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de l'Euchariftie par la difficulté d'en approcher dig

nement.

3o. D'élever la grace à un tel point, que fans elle l'homme ne pût rien, & qu'elle feule opérât par elle-même.

4. De publier que Jefus-Chrift n'eft pas mort pour tous les hommes.

5. D'établir, qu'il eft des commandemens impoffibles, que la grace elle-même ne peut quelquefois faire obferver; -- dogme qui conduit au

fatalisme.

6. D'affoiblir la confiance, que tous les Catholiques avoient dans les miniftres de la Religion au tribunal de la Confeffion, afin que les leçons orthodoxes de ces guides facrés ne s'oppofaffent point à l'exécution des projets de la fociété.

7o. De reftreindre l'autorité du Pape aux feules affemblées des conciles; afin de pouvoir appeller des décifions du St-Siege, fans croire pour cela davantage à celles des conciles.

Dans ces différens articles, on trouve le germe d'une fecte née depuis, dans laquelle le rigorifie devint le fyftême des hommes religieux, & fervit bientôt aux fuccès du fyftème philofophique, dont les auteurs plus ingénieux, plus adroits, mais auffi plus dangereux & non moins intolérans projetterent d'affervir bientôt l'Europe.

La fecte derniere, qui fervit de piédestal à la fecte aujourd'hui regnante, avoit un fénat qui renfermoit dans fon fein les véritables fecrets de la fociété. On abandonnoit à ce vulgaire, né pour obéir & croire fur parole; tout ce qui étoit de rit apparent & de dogme analogue aux dogmes reçus. Mais dès-lors toutes ces fectes, entraînées par un même fentiment de haine contre la feule Religion à laquelle appartient le furnom d'univerfelle, femblerent figner une double ligue; la premiere contre Rome & fes enfans, la feconde contre les rois & leurs droits héréditaires.

Ce qui n'avoit été dans les douzieme & treizieme fiecles qu'une lutte d'opinions religieufes, devint dans les 15e. & 16. fiecles ainfi que dans les fuivans, un moyen de couvrir des fyftêmes politiques & des trames factieufes; alors des courtisans mécontens du fouverain, des intrigans fubalternes, qui fe croyoient faits pour être plus récompensés qu'ils ne l'étoient, bien que leur nullité n'eût déjà que trop coûté à l'état, entrerent dans cette affociation, dont le but étoit d'abattre & le chef du monde Chrétien, & les chefs des peuples compofant les deux mondes. Dès 1729, le chevalier Folard qui avoit faifi tous les fils de cette trame ourdie avec autant d'art que de myftere (a), annonça qu'il fe préparoit en Europe une révolution, dont l'enfemble étoit prefque imperceptible. Il appelloit tous les fouverains à fixer leur attention fur cette confpiration d'autant plus redoutable, que bientôt fon action devoit également frapper fur toutes les puiffances légitimes.,,

Galerie de Portraits modernes.

ES Portraits fe trouvent à la fin d'un

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Ouvrage que nous avons déjà fait amplement connoître *. Il en eft de fi reffemblans 1 & 15 & fi excellemment affortis à certains perfon- Mai & 1 nages très-peu rares dans les mœurs actuelles, Juin, p. 3, qu'il faut les regarder comme des leçons en 83, 181, peinture. Et c'est peut-être une des meilleures manieres d'inftruire, de rappeller l'attention de l'homme docile & modefte fur fes défauts, & de lui infpirer le defir de s'en corriger.

(a) Il avoit été lui-même un ardent partifan de la fecte, & on Pa vu figurer dans les fcenes du cimetiere de St.-Médard; mais il revint de cette folle & mourut dans des fentimens grès-catholiques.

On comprend que les traits de ces partraits moraux, ne conviennent pas tous à un même individu, mais celui qui ne fe flatte pas, trouve çà & là quelque endroit applicable, & ne manque pas de fe dire: mutato nomine, de te fabula narratur. Ceux qui ne s'y reconnoîtront à aucun égard, & qu'on ne peut que complimenter fur cette diffemblance complette, prendront plaifir à voir fi pittorefquement deffinés des individus qu'ils ont converfés plus d'une fois, & dont ils retrouveront dans cette Galerie la parfaite image. Je transcrirai quelques-uns de ces portraits qui feront apprécier les talens de ce nouveau Théophrafte.

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CLÉON, dites-vous, n'a point de carac tere. Vous ne lui connoiffez point de vices. Il veut ce que veulent les autres, & il eft comme tout le monde. Cela fignifie honnêtement que Cléon a un caractere pitoyable qui fe moule fur les autres, quels qu'ils foient; que Cléon n'a en effet aucune vertu, puifqu'il n'en a que comme tout le monde; que Cléon au contraire a tous les vices, puisqu'il a ceux de tout le monde. Ne feroit-il pas moins fàcheux que Cléon choisit, & qu'il eût un caractere décidé même pour quelque paffion en particulier qu'il fût par exemple, avare ou diffipateur, fourbe ou colere, ambitieux ou libertin, joueur, orgueilleux, capricieux, ou livré aux excès de la table & du vin? En effet, il est tout cela à la fois, dès qu'il est tout cela fucceffivement, & tour-à-tour. C'eft un homme qui n'a point de principes ni de bouf

fole; qui d'un faut franchiroit la distance d'une chartreuse à une orgie. Cléon avec Ca

tilina auroit bouleverfé la république : Cléon avec Néron eût plaifanté en voyant brûler Rome: Cléon feroit allé avec Vanini au bout du monde prêcher l'athéifme: Cléon fe feroit fait vice-protecteur, & complice d'un régicide avec Cromwell.... Cléon, il est vrai, graces à fon heureufe étoile, n'eft pas de la claffe des premiers fcélérats de l'univers; mais au befoin il leur eût fervi de fecond à tous. ""

"

Douce, modefte, pieufe comme un ange, à vingt-cinq ans, DAPHNE fuyoit le monde, partageoit fon tems entre la priere, le travail, la lecture, les bonnes œuvres, & paroiffoit fi accomplie, que toutes les meres vertueuses la propofoient pour modele à leurs filles.

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Aujourd'hui c'eft autre chofe ! A 45 ans Daphné eft de toutes les affemblées, vole à tous les plaifirs, brille à tous les fpectacles, aime le luxe, la parure, les équipages, les chiens, les finges, les perroquets, le jeu, la danfe, la mufique, la chaffe & les voyages. Perfonne dans Paris n'a comme elle une collection curieufe d'almanachs, de vaudevilles, de grotesques, de marmoufets & de colifichets en tout genre. En un mot, toutes les petites manies à la mode font de fon goût. Elle a été l'une des plus conftantes héroïnes du magnétifme fon affiduité aux célebres repréfentations de Figaro, prouve à quel point elle eftime le bon comique; & pour un ballon, jufqu'où n'iroit-elle pas ? Daphné eft un

prodige de contradiction. Mêre avant l'âge, fuivant toute apparence elle mourra jeune. „

Si vous demandez à PANTEROPHRASTE quelle heure il eft, vous apprendrez que madame Gilette fa mere avoit reçu du milord Clawer une montre angloise, qu'on n'eût pas eue pour quatre-vingts piftoles à Paris.... Qu'un jour fa chaife ayant verfé dans la route d'Avignon, de forte que fa femme-de-chambre fe rompit les deux bras, heureufement la bonne dame, qui trembloit pour fa montre, en fut quitte pour faire remettre à Lyon un crystal à ce magnifique chef-d'œuvre d'horlogerie.... Que cinq ou fix ans avant cette petite aventure, elle avoit eu l'efprit de l'oublier fur fa table de toilette dans une auberge d'où elle partoit de grand matin qu'en conféquence il fallut à un domestique nommé la Verdure, courir vingt-cinq lieues à franc-étrier pour l'aller chercher que par le plus grand bonheur du monde, le fénéchal du lieu, qu'il avoit vu procureur-fifcal du marquis de Banaros, cousin de fa maîtreffe, étant honnête-homme, fit des menaces fi férieufes, qu'à la fin on trouva la célebre montre.... Que madame Gilette fe connoiffoit beaucoup en bijoux qu'entre autres bagatelles, elle avoit une tabatiere d'éme. raude d'un goût extrêmement recherché autrefois, & une boîte à mouches d'un mérite rare & fingulier.... Qu'elle n'auroit pas donné fa garniture de diamans pour tous ceux de l'empereur.... Qu'un feigneur de fes parens, portant même nom & armes, étoit encore

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