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vint lui-même critiquer ce projet, fait pour le sauver! M. Léon Renault le critiqua également, mais par d'autres motifs. Les membres de la commission allèrent trouver alors M. Constans et lui demandèrent s'il y tenait beaucoup. Il répondit que le gouvernement tout entier «< voulait qu'il fût voté avant la clôture de la session ». Cependant, la commission hésitait. Le gouvernement reproduisit alors son projet, mais en le développant de la manière suivante :

Art. 1er. Le budget de la Préfecture de police est rattaché au budget de l'Etat. A partir de 1882, les crédits nécesssires à ce service seront ouverts dans un chapitre spécial du budget du ministère de l'intérieur.

Art. 2.

- Les dispositions du décret du 24 octobre 1859, sont maintenues avec les additions suivantes :

1o La police des halles et marchés; l'inspection des denrées de toute

nature:

2o Le service de la navigation et des ports:

3o Le service des poids et mesures;

4o La police du matériel des voitures publiques et le contrôle de leur exploitation;

5° L'administration de la fourrière;

6o La police de la salubrité, le conseil d'hygiène, le laboratoire municipal de chimie, les établissements insalubres;

7° Le service des sapeurs-pompiers et le matériel des incendies. Art. 3. Les crédits nécessaires au fonctionnement de tous ces ser vices figureront au budget de la ville de Paris à titre obligatoire. Art. 4. Le préfet de police sera tenu, à l'égard des matières énumérées en l'article 2, d'indiquer et au besoin de requérir les mesures qu'il jugera utiles.

Si ces indications ne sont pas suivies d'effet, il en référera au ministre compétent.

Art. 5.

Pour les mesures d'exécution relatives aux services cidessus, le personnel de la police municipale sera à la disposition du préfet de la Seine dans des conditions et des formes à déterminer par un règlement d'administration publique.

Dans le cas où des agents du personnel de la police municipale seront détachés en permanence pour des services spéciaux, ils seront payés sur le budget de la ville de Paris.

Quand la commission reçut ce projet, elle déclara qu'il demandait un examen si approfondi qu'elle n'avait

1. Voir le texte imprimé, p. 44.

pas le temps de s'y livrer avant la fin de la session : et il disparut avec la Chambre.

Ce succès a naturellement engagé M. Waldeck-Rousseau à le reprendre, M. Jules Ferry étant ministre aujourd'hui, comme il l'était alors (27 octobre 1883). Le nouveau projet a toute la simplicité du premier.

Il rattache les chapitres I, II, III de la Préfecture de police au budget de l'État; c'est-à-dire l'administration centrale, les commissariats de police, la police municipale, toute la police en un mot. Il laisse au Conseil municipal, pour s'amuser, les ports et navigation, les halles et marchés, le laboratoire de chimie et le service de la Bourse.

L'idéal de M. Waldeck-Rousseau est d'être le directeur des mouchards, le patron des indicateurs, le confident des agents des mœurs, le ministre de la police!

Devenu chef de la police des rues à Paris, le ministre sera désormais responsable de tous les accidents qui se produisent, de toutes les attaques nocturnes, des violations de la loi quotidiennes qui se commettent au Dépôt. Nous le verrons tomber à propos d'un fait-divers. MM. Brisson et Floquet avaient cependant, dans la séance du 11 avril 1881, montré combien il était impossible que les débats de police pussent venir absorber les instants de la Chambre des députés!

La loi du 14 décembre 1789 a chargé le pouvoir municipal de faire jouir « les habitants d'une bonne police ». M. Waldeck-Rousseau remonte au delà. C'est lui désormais qui veut faire la police des Parisiens! Il veut veiller à leur sécurité! Ils seraient vraiment bien difficiles, s'ils n'étaient pas satisfaits d'être rossés, arrêtés, molestés par un ministre au lieu de l'être par un préfet de police!

Du reste, sous certains rapports, cela vaut mieux. Actuellement, il n'y a pas de responsabilité, le préfet de police se couvrant du ministère de l'intérieur.

Si ce projet est jamais adopté, la situation sera nette. Quand quelque abus sera commis, le conflit s'engagera

entre le Conseil municipal et le ministre. L'empêchera-t-il de lui voter des ordres du jour de blâme? Il les annulera; mais après? Et les députés de Paris ne seront-ils pas là pour porter la question à la tribune? Un ministre s'usera vite à ce jeu. M. Waldeck-Rousseau a derrière lui les exemples de MM. de Marcère, Lepère, Constans, Goblet, Cazot, qui, chaque fois qu'ils se sont compromis dans la défense de la Préfecture de police, sont sortis du débat rapetissés et éreintés.

En admettant que le ministère, que la Chambre adoptent ce projet de loi étonnant, M. Waldeck-Rousseau croit-il donc que le Conseil municipal va se contenter de la part qu'il lui laisse ?

La sécurité importe autant au Conseil municipal que la navigation et les ports, et le service de la Bourse que, dans sa condescendance, le ministre veut bien laisser à la Ville.

La lutte sera nettement et franchement engagée, si le projet arrive jusqu'à la discussion et au vote de la Chambre. Mais il est probable que ce projet aura le même sort que celui du 11 avril 1881. Au moment de l'aborder, les dé putés verront les difficultés qu'il provoque. Ils seront effrayés de l'esprit de réaction qui l'anime. Ils ne vou dront pas attacher leur nom à la reconstitution de l'héritage de Merlin (de Douai), de Fouché et de Maupas !

CHAPITRE III

LE CONSEIL MUNICIPAL ET LA PRÉFECTURE DE POLICE

I. La prétention de la Préfecture de police.

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Dépenses

penses. Répartition des dépenses. Augmentation des dépenses de la police municipale. - Part contributive de l'Etat. facultatives et dépenses obligatoires. Pas de contrôle. dations d'hommes. Le lieutenant de la Dame blanche. Les objets trouvés. Les comptes fantastiques.

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pation de l'agent de la sûreté.

II. Les ordres du jour.

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Dilapi

La grande préoccu

1er février 1879. Décret d'annulation. Ordre du jour Sigismond Lacroix. — Interpellation Maillard, 29 juillet 1879. Exactitude de M. Andrieux. M. Lombard.

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Triomphe de M. Andrieux. Ordre du jour Hovelacque, 27 mai 1880. Le budget de 1881. — 19 mars 1881, interpellation Depasse. 22 mars, lettre de M. Andrieux. Annu- Ordre du jour Lafont. 5 mai, retrait des dossiers.

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1882. Rôle ridicule du gouvernement et du conseil. Seul moyen de coercition.

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III. Refus du budget partiel. - Longanimité du Conseil.
de Lanessan.
messes du préfet de police. Vœux de M. Murat.
Hovelacque.

Proposition Yves Guyot, 27 décembre 1881.- Pro

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Discussion, 11 et 12 décembre 1882.-Les complices de la Préfecture de police.

I

Pour bien comprendre les rapports du Conseil municipal et de la Préfecture de police, il est nécessaire de rap peler en deux mots la situation légale. Régie par l'arrêté de me

sidor, copié lui-même sur l'ordonnance de 1667, elle prétend que toutes les attributions qui y sont mentionnées entraînent l'obligation de dépenses correspondantes. Le Conseil municipal reçoit du gouvernement une subvention pour la police municipale, dont le cadre est fixé par l'arrêté du chef du pouvoir exécutif du 20 juin 1871, la Préfec ture de police prétend qu'elle peut se mouvoir à l'aist au milieu de cet arrêté; qu'elle peut supprimer 3 sur 5 des inspecteurs divisionnaires, qui y sont prévus; mais si le Conseil municipal veut supprimer les deux autres, elle lui dénie ce droit2. L'arrêté prévoit 6,800 gardiens de la paix ou inspecteurs, mais ne fixe pas leur répartition entre diverses brigades, tant aux brigades de recherches, tant aux brigades politiques, à la brigade de sûreté, à la brigade des mœurs; le préfet s'attribue le droit de suppri mer la 4e brigade, le 12 mars 1879; un autre jour, il réunit la brigade des mœurs et la brigade de la sûreté; mais sile conseil municipal veut intervenir, il déclare qu'en vert de l'arrêté de messidor, responsable seulement devant les ministres, il peut organiser la police à son gré, pour assurer les services dont il n'a pas à rendre compte au conseil municipal.

Le projet du budget de 1871 était de 16,278,772 fr. e celui de 1872 de 19,968,801 fr. Le projet de budget pour 1884 est de 23,952,631, en augmentation de dépenses de 259,483 fr. 52 sur celui de 1883, en augmentation 7,700,000 sur le budget de 1871, de 4 millions sur le bud get de 1872.

Voici comment se répartissent ces dépenses:

1. V. p. 101.

2. Séance du 27 décembre 1880.

de

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