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se porter. Le peuple ne doit pas entreprendre

sur les fonctions de ses mandataires à la municipalité. C'est à eux à lui faire rendre justice. Quand its négligent leur devoir, alors, que les citoyens se portent chez eux, qu'ils aillent chez M. Bailly, qu'ils fassent atteler ses chevaux à la voiture, qu'ils l'amènent sur les lieux pour lui faire voir qu'il a tort de passer son temps dans les antichambres des ministres, et qu'il doit veiller aux intérêts de ses commettans. La municipalité a rendu une ordonnance qui enjoint à M. Montinorency de faire ôter ses armes sous huitaine; passé lequel temps, elle les fera ôter à ses frais.

Les patriotes du café Zoopy, vulgairement ap pelé le café Procope, profondément affligés de la licence des auteurs de la partie politique du Mercure de France (1), de la Gazette de Paris, de l'Ami du Roi, des Actes des Apôtres et autres pamphlets aristocratiques, ont arrêté unanimement qu'il seroit député aux rédacteurs des feuilles incendiaires ci-dessus nommées, plusieurs membres de la société patriotique dudit café, à l'effet de les rappeler dans le bon chemin par des paroles de paix.

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(1) On trouve dans la lettre de J. B. Cloots à un prince d'Allemagne le discours suivant, sur la crainte que lui témoigne son correspondant de se rendre à Pa ris, et de n'y pas jouir d'une entière sureté. Ras surez vous, je vous gatantis une sécurité parfaite; et quoique je n'aie pas l'honneur d'être procureur-général de la lanterne, j'ose dire que la constitution est trop avancée pour que les insurrections se renouvellent. Le peuple ne pend plus personne, pas même le libraire Pankouke, dont le double visage fait horreur à tous les partis. Ce nouveau Janus gagne l'argent d'un Moniteur patriote, tandis qu'il nourrit les furies du Mercure. Cet étrange citoyen traverse les ponts et les quais, sans qu'on songe seulement à le jeter dans la rivière, &c. v.

No. 71.

D

Le zèle des habitués du café Procope est certainement très-louable; mais ils l'exercent sur des pécheurs endurcis, et ceux-là sont incorrigibles.

«<< En exécution des décrets de l'assemblée nationale, et de la décision des comités réunis des affaires ecclésiastiques, et de l'aliénation des domaines nationaux, en date du 19 octobre, M. le maire de Paris, et deux administrateurs des biens nationaux se sont transportés à la cathédrale pour y apposer les scellés sur le mobilier dudit chapitre, qui sera trouvé n'être pas nécessaire à la décence et à la majesté du culte. La même opération aura lieu dans toutes les maisons religieuses et chapitres de la capitale ».

Insurrection à l'hôpital de la Salpêtrière.

11 y a quelques mois, sur la dénonciation de M. Destanges, prêtre habitué à l'hôpital de la Salpêtrière, M. l'abbé Fauchet vota à l'assemblée de la commune, qu'en vertu du décret de l'assemblée nationale sur la liberté des opinions religieuses, on supprimât dans les maisons de l'hôpital général, et notamment dans celle de la Salpêtrière, l'usage intolérant d'exiger aux quatre bonnes fêtes de l'année un billet de confession de chaque pauvre, sous peine de ne pouvoir obtenir des billets de sortie. La commune arrêta que le billet de confession ne seroit plus exigible.

L'abbé Destanges s'applaudit devant ses vingtdeux confrères de cette victoire remportée sur les préjugés religieux, à sa sollicitation; mais ses vingtdeux confrères prirent la chose autrement; ils cabalèrent contre l'apôtre de la liberté de penser, et obtinrent des grands vicaires la suspension de ses pouvoirs.

Les femmes pauvres de la maison, dont l'abbé Destanges étoit le consolateur et le guide, murmu

rèrent tout haut de cette lâche vengeance, et redoublèrent de reconnoissance et d'attachement envers leur bienfaiteur, qui de son côté ne combattoit ses confrères qu'avec de la patience et des honnêtetés.

On ne s'en tint pas là. Un administrateur vint à la Salpêtrière, mercredi 11 du courant, et signifia à l'abbé Destanges qu'il ne pouvoit plus rester dans la maison, à laquelle il cessoit d'être utile, en perdant une partie de ses pouvoirs.

A la première nouvelle de l'expulsion de l'abbé Destanges, tous les pauvres indignés se soulevèrent à la fois, et traitèrent les autres prêtres de fanatiques et de cagots; ils s'armèrent de pierres, cassèrent les vitres de la supérieure, et se préparoient à de plus grands excès. L'économe de la maison, à la tête des invalides qui y sont de garde, parvint à éteindre cette insurrection, qui ne transpira pas au-dehors par les précautions sages et modérées qu'il mit en œuvre. Cependant il est bon que l'oeil du public se tourne un moment sur cette affaire, pour obtenir justice au patriotisme éclairé de l'abbé Destanges, et aux réclamations des pauvres de la Salpêtrière.

On nous mande que tous les curés et bénéficiers du doyenné de Charleville, et depuis Sedan jusqu'à Rocroy, même jusqu'à Valenciennes, à l'exemple et à l'instigation des évêques, se coalisent forte. ment entre eux pour tenter une contre-révolution; la preuve en est dans le fait suivant: Le curé de Thin-le-Moutier, village assez considérable, à trois lieues de Charleville et à cinq de Rhetel-Mazarin se voyant au lit de mort, demanda à être assisté par le curé de Charleville, et se confessa à celui-ci d'avoir contribué de 400 liv. pour sa part à l'œuvre impie d'une contre-révolution; il ajouta que son intention étoit d'en faire l'aveu public avant de rendre le dernier soupir, et d'en témoigner son

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repentir à tous ses paroissiens rassemblés autour

de lui.

Le curé de Charleville, doyen rural du canton où se trouve situé Thin-le-Moutier, indigné des dispositions de son pénitent, se retira sans vouloir lui donner l'absolution.

Le moribond n'en fit pas moins la déclaration publique de sa faute; ce que tous ses paroissiens s'empresseront d'attester à la première réquisition.

Si tous les curés de France professoient les mêmes sentimens que dans les provinces du Nord, la chose publique seroit en danger. Mais rassuronsnous; la majorité est pour la révolution. Voilà ee que le curé de Limeray, près Amboise, écrivoit dernièrement à un ami: Je voudrois persuader à tous les Français que les curés ne sont point aristocrates. Dans le discours que ce bon pasteur prêcha à ses ouailles pour les préparer au pacte fédératif du 14 juillet, il n'hésita pas à mettre cette fête civique bien au-dessus de la pâque des juifs, et même au-dessus de celle des chrétiens.

Les chanoines de Toussaint, à Mortagne, dans le Perche, ont une bonne vierge qui pleure leur suppression, disent-ils aux bonnes gens, et ils ne seroient pas fáchés qu'on le crût. Que sait-on ? Une petite émeute..... Mais un curé de la même ville y a mis ordre, en disant à ses paroissiens: Mes amis, voyez ce que c'est. Moi, j'ai une bonne vierge qui rit de ce que ma portion congrue s'élève maintenant à 1200 liv.

On nous mande encore que sur toute la fron tière, depuis Sedan jusqu'aux environs de Valenciennes, en se rapprochant jusqu'à Laon et Rheims, on prend à tâche, à l'imitation du clergé, de tromper et séduire le peuple, de prévenir contre les heureux effets de la révolution; ce qui fait craindre une explosion prochaine, d'autant plus dangereuse que tout ce pays tient au Brabant, où

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l'empereur assemble une armée (1) dirigée contre. nous, plus peut-être que contre les Pays-Bas autrichiens. D'ailleurs, le peuple de ces cantons est très ignorant, même sur ses plus chers intérêts. On n'ignore pas, en outre, combien le gouverneur de Valenciennes et de Rocroy est peu disposé à prévenir toute incursion dans un pays bien en état de se défendre par son courage, mais à qui on en refuse tous les moyens. Les habitans de la campagne se rassemblent, et se forment en milices nationales; mais le gouvernement ne veut leur fournir ni armes, ni munitions. Du moins, si l'on ne croit pas prudent de leur mettre les armes à la main, seroit-il à propos qu'il y en eût un dépôt dans chaque municipalité pour y recourir au besoin. Ils ont tous bonne volonté; mais on cherche et on saisit tous les moyens de leur faire prendre le change.

Le maire de la paroisse de Saint-Mard de Coulonge, dans le Perche, nous mande:

Je pars pour aller à Mortagne dénoncer une femme de 30 mille livres de rente qui ne veut point payer son imposition; qui dit au pauvre tendant la main: Va-t-en au diable, puisque tu es autant que moi! qui, profitant du manquement de travail, donne au journalier par jour dix sous pour

(1) C'est le 21 de ce mois que Léopold doit faire sa terrible entrée en Brabant. Cette circonstance paroît favorable aux aristocrates de France pour amener une contre-révolution. De Lille à Strasbourg, ils s'agitent de toutes les manières pour trouver les moyens de faire servir à leurs sinistres projets les armées autrichiennes ; ils se promettent bien que, si le Brabant est une fois réduit, le nouvel empereur sera tenté de faire entrer sur les terres de France son armée victorieuse, et qu'il cédera facilement au plaisir de venir rendre à sa sœur le même service, que le duc de Brunswick rendit à la princesse d'Orange contre les patriotes.

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