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affaire, & qu'elles confeillent à la république d'abandonner fa nouvelle conftitution & de convoquer une diete, pour reprendre l'ancienne, comme étant le feul moyen de prévenir le mécontentement de l'impératrice & par conféquent les plus grands malheurs, qui menacent la Pologne. Nous ne pouvions rien nous promettre de la cour de Vienne; l'on connoît fes anciennes liaisons avec la Ruffie : mais l'on efpéroit d'être appuyé du côté de la Pruffe. Voici la copie de la lettre que le roi Stanislas avoit écrite à Fréderic- Guillaume, en date du 31 Mai dernier, relativement la fituation actuelle de la Pologne.

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Monfieur mon frere. Cette lettre fera remise à V. M. par le comte Potocki, grand-maréchal de Lithuanie. Je l'écris à une époque où tout m'impose le devoir de défendre l'indépendance & le territoire de la Pologne. L'un & l'autre viennent d'être évidemment attaqués par les prétentions de S. M. l'impératrice de Ruffie, prononcées dans fa Déclaration du 18 Mai, & par les hoftilités qui l'ont Suivie. Si Palliance qui existe entre V. M. eft un titre pour réclamer fon Secours, il m'importe effenciellement de favoir d'elle le mode qu'elle veut prescrire à fes engagemens. La connoissance pofitive des fentimens de V. M. m'eft auffi nécessaire pour ma conduite que fes forces le feroient pour mes fuccès. Il est conftant que, le territoire de la république garantie par V. M. eft violé, que fon indépendance eft compromife & attaquée d'une maniere fi générale & fi étendue, qu'en Je livrant même aux interprétations les plus fubtiles, il eft impoffible de la reftreindre au feul article de la nouvelle conftitution. Dans une occafion où comme alliée, la dignité de V. M. est fi intimement unie avec l'indépendance & l'honneur de la république, je dois m'attendre qu'elle voudra me faire com

noître fes fentimens. Ma confiancé en V. M. n'aura d'autres bornes que celles qu'elle y mettra elle-même.

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plus les fecours qu'il lui plaira de donner à la Pologne , feront clairement & promptement énoncés, &* plus ils deviendront pour elle avantageux & précieux.

Au milieu de mes inquiétudes & de mes peines, ce qui me confole, c'est que jamais cause ne fut meilleure ni dans le cas d'avoir pour appui un allié plus refpectable & plus loyal aux yeux des contemporains & de la postérité.

Tout ce que V. M. voudra & daignera confier au maréchal Potocki, porteur de ma préfente, Sera confié avec fureté & utilité, parce qu'il jouit de toute ma confiance, & de celle de la nation unie avec moi.

C'est avec les fentimens de la plus haute confidération & de l'amitié la plus vraie, que je fuis, De V. M. le bon frere Staniflas.

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Le roi de Pruffe a fait à cette lettre la réponse fuivante, datée de Berlin, le 8 Juin.

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M. mon frere. Le grand maréchal de Lithuanie, le comte Potocki, ma remis la lettre que S. M. m'a écrite en date du 31 Mai. J'y vois avec regret les embarras dans lefquels la république de Pologne fe trouve aujourd'hui engagée; mais j'avouerai auffi avec franchife, qu'après tout ce qui s'eft paffé depuis une année, ils étoient à prévoir. S. M. fe rappellera que dans plus d'une occafion le marquis de Luchefini a été chargé de lui manifefter tant à elle-même qu'aux membres prépondérans du gouvernement mes juftes appréhenfions à ce fujet. Dès le moment, où le rétabliffement de la tranquillité générale en Europe m'a permis de m'expliquer & que l'impératrice de Ruffie a laiffé entrevoir une oppofition décidée contre l'ordre des chofes établi par la révolution du 3 Mai 1791, ma façon de penfer & le langage de mes miniftres n'ont jamais varié, & en regardant d'un

oil tranquille la nouvelle conftitution que la république s'eft donnée à mon infu & fans mą concurrence, je n'ai jamais fongé à la foutenir ou à la protéger; j'ai prédit au contrai re, que les mefures menaçantes & les préparatifs de guerre auxquels la diete n'a ceffé de vifer coup fur coup, provoqueroient infailliblement le reffentiment de l'impératrice de Ruffie, & attire. roient à la Pologne les maux qu'on prétendoit éviter. L'événement a juftifié ces apparences, & on ne fauroit fe diffimuler dans le moment présent que fans la nouvelle forme de gouvernement de la république, & fans les efforts qu'elle a annoncés pour la foutenir, la cour de Ruffie ne fe feroit point décidée pour les démarches vigoureuses, qu'elle vient d'embraffer, Quelle que foit l'amitié que je voue à V. M., & la part que je prends à tout ce qui la concerne elle fentira elle-même que l'état des chofes ayant entiérement changé depuis l'alliance que j'ai contractée avec la république, & les conjonctures préfentes amenées par la conftitution du 3 Mai 1791, poftérieure à mon traité, n'étant point applicables aux engagemens qui fe trouvent ftipulés, il ne tient pas à moi de déférer à l'attente de S. M., fi les intentions du parti patriotique font toujours les mêmes, & s'il perfifte à vouloir foutenir fon ouvrage. Mais fi en revenant fur fes pas, il confidéroit les difficultés qui s'élevent de tous côtés, je ferois tout prêt à me concerter avec S. M. l'impératrice de Ruffie, & de m'entendre en même tems avec la cour de Vienne pour tâcher de concilier les différens intérêts & convenir des mefures capables de rendre à la Rologne fa tranquillité.

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Je me flatte que S. M. retrouvera, dans ces difpofitions & dans ces affurances, les fentimens de l'amitié fincere & de confidération avec laquelle je fuis &c.

Fréderic-Guillaume.,,

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Le bruit s'étoit répandu ici que dans une action qui a eu lieu du 12 au 13 de ce mois fur la riviere de Niemen, à quelque distance de la ville de Mir en Lithuanie, le lieutenant général Judycki, qui commandoit un corps Polonois, avoit totalement défait un corps ennemi de 5 mille hommes. Mais nous avons appris peu après que ce combat n'avoit été rien moins qu'à notre avantage. Nos troupes ont été obligées de faire une retraite générale, les Ruffes ayant paffé le fleuve à la nage pour tomber fur nos derrieres. Elles furent poursuivies jufques dans la ville de Niefwicz par l'ennemi, avec une perte confidérable. En même tems nous apprenons que les Ruffes, aux ordres du prince Dolgorucki, font entrés à Wilna, capitale du grand duché de Lithuanie, tambour battant & drapeaux déployés. Tous nos corps de troupes Lithuaniennes s'affemblent maintenant près de Grodno, au palatinat de Troki, où s'eft auffi rendu le général Judycki, d'autant plus que les généraux Ruffes, Melin & Ferfen, à la tête d'un corps du prince Dolgorucki, s'avancent de plus en plus fur notre territoire. Minski eft déjà entre leurs mains. Nos armes ne font pas plus heureuses en Ukraine. On affure que le général Ruffe, Kochowski, s'étant approché tout-à-coup de Lubar avec 40,000 hommes, y a attaqué de plufieurs côtés à la fois, les troupes commandées par le prince Jofeph Poniatowski, & que dans cette affaire, le brave Oberzinski a été tué, & le major Perekladowski fait prifonnier. Les levées

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de recrues fe continuent avec la plus grande activité dans toute l'étendue du royaume. On parle cependant d'une fufpenfion d'armes dans laquelle on négociera pour arranger, s'il est poffible, les chofes à l'amiable. M. de Bulgakow, ambaffadeur de Ruffie, eft encore ici : ce qui donne quelque probabilité à ce bruit.

Le comte Severin de Rzewuski, ci-devant général de nos armées, qui fe trouve maintenant dans celle des Ruffes, a envoyé un Univerfal au prince Poniatowski & aux troupes à fes ordres, pour leur enjoindre de faire cause commune avec lui contre la nouvelle conftitution, & de fe conduire, vis-à-vis des troupes Ruffes, comme avec une armée auxiliaire de la confédération générale établie à Tergowitz, 'contre la diete actuelle, qui tente d'opprimer la nobleffe & même de perdre la liberté. Le prince Poniatowski n'a fait aucun cas de cet Univerfal, & a répondu au comte de Rzewuski, pour le prier de fupprimer dorénavant fes inutiles décrets,

ESPAGNE.

MADRID (le 20 Juin). Le roi & la reine feront de retour le 30 de ce mois d'Aranjuez en cette capitale, où ils féjourneront jusqu'après la fête de S. Louis,

M. Jacques Jackson ayant été nommé par S. M. britannique, fecrétaire d'ambaffade près de notre cour avec le caractere de miniftreplénipotentiaire pendant l'abfence du lord St.-Helen, ambaffadeur de la cour de Lon

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