jouir tous ceux qui voudroient s'y établir avec eux. Les François firent la conquête de cette ille en 1664. Naffy & fes compagnons fe retirerent à Surinam, qui appartenoit alors aux Anglois, & qui non-feulement leur permirent le libre exercice de leur refigion, leur accorderent tous les droits civils, toutes les immunités que la nature de leurs loix rendoit néceflaires, mais encore le privilege d'ériger une Cour de judicature où leurs régens jugeroient toutes les caufes civiles au-deffous d'une certaine fomme entre les individus de leur com- · munauté. Tous ces privileges furent enfuite confirmés par les Hollandois, quand ls prirent poffeffion de cet établiffement A. IX. Tom. III. 30 Mars 1793. B

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en 1667. Ainfi affurés de la jouiffance de leur liberté, à laquelle tous les hommes, quelque foit leur religion, ont un droit inconteftable, is devinrent bientôt une colonie nombreuse & floriffante, compofée, en 1689, de plus de 500 perfonnes: 40 plantations & 9 mille efclaves étoient des propriétés qui promettoient d'heureux accroiflemens à cette communauté. Si l'on peut s'en rapporter à cette hiftoire, elle n'avoit dans fon fein que des citoyens utiles, toujours prêts à faire tout ce qui pouvoit tendre au bien commun & qui fouvent ont porté plus que leur part dans les charges publiques. Mais ils le plaignent d'avoir été pius fouvent encore traité d'une maniere injufte & oppreffive par des gouverneurs tyranniques & arbitraires, ainfi que par la ja'oufie de quelques colons. Malgré ces défagrémens, malgré des malheurs, des infortunes qu'ils effuyerent en commun avec les autres habitans de l'établiflement., ils firent des fortunes confidérables, & en 1760 les divers individus de cette communauté juive étoient en poffeflion de 115 plantations de cannes à fucre.

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Le grand obftacle à la profpérité de Surinam, c'eft que fes habitans font exposés aux invafions & aux déprédations des Marrons, ou Negres, qui ont formé plufieurs corps dans les parties les plus inacceffibles des bois & des montagnes, & qui font les

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ennemis les plus implacables & les plus cruels des planteurs, Je le crois bien; ces planteurs les traitoient avec une féroce inhumanité, les écrafoient de travail, les déchiroient à coups de fouets, les affommoient fous le bâton, & on voudroit qu'ils n'en euffent point de reffentiment, qu'ils bailaffent la main de leurs bourreaux ! C'eft contre ces malheureux que la milice juive s'eft fouvent fignalée & a été d'une grande utilité à la colonie. On rend ici un compte détaillé de plufieurs expéditions qui font beaucoup d'honneur au courage & à la conduite de cette troupe. Cependant, malgré les fuccès, on n'a pas pu prévenir de nouvelles incurfions de la part des Marrons, qui augmentent continuellement en nombre par les infurrections. & les défertions des Negres des plantations qu'ils féduifent & invitent à les joindre. En 1759, ces fugitifs montoient à 20 mille, & vers ce tems, on conclut un traité de paix avec eux. En 1774, on fit une ligne de défense autour de la colonie avec des poftes de troupes répartis convenablement. Au lieu de les traquer ainfi, comme des bêtes féroces, pourquoi pendant la paix ne leur a-t-on pas donné des terreins à cultiver pour leur fubfiftance, les inftrumens néceffaires, avec l'afurance de n'être point troublés dans leurs travaux? On en auroit fait des citoyens, on les auroit lié à la

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