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SUR

LA PHYSIQUE,

SUR L'HISTOIRE NATURELLE

ET SUR LES ARTS,

AVEC DES PLANCHES EN TAILLE-DOUCE
DÉDIÉ ES

A Mgr. LE COMTE D'ARTOIS;
PAR M. l'Abbé ROZIER, de plufieurs Académies, & par
M. J. A. MONGE Z le jeune, Chanoine Régulier de Sainte-
Geneviève, des Académies Royales des Sciences de Rouen, de
Dijon, de Lyon, &c. &c.

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AU BUREAU du Journal de Phyfique, rue & Hôtel Serpente

M. D C C. L X X X I V.

!

OBSERVATIONS,

E T

MÉMOIRES

SUR

LA PHYSIQUE,

SUR L'HISTOIRE NATURELLE,
ET SUR LES ARTS ET MÉTIERS.

REMARQUES

Sur l'origine & la nature de la Matière verte de M. Priestley,
fur la production de l'air déphlogistiqué par le moyen de
cette matière, & fur le changement de l'eau en air déphlo-
giftiqué;

J

Par Jean INGEN-HOUSz.

E me fuis propofé de publier mes obfervations fur la nature de la
matière verte du Dour Priestley dans le fecond volume de mon Ouvrage

fur les végétaux, que j'avois efpéré de pouvoir mettre au jour depuis long-temps, ayant la matière prête, & ayant déjà ajouté à la fin de la Préface du premier tome un apperçu de plufieurs articles que j'avois deffein de traiter dans le volume fuivant.

Dans le temps que je travaillois encore aux recherches que je deftinois pour ce volume, j'envoyai à l'Imprimeur de Paris un manufcrit de différens Opufcules qui devoient faire un livre à part, & dont j'ai preffé, autant que j'ai pu, l'impreffion, pour envoyer enfuite le manufcrit du second volume des expériences fur les végétaux. Mais ayant été fruftré jufqu'à préfent dans l'attente de voir paroître cette collection d'Opufcules (1), je me fuis déterminé à communiquer au Public, par le moyen du Journal de Phylique, quelques remarques fur la matière verte, & fur quelques autres fujets, me réfervant d'en traiter plus amplement dans l'Ouvrage que j'ai indiqué.

M. Priestley, à qui les Sciences naturelles doivent déjà infiniment, a remarqué le premier, que lorfqu'on expofe au foleil de l'eau, fur-tout de l'eau de fource, il s'y engendre, après quelques jours, une fubftance verte, glutineufe au contact; & que, quand cette matière eft produite, on trouve dans le vafe une grande quantité d'air pur ou déphlogistiqué, qui fe développe pendant que le vafe eft expofé au foleil. Il avoit déjà obfervé auparavant, que les plantes possèdent la faculté de produire de l'air pur, de corriger l'air méphitifé ou phlogistiqué, & d'améliorer l'air commun, Mais en trouvant que cette opération falutaire n'étoit rien moins que conftante, & que les plantes enfermées avec l'air commun le gâtent fort fouvent, au lieu de l'améliorer, il devinoit fi peu la raifon de cette inconftance, qu'il paroiffoit prêt à abandonner un fyftême fi beau, fes expériences précédentes fembloient avoir mis hors de toute conteftation. La raifon principale pourquoi il commençoit à douter de la folidité de fon fyftême, étoit, qu'ayant enfermé des plantes dans des bouteilles remplies d'air, & contenant affez d'eau pour tenir les plantes en vie, il trouva, qu'après avoir ôté les plantes de ces bouteilles, la production d'air pur continuoit toujours comme auparavant; ce qui le fit conclure, que le développement de cet air pur, qu'il avoit attribué à la présence des plantes, étoit dû à la présence de la matière verte, dont il trouva les parois de

que

(1) M. Molitor, Profeffeur défigné de Chimie à Maïence, ayant traduit en Allemand ces Manufcrits, pour les publier dès que l'édition originaire feroit imprimée à Paris, s'impatientant, autant que moi, qu'on en différât continuellement l'impreffion, mit fa traduction fous preffe. Elle voit déjà le jour depuis le mois de Mars 1782. Le titre en eft: Johann Ingen-Houfz.... vermifchte Schriften Phyfisch-Medicinifchen Inhabts. Uiberfetzt und heraufgegeben von Niklas Karl Molitor.... Wien, bey Johann Paul Krauf, 1782. Vers le temps que j'envoie cet Ecrit, on m'annonce de Paris (au commencement de Novembre 1783), qu'on eft à la fin de l'impreffion dudit Ouvrage.

ces bouteilles enduites, & que les plantes n'avoient contribué en rien à la production de cet air. Ce peu de prédilection pour fon propre fyftême fait d'autant plus d'honneur à fon caractère, qu'elle eft rare parmi les Savans. S'il avoit pris la matière verte pour un végétal, il n'eût pu manquer de découvrir la raison pourquoi les plantes avoient tantôt amélioré & tantôt détérioré l'air; car ayant déjà reconnu que la matière verte ne fournissoit de l'air pur qu'au foleil, il en eût naturellement conclu (s'il avoit reconnu cette matière pour une plante), que les autres plantes devoient être dans le même cas: mais il fut fi éloigné de prendre cette matière pour un végétal, qu'en obfervant qu'elle s'engendre même dans les vaiffeaux fermés, & en n'y trouvant, par un examen réitéré, à l'aide de bons microscopes, aucune organisation, il croyoit que cette matière n'étoit, par fa nature, ni animale, ni végétale, & même qu'elle ne pouvoit être ni de l'une, ni de l'autre, mais qu'elle étoit une fubftance particulière fui generis, qu'il convenoit de défigner par un nom particulier, celui de matière verte fimplement. Dans cette fuppofition, il ne pouvoit que s'éloigner de plus en plus de la route, pour trouver la véritable caufe de l'incertitude ou inconftance qu'il obfervoit dans l'influence des végétaux fur l'air renfermé avec eux.

l'air

J'ai été affez heureux pour réfoudre l'énigme, & pour découvrir la raifon de cette incertitude, en trouvant que les végétaux produifent de pur feulement au foleil, & même en grande abondance, & qu'ils évaporent à l'ombre & pendant la nuit un air méphitique, mais en trèspetite quantité; qu'ils corrigent au foleil l'air ordinaire, gâté par quelque procédé phlogistique, & améliorent l'air bon, tandis qu'elles le méphitifent à un haut degré, à l'ombre & pendant la nuit. Ayant obfervé ces deux effets contraires, & découvert leurs causes, j'en conclus que, puifque les plantes ont le pouvoir de produire de l'air pur feulement au foleil, il étoit probable que la matière verte, qui produifoit le même effet, fût auffi une espèce de végétal, fans cependant avoir d'autre garant de ma conjecture que l'analogie des phénomènes. Nous allons voir fi ma fuppofition étoit fondée ou non.

M. Priestley ayant décrit la matière verte comme un fédiment muqueux de l'eau (dans fon quatrième volume fur les airs, imprimé en 1779), l'élève au rang des végétaux dans fon cinquième volume imprimé en 1781, fur le témoignage de fon ami M. Bewly, & il la claffe parmi les conferves, fans vouloir déterminer fi c'est la conferva fontinalis du Docteur Withering, ou quelque autre de cette espèce. M. Forfter l'avoit prife pour le by us botryoides de Linnée. M. Senebier, dans fon Ouvrage égale ment intéreffant & curieux fur la lumière folaire, imprimé en 1782, a cru que ni M. Priestley, ni M. Forfter n'ont connu la véritable nature, de cet être. Il dit qu'en examinant de plus près cette plante, il l'a reconnue pour être la conferva cefpitofa filis rectis undique divergentibus. Haller,

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