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Banque royale serait dorénavant et depuis ce jour réunie à la Compagnie des Indes, et que le Roi continuerait de l'honorer de sa protection;

2° Que le Roi ayant résolu de remettre à la Compagnie la valeur de cinquante millions d'actions, la Compagnie s'obligerait de donner à Sa Majesté un équivalent de trois cents millions, savoir cent millions dans le courant de cette année, et le surplus en cinq ans ;

:

3o Que la Compagnie ne se mêlerait plus de commercer ni de vendre aucune action, soumission, souscription, ni aucune prime; mais que ce négoce se ferait en liberté dorénavant sur la place;

4° Que tous les billets de banque de dix livres chacun seraient retirés et remboursés incessamment par la Compagnie aux porteurs en entier, pour être ensuite anéantis, et qu'il ne resterait plus entre les mains du public que les billets de la valeur de cent livres, de mille livres et de dix mille livres qui se payeraient dorénavant aux porteurs, sans en exiger le cinquième pour cent et en espèces courantes; il fut aussi résolu de recevoir et d'admettre quelques nouveaux directeurs et quelques nouveaux caissiers à la place de quelques autres qui furent renvoyés et congédiés pour leurs malversations manifestes, et pour la trop grande avidité qu'ils avaient de s'enrichir en peu de temps; le sieur Perrinet, ci-devant fermier général, fut du nombre des directeurs que la Compagnie des Indes renvoya.

Le jour de cette assemblée, une compagnie de soixante soldats, choisis de l'hôtel royal des Invalides, avec leurs officiers et sergents, nouvellement vêtus de drap bleu, avec un large bord d'argent à leur chapeau, un ceinturon et une bandoulière de buffle bordés d'argent, commença à entrer en faction dans la Banque pour y veiller jour et nuit; laquelle compagnie devait être relevée de jour en jour par une autre de pareil nombre des mêmes soldats; auxquels la Compagnie des Indes devait donner

trente livres par mois à chaque soldat et aux officiers une plus forte paye.

On jugea à propos de se servir plutôt des invalides que des soldats du régiment des gardes qui y étaient auparavant postés à la porte et dans les bureaux, parce qu'on en surprit quelques-uns qui faisaient le métier de filous, en escamotant des billets de banque et de l'argent que des particuliers y portaient pour avoir de ces sortes de billets ou qui allaient recevoir la valeur de ceux qu'ils avaient.

-La Compagnie des Indes trouva le moyen d'engager huit cents familles de jeunes gens robustes en Suisse, en Allemagne et en Italie, pour aller s'établir au Mississipi, et qui devaient s'embarquer en Provence; elle leur avait fait des avances considérables. Lorsqu'ils seraient arrivés dans cette colonie, on devait distribuer à chaque famille la quantité de deux cent vingt-quatre arpents de terre à défricher et à mettre en valeur, avec tous les outils et autres choses nécessaires pour leur entretien et pour leur travail pendant la première année, afin qu'ils pussent mettre ces terres en état de rapporter des grains et autres fruits dont ils devaient jouir les trois années suivantes avec une entière franchise, après lequel temps ils devaient être obligés de payer la dixième partie du revenu de ces terres au seigneur du fief, dont la maison devait être bâtie au milieu de leurs habitations. Chaque village devait être composé d'abord de vingt de ces familles, qui, par conséquent, devaient former le nombre de quarante villages qui devaient être seulement à une lieue de distance les uns des autres.

On y envoya aussi en même temps des prêtres missionnaires et des jésuites pour instruire toutes ces familles et pour leur administrer les sacrements, et pour faire le service divin suivant les cérémonies de l'Église catholique.

M. le duc d'Orléans fit donner deux millions pour

acquitter les dettes d'un très-grand nombre de particuliers, artisans et autres, qui étaient détenus dans les prisons de cette ville de Paris et dans celles des autres villes du royaume, afin de les mettre en liberté et en état de continuer leur négoce.

Son Altesse Royale assigna aussi aux Théatins de Paris une somme de cent cinquante mille livres, afin qu'ils pussent achever le bâtiment de leur église, celle de quarante mille livres qu'une loterie avait produite, il y avait quatre ou cinq ans, ne l'ayant laissé que trèsimparfait.

Le 25, on publia une déclaration du Roi, rendue le 18 et registrée le 24 au Parlement, concernant la vaisselle et les ouvrages d'or et d'argent, pour réprimer le luxe extraordinaire d'un très-grand nombre de gens de tous états et de toute condition, principalement des agioteurs qui s'étaient enrichis en moins de sept à huit mois au commerce des actions et des autres papiers en la rue Quincampoix, lesquels s'étaient pourvus d'une quantité prodigieuse de vaisselle d'argent de toute espèce, la mieux travaillée et la plus belle qui se soit jamais vue chez les princes et chez d'autres personnes d'un rang distingué par leur noblesse et par leurs dignités.

Par cette déclaration, le Roi fait défense à tous orfévres et autres ouvriers travaillant en or et en argent de cette ville de Paris et des autres villes et lieux du royaume, de fabriquer, exposer ou vendre, à compter du jour de la publication de la même déclaration, aucun ouvrage d'or rendant le poids d'une once, à la réserve des croix des archevêques, évêques, abbés, abbesses et religieuses, des chevaliers des ordres de Saint-Michel, du Saint-Esprit et de Saint-Louis, de Saint-Jean de Jérusalem ou de Malte et de Saint-Lazare, et à la réserve des chaînes d'or pour les montres, que Sa Majesté leur permet de faire et de débiter à l'ordinaire.

Fait pareillement défense de fabriquer, vendre ou exposer en vente aucun balustre, bois de chaise, cabinets, tables, bureaux, guéridons, miroirs, brasiers, chenets, grilles, garnitures de feu et de cheminée, chandeliers à branches, torchères, girandoles, bras, plaques, cassolettes, corbeilles, paniers, caisses d'orangers, pots à fleurs, urnes, vases, carrés de toilettes, buires, pelotes, seaux, cuvettes, carafons, marmites, tourtières, casseroles, flacons ou bouteilles, surtouts pour mettre au milieu des tables, pots à huile, corbeilles et plats par étage inventés pour servir le fruit, le tout de quelque poids que ce puisse être, et tous autres ouvrages de pareille qualité d'argent ou auxquels il y aurait de l'argent appliqué, sans préjudice néanmoins des calices, ciboires, vases sacrés, soleils, croix, chandeliers et autres ornements d'église, que l'on pourra continuer de faire aussi à l'ordinaire, en vertu des permissions que Sa Majesté en donnera.

Fait pareillement défense auxdits orfévres et ouvriers de fabriquer, exposer et vendre, à compter aussi du jour de la publication de cette déclaration et jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, aucun bassin, plat, assiette et autre vaisselle d'argent plate, même de continuer les ouvrages desdites espèces par eux commencés, sans la permission du Roi par écrit; et à l'égard desdites vaisselles plates pour lesquelles le Roi aura accordé des permissions, Sa Majesté veut et entend que les bassins d'argent ne puissent excéder le poids de quinze marcs chacun; les plats celui de dix marcs, et les assiettes celui de trente marcs la douzaine, les soucoupes celui de cinq marcs chacune, les aiguières celui de sept marcs chacune, les chandeliers ou flambeaux celui de quatre marcs chacun, les écuelles couvertes ou non couvertes celui de cinq marcs, les sucriers celui de trois marcs chacun, les salières, poivrières, tasses et gobelets et autres menues vaisselles pour l'usage des tables, celui de deux marcs chaque espèce; le tout à peine

T. II.

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de confiscation des ouvrages énoncés ci-dessus et de trois mille livres d'amende, dont la moitié sera pour le dénonciateur et l'autre moitié à l'Hôpital général de Paris, et aux hôpitaux des lieux les plus prochains, payable solidairement par les orfévres et par ceux qui achèteront lesdites espèces de vaisselle d'argent, et à peine contre les maîtres orfévres d'être déclarés déchus de leur maîtrise sans pouvoir être rétablis sous quelque prétexte et occasion que ce puisse être, et contre les compagnons et apprentis qui auront travaillé à la fabrication desdites pièces ou espèces, de ne pouvoir parvenir à la maîtrise; défend sous les mêmes peines aux maîtres et gardes des orfévres, essayeurs, et au fermier de la marque de l'or et de l'argent d'apposer auxdits ouvrages aucun de leurs poinçons, à peine de trois mille livres d'amende solidaire pour lesdits maîtres et gardes, essayeurs et fermier, et de la déchéance de la maîtrise à l'égard desdits maîtres et gardes; défend à toutes personnes sans exception de faire et de laisser travailler auxdits ouvrages dans leurs hôtels et maisons, à peine de confiscation et de trois mille livres d'amende solidaire avec les maîtres et ouvriers, etc. Le même jour, 26, on publia un arrêt du conseil d'État qui, à l'exception de la Compagnie des Indes, faisait défense à toute personne de contracter à l'avenir aucun engagement sous le nom de Primes ou autrement, pour fournir et recevoir à terme des actions, souscriptions ou polices de ladite Compagnie, ni d'antidater les promesses que quelques particuliers faisaient à ce sujet, et ordonnait que les porteurs de pareils engagements seraient tenus de les représenter dans le restant du même mois de février, par-devant MM. Lepeletier de La Houssaye, d'Ormesson, de Gaumont, de Baudry et Dodun, commis pour viser lesdits engagements, qui, faute d'être ainsi visés dans ledit temps, seraient déclarés nuls.

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Le 25, on publia un autre arrêt du conseil d'État, rendu le 18, qui ordonnait que celui du 21 novembre 1719

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