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fécution des magiftrats; les miniftres environnés de tous leurs pouvoirs n'avoient point fait fléchir mon ministère; il m'est donc permis de me croire en patriotifme au moins l'égal de tous ceux que j'ai vu fi fouples, fi timides, & qui n'ont une contenance affurée, que depuis le moment où il n'y a plus eu de danger à courir qu'en fe montrant l'ami de l'ordre, qu'en défapprouvant hautement les actes fanguinaires qui fouillent notre révolution. Je me fuis expofe à ce nouveau danger. J'ai ofé, dans une lettre aux parifiens, leur reprocher le meurtre illégal de trois magiftrats, les conjurer de ne plus fe dégrader aux yeux de l'europe, par un abus auffi épouvantable de cette liberté qu'ils venoient de conquérir.

Contribuant de tous mes efforts au fuccès de notre conftitution, en dévançant quelquefois les opinions' de nos légiflateurs, je n'ai employé ni les exagérations, ni les moyens feditieux. J'ai cru que l'édifice du bonheur

public ne devoit s'élever qu'à la lueur de la · raifon & avec les inftrumens de la fagesse. Pendant le cours de cet ouvrage, j'ai marché. à travers deux écueils, la paffion de tout conferver & celle de tout détruire. Auffi, après l'avoir publié, m'attendois-je qu'il ne plairoit à aucun des partis qui divifent la nation. Cependant les bons citoyens, ceux qui font-véritablement dans le fens de la conf titution, qui ne cherchent ni à perpétuer l'anarchie ni à faire revivre les anciens abus, ont applaudi à mon travail, & m'ont encouragé à le continuer.

Je présenterai, dans un troifième volume, la nouvelle conftitution de Pologne, celle des Suiffes & Grifons, celles des Etats du roi de Sardaigne, de Naples, de l'Espagne & du Portugal. Enfin un quatrieme volume fera uniquement confacré au développement de celle qui nous fufcite tant de haines, qui enfante tant de projets de vengeance, & & fort, pour ainfi dire, du fein d'une mer

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agitée. Je remplirai cette tâche avec l'impartialité d'un citoyen qui n'a d'autre defir que d'expofer la vérité, qui n'a point cherché à fe placer fur les ruines des autorités renverfées, & qui ne s'eft réservé que le droit de ne jamais diffimuler fa pensée.

DISCOURS

PRÉLIMINAIRE.

MALGRE ALGRÉ la rapidité avec laquelle ces difcours ont été compofés, malgré les erreurs qui s'y font néceffairement gliffées, j'ai cru devoir répondre au defir que plusieurs perfonnes devant lefquelles ils ont été prononcés, m'ont témoigné de les voir imprimés. Avant d'arriver à la conftitution des différens gouvernemens que j'ai parcourus, j'ai expofé dans mes deux premiers difcours, mon opinion fur l'origine de la fociété; & quoique ce fujet ait été traité par des mains plus habiles, je n'en hafarderai pas moins de faire reparoître ici mes idées, telles que je les avois déjà présentées dans un ouvrage für notre ancienne légiflation.

L'homme eft né pour vivre fous l'empire, & à l'aide des conventions fociales. Cette vérité tant de fois répétée, devient

plus fenfible à mefure que l'on réfléchit fur notre organisation, fur la longueur de notre croiffance, & du développement de nos forces.

Dix ans s'écoulent depuis l'inftant où l'enfant voit le jour, jufqu'à celui où, même dans l'état de nature, il peut fe paffer de fecours, & exifter par fes feules facultés.

Si donc il étoit abandonné par celle qui lui a donné la vie, à l'époque où la nature n'impose plus à la mère la néceffité & le befoin de l'alaiter, il périroit victime de sa foibleffe ou de la voracité des autres animaux.

Mais cette mère pourroit - elle fuffire à fon existence & à celle de tous les enfans qu'elle produiroit, pourvoir à la nourriture, à la défenfe de ces êtres qui fe traîneroient à fa fuite, fi elle n'étoit pas aidée dans fes foins maternels?

Sa condition feroit la pire de toutes.

La nature, en refufant à l'homme la force & l'agilité qu'elle a accordées à d'autres animaux, l'en a dédommagé.

S'il eft moins fort que les grands carni

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