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Brion Ing Ghe du Roi

Biche
NE

Bouquetom

DUBAS

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24 Long. du Mérid. de l'1.de Fer.

Bureau des Révolutions de Paris, rue des Marais F S G.N° 20.

RHIN

RÉVOLUTIONS

DE PARIS, DÉDIÉES A LA NATION Et au District des Petits-Augustins. Avec gravures analogues aux différens événemens, et les cartes des départemens.

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Du 9

DÉTAILS

A U 16 ОстоВНЕ 1790. Réflexions sur la vraie manière d'honorer la mémoire d'un écrivain patriote.

La douleur de l'amitié est presque toujours profonde, silencieuse, ennemie de l'éclat ; ou si quelquefois elle parle de ses pertes, si elle peint les N. 66.

A

vertus de l'homme qu'elle pleure, un seul mot lui suffit ; et ce mot est l'explosion du sentiment. C'est un éclair; c'est enfin l'épanchement sublime de M. le Gendre sur la tombe de Loustalot.

Un éloge est rarement l'hommage de l'amitié; le cœur ne se soumet point au joug de l'esprit, et dans tout éloge d'apprêt, c'est l'art qui dicte, c'est l'indifférence qui parle, c'est même souvent la malice qui inspire.

Mais si l'amitié ne peut jamais s'acquitter de cet emploi, faut-il donc que les orateurs renoncent à la gloire de louer les grands hommes? Non, sans doute. Mais qu'il est difficile, qu'il est rare d'être digne d'un tel honneur!

Cet emploi est le seul peut-être où l'oubli de soimême se revête d'un caractère sacré. Il faut que l'orateur qui se charge de l'éloge public d'un grand homme, mette entre son auditoire et lui la vie de celui qu'il célèbre; que caché derrière, se dérobant à ceux même qui l'écoutent, le colosse de son héros le mette à l'abri de tous les regards; et tandis que la mort semble le lui prêter un moment pour instruire les humains par le récit de ses vertus, qu'il reste pour ainsi dire en otage dans le cercueil de celui que son éloquence ressuscite.

C'est à ces traits que l'on reconnoîtroit dans l'orateur, sinon l'ami de l'homme dont il honore la cendre, du moins le citoyen généreux et modeste; mais si dans la tribune il fait asseoir à ses côtés l'ombre de son héros, si cette ombre ne lui sert qu'à mettre en lumière ses propres qualités, si lorsque son art provoque les larmes par le souvenir de la perte qu'il déplore, son adresse les dessèche en se désignant comme l'unique dédommagement de cette perte, on peut dire alors que le deuil de cet orateur ressemble à celui des rois qui montent sur le trône. La sensibilité n'est plus où la joie de succéder est tout.

Loustalot fut notre ami, notre frère, notre compagnon dans nos travaux. L'amour de la vérité étoit le premier anneau de la chaîne qui nous unissoit; c'est cet amour de la vérité qui survit à tous les hommes, qui nous apprend encore à apprécier les fleurs que l'on répand sur sa tombe. Et de même que notre haine seroit le juste partage de quiconque déchireroit sa mémoire, de même aussi ne doit-on pas écrire qu'il suffise d'encenser Loustalot pour devenir à nos yeux un être sacré. Nous savons assez qu'il est rare que le prêtre qui prône son culte, n'ait pas un intérêt secret à faire adorer son idole.

Cet intérêt secret, par exemple, perceroit dans Forateur, si, prononçant l'éloge d'un grand homme, il restoit dans son coeur une place que les applaudissemens pussent chatouiller délicieusement; si au milieu du désordre de la douleur, il avoit le sung-froid de numérer les acclamations, et la force de les décrire. O liberté garantis à jamais de cette foiblesse les orateurs français ! Où en serions nous, si sous ton règne is goûtoient encore les jouissances qui consoloient jadis les panégyristes des tyrans, du mensonge et de la bassese de leurs louanges?

Cet intérêt perceroit encore, par exemple, si l'on répandoit sur l'éloge de Loustalot cette teinte de flatterie qui distinguoit autrefois l'histoire de nos monarques. On ne s'occupoit que d'eux, et les peuples dont les sueurs les avoient nourris, les mortels généreux dont le bras les avoit couverts de l'égide de la sagesse, les héros qui les avoient investis de leur courage, trop souvent écrasés de leur vivant sous le despotisme de ces maîtres superbes, étoient encore condamnés à l'injure de l'oubli sous l'infidèle burin de l'historien servile. S'il existoitun éloge de Loustalot, composé dans cet esprit, il outrageroit ses manes en dégradant ses amis. L'ouvrage des Révolutions de Paris fut le gymnase où Loustalot combattit dignement contre les ennemis du bien public; mais j'ai la noble fierté de me citer

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ici moi-même : c'est moi dont les mains eurent 'a patriotique audace de bâtir les murs de ce gymnase, d'élever ce boulevard conservateur de la liberté de ma patrie; et tandis qu'au dedans, Loustalot forgeoit sans cesse des traits pour frapper les pervers, seul je me montrois au-dehors de l'édifice, mon nom s'imprimoit sur tous ses parois, et j'étois l'unique talisman qui conjuroit, bravoit et repoussoit les orages. Le destin de ces murailles étoit-il donc attaché à la perte prématurée de mon malheureux ami? Etoit-il écrit qu'elles s'écrouleroient pour lui servir de cercueil? La mort d'un patriote éteintelle le flambeau du patriotisme? Loustalot est la preuve que je me connoissois en soldats de la liberté que je savois bien choisir mes frères d'armes. Je vis encore et parce que mon couragǝ a pris le deuil, a-t-il cessé d'être le même?

J'ai vu Loustalot..... et ma douleur amère peut à peine l'écrire. J'ai vu Loustalot descendre dans la tombe; mais je l'ai vu tel que Rome vit jadis Régulus retourner à ses fers. Mes pleurs ne m'ont point appris à désespérer du salut de la républi que je perdois le bras qui tant de fois avoit terrassé les Africains; mais regardant autour de moi, je vis la ruine de Carthage écrite d'avance sur mille fronts, et je me dis avec confiance: Rome est en sureté, Loin de moi donc cette humilité d'apprêt qui me feroit dire que nous avons perdu notre maître à tous. Franc comme la liberté, je déclare que dans la défense du patriotisme je ne connois que des émules; et que le seul à qui j'accorderois ce titre de altre, si repoussant pour l'homme libre, seroit l'écrivain réservé à périr le dernier pour la défense des droits du peuple.

O Loustalot! toi dont les vertus ont maintenant reçu cette couronne qui n'est point sur la terre, ton nom cher à la patrie, quelle que soit la manière dont on le loue, ton nom, dis-je, ne deviendra jamais l'arme destructive de l'ouvrage que tu n'aidas à embellir. Ta mort n'éveillera point la.

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