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donne aujourd'hui au public, avec d'autant plus de confiance, qu'il a paru les defirer avec plus d'ardeur. En effet, les Lettres font prefque toujours ce qu'il y a de plus intéreffant parmi les ouvrages de toutes fortes d'auteurs. Elles font à l'égard des autres ouvrages, ce que la converfation eft à l'égard des harangues & des actions publiques. Et comme il n'y a perfonne qui n'aimât mieux converfer avec tout ce qu'il y a eu de grands hommes & de faints perfonnages, que de les entendre parler en public, il n'y a perfonne auffi qui ne foit plus touché de ce qui nous refte de leurs Lettres que de leurs autres ouvrages; parce qu'enfin on aime à voir les hommes tels qu'ils font,,& que ce qui les montre fous leur forme naturelle, & avec le plus de naïveté, est toujours ce qui plaît le plus. „

Lettres fur les dangers de changer la conftitution primitive d'un gouvernement public, écrites à un patriote Hollandois.

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Noftrum eft, fi nec ingrati, nec imprudentes effe volumus, eam rempublicam conftantes tueri, quam ratio fuadet, probant experimenta, commendat antiquitas. Hugo Grotius, de Antiq. Reip. Bat.

A Leyde, chez J. Cyfveer. I vol. in-8vo, 2 fl. de Hollande.

E n'ai pas lu cet ouvrage que je ne connois que par le titre. Mais fi l'auteur a profité de tous les avantages de la thefe qu'il défend, il eft certain qu'il impofera filence à fes adverfaires. Outre les raifons les plus convaincantes, les autorités les plus graves & les plus refpectées, il a pour lui les faits, & c'eft bien là le grand argument qui parle aux igno

rans

rans comme aux favans; il a pour lui l'état déplorable de tous les états où l'efprit de nouveauté & de prétendue réforme a fu s'introduire, foit par l'imbécillité des fouverains, foit par les intrigues de la démocratie, ou par tous les deux enfemble: car cette union est une chofe très-ordinaire. Mais les grands princes favent s'en préferver. On connoît le mot de Charles Quint. Un gouvernement établi marche de lui-même ; ceux qui propojent des nouveautés, font les perturbateurs du repos public.

Vita venerabilis patris Emmanuelis Correa, e focietate Jefu, in Brafilia miffionarii; unà cum adjun&tis animadverfionibus hiftoricis. In fano fan&ti Martini. 1789. 1 vol. in-12. de 303 pag.

MMANUEL Correa eft un des ouvriers

Eévangéliques qui s'eft le plus diftingue

dans les vaftes champs que l'Amérique offroit au zele apoftolique, avant que la politique du philofophifme foit venue ravager ces pla ges à peine défrichées par les travaux de la Religion. Sa Vie pleine de leçons & d'exemples, & qui préfente plus d'un fujet de réflexions à un efprit jufte & folide (a), n'eft cependant pas ce qu'il y a de plus remarqua

(a) Né à Scalapa, bourg du Portugal, d'une famille ancienne & noble, en 1712, Emmanuel CorTome 11. R

ble dans ce volume. Les notes font d'un intérêt tout autrement prononcé, pour l'hiftoire moderne, & bien propres à faire apprécier des hommes très-fameux dans les événemens de ce fiecle. C'eft en quelque forte un précis hiftorique du miniftere trop fameux du marquis de Pombal, de la fuppreffion des Jéfuites, & d'autres affaires qui ont fait tant de bruit dans ces derniers tems, & que l'état actuel des chofes en Europe, & celui qui fe prépare, rendent particuliérement remarquables. On y voit clairement le germe des fruits qu'on vouloit produire, la préparation des événemens qu'on defiroit, & l'abolition des obftacles qui pouvoient en prévenir ou en arrêter le développement. Les annales du genre humain y gagneroient fi cet ouvrage étoit plus répandu; mais étant écrit en latin, il fera peu lu, l'ignorance de la génération actuelle ne franchiffant guere l'efpace de l'A BC de la langue populaire. Nous en tranfcrirons cependant quelques paffages.

Un des traits les plus incroyables de la politique de Carvalho eft celui qui regarde une Bulle de Benoit XIV. Les Jéfuites ayant obtenu de la cour de Madrid la pleine liberté des Indiens que leurs travaux avoient civilifés, ne furent pas également heureux à celle de Por

rea entra chez les Jéfuites en 1729, & fut quelque tems après envoyé en Amérique, où, après avoir enfeigné la philofophie à Fernambuco & la théologie à Bahia (Baie de tous les Saints), & s'être livré en même tems à tous les travaux du zele évangélique, il fut arrêté avec les autres Jéfuites par ordre du miniftre Carvalho, transporté à Lisbonne & de-là à Rome, où il eft mort en 1761.

tugal. Les colons Portugais afferviffoient les néophites, & le miniftere paroiffoit au moins diffimuler. Les Jéfuites engagerent le roi d'Efpagne à demander un Bref de Benoît XIV en faveur de la liberté Indienne, perfuadés que le roi de Portugal y auroit les plus grands égards. Le Bref fut expédié, & envoyé à Madrid & à Lisbonne. Dans cette derniere cour on n'en fut pas trop content, & le Bref fut mis de côté. Carvalho le retrouve au moment qu'il travailloit à la deftruction des Jéfuites, & le publie comme une preuve de l'esclavage où les Jéfuites réduifoient les Indiens, en déclarant que c'étoit contre eux que le Bref avoit été expédié. Il faut entendre l'auteur. Après avoir rapporté les peines infinies que s'étoient données les miffionnaires pour défendre leurs néophytes de l'avidité & de la dureté des colons, il continue de la forte. Cùm hæc om→ nia notiffima fint, extentque de hâc re fummæ autoritates & teftimonia præftantiffimorum hominum, præfulum videlicèt, prætorum, moderatorum civitatum, & ejus ætatis fcriptorum, nihilominùs Carvalhus, homo acutus & eruditus, America Lufitanæ Jefuitas, tamquàm Indorum libertatis op"preffores, infimulare non dubitavit ; &, ", quod caput eft, Benedicti XIV Apoftolicas incipit Litteras * , quas Breve appellant, ad eam (Immenfa Paftorum rem próbandam, confirmandamque in mePrincipis dium producit; quæ quidem Litteræ Jefuita- extat in rum operâ a commemorato Pontifice im- I. Tom. petratæ fuerant. Cum enim nonnulli Lufi- Bullar. » tanorum Paraenfium annis 1737 1738 & XIV.

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» 1739 Indorum Hifpanorum pagos ad fiu. men Orinocum pofitos fubitis incurfionibus infeftare cœpiffent, & pacatos homines in fervitutem iniquiffimè perducere; Jefuitæ Hif „pani, quorum curæ ii pagi commiffi erant, de eâ re Madritum fcripferunt, & apud catholicum Hifpaniarum regem conquefti funt. Aula Madritenfis eas, de quibus agimus, Litteras a Benedicto XIV obtinuit. Hujufmodi Litteræ miffæ fuerunt ad aulam fideliffimi », regis Joannis V, qui vel politicâ ratione adductus, quòd exterorum operâ impetratæ ,, fuiffent; vel quia, re diligenter indagatâ , ,, repertum fuit, Paraenfes ab injustis incurfionibus omninò ceffaffe, commemoratas Litteras tunc promulgari noluit. At bonus vir Carvalhus & optimâ fide præditus pontificias hujufmodi Litteras, quafi fuiffent in ,, Societatis homines fcriptæ, evulgandas promulgandafque curavit; atque ita Indorum ,, libertatis quamquàm erat alioquin morta,, lium ftolidiffimus, in urgendo tamen hoc fibi commiffo negotio ftrenuè fe geffit. "

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On trouve ailleurs: un paffage remarquable fur les dépenfes qu'a fait Carvalho, relativement à fon projet de détruire les Jéfuites. Les détails que l'auteur nous donne fur ce fujet, font trop délicats pour trouver place ici. Après avoir parlé d'une fomme de 30000 ducats diftribuée dans une certaine ville, il porte la dépenfe totale à un calcul bien confidérable. Carvalhus enim, quamquàm erat pecuniæ tenaciffimus, & a fumptibus faciendis valdė » alienus (utpotè qui in magnâ penuriâ, & » rei familiaris anguftiâ natus & educatus fue

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