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lité, que jusqu'à présent ils ont si généreusement défendus; nous leur dirons : « Braves gardes françaises, qui avez préféré la gloire de sauver la patrie l'épouvantable honneur d'égorger ses enfans; vous dont les mains généreuses se sont unies à celles de vos concitoyens pour faire tomber les remparts de la bastille, vous ne serez pas des derniers à sentir combien vous seriez coupables d'écouter les insinuations de vos chefs, combien vous seriez imprudens de vous y confier. Croyez-vous qu'il y ait une paix solide avec le despotisme? Croyez-vous qu'il puisse jamais vous pardonnner de l'avoir renversé ? Considérez attentivement l'auteur du projet qui vous abuse, et vous devinerez bientôt ses perfides intentions. Rappelez-vous que ce même homme, qui vous flatte ajourd'hui de l'espoir décevant de vous emparer de la garde de Louis XVI, est celui qui, au mois d'octobre, refusa de marcher à votre tête, lorsque vous alliez la conquérir.

« Et vous généreux citoyens, qui avez consacré votre fortune et vos loisirs à la défense de la liberté; vous qui oubliez vos paisibles occupations, votre repos, pour protéger journellement la sureté et la tranquillité de la capitale, voyez quel est le prix qu'on réserve à vos services. C'est en vous privant de l'honneur d'entourer le monarque, que votre ingrat général veut vous payer de votre engoûment et de votre idolatrie. Connoissez enfin le prétendu héros des deux mondes; ne soyez plus dupes de ses phrases à la génevoise, de la prétendue droiture de son cœur, de la pureté de ses souvenirs ; rendez justice à notre zèle, et n'adorez plus que la patrie et la liberté (1) ».

(1) M. la Fayette, dans un discours prononcé devant les officiers municipaux, a parlé à la vérité de la co servation constitutionnelle de la garde citoyenne dans la garde du ri; mais si cela doit être ainsi, pourquoi les 6oco hommes de garde soldée n'écraseront-ils pas le petit nombre

Moyens à opposer au projet de réduction des municipalités.

L'institution des municipalités, des districts et des départemens est le fruit des beaux jours de l'assemblée nationale. Cette institution est la base inébranlable des droits du peuple et de la liberté. Les ennemis de la chose publique s'en sont bien apperçus; aussi n'out-ils cessé d'intriguer et de machiner pour corrompre ces nombreuses administrations dans leur formation, et après leur formation.

- Tous les projets des ministres et des contre-révolutionnaires, toutes les conspirations ont été éventées ou rendues vaines par les seules municipalités. Ce n'a été que dans les lieux où les municipalités sont aristocratiques et vendues à la cour, que les ministres ont obtenu quelques succès dans leurs complots.

D'après ce calcul, que les traîtres supputent mieux encore que les patriotes, il se forme sourdement un projet qui ne réussira jamais, nous osons l'assurer d'avance, mais qui pourroit allumer la guerre civile, et jeter l'état dans le plus grand désordre.

La cour est d'accord avec le comité de constitution, pour porter à la liberté l'atteinte la plus redoutable. Le complot a percé, déjà les esprits foibles sont préparés à l'assemblée nationale pour donner leur assentiment.

y

On veut diminuer le nombre des municipalités, pour créer ce qu'on appellera de grandes munici palités, et diminuer aussi le nombre de districts,

de soldats citoyens qui se dévoûront an service? Par exemple, lorsque le roi sera à Compiègne, dans quelle proportion les citoyens se trouveront-ils avec les 6000 hommes de la garde ordinaire?

pour

pour donner une attribution plus étendue aux directoires de département.

Déjà les districts et les municipalités que l'on projette de conserver sont désignés et mis en liste (1). C'est à ces corps favorisés que l'on dois inspirer et insinuer la démarche d'adresser des pétitions à l'assemblée nationale, qui, en consommant l'œuvre infernale de la cour, aura l'air d'accéder au cri général et à la voix du peuple. Nous irons plus loin, et nous dirons que déjà les bureaucrates comptent dans leurs cartons, avec la joie des hypocrites, nombre de pétitions sollicitées, rédigées et envoyées dans cet esprit. Quand la somme de ces pétitions sera assez imposante, quand les filets seront bien tendus, les voies assez préparées ; quand la prétendue impéritie de quelques municipalités mineures aura été bien divulguée, c'est alors que, sous le prétexte du bien public, on doit proposer des chaines à la patrie, dans le mode d'une administration concentrée, mais concentrée pour être moins difficile à se vendre, et plus facile à corrompre. C'est alors que viendra le jour de la vengeance en faisant tomber les suppressions sur les municipalités et les districts les plus patriotes. La nature des localités et la population parleront en vain en faveur de quelques administrations; les traîtres ne inanqueront pas de rai

(1) La ville de Troyes, département de l'Aube, a déjà travaillé en conséquence; et dans ses demandes faites dans le sens de la cour, il est question de la suppression du district d'Arcis; le tout pour punir cette ville d'avoir arrêté le ministre Necker: ainsi les pervers sont prévoyans. Les ministres sont si décidés à mal faire, dans la classe où on les choisit, qu'ils s'assurent de l'im punité avant même de commettre le crime. Le district d'Arcis est si fortement menacé de cette suppression, que son découragement va jusqu'à l'inactivité dont on ne manqueroit pas de lui faire un crime pour le supprimer. No. 70.

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sons illusoires pour donner le change, et pour re mettre entre les mains des administrations corrompues le sort, la fortune et la liberté du peuple.

Pour arriver à l'accomplissement de cette conspiration politique, on fera valoir au peuple les motifs les plus spécieux. On parlera d'économie, du prix énorme que coûtent les administrations; en parlera d'une gêne prétendue que peut causer dans la circulation des espèces et des denrées le pouvoir trop grand acco: dé à chaque municipalité; on armera les commerçans contre les cultivateurs, les riches contre les pauvres, les cités corrompues contre les campagnes où la liberté repose encore sur les bonnes mœurs; on aiguillonnera l'ambition et la cupidité des citadins, et les traîtres promenant le poison de la corruption et la perspective du pouvoir et du brigandage, dans la hiérarchie des administrateurs, corrompront ainsi, d'un échelon à l'autre, le supérieur par l'espoir d'un plus grand nombre d'inférieurs, et de la sorte arriveront à ce but exécrable de l'ancien régime, de ramener tout le pouvoir entre les mains d'un scul.

Citoyens si l'on porte la moindre atteinte au grand décret des municipalités, à cette loi sacrée de la liberté française, vous êtes perdus. Cette loi est votre palladium; la grande charte est moins précieuse aux Anglais que ne doit l'être pour vous l'institution municipale. Prenez y garde, nous le répétons, vous êtés perdus et perdus sans ressource, si l'on touche à cette loi. Dévouez à la vengeance publique tout homme assez imprudent pour proposer la moindre réduction dans vos administrations.

Voyez, citoyens, la perfidie des motifs de ceux qui demanderoient cette réduction, et voyez les suites funestes de cette atteinte à la loi municipale.

On vous alléguera les frais que coûtent à l'état

tant de municipalités, tant de districts, comme si la liberté étoit jamais trop chère; comme si, pour épargner quelques centaines de millions, il falloit livrer chaque région à la discrétion et à la voracité d'une administration éloignée, et dès-lors étrangère, choisie, et dès lors cotrompue. Nous disons et soutenons au contraire, que si au lieu de laisser à chaque ville, bourg et village sa mu nicipalité, on établit une grande municipalité dans chaque canton, pour administrer et ordonner de tout dans quinze ou vingt paroisses, il en coûttera le double: il faudra d'abord que l'administra. tion de la grande municipalité soit plus nombreuse; il faudra que ses administrateurs aillent et viennent, se transportent sur les lieux où il y aura litige ou estimation, vente ou achat, procès ou exécution, etc. tantôt ces voyages, ces allées et venues seront ou individuelles cu en corps de commission. D'une autre part, les cliens et les contendans soumis à la grande municipalité auront à courir sans cesse vers leurs chefs, vers leurs juges, vers leurs administrateurs. Calculez ce qu'il en coûtera; ne faudra-t-il pas, indépendamment du chef-lieu, que cette grande municipalité ait ses syndics, ses agens, ses commissaires dans chaque paroisse? Ces hommes, choisis par l'influence des administrateurs seront-ils moins coûteux que les municipaux actuels? Ces grandes municipalités seront elles composées de membres tous pris dans le chef-lieu ? On n'oseroit le proposer ni le décréter: il faudra donc que ces membres soient pris dans les diverses parois es, qu'ils transportent leur domicile dans le chef-lieu; il faudra les salarier à plus haut prix. Le paysan transporté à la ville aura de nouvelles tentations, de nouveaux besoins, et le voilà oorrompu.

Mais quelle justice, quel droit, quelle impartia lité doivent attendre des grandes municipalités les bourgs et villages? N'est on pas convaincu que la cité immolera toujours les paysans et les cain:

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