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vierges ou femmes mariées feront, ainfi que leurs complices, punis de mort & leurs biens confifqués, lorfque les perfonnes ravies étoient de condition libre; & fi le raviffeur étoit de condition fervile, il y avoit contre lui peine du feu il déclare que le confentement de la perfonne ravie, ni celui de fes pere & mere, donné depuis l'enlevement, ne pourront exempter le raviffeur de cette peine; que les pere & mere qui dans ce cas garderont le filence, ou qui s'accommoderont à prix d'argent, fubiront eux-mêmes la peine de la déportation; il permet aux pere & mere, tu teurs & curateurs, freres & fœurs, maîtres & parens de la perfonne ravie, de tuer le raviffeur & fes complices qu'ils furprendroient dans l'acte même de l'enlevement ou dans leur fuite; il ne veut pas que le raviffeur puiffe s'aider de la prefcription ni de la voie de l'appel, ni qu'il puiffe jamais époufer la perfonne ravie quand même elle ou fes parens y confentiroient.

La loi Raptores cod. de epifcop. & cleric. qui concerne le Rapt des religieufes & des diaconeffes, porte qu'outre la peine de mort les biens feront confifqués au profit du monaftere des religieufes ou de l'église à laquelle la perfonne ravie étoit attachée; elle permet auffi au pere & autres parens, tuteurs & curateurs de tuer le raviffeur furpris en flagrant délit.

La novelle 123, prononce la même peine de mort contre le raviffeur & fes complices, foit que la religieufe ait confenti ou non, & au cas qu'elle ait confenti, la loi veut qu'elle foit punie févérement par la fupérieure du monaftere.

Par rapport à la confifcation, les novelles 143 & 150, décident qu'elle appartiendra au fifc & non à la perfonne ravie, ni à fes parens qui s'en font rendus indignes pour n'avoir pas veillé fuffifamment à la garde de leurs enfans.

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C'EST

RE

RECÈS DE L'EMPIRE.

'EST ainfi qu'on nomme en général toutes les conftitutions, les réglemens & les loix fondamentales de l'Empire. Mais dans un fens moins étendu, ce font les loix univerfelles portées par l'empereur & par les Etats de l'Empire dans la diete, voyez l'article DIETE. On croit que l'origine du mot receffus vient de ce que ces loix fe faifoient autrefois au moment où l'affemblée des Etats ou la diete alloit fe féparer ou fe retirer.

Les jurifconfultes Allemands diftinguent les Recès de l'Empire en géné, raux & en particuliers. Les premiers font les loix faites par tous les Etats affemblés en corps; les derniers font les réfolutions prifes par les députations particulieres. On les diftingue encore en receffus primarios & receffus fecundarios. Les premiers font ceux que l'on fait imprimer & que l'on publie; les autres font des réfolutions que l'on tient fecrettes, & qui fe dépofent dans les archives de l'Empire, dont l'électeur de Mayence a la garde. Voyez Vitriarii inftitutiones juris publici Romano-germanici.

RÉCOMPENSE, f. f.

LES Récompenfes & les peines forment une branche de la justice bien

intéreffante pour les corps politiques, & qui, fans aucun doute, peut & doit demeurer entre les mains du prince. Delà dépendent l'arrangement ou le défordre dans l'intérieur : & au dehors la gloire ou les mauvais fuccès. Il n'y a pas de caufe auffi prochaine des talens ou de l'inertie; de la vertu ou de la dépravation, que la jufte ou l'injufte diftribution du prix du mérite, & du châtiment de l'indignité.

Difons tout; récompenfer & punir eft le reffort univerfel de toute forte de gouvernement. C'eft, puifque cette expreffion a été admife, le principe des principes. Sans la récompenfe & la punition, la vertu dépérit; l'honneur s'éteint, la crainte difparoît. Ce font comme des planetes fans force, fans aЯtion, fans vie, fi le premier mobile ne leur communique le mou

vement.

Ces roues fecondes ont, à la vérité, plus ou moins de puiffance, fuivant la grandeur que l'on donne à chacune d'elles dans la machine; mais fubordonnées au même pendule, elles ne fauroient marcher féparées. On ne

connoît pas la vertu fans l'honneur; l'honneur fans un fentiment de vertu : ni l'un ni l'autre ne fubfifteroit fans la crainte, ne feroit-ce que celle de la honte & du reproche.

Le cardinal de Richelieu a dit, que quand on ne fe ferviroit d'autre principe que d'être inflexible pour châtier, & religieux à récompenfer, on ne fauroit mal gouverner. L'unique fecret de ce reffort infaillible, eft d'être également attentif à tous les deux.

Si on décore la vertu, & qu'on ne puniffe pas ce qu'on doit appeller des fautes, on ne fait qu'une moitié. Une ame fans fentimens fe paffe d'honneur, & croupit dans fa léthargie. Si la punition ne corrige pas celui qui l'effuie, du moins on le rend malgré lui utile à la fociété; il fert d'exemple. Si on ne récompense pas on décourage, & fi on ne fait que

châtier on abrutit.

Tout eft bien dans un Etat où ces maximes font fuivies : tout est mal où elles font négligées.

On pourroit dire que les Récompenfes font de pure grace; que tout citoyen eft obligé de fervir le corps politique dont il eft membre; que le fujet qui occupe une place a contracté l'obligation d'en remplir les devoirs; & que nous nous devons tous à la probité, pour l'amour de nous-mêmes. Cette thefe peut fe foutenir dans la fpéculation; fa conféquence feroit de fupprimer les Récompenfes, & ce parti vaudroit mieux, fans comparaison, que de les répandre mal-à-propos. Le mépris des gens de bien, & la faveur accordée aux mauvais fujets, font des abus du pouvoir, nuifibles au pou

voir même.

Mais l'expérience apprend que la Récompenfe eft néceffaire: obfervons qu'on doit la diftinguer du bienfait; l'une eft, pour ainfi dire, due à celui qui fe diftingue; elle eft due du moins à l'intérêt public, autant qu'elle excite l'émulation à le fervir; l'autre eft une pure libéralité du prince.

On ne doit pas envier au fouverain la fatisfaction de faire du bien à un fujet qu'il favorife; mais s'il a quelque foin de fa réputation, ce favori ne fera pas fans mérite. En général, il doit être avare de bienfaits, fi l'on prend ce terme dans fa fignification étroite. Plus il donnera gratuitement, moins il aura de quoi récompenfer; fon Etat & fa perfonne n'en feront pas fi bien fervis.

Toute récompense eft honorable, ou utile, ou tous les deux ensemble. Suivant l'idée commune des hommes, plus les Récompenfes amenent de profit, moins l'opinion y attache d'honneur. Il devient plus grand, toutes chofes égales d'ailleurs, à proportion que l'utilité s'y trouve moindre. Il femble que l'honneur & l'intérêt ont de la peine à s'allier enfemble.

Dans les Etats populaires, les Récompenfes font plus honorables qu'utiles; ce font des triomphes, des ftatues, un furnom; c'eft que le peuple préfere l'utile à l'honorable; il le conferve pour lui. Si dans les monarchies les honneurs font moins grands, Purile y eft plus ordinairement attaché.

Le monarque s'approprie l'honorable du mérite de fes fujets, l'honneur eft fon apanage plus particulier; il n'aime pas à le communiquer.

La monarchie tyrannique ne connoît pas les Récompenfes. La fureté du tyran lui demandé d'avilir & d'appauvrir fes fujets, & de garder ses bienfaits pour s'attacher des fauvegardes.

Si une feule république fournit plus d'exemples de faits héroïques que plufieurs monarchies, c'eft que la gloire eft un aiguillon bien au-deffus de Î'intérêt, pour une ame faite pour l'héroïsme; elle s'éleve dans la proportion des honneurs auxquels elle peut aspirer.

Il eft au contraire quelquefois dangereux dans la monarchie d'en mériter de trop confidérables. Les foupçons & l'envie s'emparent facilement de l'efprit du prince. Parménion l'éprouva fous Alexandre, Bélifaire fous Juftinien. Les principes de la politique d'ufage étouffent les fentimens de l'humanité, & font des ingrats.

Les Récompenfes ont été les grandes caufes des victoires des Romains. On peut voir dans Polybe comment chaque action de quelque mérite étoit payée par un honneur. On diftribuoit le prix à l'iffue du combat. Que l'on faffe à cette circonftance toute l'attention qui lui eft due; une pareille promptitude ne donnoit pas le temps de faire agir les protecteurs; le témoignage de l'armée éclairoit le général, & auroit démenti des choix de faveur. Il ne laiffoit aucune incertitude fur le mérite qu'on couronnoit aux yeux de tous. Le foldat s'attendoit à ce fpectacle après l'action, il échauffoit fon imagination pendant fa durée.

Cet honneur n'étoit point paffager, il ne pouvoit être ignoré de perfonne outre la Récompenfe, il étoit permis à tous ceux qui en avoient reçu pour leur valeur, de porter dans les fpectacles un habit qui les diftinguoit; tout le peuple étoit inftruit que celui qui en étoit vêtu s'étoit signalé. Quel honneur d'un côté, & de l'autre quel objet d'émulation pour ceux qui ne l'avoient pas encore mérité! L'habit n'étoit pas l'enfeigne de la profeflion un ornement ajouté n'étoit pas la marque de l'ancienneté d'un fervice ufité. Le foldat pouvoit acquérir cette diftinction à fa premiere campagne, & ne le point obtenir après vingt ans de métier.

Quel éclat accompagnoit la gloire du triomphe! Un char fuperbe attelé de quatre chevaux de front, ufage réservé pour cette unique occafion; les richeffes des provinces que l'on portoit à fa fuite; des rois enchaînés qui le fuivoient; le bruit guerrier de l'armée victorieufe; les acclamations redoublées de la multitude; tous les yeux d'un peuple fouverain attachés sur le vainqueur; l'honneur ne peut être porté à un plus haut degré, fi on ajoute qu'on n'y élevoit que le mérite.

On trouve dans cette derniere réflexion tout le prix des Récompenfes romaines une pompe vaine, une couronne de gramen ou de feuilles de chêne n'ont aucune valeur intrinfeque on ne peut les eftimer affez lorsqu'elles font un témoignage assuré de la vertu.

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Les Romains par un même moyen excitoient aux actions diftinguées, & banniffoient l'avarice des motifs. Ils infpiroient à leurs citoyens une vertu defintéreffée, & ménageoient le tréfor public. Un foldat refufa une chaîne d'or des mains de Labienus, lieutenant de Céfar, & lui dit je n'ai pas cherché la Récompenfe d'un avare, mais celle d'un homme de cœur. Lorfque Marcus Marcellus dédia un temple à l'honneur & à la vertu, on le fépara en deux, de maniere qu'il falloit paffer par celui de la vertu, pour arriver à celui de l'honneur.

Si la Récompenfe a tant de puiffance fur les hommes, quoiqu'elle n'ait rien de réel, fi le témoignage qu'elle rend du mérite de celui qui la reçoit, fait tout fon prix; on doit dire que lorfqu'elle ne fera plus la preuve de ce mérite, elle fera fans effet, & n'aura plus de part dans l'eftime des hommes. Lorsqu'on permit en France aux feules femmes pudiques de porter des ceintures d'or, & qu'elles en virent porter à celles qu'elles favoient ne l'être pas, elles les jeterent & dirent: Bonne renommée vaut mieux que ceinture dorée.

Les Récompenfes pécuniaires données à la valeur font déplacées & hors du genre. Si l'intérêt devient l'objet du militaire, l'honneur fe perdra; un fentiment bas prendra la place d'un fentiment élevé. Lorfque les Romains diftribuoient de l'argent aux foldats, tous y avoient une part égale; ce n'étoit que le falaire de la fatigue.

Cependant où les honneurs font moins éclatans, & les befoins plus communs, comme dans les monarchies, on peut tolérer que l'on ajoute à l'honneur quelque émolument; il eft de la juftice par-tout, que celui qui a paffé fa vie à fervir fa patrie, ne vieilliffe pas dans la mifere. La Récompense d'intérêt eft due à la continuité des fervices jointe aux befoins, celle de l'honneur aux actions diftinguées; chaque chofe fera dans fa place.

Il arrive quelquefois qu'une action compliquée mérite la punition & la Récompenfe, l'une ne doit point fe compenfer avec l'autre il faut employer toutes les deux ce contrafte rend l'une & l'autre plus fenfibles; leur effet eft alors infaillible. La justice éclate dans cette conduite qui ne 'porte aucune émpreinte de la faveur.

Lorfqu'Epaminondas infultoit Lacédémone, un Spartiate fe jeta nu au milieu des ennemis, avec fes feules armes offenfives; on le couronna pour fon courage & fes actions; on le condamna à l'amende, pour avoir com-. battu fans bouclier.

Il faut avouer qu'il n'eft pas facile au fouverain, fur-tout dans un grand Etat, de faire un ufage bien régulier de ce grand mobile du gouvernement. Les qualités que l'on lui défire femblent même s'y oppofer. On veut qu'un prince foit bon & libéral : il est heureux que fon cœur foit capable d'amitié, & qu'il s'ouvre à un fentiment tendre pour fa famille; mais la faveur s'infinue à l'aide de ces qualités louables. Il faut qu'il fache être bon fans être facile, libéral feulement dans les occafions; fa justice doit mar

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