i les plus graves. Le comité des rapports de l'assemblée nationale se trouve saisi de cette affaire; nous croyons que si la bureaucratie de ce comité ne nuit pas aux intérêts des chefs de la garde nationale, la balance doit pencher en leur faveur contre la municipalité. 9 Depuis le moment où la garde nationale de Marseille a pris l'uniforme les officiers municipaux ont imaginé de s'en faire une espèce de cohorte prétorienne pour les accompagner jusque dans les momens où ils n'étoient point en fonctions. Le maire ou ses collègues alloient-ils à une lieue de la ville, revenoient-ils de leur maison de campagne, ils se faisoient suivre ou recevoir par des bataillons de la garde citoyenne; ils trouvoient beau de faire passer leur voiture au milieu de deux files de soldats qui leur présentoient les armes, et auxquels ils répondoient par un salut mêlé de popularité et de protection (1). La garde nationale s'est fatiguée de ce service de valets, et les chefs s'en sont plaints au directoire du département des bouches du Rhône. Ils ont représenté que des citoyens libres n'étoient pas faits pour servir de satellites à des municipaux orgueilleux; qu'ils ne devoient les accompagner que dans les fonctions de leurs places; enfin que cette pompe ridicule exigée par la municipalité de Marseille, étoit au moins inutile, lorsque la journée du malheureux artisan étoit absolument nécessaire à l'existence de sa famille. Ces représentations étoient trop raisonnables pour ne pas blesser les prétentions des municipaux. Ils en ont été instruits, et delà leur animosité contre M. Lieutaud et son état-major. (1) M. Licutaud, commandant de la garde nationale, a reçu plusieurs fois de la part de la municipalité, des réquisitions pour envoyer tel ou tel bataillon au-devant de M. le maire qui arrivoit de la campagne; il a constamment obéi. Le 28 septembre dernier, le conseil général de la commune de Marseille arrêta de renverser le régime existant de la garde nationale, et, séance tenante, il en créa un nouveau. Il ordonna en même temps aux sections de s'assembler le surlendemain, pour procéder à l'élection d'un nouveau chef de l'armée marseilloise. Au jour fixé les sections s'assemblent, les par tisans de la municipalité ont soin d'y faire voter des étrangers ( ce qui est très facile à Marseille, où on ne connoit pas encore l'usage d'inscrire sur un registre les citoyens actifs); ils s'y permettent les violences les plus coupables. Dans la dix-huitième section, des notables présens gênent ouvertement la liberté des suffrages. L'un d'entre eux saisit au collet le président de l'assemblée et le force de continuer la séance; le tumulte est au comble; cependant le maire arrive, il décide que la séance doit être levée. " Le lendemain la section se rassemble; mais ceux contre qui les violences sont dirigées n'y paroissent plus, et c'est la même chose dans les autres sections; par-tout la minorité active fait la loi par la terreur. Les citoyens amis de l'ordre et de la paix s'éloignent; quelques-uns protestent; mais lorsqu'ils présentent leurs protestations à la municipalité, on leur répond que cela ne la regarde pas. Il n'en étoit pas de même de celles qui favorisoient la cause des municipaux. Une seule section résiste au torrent; elle délibère en faveur de la garde nationale. Sept individus protestent, la municipalité reçoit la protestation, et casse en leur faveur la délibération de la majorité. Cependant un très-grand nombre de citoyens de la garde nationale se rassemblent aux Carmes déchaux. Réunis paisiblement et avec la permission du corps municipal, ils votent en faveur de la garde nationale et de ses chefs. Alors l'humeur et le mécontentement éclatent, la division se met dans l'armée, dans les bataillons et dans les compagnies. La municipalité accueille le vœu de la minorité contre la majorité; elle casse les délibérations, et pour ensevelir dans l'ombre une conduite aussi répréhensible, elle fait défense à tous les bataillons de rien imprimer sans sa permission. D'après cet exposé, il est impossible de se dissimuler les torts insignes du corps municipal; il est évident qu'il a voulu vexer la garde nationale et ses chefs, en exigeant d'eux un service domestique, indigne des soldats de la liberté. Les gardes nationales ont pris les armes pour défendre la constitution, pour protéger la sureté et la propriété de leurs concitoyens, mais non pour servir d'escorte à d'insolens municipaux dans leurs parBies de plaisir. Ceux de Marseille ont contrevenu au décret de l'assemblée nationale du mois d'août 1789, qui défend aux municipalités d'exiger des gardes nationales au-delà du service nécessaire, et de se méler de leur régime interieur. Ils ont contrevenu au décret du 30 avril 1790, qui ordonne que toutes les gardes nationales du royaume resteront jusqu'à leur organisation définitive sous le régime qu'elles avoient au moment où les municipalités dans le ressort desquelles elles sont établies, ont été régulièrement constituées ; et que les modifications exigées par les circonstances se feront du consentement exprès des gardes nationales et des municipalités. Ils ont contreveny enfin à celui du 30 juin dernier, dans lequel il est dit que s'il est du devoir des corps administratifs et municipaux de requérir, dans les cas de nécessité et pour le maintien de la tranquillité publique, le secours de la force armée, ils ne peuvent néanmoins faire aucune disposition législative, relativement aux gardes nationales. Mais ce qu'il y a de plus odicux dans la con: duite de la municipalité de Marseille, c'est l'ordonnance par laquelle elle défend aux bataillons de l'armée de rien imprimer sans sa permission. Les suppôts de l'ancien régime, dans les plus furieux accès de leur délire, ont-ils jamais rien fait de plus atroce? Certes! il faut que la jouissance du pouvoir soit un poison bien dangereux, pour changer à ce point des hommes qui ont été victimes de l'autorité arbitraire, des hommes que toutes les bouches de la renommée ont célébrés dans tout le royaume, comme d'excellens patriotes. Et ce sont ces mêmes municipaux, tyrannisés naguères par le prévot Bournissac, qui osent défendre la plainte à des opprimés, qui osent leur interdire la ressource de la presse contre les vexations de leurs oppresseurs (1)! Maréchaussée hors de la loi, même sous l'ancien régime. Tout facile qu'il étoit aux grands, et sur tout aux princes, de violer et de faire violer la loi selon leur fantaisie, ils ne trouvoient pas encore assez prompte, assez expéditive la marche indirecte qu'il falloit tenir pour cela. Les ci-devant comte d'Artois et prince de Lambesc avoient à leur disposition une compagnie de maréchaussée particulière, dépendante d'eux seuls, et ne reconnoissant, après la volonté de ces princes, ni loi, ni tribunal, ni supérieurs: en un mot, cette maréchaussée clandestine n'étoit enregistrée en aucune cour, n'étoit portée sur aucunes dépenses (1) On reproche au commandant de la garde nationale de Marseille, d'être en correspondance avec M. la Favette. A la vérité M. la Fayette est un citoyen suspect, et très-suspect; mais encore faudroit il produire la correspondance. de l'administration générale, pas même inscrite dans l'almanach royal, et en activité dans toute l'ile de France, ne reconnoissoit aucunement le grand prévôt de cette province. Cette compagnie existe encore; et ce qu'il y a de plus surprenant, elle exerce son ténébreux ministère avec plus de force que jamais. A la mort du prince de Soubise, Lambesc fut investi des capitaineries du défunt. Il déploya, dès le premier jour, dans cette administration toute la dureté qu'il a si bien manifestée. Dévoué au comte d'Artois, ils lièrent à cet égard leurs plaisirs et leur génie. Le peuple des capitaineries en question avoit encore, respiré malgré le régime oppresseur des chasses; à l'approche de ces deux princes, il n'y eut plus de repos pour lui; les vexations, les prohibitions de toute espèce furent inventées. On se figure assez ce qu'il en dut être par ce mot de Lambesc: Il se plaignit aux gens de justice de la nonchalance du sieur Gueroult, chevalier de Saint-Louis, capitaine de la Muette; on lui représenta que les propriétaires des campagnes en étoient assez contens, à cause de son humanité et de sa bonté: Oui, oui, dit Lambesc de l'humanité, de la douceur, de la compassion! Oh bien ! je vous donnerai un homme qui vous mènera bien cela. En effet, le sieur Gueroult fut déplacé, et son poste fut donné au sieur Prioreau, qui depuis la révolution n'a cessé d'être nommé par les ministres pour commander leurs expéditions, et a servi l'aristocratie avec le même zèle que lorsqu'il étoit le Tristan des deux princes. La compagnie de maréchaussée que cet homme commande est de 8o cavaliers, très-bien montés et choisis en conséquence de leur ministère. On sait que le sieur Papillon, prévôt de l'île de France, veut attaquer l'illégalité de cette formation. Mais les plaintes portées contre lui-même Pont détourné de ce soin. Il est bien étonnant que |