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intérêts généraux des peuples, et même elle pourrait s'exercer en faveur de la limitation des armements, qui est le casse-tête des hommes politiques et des diplomates de nos jours.

10. L'option entre l'arbitrage et l'examen. - L'angoisse de la guerre est passée, mais nous en avons recueilli et nous en gardons l'expérience. Maintenant, plus d'apologie de l'arbitrage; on ne trouve dans le pacte de la Société des Nations, adopté par la conférence de la paix le 28 avril 1919, qu'une formule d'option entre l'arbitrage et l'examen du conflit : « Tous les membres de la société conviennent que s'il s'élève entre eux un différend susceptible d'entraîner une rupture, ils se soumettront soit à la procédure de l'arbitrage ou à un règlement judiciaire, soit à l'examen du Conseil » (art. 12). On fait ensuite allusion par deux fois à la « sentence des arbitres » (art. cité, § 1, 2 ou, d'après la réforme du texte par la deuxième assemblée, « à la décision arbitrale ou judiciaire »). C'est seulement à l'article 12 que l'arbitrage apparaît dans le texte du pacte. Nous reviendrons plus loin sur les dispositions du pacte qui y sont relatives, voyons pour le moment les conditions dans lesquelles existe le cas d'option. La voie diplomatique est d'abord utilisée pour le règlement des différends entre les États. Si on échoue dans cette voie, l'arbitrage pourra être tenté. « Les membres de la société conviennent que s'il s'élève entre eux un différend susceptible, à leur avis, d'une solution arbitrale ou judiciaire et si ce différend ne peut se régler de façon satisfaisante par la voie diplomatique, la question sera soumise intégralement à un règlement arbitral ou judiciaire » (art. 13). Puis on établit les questions « qui sont généralement susceptibles de solution arbitrale ou judiciaire » (art. 13, § 2). Mais, toujours fidèle à l'esprit libre et au caractère facultatif de l'arbitrage, le pacte arrivait jusqu'à paralyser complètement la cour permanente. Car « la cour d'arbitrage, disait-il, — à laquelle la cause est soumise, est la cour désignée par les parties ou prévue dans leurs conventions antérieures » (art. 13, § 3).

Le texte de cet article a été modifié par la deuxièm eAssemblée; il est ainsi conçu : « La cause sera soumise à la cour permanente de justice internationale, instituée conformément à l'article 14, ou à toute juridiction ou cour désignée par les parties ou prévue dans leurs conventions antérieures » (art. 13, § 3, d'après l'amendement de la IIe Assemblée). Enfin le pacte, dans le même article, cherche à

garantir l'exécution des « sentences rendues » (art. 13, § 4) par les cours d'arbitrage dans cette première instance arbitrale (d'après l'amendement, par la cour de justice). Plus loin, le pacte réduit à néant l'espoir d'une loi internationale réglementant l'arbitrage, car « les engagements internationaux, tels que les traités d'arbitrage qui assurent le maintien de la paix, ne sont considérés comme incompatibles avec aucune des dispositions du présent pacte » (art. 21). D'après la réponse donnée par le Comité spécial de Juristes à la question 3o, adressée par le conseil de la Société des Nations (28, IX, 1923), celui-ci « le cas échéant, doit régler les modalités de son action de manière à compter sur les compromis internationaux, tels que les traités d'arbitrage et les accord régionaux qui assurent le maintien de la paix. » Seulement, je me permets de douter que les << traités d'arbitrage et les ententes régionales, comme la doctrine de Monroe » soient efficaces pour assurer le maintien de la paix d'une manière transcendentale, c'est-à-dire l'emportant sur les événements immédiats, réellement durables.

11. La conférence des ambassadeurs faisant fonction de cour. — L'intervention de la conférence des ambassadeurs dans le conflit italo-grec à la suite de l'assassinat de la mission Fellini à Janina (voir 2e Partie, Chap. 11, 13), conflit qu'elle a heureusement réglé, révèle l'importance de cet organisme faisant fonction de cour. Toutefois la reconnaissance de la compétence de cet organe par la troisième Assemblée ne signifie peut-être pas un progrès dans la lutte pour le nouveau régime juridique personnifié par la Société des Nations. Les conférences d'ambassadeurs étant des aréopages plutôt politiques que juridiques dont le but est d'arriver à un règlement amiable, elles peuvent être fort utiles lorsque le conflit est grave, mais leur décision sera d'autant moins juste que le problème sera plus difficile.

12. Le Conseil faisant fonction de Cour.-Après avoir établi l'option entre la procédure d'arbitrage et l'examen du litige par le Conseil (art. 1) le pacte règle l'organisation de l'arbitrage (art. 13). Pour arriver à l'autre terme de l'option, nous laissons pour le moment de côté l'article 14, où s'exprime la véritable conception de la Cour de justice internationale. C'est un peu à tort qu'on a inscrit dans l'article 15 le statut du Conseil faisant fonction de Cour. Tout d'abord, le Conseil est la juridiction de droit commun. « S'il s'élève

entre les membres de la Société un différend susceptible d'entraîner une rupture et si ce différend n'est pas soumis à l'arbitrage ou à un règlement judiciaire, prévu à l'article 13, les membres de la Société conviennent de le porter devant le Conseil (art. 15). » Dans le texte du projet (lu à la séance plénière de la Conférence de la paix du 14 février 1919), on avait écrit, « différend... qui ne puisse, comme ci-dessus, être soumis à l'arbitrage » — ce qui aurait rendu l'option pratiquement impossible.

Le Statut judiciaire du Conseil, bien qu'il soit contenu tout entier dans l'article 15 du pacte, n'en comprend pas moins huit ou neuf préceptes ou règles : a) soumission à la juridiction du Conseil (§ 1er); b) initiative de l'action : avis au secrétaire (§ 1er); c) exposition de la cause par les parties (§ 2); d) essai de règlement du différend par le Conseil et publication éventuelle des faits et des explications des parties (§ 3); e) le différend une fois réglé, viennent la rédaction et la publication du rapport (§ 4); f) la publication éventuelle des rapports des membres présents (§ 3); g) l'engagement des parties de ne pas recourir à la guerre, le rapport du Conseil supposé accepté (§ 6); h) en cas de non acceptation, la réserve des membres d'agir à leur gré pour le maintien du droit (§ 7); i) et la suspension de toute solution dans le cas de compétence exclusive d'une partie (§ 8). Il faut y ajouter, le pouvoir exécutif de contrainte internationale, prévu pour le cas de rupture des engagements pris d'accord avec les articles 12, 13 ou 15, c'est-à-dire pour le cas où il y a refus de se soumettre à l'arbitrage ou à l'examen du Conseil (art 16, § 2).

Il faut encore mentionner la juridiction du Conseil par extension, juridiction externe et facultative. « En cas de différend entre deux États, dont un seulement est membre de la Société ou dont aucun n'en fait partie, l'État ou les États étrangers à la Société sont invités à se soumettre aux obligations qui s'imposent à ses membres aux fins de règlement du différend, aux conditions estimées justes par le Conseil » (art. 17). Le statut judiciaire du Conseil, tel qu'il est organisé par l'article 15, s'applique « sous réserve des modifications jugées nécessaires,» de même que les dispositions des articles 12, 13 et 16. En outre, « dès l'envoi de cette invitation, le Conseil ouvre une enquête sur les circonstances du différend et propose telle mesure qui lui paraît la meilleure et la plus efficace dans le cas particulier » (art. 17, § 2). Mais cette compétence facultative du Conseil peut devenir obli

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gatoire, car « si l'État invité, refusant d'accepter les obligations de membre de la Société aux fins de règlement du différend, recourt à la guerre contre un membre de la Société, les dispositions de l'article 16 lui sont applicables » (art. 17, § 3). Enfin, « si les deux parties invitées refusent d'accepter les obligations de membre de la Société aux fins de règlement du différend, le Conseil peut prendre toutes mesures et faire toutes propositions de nature à prévenir les hostilités et à amener la solution du conflit » (art. 17, § 4).

13. Les commissions de conciliation. Proposées par la Suède et la Norvège à la première Assemblée de la Société des Nations, en tant qu'addition au pacte, les commissions de conciliation ont été renvoyées pour étude à un comité, mais sans qu'il soit question de toucher au pacte, par l'Assemblée de 1921. L'Assemblée de 1922, on le sait, accepta le rapport du comité avec la recommandation aux membres de la Société, de conclure des conventions en vue de l'établissement de commissions de conciliation pour le règlement amiable des conflits internationaux. Bien que l'idée d'une convention générale ait été rejetée par la troisième Assemblée, on y a fait remarquer que le développement du système des conventions bilatérales. peut arriver à rendre possible et désirable une convention d'un caractère général. Mais le désir de la Suède et de la Norvège n'était — d'après l'opinion très catégorique de M. de Visscher-que de « décentraliser l'exercice d'une fonction que le pacte n'avait organisée que comme attribution du Conseil » (Voir La procédure de conciliation, dans Revue de droit international, 1923, p. 22). Un projet de convention portant institution de commissions de conciliation entre le Danemark, la Finlande, la Norvège et la Suède vint bientôt, en 1924, réaliser cet idéal septentrional de décentraliser la justice. Nous avons déjà indiqué le résultat de la Conférence scandinave de Stockholm, du 5 mars 1924 (voir ci-dessus, C. 3).

Étant donné l'évolution de la justice internationale et l'évolution générale des institutions internationales, je me garderai bien de dire que les commissions de conciliation sont une institution progressive. Elles semblent plutôt par rapport à l'idéal universel de l'unification de la justice internationale, un exemple d'institutions régressives. On doit aboutir à cette conclusion si l'on prend en considération le mouvement qui se produit de l'arbitrage à la justice internationale; il est hors de doute en effet que les commissions

appartiennent au domaine de l'arbitrage dont elles ont le caractère de fixité et de règlement bilatéral. L'autorité du Conseil et sa compétence en tant que cour sont, en fait, fort diminuées, par l'existence des commissions de conciliation.

14. L'Assemblée faisant fonction de cour. Il existe en quelque sorte une deuxième instance - une troisième, si l'on emploie préalablement la voie diplomatique de cette justice internationale extraordinaire. C'est l'Assemblée : « le Conseil déclare l'article 15 du pacte peut, dans tous les cas prévus au présent article, porter le différend devant l'Assemblée» (§ 9). La procédure judiciaire reste la même. « L'Assemblée devra de même être saisie du différend à la requête d'une des parties » (§ 9). Après avoir établi un délai le pacte déclare que l'action et les pouvoirs de l'Assemblée sont les mêmes que ceux du Conseil, son rapport à la même valeur qu'un rapport du Conseil (§ 10).

15. La Cour permanente de Justice internationale. Nous arrivons enfin à la première réalisation historique d'une justice internationale ordinaire. La communauté internationale étant organisée pour la première fois dans le monde, elle ne pouvait manquer d'avoir l'organe spécifique de sa fonction judiciaire: la Cour internationale. La création de la Cour est prévue dans le texte du pacte : « Le Conseil est chargé de préparer un projet de Cour permanente de Justice internationale et de le soumettre aux membres de la Société. » Le pacte prévoit aussi l'attribution à la Cour de deux fonctions différentes a) fonction judiciaire : « Cette Cour connaîtra de tous différends d'un caractère international que les parties lui soumettront »; b) fonction consultative: « Elle donnera aussi des avis consultatifs sur tout différend ou tout point dont la saisira le Conseil ou l'Assemblée » (art. 14). Dans le texte du projet de pacte (14 février 1919), ce dernier alinéa n'existait pas.

En tête du Statut de la Cour (adopté par l'Assemblée de la Société des Nations. le 13 décembre 1920), à l'article 1er, on trouve cette déclaration : « Indépendamment de la Cour d'arbitrage, organisée par les conventions de la Haye de 1899 et 1907, et des tribunaux spéciaux d'arbitres, auxquels les États demeurent toujours libres de confier la solution de leurs différends, il est institué, conformément à l'article 14 du pacte, une Cour permanente de Justice internationale» (art. 1er). La création de la Cour a donc réalisé le vœu de

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