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trait des affaires, le luxe corrupteur, l'ambition des conquêtes qui, en étendant les empires, atténue leur force, les divifions dont le peuple eft toujours la victime, & que forts de leur union, ils défendront cette conftitution contre toutes les attaques dont elle eft menacée.

Quoique cet ouvrage n'annonce pas une philofophie bien fûre & des méditations très-profondes, il eft utile par le rapprochement de l'hiftoire des différentes républiques. Tous ceux qui s'occupent en France de la légiflation, s'emprefferont fans doute de fe le procurer: il offre des fujets de réflexion. Il eft fâcheux que le traducteur ne nous apprenne point le nom de l'auteur de l'ouvrage & l'époque à laquelle il a été compofé.

Cette hiftoire n'empêche pas qu'on n'attende avec impatience l'Effai fur les anciennes républiques par Pierre Chauffart.

Philofophiska, hiftoriska och politiska réfléxione &c. C'est-à-dire. Réfléxions philofophiques, hiftoriques & politiques préfentées à un jeune prince lors de fon avénement au tróne. In-8°. A Stockholm chez Zetterberg 1791.

N trouve ici d'excellens confeils aux rois qu'ils ne liront pas, qu'on écar

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tera d'eux avec grand foin, parce que les rois n'en prennent que de leurs paffions, on de leurs courtifans toujours intereffés à fervir deur orgueil, à les tromper. Mais fi les rois ne lifent pas, les peuples lifent, & leur montrer ce que leurs premiers, magiftrats devroient faire, ce qu'ils ne font pas, ce qu'il leur eft impoffible de faire, c'eft leur apprendre à ne point compter fur eux, à fécouer le joug d'une domination qui peut tout pour les écrafer & rien pour leur bonheur. Donnons un apperçu des divers chapitres qui compofent cette ouvrage & qui nous mettra à même de développer ces idées.

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Chapitre I. Un monarque avancé en âge & tres refpecté s'adreffe à un des grands de fa cour qu'il croit lui être le plus attaché & le conjure au nom du bonheur de l'Etat & du peuple, d'exécuter fes dernieres volontés. Il lui fait enfuite l'aveu de fon extrême tendreffe pour fon fils, & malgré Lon affection, il prononce généreusement le vou que fon fils n'atteigne jamais l'âge mûr, la cruauté, devoit monter fur le trône avec lui, & s'il devoit fouler aux pieds les mœurs & la vertu. Il ordonne donc à fon fidele lord de chercher un pays où l'humanité ne foit pas fouillée par les vices, ni dégradée par l'esclavage, afin d'y apprendre parfaitement l'art de régner, & les vraies vertus civiles pour les enfeigner

à fon héritier. Differtation du roi fur le vrai & le faux honneur, fur le tombeau où les potentats & les mendians, les tyrans & les efclaves font égaux & expofés an même fort. I obferve que la poftérité n'a nulle confidération pour les rangs, qu'elle ne fait acception de perfonne & qu'elle juge avec une égale févérité les grands & les petits. C'eft ce qui défole les rois. Un tribunal qui fans égard pour leur majeftě aura l'audace de les péfer dans la même balance que le berger', que cette foule d'individus qu'ils écrafoient fous leurs pieds comme de vils infectes. Quelle indignité! Ils n'auront plus de miniftres qui faffent retentir leur nom d'un bout de la terre à l'autre de la gloire de maffacrer les hommes, de les enfevelir dans des fleuves de fang & dans des monceaux de ''cendres. Qu'ils fe confolent du moins à ce dernier égard. Leurs fucceffeurs ne les imiteront que trop fidellement. Ils ne manqueront pas plus qu'eux de faire le malheur du monde. Mais revenons à notre auteur, ou plutôt au prince qui parle en fon nom. Il ordonne à fon miniftre d'inculquer les vérités qu'il vient d'expofer & plufieurs autres à fon jeune fucceffeur, parce que, dit-il, il fent bien qu'il n'a plus guetes de tems à vivre & que cependant il défireroit pouvoir emporter avec lui au tombeau l'efpérance d'avoir af furé, autant qu'il étoit en lui, le bonheur de

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fon fils & de fon peuple : voilà un fentiment bien louable mais qui eft venu un peu tard. L'ordre qu'il a donné à fon miniftre de chercher un pays où l'humanité brille de tout fon éclat, n'étoit pas facile à remplir. Avant de découvrir un tel pays, il a du en visiter beaucoup d'autres où l'humanité étoit gémiffante ou exilée. Mais un roi n'y prend pas garde de fi près, la fphere de fes réfléxions ne s'étend pas fi loin; il veut & cela doit fuffire.

Chapitre II. Le grand feigneur chargé de cette commiffion eft de retour de fes excurfions, au moment que le jeune prince vient de monter fur le trône. Il lui rend

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compte des ordres que fon pere lui a donnés, & du ferment qu'il lui a prêté. Il protefte que ni l'espoir des récompenfes, ni la crainte des punitions, ni l'ambition, ni la partialité ne l'empêcheront pas de lui dire la vérité & d'être fidele à des engagemens facrés. Il rapporte qu'il a vu un peuple qui en a conquis un autre & en a été vaincu à fon tour; que ce dernier par désespoir a fecoué les chaînes qui le tenoient en efclavage, tandis que l'autre plongé dans la molleffe les a reçues volontairement & patiemment; que rarement la vertu & souvent la dureté ont gouverné ceux qui devoient gouverner avec fageffe & douceur; que la fureur des paffions fait plus de ravages dans le monde politique que les trem

blemens de terre n'en caufent dans le monde phy, fique; que les monarchies & leur durée le font fuccédées tour à-tour &c. If obferve enfuite que la connoiffance des hommes eft néceffaire aux princes qui doivent régner fur des hommes; que quoique leur vie foit marquée tantôt par des actions nobles, tantôt par des cruautés ; qu'ils s'élevent ou s'abaiffent, adorent un être fuprême, ou en nient l'existence, ils n'en font pas moins tous de même nature; que leur ame a les mêmes fentimens & les mêmes defirs; que la diverfité des climats, des religions, des formes de gouvernement changent leur fisuation & non pas leur nature; que le defir de la liberté & du bonheur ne fe perdent qu'avec la vie; que le citoyen rifque tout pour la liberté & pour la patrie; que cet elclave n'a que fes chaînes, qui dans un moment fe jette baffement aux pieds du même tyran, que plein de rage dans un autre il facrifie à fa fureur & à fa vengeance.

Dans le 3e. chapitre, confacré aux causes. des changemens de formes des gouvernemens, l'anonyme prouve par l'histoire ancienne que la dureté jointe aux abus des loix & de la liberté dans les adminiftrateurs, ainfi que la haine & le défefpoir des adminiftrés ont renverfé les plus puiffans empires; que l'Egypte a gémi plufieurs fiecles fous le joug; que les meilleures têtes,

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