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appartient également, à tous les individus il n'y a point de doute que tout homme ne puisse avoir une presse comme une plume; c'est une vérité constitutionnelle, fondée sur la déclaration des droits; et nous désespérerions de la chose publique si le droit d'imprimer pouvoit encore dépendre d'un municipal, ou même des représentans de la nation (1).

Citoyens de toutes les communes du royaume, ne vous laissez pas opprimer par d'insolens municipaux qui, tout fiers des énormes pouvoirs qu'on leur a attribués provisoirement, et auxquels l'absence des loix ne laisse que trop d'extension, oublient qu'ils doivent dans deux ans rentrer dans la foule de leurs concitoyens. Souvenez-vous que des loix constitutionnelles vous donnent le droit de vous assembler paisiblement et sans armes et moquez-vous des administrateurs qui vous interdiroient une faculté que vous ne tenez pas d'eux.

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Etablissez des presses, ayez des imprimeries, il ne sauroit trop y en avoir. Les intrigues, les manœuvres des scélérats, seront toujours plus multipliées que les moyens de les dévoiler. Songez qu'à chaque vérité utile que vous ferez circuler, Vous augmenterez de quelques hommes l'armée des patriotes, vous ferez pâlir les tyrans à gances d'or ou en écharpes.

Si vos mandataires s'avisent désormais de vous défendre d'écrire ou d'imprimer, traînez les devant les tribunaux là, demandez-leur compte de leur injuste prohibition, et forcez-les à subir la peine

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(1) L'article 2 de la déclaration des droits, porte: « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme; tour citoyen peut donc parler, écrire et imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ».

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de la responsabilité. Dans le cas où les juges, d'accord avec les municipaux, conspireroient contre vos droits et votre liberté, adressez-vous alors au corps législatif, comme à votre dernier refuge, Et si tous les ministres de la loi étoient sourds à vos réclamations; si aucune ressource légale ne vous étoit ouverte, assemblez vos parens, vos amis, vos concitoyens ; établissez vos presses à mainarmée, et rappelez vous que la résistance à l'oppression est le droit de tout homme libre. C'est alors que l'insurrection est le plus saint des devoirs (1).

'Mémoire à consulter et consultation pour LouisPhilippe-Joseph d'Orleans.

Tel est le titre d'une très-lourde pièce d'écriture, imprimée et distribuée la semaine dernière au nom de M. d'Orléans.

Le résultat de cette consultation, délibérée par deux ci-devant avocats au parlement de Paris (les sieurs Bonhomme et Rozier), est que M. d'Orléans doit attendre l'institution et l'organisation du tribunal de cassation, qui doit être celui des prises à partie, et s'occuper en attendant de la plainte qu'il doit rendre :

(1) Quelle différence de la conduite des municipalités de Fiarce, avec celle de Liége, qui à la tête d'un peuple, à peine nombreux comme celui d'un des districts du royaume, résiste aux princes d'Allemagne coalisés contre sa liberté. Nous regrettons bien que les bornes et le genre de notre journal ne nous permettent pas d'insérer la réponse des liégeois aux propositions des six cours électorales. Généreux étrangers, votre courage, s'il est scuteru, vous rend dignes de comman der au monde.. Mais qu'il seroit affligeant pour les cœurs patriotes, si l'impuissance de résister vous rendoit victimes de l'élévation de vos sentimens.

1. Contre MM. Boucher d'Argis et Flandres de Brunville.

2o. De la plainte en faux témoignage contre MM. Lasserre, Duval, Nampty et Thierry-la-Ville.

3o. Du parti qu'il doit prendre contre quelques autres témoins, entre autres contre MM. Frondeville, Guilhermy, Pelletier, Digoine, Morlet, Roch, Galant, Boisse, etc.

En paroourant la pièce dont il s'agit, on est étonné de la foiblesse, de la lâcheté de la discussion sur un sujet qui prêtoit autant à l'élévation du style, à la force des pensées et du raisonnement. Les avocats de M. d'Orléans sont d'autant moins excusables, qu'il circule depuis long-temps dans le public d'excellentes dissertations sur l'affaire du 6 octobre, dont ils auroient pu faire leur profit. Mais ces messieurs ont voulu être eux-mêmes, et en cela ils ont complétement réussi à ennuyer et à fatiguer leurs lecteurs. Ils auroient dû se rappeler ce passage de J. J. Rousseau : Si une courte satire amuse, une longue justification ennuye.

Nous avons trouvé la consultation de MM. Bonhomme et Rozier si fastidieuse, qu'il nous est impossible d'en offrir l'analyse.

Nous observerons seulement qu'ils n'auroient pas du défendre M. d'Orléans, au dépens du sieur Nicolas, dit coupe-téte, en appelant ce dernier assassin infáme. Le sieur Nicolas qui a l'honneur d'être décrété par le châtelet, n'est point un assassin. Il n'a tué personne; il est seulement accusé d'avoir coupé la tête d'un garde du roi mort. Or, séparer la tête du corps d'un homme mort, n'est pas un assassinat. Ge peut être, d'après les circonstaces qui l'accompagnent, une action féroce, sanguinaire; mais la loi n'en fait point un crime, et cela suffit pour qu'un jurisconsulte ne donne pas à celui qui s'en est rendu coupable le nom d'assassin.

Selon nous, les avocats de M. d'Orléans auroient dù lui conseiller de porter sa plainte contre un personnage qui a joué l'un des principaux rôles

dans sa malheureuse affaire. Cest M. la Fayette qui, sans oser témoigner contre lui directement, la fait sourdement diffamer par ses émissaires et ses observateurs. Il est coupable encore envers M. d'Orléans, de l'avoir tenu relégué loin de sa patrie, par une lettre de cachet dont il a été l'exécuteur, lorsqu'au mois de juin dernier, sans aucun motif public, il lui a fait dire par un de ses aidesde-camp, que le roi exigeoit qu'il restât en Angleterre. Le sieur la Fayette est responsable de l'exécution de cet ordre arbitraire, en vertu de l'article VII de la déclaration des droits. « Nul homine ne peut-être arrêté ni détenu, que dans les cas déterminés par la loi, et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceuc qui sollicitent, EXÉCUTENT OU FONT EXÉCUTER des ordres arbitraires doivent être punis.

Comédiens ordinaires du roi.

La tête leur tourne! Les princesses GAUCHES Raucourt et Contat, demandées par une portion de spectateurs à quarante-huit sous la pièce, ont rendu leur réponse officielle le samedi 6 de ce mois, jour où M. la Rive jouoit Gustave, c'est à dire, qu'il y avoit nombreuse assemblée à ce théâtre.

Cette cérémonie s'est faite avec toute la pompe et la dignité dues à ce's altesses érotiques. M. Fleury, en habit de gala, ministre plénipotentiaire de l'aventure, après avoir lentement amené le public au plus profond recueillement par les trois révérences du Bourgeois Gentilhomme, a déployé le traité proposé au public par très haute et très-puissante dame Contat, SA MAITRESSE.

Jamais l'impudence et le délire de l'amour-propre n'ont été poussés plus haut qu'ils le sont dans la lettre de Contat. Figurez-vous une capitulation péniblement révérencieuse, dans laquelle la comédienne du roi dit en substance au public : « Je ne vous ferai l'honneur, messieurs, de paroître sur

le théâtre, qu'autant que vous serez soumis à mes caprices. Le sieur Talma (à ce mot, l'accent du plénipotentiaire est devenu mielleux, douloureux, et presque larmoyant, tant est grande la charité comique.) Le sieur Talma me déplait ; je n'ai pas besoin de vous dire pourquoi; mais il me déplait. J'ai mis dans ma téte de le perdre ; vous aurez la bonté de le chasser, après quoi je jouerai la comédie, c'est-à-dire, cinq à six roles au plus tous les ans, et selon ma fantaisie, sinon plus de minauderies pour vous, plus d'accent pointu, plus de maintien dévergondé, plus de ton impudent, plus de Contat.

Le discours fini, le public a levé les épaules; la petite pièce a commencé, et il n'a plus été question de rien.

N'oublions pas de dire que la fameuse Contat a parlé de son moral, ce qui a beaucoup réjoui parterre et le paradis.

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de

Cette indécente scène a porté sa correction avec elle. Nous pensons que l'auteur des Petites-Affiches a tort de proposer pour correctif la défense au public de faire des motions au spectacle, et la défense aux comédiens d'y répondre. Nous le prions de ne pas recourir si vîte aux prohibitions pour si légères gaucheries. Là où la liberté est tout, les iuconvéniens ne sont rien. S'il ne falloit pour provoquer les défenses que quelques accidens, le pouvoir exécutif auroit trop beau jeu, puisqu'il n'auroit qu'à susciter les accidens pour avoir l'occasion de prohiber. Le système de la liberté doit êtro mieux entendu. Cet auteur a beau nous citer les défenses de la municipalité de Marseille en pareille matière : cette municipalité auroit tort. Nous pensons que la citation est fausse quant aux temps; il est vrai que sous l'ancien régime il étoit défendu aux comédiens de Marseille de lire sur la scène les papiers que le public y jetoit; mais l'ordonnance est toujours restée sans exécution, et il est difficile de croire qu'on eût pris la peine de la renouveler aujourd'hui.

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