1 ALLEMAGNE. HAMBOURG (le و Juin.) Le capitaine Joachim Moller, venant ici de Bordeaux, avec une cargaison de fucre, café, & autres marchandifes, a été rencontré dans la Manche, vers les II heures du foir ,par un vaisseau de guerre anglois, qui, après avoir préalablement tiré deux coups de fignal pour le faire approcher, lui avoit enfuire lâché toute fa bordée, dont II boulets avoient beaucoup endommagé son navire, fans néanmoins bleffer personne. Mr. Moller se rendit ausfitôt à bord du vaisseau anglois pour montrer ses papiers au capitaine, Celui-ci les ayant trouvés en regle, lui fit beaucoup d'honnêtetés, & lui donna ses charpentiers pour réparer le dommage qu'il lui avoit fait. On pense ici que Mr. Moller s'est attiré ce traitement par sa propre faute, n'ayant pas répondu, comme il eft d'ufage, au signal du vaisseau de guerre an glois; mais il y a toute apparence qu'il étoit alors endormi avec son équipage. Le colonel Faucitt, qui arriva le 23 du mois dernier, de Hanovre à Lehe sur le Weser, fit prêter le 24, le ferment de fidélité à 500 Hessois, tant chaffeurs que recrues, qui s'embarquerent le 25, fur 4 bâtimens de transport anglois. Un peu avant l'embarquement, 9 de ces chaffeurs furent mariés en rafe campagne à 9 filles hefsoifes, qui les suivent en Amérique. Voilà probablement le reste des troupes auxiliaires qui fortiront de l'Allemagne; on dit cependant que la Saxe doit faire passer 7 à 8 mille hommes à la folde de l'Angleterre; mais cette nouvelle ne paroît pas fondée. On mande de Memel, que le 19 du mois dernier, un violent ouragan a fait périr 7 vaisseaux qui mouilloient dans ce port; l'un, qui étoit fuédois, & dont la cargaison consistoit en harengs, a disparu avec tout l'équipage; les 6 autres, dont 5 anglois & un hollandois, ont été brisés, les cargaisons perdues; mais on est parvenu à sauver les équipages. BERLIN (le 10 Juin.) Le roi a fait fuccessivement la revue des corps de ses troupes à Magdebourg, à Custrin & à Stargard. S. M. est actuellement pour le même objet, dans la Prufse occidentale, d'où elle doit revenir le 13, à Potzdam. Le marquis de Jaucourt, maréchalde-camp au service de France, s'est trouvé aux manœuvres des troupes prussiennes. Sa Maj. a accordé une somme de 20 mille écus d'Allemagne aux habitans d'Embden, pour les dédommager des pertes qu'ils ont éprouvées lors de l'inondation du 21 Novembre dernier. Lorsque le prince Henri de Prusse revint à Rheinsberg, après la maladie dangereuse dont il avoit été attaqué à Brunswick, il fut reçu à quelque distance de cette maison de plaisance par un chœur de jeunes filles, représentant les Graces qui faifoient des offrandes & chantoient des cantiques devant un autel où les lettres P H étoient entrelacées ; d'autres troupes de bergers & de bergeres se trouverent fur le paffage de S. A. R., dansant devant leurs cabanes & chantant des rondeaux analogues à son rétablissement. La bourgeoisie de Rheinsberg, divisée en plusieurs troupes à cheval, vint aussi à la rencontre de ce prince, & la ville fut superbement illuminée. RATISBONNE (le 3 Juin.) L'extrait d'un refcrit de l'impératrice-reine, relatif aux différend's qui fubfiftent entre cette souveraine & la cour de Saxe fut présenté dernierement, ainsi qu'on l'a dit, à la diete de l'empire par le baron de Borié, ministre d'Autriche. Cette prece eft conçue en ces termes : << Il y a actuellement 200 ans qu'il s'éleva un différend entre la couronne de Bohême & l'électorat de Saxe, au sujet des seigneuries de Glaucha, Lichtenstein, & Waldenbourg, sur lesquelles la cour électorale prétendoit étendre fa haute jurifdiction, comme situées dans le cercle de Misnie, quoiqu'en même tems elles relevassent de la couronne de Bohême, qui les avoir accordées au comte de Schonbourg, comme des arrieres-fiefs de l'empire. On fecontenta toujours, de la part de la derniere, de s'opposer aux prétentions électorales par des écrits contradictoires. Enfin, la cour de Saxe ayant exigé d'être formellement reconnue comme juge suprême & fouverain, par le comte de Schonbourg à Glaucha, à l'occasion d'une prétention pécuniaire à fa charge, la chambre féodale de Prague envoya d'abord au ministre saxon les lettres déhortatoires d'usage; mais, fur ce que, contre toute attente, on les lui renvoya sans être ouvertes, la couronne de Bohême se vit, parce pro cédé étrange, couper la voie ordinaire de conferver ses droits. On alla même si loin, de la part de l'électorat, qu'il entra des troupes saxon. nes à Glaucha; qu'on enfonça la porte du châ teau, qu'on abattit l'aigle impériale, qu'on chaffa le comte de Schonbourg, qu'on fit fa garde prifonniere, qu'on enleva quelques-uns de ses officiers par force, & qu'on commit plusieurs autres violences. A de telles voies de fait, la cour impériale & royale n'a pu être plus longtems indifférente, sans abandonner totalement fes droits,, & fans manquer elle-même à sa dignité i sependant, par une estime véritable pour la mai (On a fait connoître précédemment les deux faits de ce rescrit, argués de faux par le baron de Loben, ministre comitial de la cour de Dresde.) Des avis de la Moravie annoncent qu'il s'y est élevé des troubles dans le cercle de Gradisch. C'est la religion qui en est le prétexte, & ce sont des ecclésiastiques qui y ont donné lieu, diton, par un zele inconsidéré. Vingt-mille habitans ont refusé d'aller à la messe, se déclarant luthériens. Quelques-uns prétendent que le motif de leur démarche n'est autre que de s'exemter de l'obligation de payer la dixme au clergé. Il est vrai néanmoins qu'il y a dans la Moravie beaucoup de protestans cachés, ainsi que dans la Sty rie & l'Autriche. La cour de Vienne, perfua dée que dans les émeutes populaires, les moyens 1 violens ne font souvent qu'aigrir les esprits, surtout lorsque le zele de religion y a part, a ordonné de traiter ces habitans avec douceur, & s'est contentée jusqu'à présent de leur envoyer des ecclésiastiques reconımandables par leur capacité, & leur modération. : VIENNE (le 21 Juin.) L'électeur de Treves, qui arriva le 6 en cette ville, avec la princesse Cunegonde de Saxe, sa fœur, a continue fa route fur Presbourg, pour y faire une visite au duc Albert de Saxe-Teschen, & à l'archiduchesse Marie-Christine son épouse. L'impératrice-reine s'y rendit aussi le même jour, & revint le 9 au château de Schonbrun. Hier 10, le comte de Sagramoso, ci-devant ministre de l'ordre de Malte près du roi & de la république de Pologne, fut admis à l'audience de S. M. I. Suivant les derniers avis reçus du voyage de l'archiduc Maximilien, ce prince, qui a vifité les places de Semlin, de Raftadt, de Peter waradin & de Belgrade, étoit le 7 Mai à Titul, d'où il a continue fa tournée. Il a péri depuis peu, près de Bade, 6 bateaux chargés de recrues pour l'Autriche; il n'a pas été possible de fauver la moindre partie de cette belle jeunesse, dont la perte a sensiblement touché l'impératrice-reine. Il y a ici un jeune homme d'une famille honnêre de Ratisbonne, né sans bras, qui peint trèsbien le portrait, il fait très-adroitement avec les orteils ce que les autres peintres font avec leurs doigts. H assiste souvent aux féances de l'académie de peinture; mais il ne se donne point en spectacle, & il ne travaille que devant quelques-uns de ses amis. On apprend de Constantinople que l'escadre |