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moulin de Fins, fitué auffi dans la coûtume de Péronne, à fe pourvoir contre le nommé Barlemont, qui s'étoit avifé, comme Thuet, de bâtir un moulin à vent dans la feigneurie de Fins. Cette conteftation a été jugée par arrêt contra dictoire du 7 Février dernier, qui a également ordonné la démolition du moulin de Barlemont. Plufieurs arrêts femblables ont été rendus par le parlement de Paris, qui s'eft fondé fingulierement fur le texte de la coûtume de Péronne; ce qui établit une jurifprudence conftante, & maintient les feigneurs hauts-jufticiers-voyers, Jeuls, dans le droit de faire conftuire des moulins à vent ou à eau dans l'étendue de leurs feigneuries.

Un arrêt du grand-confeil du 4 Juin, déclare nul & de nul effet, comme donné fans pouvoir ni jurifdiction, un arrêt du parlement de Nancy, du 14 Mai dernier.

M. le comte de Falckenftein, pendant fon féjour en cette capitale, n'a mangé chez perfonne, pas même à Chantilly, où il s'eft rendu après diner, pendant que toute la maifon de Condé s'y trouvoit raffemblée. On fe plaît à recueillir tous les traits qui peuvent caractériser ce prince: en voici quelques-uns.

M. le comte de Falckenftein se trouvant au jeu de Mme. Adélaïde, appuyoit fon coude fur. le bras du fauteuil de cette princeffe ; & comme elle vouloit auffi appuyer le fien, elle lui dit en fouriant: Il me femble, M. le comte, que vous oubliez votre incognito... Cela eft vrai, répondit le prince, mais je m'en trouve bien.

Pendant que ce monarque étoit chez la reine, le prince de Liftenois, vice - amiral, & prince du St. empire, y étant arrivé, il lui fit dire, felon l'ufage à l'égard des grands feigneurs, que le comte de Falckenstein demandoit

à lui être préfenté. M. de Liftenois accourut; & fur ce qu'il dit dans leur conversation qu'il fe propofoit d'aller faire fa cour à M. le comte à Vienne, Jofeph II répondit: Je n'y fuis pas plus brillant qu'ici, excepté 20 à 12 fois par an, que je fuis obligé de repréfenter l'empereur.

Un jour que ce prince traverfoit à pied une partie de la capitale, une pauvre femme s'avança près de lui; & le prenant en tremblant par le pan de fon frac, qu'elle baifa, lui dit avec un ton mêlé de refpect & d'admiration: M. le comte, heureux le peuple qui paie vos habits!

M. le comte de Falckenftein avoit deffein de donner une gratification de 200 louis d'or au cocher de louage dont il fe fervoit ordinairement mais il a préféré de lui affurer une penfion viagere de 800 livres.

Un poëte ayant fçu que M. le comte de Falckenstein avoit été au palais le 15 Mai, & qu'il avoit affifté à l'audience dans une des lanternes. prit la liberté d'adreffer ces vers à ce prince.

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Eh bien, à Paris, ce matin,

Il l'eût trouvé dans la lanterne.

M. le comte de Falckenftein, après avoir vu quelques villes de Normandie, arriva le 3 de ce mois, vers les 10 heures & demie du foir, à Dol en Bretagne,& le lendemain, des 5 h. du matin, tous les habitans entouroient la maison de ce

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voyageur illuftre. Lorfqu'il parut, fon air de popularité, comparé avec fa grandeur réelle, excita une admiration inexprimable. A 7 heures, il partit pour St. Malo; il vifita cette place dans la matinée du 5, & fe remit en route pour Breft. L'itinéraire de M. le comte de Falckenftein étoit, dit-on, fixé de la maniere suivante. De Rouen, au Havre, à Caen, à Cherbourg, à Grandville, à St. Malo, à Breft, à l'Orient & à Nantes : remontant enfuite la Loire, il paffera par Angers, Saumur, Amboife & Bois, pour venir à Orléans; il fe rendra à Poitiers, la Rochelle, Rochefort, Bordeaux, Touloufe, & vifitera le canal de Languedoc jufqu'à Montpellier; de cette derniere ville ce prince fe rendra à Avignon, à Aix, à Marseille & Toulon, reviendra enfuite par Aix & Avignon, pour paffer par Vienne, en Dauphiné, à Lyon, qui fera le terme de Les voyages dans ce royaume, car de Lyon ce monarque ira voir Geneve, Berne, Conftance & le lac de ce nom, pour venir à Ulm, & reprendra de-là la route de la capitale de l'Autriche. Le comte de Belgiojofo, minifire de S. M. Imp. à la cour de Londres, accompagnera fon augufte maître jufqu'aux frontieres de ce royaume.

On affure auffi que le roi fe propose de voyager l'année prochaine, avec très-peu de fuite. S. M. ne prendra pour la fervir, que deux valets de chambre; un capitaine des gardes, le garde des fceaux, & M. de Sartine l'accompagneront. Le roi vifitera les principales villes de fon royaume., s'arrêtera dans celles où il y a parlement, & y fiégera, verra les places frontieres & fes ports. Défenfes expreffes aux villes de faire les moindres dépenfes pour lui. Il mangera chez les évêques les intendans, les gouverneurs, &c., dont la taible fera reglée.

M. Munier, ingénieur à Angoulême, a eu

T'honneur de présenter à Mgr. le comte d'Artois, à fon entrée dans la province d'Angoumois, en allant à Bordeaux, un manufcrit de 130 pages, fous la forme d'un petit in-4°., contenant une expofition fommaire des objets qui peuvent intéreffer la curiofité des voyageurs dans cette partie de l'appanage du prince, avec des remarques fur la beauté des chemins de cette province. Ce manufcrit, que Mgr. le comte d'Artois a reçu avec bonté, eft extrait d'un ouvrage plus confidérable, contenant l'ellai d'une méthode générale,, propre à étendre & à perfectionner, furtout en voyageant, les connoillances de l'efprit humain. Cette production de M. Munier formera un recueil d'obfervations relatives à l'hiftoire, à l'adminiftration du royaume de France, au commerce, aux fciences, aux arts, & principalement à la culture des terces; le tout appuyé fur des faits exacts, & enrichi d'expériences utiles, en 2 vol. in-8°.

On apprend que Mgr. le comte d'Artois, fenfible aux marques de joie qu'a fait éclater, en le voyant, la ville capitale de fon appanage, a fait remettre 100 louis à l'hôpital de cette ville.

M. le duc de Chartres arriva. ici le 7 de ce mois, de fon voyage en Hollande.

L'archevêque de cette capitale va de mieux en mieux, & l'on efpere qu'il fera bientôt rendu aux vœux de fes diocéfains. Un inftant après que ce refpectable prélat eut reçu le viatique, il tendit la main à un chanoine, & lui dit : Vous m'aviez demandé quelques fecours pour une pauvre famille; paffer chez mon receveur, & prenez deus mille écus, le chanoine lui répondit: Mgr., cette pauvre famille fouffre encore plus de votre état actuel que de fon indigence, elle la fupportera avec patience jufqu'à votre rétablissement: Non, cher abbé, repliqua le prélat, il ne faut jamais

mon

différer d'un inftant lorfqu'il s'agit de faire le bien, & furtout quand ce font des malheureux à fecourir.

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Trois particuliers étant partis d'ici, dans le deffein de voyager quelque tems pour leur amufement, apperçurent, à la fin du fecond jour de leur marche, une flamme confidérable. Ils volerent auffitôt à l'endroit d'où elle partoit, & trouverent les malheureux habitans d'un village, ayant leur pasteur à leur tête occupés à éteindre un incendie qui avoit déjà confumé trois chaumieres. Ils fe réunirent à eux; & après trois heures de travail, ils parvinrent à arrêter entierement les progrès du feu. Ils jouiffoient de la reconnoiffance des payfans, lorfque, réfléchiffant à la perte que venoient d'éprouver les proprié taires des chaumieres brûlées, & frappés tous trois du même fentiment, ils tirerent en même tems leurs bourses, les remirent entre les mains du pasteur, renoncerent à leur voyage, & s'applaudirent d'avoir fait fervir au bien de l'humanité un argent qu'ils deftinoient à leurs plaifirs. La fomme s'eft trouvée monter à 5600 liv.

M. de Lille, auteur de la Philofophie de la nature, reçut, pendant fa détention, une lettre anonyme, conçue en ces termes :

I

Je n'ai point le bonheur de vous connoître, Monfieur; mais votre ouvrage m'a infpiré ce qu'en lifant M. de Voltaire j'ai plus d'une fois fenti, le defir de faire une action honnête.

Je n'ai donc pas hésité de vous offrir deux rou leaux de 50 louis qui peuvent vous être de quelque resource dans votre fituation : vous me les rendrez quand vous le pourrez. Je crois autant aux plaifirs de la confcience qu'à fes remords; auffi ne céderai-je à l'envie que j'ai d'être connu de vous que lorsque vous ferez heureux.

Par un de ces hazards qui fervent si bien l'hu¬

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