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ble d'arrêter les efforts de l'ambition, & de contenir la puiffance qui a le fentiment de la fue périorité de fes armes.

Puifque les conftitutions ne peuvent mainte nant s'établir folidement dans les empires qu' la fuite des calamités, des diffentions, celfons de gémir fur les maux qui nous ont agités depuis fi long-tems, c'est à eux que nous devrons cette conftitution qui croît & s'élève, dans ce moment fous nos yeux. Que de troubles & de douleurs ont préfidé à fa naiflance! Elle va, n'en doutons plus, réunir tous ceux qu'elle avoit divifés. Elle vient de recevoir un hommage fi folemnel! Qui oferoit aujourd'hui parler de facrifices, lorfque le monarque lui-même en fait de fi étendus à la félicité publique! Qui ofera fe parer des titres du hafard, lorfque celui de citoyen eft devenu le premier de tous! Qui fe permettra de réclamer la fupériorité de fon rang, lorfqu'il n'en doit plus exifter d'autre que celle des vertus & des talens!

Ve DISCOURS. SUITE de la Conftitution Germanique.

Nous avons vu, dans le difcours précédent;

quelles étoient les loix fondamentales de l'Allemagne; mais nous fommes encore loin de connoître fa constitution : tout eft règle, cérémonial dans cet empire. Après avoir été long-tems fans loix, il eft devenu l'efclave des plus légères formalités. L'élection & le couronnement de fon empereur font les points auxquels le fouverain & les états attachent le plus d'importance. Autrefois l'empereur plaçoit toute fa gloire à voir Rome fous fa dépendance: aujourd'hui il la met à être indépendant de fon pontife.

Depuis la bulle d'or, les électeurs font feuls l'élection de l'empereur, au nom de tout l'empire. Non, difent les publiciftes, en vertu d'un pouvoir qui leur foit délégué, mais en vertu d'un droit qui leur eft propre, & qui eft attaché à leur électorat.

Tout contraire que foit ce droit à celui de la nation, il est à defirer qu'il ne foit jamais contesté. Il feroit, fans doute, plus immuable, si tous les états affemblés, & confultés fur la forme de l'élec

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tion, euffent, par une loi fonda mentale, déféré aux feuls électeurs la faculté de leur choisir un chef, mais les fimples fujets de l'empire n'ont été convoqués ni à Nuremberg, nï à Metz, avant la publication des trente articles qui compofent la bulle d'or; elle n'a donc point ce confentement du peuple qui femble indispensable pour l'élection du chef auquel il doit enfuite refpect & fidélité Néanmoins, puifqu'il n'y a point eu de réclamation contre ce droit, dont les électeurs font en poffeffion depuis 1356, on peut le confidérer comine revêtu du confentement général.

Le lieu de l'élection n'étoit pas anciennen ent déterminé; mais il eft défigné à Francfort, par la bulle d'or, à moins que, par des obstacles ¿ des raisons fupérieures, les électeurs ne conviennent de fe réunir dans une autre ville.

Avant que les électeurs fe foient rendus à Francfort pour l'élection, le maréchal héréditaire de l'empire; conjointement avec le magiftrat de la ville, prépare les logemens, & convient du prix des denrées. Les électeurs peuvent cornparoître en perfonne, ou envoyer des ambaffade s munis d'un plein pouvoir qu'ils préfentent à l'électeur de Mayence pour en faire la vérification.

Avant l'élection, le magiftrat, la bourgeoisie & la garnifon de Francfort promettent, 'par ferment, de ne la point troubler; enfuite les électeurs déli

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bèrent & arrêtent les articles de la capitulation, que l'empereur doit foufcrire & jurer d'exécuter. Le jour de l'élection, les électeurs, revêtus des habits qui défignent leurs dignités, montent à cheval, ayant à leurs côtés leurs maréchaux héréditaires qui portent l'épée électorale dans le fourreau, pour marquer qu'il vous remplir une fonction paisible; ils se rendent avec cette pompe à l'églife où l'on célèbre une meffe, après laquelle les électeurs font ferment de donner leur fuffrage fans pacte, falaire ni récompenfe, & enfuite ils entrent au conclave pour procéder à l'élection.

Ce ferment par lequel des Rois, des princes fouverains s'engagent à donner leurs fuffrages fans falaire, n'eft pas très-noble; mais les hommes en élevant leurs pensées, n'épurent pas toujours en même tems leurs expreffions.

Lorfque leur orgueil fe complaît dans des formalités antiques, ils y attachent tant d'impor tance qu'ils n'ofent, pas en corriger ce que l'ignorance y a introduit de vil & de dégradant pour eux. L'électeur de Mayence recueille les fuffrages & remet le fien à l'électeur de Saxe.

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L'empereur eft élu à la pluralité des voix.

Il n'existe point de loix qui fpécifient formellement les qualités requifes pour être élu. La bulle d'or n'exige que celles-ci: un homme bon, jufte & utile.

Il y a peut-être plus de fageffe qu'on ne penfé 'dans cette défignation. Eh que faut-il de plus au bonheur d'un empire, qu'un fouverain qui ait de la bonté, de la justice, & qui sache se rendre utile à l'état qu'il gouverne!

Les proteftans peuvent être élus empereurs de→ puis le traité de Veftphalie, puisqu'il leur attri bue tous les droits dont jouiffent les états catho liques.

C'est donc à tort que quelques politiques mo 'dernes ont prétendu qu'un des électeurs le plus en état d'oppofer une puiffance redoutable à l'empereur, fe proposoit de faire élever un de fes fils dans la religion catholique, pour le rendre fufceptible de la dignité impériale.

Quoique beaucoup d'autres foutiennent qu'il faille être Allemand pour être élu, cette opinion n'eft appuyée fur aucune loi, & certainement un roi de France qui réuniroit le vœu des électeurs, pourroit monter fur le trône impérial, occupé autrefois par Charlemagne & par fes defcendans. La politique fera le plus puiffant obstaclę au desir que pourroit avoir tout prince étranger d'ajouter cet honneur à fa domination.

Les loix publiques ne décident point à quel âge on peut être élu empereur. L'hiftoire prouve que ce titre a été conféré à des mineurs, même à des pupilles la capitulation de l'empereur Jofeph

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