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d'assister à nos instructions publiques; le dimanche suivant on n'y vit que les habitans de Saint-Mion, parce que M. Rozier, leur curé, les avoit invités d'y venir. Voilà les moyens qu'emploient les ennemis du bien public pour égarer ce peuple. J'espère, monsieur, que vous voudrez bien insérer ceci dans vos révolutions de Par ris, et vous obligerez celui qui est avec fraternité, votre serviteur, &c.

Note des rédacteurs.

Nous recevons de tous les départemens du royaume des plaintes contre les prêtres, dont les uns ne veulent pas lire au prône les décrets de l'assemblée nationale ; d'autres refusent l'absolution à ceux qui sont dans le dessein d'acheter les biens du clergé. Ailleurs, ils em ploient toutes les ressources du fanatisme pour soulever les peuples; ea Languedoc, ils courent les rues le crucifix à la main, prêchant la croisude contre les protestans, et vomissant les imprécations les plus atroces et les plus dégoûtantes contre la nouvelle constitution. Nous nous chargeons volontiers de faire connoître les machinateurs de toutes ces con urations pieuses; nous invitons les bons citoyens à nous faire passer leurs noms (1), nous les livrerons à l'indignation publique.

Affaire de quatre officiers du régiment de

Bretagne.

Le sieur d'Honières, lieutenant au régiment de Bretagne, en garnison à Briançon, il y a à peu près trois ans, fait une chanson badine. Le sur Morel, officier dans le même corps, croit s'y reconnoître dans l'épithète de géant informe. Il en porte ses plaintes au major Chabrol, son oncle, le major au colonel Ccerlosquer. Le colonel prend feu, et le sieur d'Horières est perdu; on lui arrache sa démission.

Telle est à peu près l'introduction d'une affaire, exemple mémorable de l'odieux despotisme qui régnoit dans

(1) Nous prions nos correspondans d'affranchir les let tres, sans quoi elles ne seroient pas reçues.

le militaire, et dont M. de Menou a fait le rapport jeudi 14 octobre.

Poursuivons le sommaire du rapport.

Le corps des officiers ignora long temps la vexation exercée envers le sieur d'Honières. Ce jeune homme huit mois après sa démission, passe quelques jours à Grenoble avec le sicur Morel, sans lui demander raison de son malheur, dont il étoit la cause. Cette conduite, que la jactance du sieur Morel ne laisse pas ignorer au régiment, jette de la défaveur sur le courage du sieur d'Honières. Il retourne en Provence, sa patrie. Un officier d'un autre corps lui tient quelques propos relatifs à son exclusion. Il se bat contre lui, en reçoit plusieurs coups d'épée, et touche à son heure dernière.

La nouvelle s'en répand. Elle perce jusqu'au régiment de Bretagne. Tant de courage, étonne dans un homme, qu'on en croyoit peu susceptible. Alors sen ami, sơn confident unique, le sieur Roubin, profite de la situation des esprits; il dévoile que le colonel Coërlosquet a abusé de l'inexpériente jeunesse du sieur d'Honières ; qu'il en a exigé une parole d'honneur de taire à sa famille et à ses camarades, la violence qu'on lui a faite, et sur-tout de ne point se battre contre le sieur Morel; et qu'il a mis à ce prix l'assurance d'un certificat de

service.

A ce récit l'opinion change. C'est alors Morel qui mérite l'animadversion, et d'Honières l'estime. Le renvoi de l'un et le retour de l'autre sont arrêtés et signés par 17 lieutenans. Mais comme le sieur d'Honières est mourant, on dresse un projet de lettre à écrire par lui au régiment, pour demander sa réintégration. Le sicur de Bonnard, premier lieutenant, la rédige. On la fait passer au sieur d'Honières, qui malade encore de ses blessures, y ajoute quelques circonstances ignorées du corps, la transcrit et l'envoie. Cette lettre est communiquée à tous les grades, et les voeux pour la santé et le retour du sieur d'Honières sont géneraux.

Quelques semaines s'écoulent. Tout à coup arrive au capitaine commandant le corps, un ordre du colonel Coëtlosquet de plonger dans des cachots séparés, les sieurs de Bonnard frères, et de Roubin, et d'exiger par la menace du même traitement, la rétractation de ceux qui avoient signé la délibération du rappel - du sieur d'Honières.

Neuf mois de captivité ont succédé à cet ordre; et dans cette captivité, le colonel Coëtlosquet a épuisé sur ses victimes tous les genres de vexations. Refus constans d'écrire, de communiquer avec leurs amis, de prendre l'air, de se procurer même les secours nécessaires à la santé. Enfin, l'option de donner leur démission ou de se faire juger par un conseil de guerre de l'ancien régime, a mis fin à tant de maux. C'est au fond des cachots que les sicurs de Bonnard frères, et de Roubin, ont signé leur démission; et ce qui paroîtra surprenant même aux partisans de l'ancien régime, c'est qu'ils ont été détenus quinze jours après l'avoir donnée, attentat qui n'a pas de nom! Le sieur d'Honières n'est pas rentré au régi-/ ment; et voilà quatre officiers perdus pour une chanson.

M. de Menou a mis de l'ordre et de la clarté dans le rapport de cette affaire. Ce rapport est imprimé, et l'on y trouvera, ainsi que dans les divers mémoires de ces quatre officiers infortunés, des détails intéressans, mais trop longs pour entrer dans cet article.

Au milieu de la défaveur générale que ce rapport venoit de jeter sur le sieur Coëtlosquet, M. de Murinais fut le seul qui eut le courage de monter à la tribune pour le défendre; mais ce courage étoit mal-adroit. Il y a des instans où c'est desservir ses amis que de prendre leur parti. On est naturellement peu disposé à supposer le bon droit à l'homme qui garde le silence sur sa propre justification. D'ailleurs, M. de Murinais, dix fois interrompu, recommença dix fois son discours par ces mots: J'ai eu l'honneur de servir sous M. de Coëtlosquet. L'honorable membre auroit dû se souvenir qu'aujourd'hui ce n'est pas une tournure adroite que de s'honorer d'avoir servi sous un tyran. Il est plus sage de n'embrasser que le parti de la vérité ; et la noble et modeste affirmation de M. de Champrouet, député de Briançon, sur la réalité des faits énoncés dans le rapport, a fait plus d'impression en faveur des quatre officiers, que toute la véhémence de M. de Murinais n'a fait de bien au colonel.

L'assemblée nationale a rendu le décret suivant : « Le roi sera prié d'ordonner la formation d'une cour martiale , qui entendra les réclamations des sieurs de Bonnard frères, Roubin et d'Honières, officiers au régiment de Bretagne infanterie, et les jugera suivant les nouvelles formes décrétées pour les délits militaires ».

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Cette affaire est précieuse à la révolution, sous différens points de vue.

En rendant justice à des subalternes, la cour martiale apprendra aux militaires inférieurs, à croire enfin d'une manière stable aux bienfaits du nouveau régime, sur lequel tant de gens cherchent à les décevoir.

Cette affaire apprendra à la France, et convaincra l'assemblée nationale enfin que le despotisme que l'on s'est permis contre des officiers qui ne manquoient ni d'alentours, ni de fortune, ni de protecteurs, a dû être un million de fois plus injuste et plus oppresseur envers les soldats, que l'on regardoit, et que l'on voudroit faire regarder encore comme des êtres sans consistance.

Cette affaire enfin prouvera que le régiment de Bretagne étoit, comme tous les autres, la miniature du grand tabicau de l'esclavage de la France.

Ici, un colonel individuellement bon peut-être, mais dangereux par ses entours, croyant faire le bien, parce qu'on ne lui conseille que le mal; n'est-ce pas là l'image de l'ancien trône? Un major adroit fourvoyant l'autorité pour servir sa vengeance, son intérêt et son parent, Loujours assez fin pour rejeter l'odieux d'une vexation, dont il profite, sur le colonel, dont il maîtrise l'esprit; voila lancienne cour. Une commission, formée de quelques capitaines, qui juge sans information, qui condamne sans entendre; voilà l'ancienne justice. Des camarades, émoins insensibles de l'oppression des chefs muets, spectateurs de l'injustice faite à leurs amis, à leurs frères, à des hommes; voilà les anciens grands. Enfin, quatre innocens soupçonnés, abusés, vexés, condamnés et oubliés; voilà lancien peuple. Ce rapprochement est exact.

ASSEMBLEE NATIONALE.

Suite des décrets concernant les rentes sur le clergé.

III. Les arrérages des rentes dues par le clergé, dont le remboursement auroit été ordonné et non consommé, seront payés, si fait n'a été, à compter des derniers arrérages acquittés jusqu'au jour du rembour

sement.

IV. « Ledit receveur général du clergé sera tenu de verser incessamment dans le trésor public les fonds qui doivent exister dans sa caisse, et lesdits fonds seront appliqués, jusqu'à due concurrence, à l'acquittement immédiat desdites rentes.

V. « Il sera nommé incessamment des commissaires pour fairele rejet des rentes constituées sur le clergé, qui doivent être éteintes et supp: imées, aux termes dudit décret du 15 août, et dresser l'état de celles qui, aux termes du même décret, doivent être payées dans les divers districts.

au

VI. « Les rentes et redevances connues sous le nom de fiefs et accessions de droits d'usage, chauffage et autres rentes affectées jusqu'ici sur les domaines, profit des archevêchés, évêchés, chapitres, diocèses, ab-' bayes, cures, chapelles, bénéfices, communautés religieuses, autres toutefois que les commanderies et bénéfices de l'ordre de Malte, les maisons religieuses de femmes, et conservées sans traitement, seront rejetées de l'état de domaine et supprimées, à compter du premier janvier 1790.

VII. « Les rentes affectées sur les domaines, et autres revenant à des hôpitaux, hôtels-dieu, pauvres de paroisses, écoles, colléges, fabriques, autres que ceux qui sont situés dans le département de Paris, seront payées dans les divers districts auxquels ces établissemens appartiendront, en la forme et aux conditions prescrites par les articles 13, 14, 15, 16, 17 et 18 dudit décret du Is août.

VIII. « Les gages des officiers, des greffiers des insinuations, des greffiers des domaines, des gens de main-morte, et autres appartenans à des corps ecclésiastiques ou religieux, seront éteints et supprimés, à compter du premier janvier 1790 ».

On a repris la discussion sur la contribution foncière. Les articles suivans ont été décrétés.

II. « Le conseil municipal choisira parmi ses membres des com:rissaires qui seront assistés d'un nombre au moins égal; d'autres commissaires nommés par le conseil général de la commune, dans une assemblée qui sera indiquée huit jours d'avance, et à laquelle les propriétaires, même forains, pourront assister et être élus, pourvu néanmoins qu'ils soient citoyens actifs.

IIL« Ces commissaires se transporteront dans les dif

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