Page images
PDF
EPUB

qui concerne le chargement et le déchargement des navires étrangers en Hollande; il faut en conclure que le législateur hollandais a voulu qu'inversement ce soit le droit étranger qui s'applique au chargement et au déchargement des navires hollandais effectués à l'étranger1.

Le cas suivant, qui se produisit, il y a quelques années, dans le port de Gênes est aussi du plus grand intérêt : le 28 décembre 1906, le règlement du Consortium du port de cette ville établit que le travail de chargement et de déchargement, d'emballage, pesage et réception des marchandises de bord, ne pourrait être effectué par les équipages que pour les voiliers et vapeurs d'une jauge inférieure à 500 tonnes, tandis que pour les voiliers ou vapeurs de jauge supérieure à 500 tonnes, le travail devrait être exécuté par des travailleurs inscrits sur les listes du Consortium. Au point de vue du droit interne italien, la légitimité de cette disposition est indiscutable et les motifs en sont évidents: en effet, si l'on permettait aux équipages de procéder au déchargement, non seulement on troublerait la bonne organisation du travail du port, qu'il est déjà si difficile de réaliser à bien des égards, mais on violerait, contre toute raison, le principe de la division et de la spécialisation du travail; surtout on romprait, au préjudice de l'intérêt général, l'harmonie complète qui doit exister entre la façon dont s'opère le déchargement et la manière dont elle est réglementée. Or, certains armateurs de navires étrangers demandèrent à faire décharger les marchandises par leur personnel de bord, contrairement aux prescriptions formulées par le Consortium. Celui-ci repoussa la demande; la question fut soumise à l'examen du Conseil supérieur de la marine marchande et à celui du Conseil d'État qui furent d'accord pour ne pas accueillir favorablement la demande des armateurs ".

Le Conseil supérieur de la marine marchande jugea que la disposition prise par le Consortium du port était légitime et opportune, vu la meilleure connaissance qu'ont les travailleurs du port de la machinerie de ce même port et en raison de la rapidité et du bon ordre du travail qui résultent de cette connaissance, étant donné d'autre part le lien qui existe très fréquemment entre les opérations de char

1. Bulletin de l'Institut intermédiaire international, t. XII, 2, p. 277, no 3867. 2. Sciolla, Della sovranità locale sui fatti interni delle navi estere (Il Diritto Commerciale, 1911, I, 214-8).

[ocr errors][merged small]

gement et de déchargement à bord des navires et les opérations correspondantes soit dans les bassins, soit sur les quais; il décida, par conséquent, que la disposition devait s'appliquer pour les navires étrangers comme pour les navires nationaux, ajoutant toutefois qu'on pouvait laisser au président du Consortium la faculté d'accorder, dans des cas spéciaux et pour des marchandises spéciales, la permission du capitaine du navire de faire exécuter, par son propre équipage le chargement et le déchargement de la cale au palan et vice versa.

Dans sa séance du 23 juin 1911, le Conseil d'État s'exprima de la manière suivante : « Dans le plus grand nombre de ces cas, l'opération de chargement comme celle de déchargement se compose d'une série d'actes indivisibles, d'autant plus que, même si la division est matériellement possible, elle ne serait avantageuse ni du côté de la rapidité ni du côté des frais; et il serait contraire à l'intérêt au capitaine lui-même de faire procéder d'abord aux opérations qui ont lieu uniquement dans l'intérieur du navire, ensuite aux opérations extérieures; cela impliquerait des retards et des difficultés dans le travail comme dans le déchargement. Or il est évident que si les divers actes sont considérés comme indivisibles et s'accomplissent en même temps, les règles dictées par le Consortium sont applicables dans tous les cas et sans limitations même pour le transport de la cale au palan. S'il n'en était pas ainsi, il faudrait admettre que l'équipage du navire peut accomplir les opérations de chargement et de déchargement, même à l'extérieur du navire lui-même, ce qui serait en opposition avec les principes établis et mentionnés ci-dessus. Il est inutile d'objecter que l'intérieur du navire peut être comparé à un domicile privé, et qu'en conséquence l'autorité maritime ne peut pas imposer au capitaine de laisser pénétrer dans le navire le personnel employé au travail du port, car il est évident que le navire qui aborde pour charger ou décharger des marchandises, ne peut pas se dispenser, s'il veut atteindre son but, d'employer les moyens mis à sa disposition à l'atterrage. »

Ces deux décisions ne sont pas entièrement satisfaisantes. Les deux corps consultatifs, dans cette affaire, n'avaient pas seulement pour mission d'apprécier l'opportunité et l'utilité de la règle édictée par le Consortium, de rechercher si cette règle devait s'appliquer aussi bien au navires étrangers qu'aux navires italiens, ou bien si elle

devait être modifiée de la même manière pour les navires italiens et étrangers. A côté de ces questions secondaires, la question principale soulevée par la demande des armateurs étrangers, était celle-ci : examiner si la règle édictée par la Consortium était internationalement licite et pouvait, par suite, être appliquée aux navires étrangers comme aux navires nationaux. Or, il ne semble pas que les deux avis avaient répondu, au moins directement, à cette question principale. Il est pourtant très facile de la résoudre, il suffit pour cela de rappeler, d'une part, les dispositions rapportées plus haut des traités de commerce sur l'égalité de traitement entre les navires nationaux et les navires étrangers en matière de chargement et de déchargement et, d'autre part, les conventions consulaires sur l'obligation qu'ont les navires étrangers de se soumettre aux lois locales relatives au chargement et au déchargement; on est ainsi amené à conclure non seulement que le Consortium s'est maintenu en parfait accord avec les devoirs internationaux de l'Italie, mais encore qu'il a exercé, par délégation de notre État, un droit expressément reconnu à ce dernier par les traités en vigueur. Dans l'espèce, il suffisait donc d'examiner si les États auxquels appartenaient les navires réclamants étaient conventionnellement liés à l'Italie par des traités de ce genre. Mais, même s'il n'en était pas ainsi, il me semble qu'on aurait pu adopter la même solution, en se basant sur l'existence d'une coutume internationale résultant des conventions citées ainsi que de beaucoup d'autres analogues passés entre d'autres Puissances, et certainement, de quelque façon que ce soit, en se fondant sur le caractère rigoureusement territorial de la loi réglementaire en question. Le but visé par cette loi ne pourrait être atteint, et le conseil d'État aussi bien que le conseil supérieur de la marine marchande l'exposèrent très clairement, que si cette loi était applicable à l'égard des navires étrangers comme à l'égard des navires nationaux. En définitive, nous sommes ici encore en présence de l'exercice légitime d'un pouvoir émanant de la souveraineté territoriale, pouvoir qui peut toujours être exercé par l'État dans ses eaux à l'égard des navires étrangers : si ce pouvoir fait l'objet de dispositions conventionnelles, cela n'empêche pas qu'il existe et qu'il peut toujours être invoqué d'après un principe général sur lequel il est inutile de revenir et d'insister une fois de plus.

Il peut être intéressant de mentionner encore à ce sujet la dispo

sition contenue dans l'article 14 de la Convention additionnelle à l'accord entre le royaume des Serbes, Croates et Slovènes pour Fiume, signée le 27 janvier 1924 et approuvée en Italie par royal décret-loi du 22 février 1924, n. 211, converti en loi le 10 juillet 1925, n. 1512. Cet article, après avoir établi que l'administration et la gestion des services du bassin Thaon di Revel dans le « Porto Grande » de Fiume, donné à bail par le gouvernement italien à celui des Serbes, Croates et Slovènes, appartiennent à ce dernier gouvernement qui y pourvoira avec son personnel, ajoute : « Pour toutes les opérations d'embarquement, de débarquement, de transbordement (tramacco), d'entassement, de livraison, de chargement et de déchargement des marchandises, etc., le gouvernement serbe, croate et slovène se servira exclusivement des travailleurs du port organisés et inscrits auprès de la capitainerie du port et d'après les règles et les tarifs fixés par les autorités italiennes. L'autorité serbe, croate et slovène préposée aux services du bassin loué pourra organiser des équipes de travailleurs choisis parmi ceux indiqués ci-dessus. >>

Les opérations commerciales des navires étrangers requièrent souvent le concours d'une autorité publique, qui peut être selon les cas une autorité locale ou le fonctionnaire consulaire.

Le consul en général accomplit les fonctions qui, dans le territoire de l'État auquel il appartient, sont de la compétence de l'autorité maritime du port. D'après la législation italienne, le consul à l'étranger correspond à ce que le capitaine du port est dans le territoire national l'article 9 du code maritime marchand affirme textuellement que « le service de la marine marchande italienne à l'étranger est confié aux consuls royaux. » Mais la compétence du consul italien s'arrête si, pour les opérations que le capitaine du navire italien doit accomplir, la compétence de l'autorité locale est établie ou par les lois du pays ou par des traités internationaux (art. 115 et 116, Code maritime marchand). En ce qui concerne les navires étrangers, l'article 20 du Règlement maritime marchand dispose que, en cas d'absence de l'agent consulaire de l'État auquel lesdits navires appartiennent, les officiers de port italiens doivent leur prêter la même assistance et les traiter de la même façon que les navires nationaux.

Les conventions consulaires conclues par l'Italie établissent en général que les consuls pourront aller personnellement ou envoyer

des délégués à bord des navires de leur nation, après qu'ils auront été admis à la libre pratique; interroger les capitaines, l'équipage et toutes les personnes se trouvant à bord; examiner les papiers de bord; recevoir les déclarations sur le voyage des navires, sur leur destination et sur les incidents de la traversée; dresser les manifestes et faciliter l'expédition de ces navires; enfin accompagner les capitaines ou individus de l'équipage devant les tribunaux et dans les bureaux de l'administration du pays pour leur servir d'interprètes et d'intermédiaires dans les affaires qu'ils auront à suivre ou les demandes qu'ils auraient à former 1.

On pourrait dire que ces fonctions sont des fonctions indépendantes des consuls; il y en a d'autres qui consistent dans l'assistance des consuls à des opérations qui doivent être accomplies par les autorités locales. Laissant de côté ce qui concerne plus directement la police judiciaire dont il sera traité plus loin, nous rapportons ici les dispositions contenues dans le droit conventionnel italien, lesquelles correspondent à peu près à celles qu'on peut trouver dans les conventions consulaires conclues par les autres pays.

La plupart des conventions de l'Italie établissent que les fonctionnaires de l'ordre judiciaire et les officiers et agents de la douane ne pourront en aucun cas se livrer à des visites, et à des recherches à bord des navires étrangers, sans être accompagnés par l'autorité consulaire de la nation à laquelle ces navires appartiennent 2. Quelquefois, au contraire, on établit que l'intervention consulaire ne sera pas nécessaire pour l'exécution, de la part des autorités locales, des formalités ordinaires à l'arrivée et au départ des navires, conformément aux règlements de police, de douane et de santé; cette intervention est limitée aux cas où il s'agit de procédures judiciaires ou administratives. Les fonctionnaires de l'ordre judiciaire et administratif ont le devoir de prévenir, en temps utile, les agents consulaires pour qu'ils assistent aux opérations en question et parti

1. Conventions consulaires entre l'Italie et les pays suivants : Albanie, art. 9; Allemagne, art. 14; Argentine, art. 11; Bulgarie, art. 25; Espagne, art. 20; France, art. 12; Grèce, art. 19; Guatemala, art. 18; Portugal, art. 12; Roumanie, art. 26; Salvador, art. 15; Tchéco-Slovaquie, art. 20, 2).

2. Conventions consulaires entre l'Italie et les pays suivants : Allemagne, art. 14; Bulgarie, art. 25; Espagne, art. 20; France, art. 12; Salvador, art. 15. 3. Conventions consulaires entre l'Italie et les pays suivants : Grèce, art. 19; Portugal, art. 12; Roumanie, art. 26; Tchéco-Slovaquie, art. 20, 3).

« PreviousContinue »