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juftice, que d'avoir recours aux châtimens, & de s'expofer plus longtems aux horreurs d'une guerre inteftine, qui ne peut qu'accroître l'animofité, & élever pour jamais un mur de féparation entre la mere-patrie & fes enfans. Le comte de Gower, préíident du confeil fut le premier qui s'oppofa à cette motion fur ce qu'elle étoit auffi injurieufe pour les miniftres que pour la nation en général, attendu que tout ce qui avoit été réfolu relativement aux affaires de l'Amérique avoit eu le confentement & le vœu de l'une & de l'autre chambre du parlement; fur ce que les Américains avoient été les aggreffeurs, & que les actes dont ils fe plaignent font juftes & émanés du pouvoir qui feul avoit droit de s'oppofer à une indépendance qu'ils affectoient, & qu'ils ont toujours cherché à porter auffi loin qu'on la voit aujourd'hui. Le lord Gower affura la chambre que la campagne prochaine promettoit des fuccès dont il falloit attendre l'avantage de pouvoir donner enfuite une paix folide, en nous épargnant la lonte de la demander.

Les ducs de Grafton, de Manchester & le lord Cambden appuyerent au contraire, la motion de toutes leurs forces; le dernier furtout représenta les trois royaumes fur le penchant d'u ne ruine inévitable & termina la vive harangue en difant qu'il étoit fi convaincu de la néceffité d'une prompte réconciliation avec l'Amérique, que, pourvu qu'on fît la paix avec les colonies, il confentoit à voir la nation déclarer la guerre à tout le refte du monde.

Le lord Weymouth, fecrétaire d'état, en fe déclarant contre la motion, dit qu'il n'en pénétroit pas bien le myftere ; le lord Chatam alors, recueillant de nouveau fes forces, répondit, que, puifque le noble lord ne l'avoit pas bien

compris, il alloit fe résumer d'une façon à ne laiffer aucune ambiguité. Il dit donc qu'afin de rendre plus efficace & plus durable la paix, pour laquelle il votoit, il falloit commencer par la révocation de tout ce qui avoit été fait jufqu'à préfent; qu'on ne devoit point héfiter à faire les premiers pas vers une réconciliation utile & néceffaire;.... que ce n'eft point l'Amérique qui nous fait la guerre; qu'elle n'eft que fur la défenfive,... qu'au lieu de lui parler de pardon de foumiffion abfolue & illimitée, il falloit lui offrir une pleine & entiere juftice, &c.

. Le lord Weymouth remercia l'orateur de fa complaifance; mais il refta dans fon opinion fur la négative de la motion, en difant que rien ne preffoit, & qu'à la fin d'une campagne dont on avoit tout lieu d'attendre les plus heureux effets, il feroit tems de fonger à des négociations que le fuccès de nos armes rendroit alors plus décentes & plus utiles.

Ces affertions furent vivement contredites par le lord Shelburn, & quelques autres membres de la chambre; mais le lord Mansfield ayant entrepris une analyfe raifonnée de la motion du lord Chatam, loutint qu'elle étoit au moins peu fatisfaifante, & il réunit les raifons les plus fortes qui devoient la faire rejetter. En effet, quoique les lords Onflow, Shelburn & Abingdon employaffent toute leur éloquence à détruire les raifonnemens combinés des lords Gower, Weymouth & Mansfield contre la motion, elle fur rejettée à la pluralité de 99 voix contre 28; mais quelques gens redoutent ici que l'impreffion d'un vieillard célebre, jadis l'idole de la nation, qui, malgré tes infirmités, eft venu se traîner fur deux bâtons à la chambre des pairs pour y annoncer fes craintes & fes allarmes, ne les ait fait paffer dans les efprits du nombreux

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auditoire que fa démarche & fa réputation ancienne avoient attiré.

Le même jour 30, les communes pafferent le bill des annuités, & ceux de la taxe fur les domeftiques & les ventes. La chambre en comité reprit la difcuffion des affaires concernant le commerce de l'Afrique, & prit à ce fujet les refolutions fuivantes : « Que le rapport fait qu'il a été établi par des gouverneurs & chefs des forts dans l'Afrique un commerce particulier, tendant directement à un monopole, & qu'ils ont fait ce commerce fi préjudiciable aux intérêts publics, de concert avec des perfonnes de ce royaume, dont un & plufieurs

étoient en même tems membres du comité fufdit) ne regarde aucun des membres du comité actuel des négocians qui trafiquent en Afrique; & comme il appert qu'il s'eft gliffé divers abus dans la maniere de pourfuivre le commerce à la Côte-d'or & à Whydab, la chambre eft d'avis que cet objet mérite l'attention & la considération du parlement ». Ces réfolutions furent ap prouvées dès que le rapport eut été fait.

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Le 2 de ce mois une commiffion fe rendit la chambre haute, & donna le confentement royal au bill pour emprunter une fomme d'argent par billets d'échiquier, à 19 autres bills publics, & à 7 particuliers, &c. Les communes pafferent le bill pour emprunter un million en billets d'échiquier, & le bill pour approprier an fubfide plufieurs fommes à tirer du fond d'a mortiffement.

Le 5, les communes réfolurent de fupplier le roi par une adreffe, d'avancer 13 mille liv. fterl. pour l'entretien des forts & établiffemens de la nation en Afrique.

Le 6, le roi fe rendit au parlement, & donna fon confentement royal aux bills pour lever

5 millions & demi par annuités, pour taxer les domeftiques, pour taxer les ventes, & à divers autres bills publics & particuliers, après quoi S. M. prononça le difcours fuivant :

Mylords & Meffieurs,

La conclufion des affaires publiques, & la confidération de l'inconvénient d'un trop long fervice, dont je crains que vous n'ayez beaucoup fouffert, exigent de moi que je mette une fin à la feflion préfente du parlement; mais je ne puis en faire donner l'ordre, & vous laiffer partit pour les différens comtés dont vous êtes les représentans, fans vous exprimer toute la fatisfaction que je reffens de votre conduite, & fans vous remercier des preuves inconteftables que vous m'avez données de la continuation de votre attachement à ma perfonne & au gouverne ment, de votre jufte difcernement dans tout ce qui regarde les vrais intérêts de votre pays, & de la perfévérance conftante à maintenir les droits de la légiflation britannique.

Meffieurs de la chambre des communes,

Je ne puis affez vous remercier de l'affedion publique avec laquelle vous m'avez accordé les fubfides extraordinaires que je me fuis trouvé dans la néceffité de demander à mes fideles communes pour le fervice de l'année courante; je dois en même tems vous marquer ma reconnoiffance, & du zele avec lequel vous m'avez mis dans la poffibilité d'acquitter les dettes que j'avois contractées dans mon gouvernement civil, & de l'aug mentation confidérable que vous avez faite des revenus de la lifte civile pour le refte de ma vie.

Mylords & Meffieurs,

J'efpere de la divine providence, & des opérations vigoureufes & bien concertées des forces confidérables que vous avez mifes dans mes mains, que cette campagne aura foit 9 par terre, foit par mer, un fuccès affez grand pour opérer la fuppreffion de la révolte en Amérique, & pour rétablir l'obéissance conftitutionnelle que tous les fujets d'un état libre doivent à l'autorité de la loi.

Le lord chancelier a dit alors, par exprès commandement de S. M.:

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Mylords & Meffieurs,

« C'est la volonté royale & le defir de S. M. que ce parlement foit prorogé au lundi 21 de Juillet prochain, pour reprendre fes féances audit jour ».

Le total des moyens accordés pour lever les fubfides néceffaires au fervice de cette année, y compris la fomme de 13 mille liv. fterl., que le roi eft prié d'avancer pour l'entretien des forts & établiffemens de la nation sur la côte d'Afrique, monte à 13026672 liv. fterl.; les moyens montent à 13754144. Ainfi les moyens excedent de 727482 liv. fterl. Les dépenfes de cette année excedent celles de l'année derniere de 3356413

liv. fterl.

Il paroît par les détails remis au parlement par le ford Shelburne dans l'importante délibération du 30 Mai, lorfqu'il fut queftion dans la chambre haute de la propofition du comte de Chatam pour une réconciliation avec les colonies , que le montant des droits de la douane pendant les 4 dernieres années, a porté en tout, chaque année, fçavoir, en 1773, 5000000, 5100000; en 1775, 5000000; en 1776, 5000; mais, toutes déductions faites, ces droits ont rapporté netto dans l'échiquier, fçavoir, en 1773, 2200000 liv. fterl. ;en 1774, 2100000; en 1775, 2000000, & en 1776, 2600000. D'où il paroît qu'il y a eu une diminution annuelle dans ces droits, de 1100000 liv. fterl., caufée principalement, & peut-être uniquement par notre malheureufe guerre avec les colonies, & cela dans un tems où les dépenfes publiques font beaucoup augmentées par cette même guerre. Les autres branches des revenus publics font auffi plus ou moins affectées par la même caufe. La taxe levée pour l'entretien des pauvres a fait, l'année derniere, un objet d'un million & demi sterling. Tandis que les re

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