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(ceci s'adresse directement aux Parisiens, et in directement à tous les Français), qui ont vu que ees mêmes commandans et capitaines, etc. étoient précisément ceux qui appuyoient toutes les propositions insidieuses du général; précisément ceux que l'on voyoit à la tête de ces bruyantes visites faites au général; les citoyens, dis-je, qui ont vu, et fort bien vu cela, ne manqueront pas de donner les places d'officiers à de meilleurs patriotes, à des hommes plus fermes, moins vaniteux, moins intrigans; et c'est ainsi que la garde nationale parisienne soutenant la liberté, ne sera plus, en partie, à la disposition d'un état-major détestable.

Si yous laissiez vos officiers en place trop longtemps, soyez sûrs que petit à petit on en gagneroit la plus grande partie. Il est bien certain que dans un coup en grand vous refuseriez d'obéir, citoyens, à ces officiers devenus traîtres. Mais connoissez mieux vos ennemis; ce n'est point à ces grands coups que les aristocrates et les impartiaux voudroient vous mener. Leur dessein est d'usurper un grand pouvoir en détail, de s'assurer en détail d'un service aveugle, qui puisse aider à leurs menées au lieu de les éventer, de fatiguer le peuple par mille vexations particulières, dont on ne voit pas tout à coup les conséquences, de vous ravir vos ressources, vos droits pied à pied, de brouiller vos assemblées, de gêner vos élections, d'attaquer la liberté de la presse, de corrompre vos plaisirs, de vous circonvenir enfin en tout et par-tout, pour vous lier, vous endormir, vous rebuter et vous enchainer. N'avez-vous pas vu, avec quelle adresse ils veulent vous faire entendre, à chaque atteinte portée à la loi, que c'est pour le plus grand bien, et pour un cas particulier? Comme le piége est toujours bien tendu, quand l'officier est gagné et qu'il commande, vous commencez par obéir; la discussion ensuite est ou tardive ou oubliée. Combien d'exemples n'en avez-vous pas ?

Arrêtez

Arrêtez le mal dans sa course, car vous perdriez de jour en jour cette liberté qui vous a coûté tant de peines et de sacrifices.

Nous avons dit plus haut qu'il étoit absolument nécessaire que l'officier restât un an simple fusilier après l'expiration de ses fonctions. Nous insistons et prions les citoyens d'insister sur cette clause importante à insérer dans la loi. La fréquence des élections et la courte durée des Commissions d'officier seroient sans utilité, si les fonctionnaires, tant civils que militaires, pouvoient être continués. Leur pouvoir actif ne seroit employé qu'à se faire des créatures pour être élus de nouveau; et plus un citoyen resteroit en place, p'us il acquerroit des moyens de s'y perpétuer. D'où vient que le président de l'assemblée nationale, le premier homme de l'empire n'a ni cour, ni flatteurs, tandis que le moindre valet du maire et le barbier du général reçoivent à la journée de l'encens et jusqu'à des placets ? C'est que le pouvoir de ceux-ci est constant, c'est que le président de l'assemblée ne l'est que pour quinze jours; s'il l'étoit pour un an, les ambassadeurs des couronnes l'étoufferoient de caresses.

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Si le commandant de la garde parisienne n'étoit en fonctions que pour trois mois le général la Fayette seroit-il le sultan de Paris? Soyez de bonne foi, citoyens, et répondez à cette question.

Nous irons absolument au but, et nous dirons que rien n'est plus inutile qu'un commandant général de la garde nationale. Ce seroit aux commandans de bataillon à remplir ce poste l'un après l'autre, au gré du sort, de trois mois en trois mois, en exceptant toujours ceux qui en auroient fait les fonctions; là où il n'y auroit qu'un bataillon, ce seroit aux capitaines.

C'est mal à propos que l'on viendroit nous citer les travaux de cette place et les talens qu'elle exige. Quand il ne faut qu'obéir, on a toujours assez de talent; quant à la manière d'obéir, un conseil No. 72.

B

militaire, quel qu'il soit, vaut mieux que les plus grands talens d'un homme. D'ailleurs, lorsqu'un seul fait tout, ne s'expose-t-on pas à une dépendance funeste? Lorsqu'un seul pense, veut et agit, que peuvent apprendre les autres?

En reprenant l'article de la nomination des of ciers, nous pensons bien qu'à moins de vouloir bouleverser l'empire, elle ne pourra être attribuée qu'aux assemblées primaires; c'est à elles sur tout que nous adressons ces réflexions. Nous les conjurons d'y faire la plus sérieuse attention. Elles sentent déjà par expérience que la trop longue permanence des officiers dans leurs places est l'une des principales causes de cos malheurs, et des entraves apportées à l'exécution stricte de la loi.

Enfin, tout se réunit pour prouver qu'il seroit dangereux que la commission des officiers durat plus de six mois.

Un officier qui le seroit pour quatre ans, ne s'accoutumeroit t-il pas à sa domination? Est-ce ap: quatre ans de commandement que vous le réduiriez à l'obéissance et au rang de fusilier?

"Vous ne ferez pas de distinction à cet égard entre les offici rs. Les uns certainement voudront durer autant que les autres. Il est des postes dont les fonctions sont très pénibles et entèlement assujettissantes. Alors, ou il arrivera qu'un officiar perdra de vue son état dans la vie civile, ou il faudra choisir dans une classe particulière les officiers dont les fonctions demanderont une activité constante; voilà des privilégiés.

Nous avons dit, que le citoyen armé ne pouvoit en aucun cas être considéré que comme un citoyen actif. Il faut donc, d'après ce principe, que nous voyions disparoître de la société domestique ces uniformes nombreux, qui dénaturent la physionomie et bientôt le caractère du citoyen ou si l'on s'obstine à le garder, que du moins il ne puisse être porté hors le service sous des

peines graves (1). Eloignons du coin de nos foyers cet esprit despotique et tranchant attaché à cet habit, que la loi n'eût jamais dû déoréter; puisse la seconde législature nous en délivrer à jamais. L'organisation de la garde nationale sera vicieuse, si dans le service, dars la disposition des grades, dans les loix de la subordination, dans la discipline, on attaque les droits de citoyen actif, dans le citoyen armé.

Sur-tout, malheur à nous, si par la disposition des loix de l'organisation dont il s'agit, il devenoit possible d'interpréter la nature des délits, de manière qu'au gré d'une extension forcée, le citoyen se trouvât dans ses biens, dans sa vie, dans son honneur et daus sa liberté, justiciable des jurisdictions militaires! Certes, ce seroit alors qu'il faudroit déserter la patrie, et la livrer aux inquisiteurs dont elle seroit bientôt couverte.

Ecartons donc, avec prudence et fermeté, tout ce qui tendroit à former des corporations trop prépondérantes, ou bientôt le petit nombre op primeroit le grand. Point de bataillons, point de légions, point d'armée réunie, si ce n'est dans les Occasions seulement où la circonstance l'exigera.

Serons nous mieux armés, plus braves pour appartenir à une corporation magnifique? Restons chacun dans notre foyer, dans notre lieu natal; là, sous les yeux de la municipalité et des chefs très amovibles que nous aurons choisis, faisons service à la chose publique. Quand il le faudra, secourons nos voisins.

Si l'ennemi ose se présenter, envoyons nos plus zélés volontaires dans les camps. Quand nous en aurons le loisir, apprenons à marcher serrés et

(1) On peut assurer, sans crainte, que si les habits d'uniforme étoient supprimés, les citoyens ne seroier t plus si désireux de devenir officiers. C'est de l'épaulette qu'on est jaloux plus que du commandement.

à charger les armes; toute la science du fusilier se borne à cela.

Veut-on faire de nous des tacticiens? Que ceux que leur génie pousse deviennent des Turenne; soyons les Spartiates des Termopiles dans un défilé, et Horatius Coclès sur un pont. Du reste, et encore une fois, laissons de côté ces légions, ces bataillons, et toutes les parades qui s'ensuivroient, et au lieu de marcher à droite et à gauche sans raison, et selon le caprice des doubles épaulettes, au lieu d'aller nous ennuyer à des fêtes commandées, préparons-en nous mêmes, chacun chez nous, et à notre gré, après toutefois que nous aurons semé nos grains et cueilli nos moissons, ce qui est le plus important.

Duels.

Le duel entre MM. Lameth et Castries avoit alarmé tous les patriotes. On étoit indigné des périls que quelques spadassins aristocrates avoient fait courir à l'un des plus courageux défenseurs de la liberté; et dans le premier feu de cette vertueuse indignation, la municipalité, les sections et les bataillons de la garde nationale s'assemblèrent pour délibérer sur le danger où se trouvoit la chose publique.

Quelques citoyens, mieux intentionnés que bien instruits, crurent voir dans une loi sévère le moyen de briser le funeste préjugé des duels; ils s'écrièrent qu'il falloit punir exemplairement les duellistes; ils persuadèrent à leurs auditeurs prévenus d'adresser à cet effet une pétition à l'assemblée nationale. Aussi-tôt l'enthousiasme saisit toutes les têtes; on adopte le projet à la française, c'est à dire, sans examen ; et le corps municipal, M. Bailly à la tête, vient lire à la barre du corps législatif l'arrêté suivant: « Le corps municipal, alarmé de la fréquence des combats

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