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Il n'y avait plus que trois jours avant le tournoi et dans toute la ville de Lyon on ne songeait qu'aux préparatifs de cette fête. Les gens du sire de Vaudrey dressaient des barrières; les chevaliers couraient chez les marchands, apprêtaient leurs costumes et leurs armes ; c'était à qui paraîtrait avec éclat dans cette joûte que la présence du monarque rendait encore plus solennelle.

Selon le ban qui avait été publié au nom du roi par le sire de Vaudrey, le tournoi s'ouvrit un lundi du mois de juillet de l'an 1491. Le tenant parut le premier dans la lice, et contre lui s'exercèrent le sénéchal Galliot de Genouillac, Bonneval, Chatillon, Bourdillon 1 Sandricourt 2 , jeunes et belliqueux favoris de Charles. Tous redoublaient d'efforts pour ne pas laisser sous les yeux du roi triompher un chevalier étranger.

Bayart, à peine âgé de dix-huit ans, et dont la taille ni les formes n'étaient point encore parvenues à leur développement, parut à son tour sur les rangs. Il avait pour son coup d'essai affaire à une des meilleures lances de l'époque ; mais, soit un heureux hasard, soit courtoisie du sire de Vaudrey, il fournit sa carrière à pied et à cheval, aussi bien que nul d'entre les combattan s Selon l'ordonnance du tournoi, chacun, après sa joûte, devait faire le tour de la lice, à visage découvert, pour que l'on reconnût celui qui avait bien ou mal fait.

1. Aussi disoit-on lors :

Chastillon, Bourdillon, Bonneval
Gouvernent le sang royal.

Aucuns y mirent Galliot, qui fut depuis grand écuyer et maître de l'artillerie de France. » (Brantôme, Hommes illustres françois, tom. II, disc. 19, pag. 163 de l'édition in.8.o, Paris, 1822).

2 Louis de Hédouville, célèbre pat le tournoi connu sous le nom de Pas de Sandricourt, qu'il donna le 16 septembre 1493, dans son château près de Pontoise, et dont la magnificence fut telle qu'elle le ruina complètement.

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Lorsque Bayart passa devant les dames, étonnées de sa jeunesse et de son extérieur peu viril, elles s'écrièrent en leur patois lyonnais: Vey vo cestou malotru, il a mieux fay que tous las autres.

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Le suffrage du roi vint compléter celui des dames. «Par la foi de mon corps, dit-il à son souper au comte de Ligny, Piquet a un début qui donne bonne espérance; mon cousin, je ne vous fis de la vie si bon présent. Sire, répondit le comte Vous avez plus contribué que moi à des succès dus à vos encouragemens. Dieu veuille qu'il ne s'arrête pas en si beau commencement; mais une chose m'inquiète, c'est de savoir la part que prendra Mons d'Ainay aux prospérités de son neveu.» Le roi se mit à rire, ainsi que toute la cour qui s'était déjà divertie aux dépens de l'abbé. Théodore Terrail vécut assez long-temps pour voir Bayart dans tout l'éclat de sa réputation, mais l'histoire ne dit pas s'il lui pardonna son tour de page 1.

1 Théodore Terrail, de la branche de Terrail-Bernin, régit et fut enterré dans la l'abbaye d'Ainay durant quarante-huit ans, chapelle de Saint-Sébastien, qu'avait fondée son prédécesseur et son oncle, Antoine Terrail, au milieu de la nef de l'église d'Ainay. On lisait cette épitaphe sur son tombeau :

THEODORYS NATIONE ALLOBROGIC.

PATRIA GRATIANOP.

GENTIBVS TERRALLINIS

LOCI HVIVS SVMM. ANTISTES

HIC SITVS EST.

PRÆFVIT ANN. LXVIII

MENS. III. DIEB. IIXX.

DECESSIT ANNO

SALVTIS M. DV.

PRID. NON. MAI

ETATIS VERO

SVE LXXIII.

VIVAT DEO.

Par une erreur consacrée par tous les historiens, on appelle improprement Bayart le chevalier Bayart. Toutefois aucun des écrivains qui se sont servis de cette dénomination, ne s'est rendu compte de sa signi- / fication. Il nous semble qu'elle ne devrait être entendue que figurément, dans le sens de chevalier par excellence, de même que les Romains appelaient urbs la ville de Rome, et Cicéron, l'orateur. Au positif, c'est une absurdité de dire le chevalier Bayart, comme l'on dit le chevalier Tiran-le-Blanc ou le chevalier de Forbin. En effet, cette qualification n'était point encore devenue une distinction nobiliaire établie en faveur des puinés des familles nobles, et, comme diguité ou investiture militaire, elle ne précédait jamais le nom propre an quinzième siècle. Aussi Bayart ne fut-il jamais appelé de son vivant le chevalier, mais bien le seigneur ou le capitaine Bayart. • A qui me rendrai-je, lui demande Soto-Mayor?-Au capitaine Bayart. « Je suis le capitaine Bayart, dit-il en remettant lui-même son épée à un gentilhomme bourguignon, à la déroute de Guinegåte. » Les quittances et les montres originales qui se trouvent dans les manuscrits de la bibliothèque royale, sont au nom de Pierre de Bayart, seigneur dudit lieu. Le Loyal Serviteur, tout en ayant intitulé son Ouvrage : Histoire du Bon chevalier sans peur et sans reproche, ne s'est jamais servi de cette dénomination en style direct. Champier a de même évité d'en faire usage dans le cours de son livre, intitulé, selon les éditions, Les Gesles du preux chevalier Bayart, ou Histoire du capitaine Bayart, gentilhomme du Dauphiné.

Il faut se rappeler que l'époque de la publication de ces deux ouvrages fut aussi celle où parurent tous ces romans de chevalerie dont la cour de François I.er faisait ses délices. L'invention récente de l'imprimerie fut presque exclusivement consacrée à reproduire les plaisantes et récréatives histoires des Amadis, des paladins de Charlemagne, des chevaliers de la Table Ronde, et l'influence de ces compositions romanesques s'étendit sur toute la littérature contemporaine. Champier et le Loyal Serviteur y payèrent tribut, en donnant à leurs histoires les titres et la tourpure à la mode. On ne saurait en inférer autre chose, et c'est à Godefroy seul qu'il faut attribuer l'erreur que nous venons de signaler. Cet éditeur enchérit sur ses devanciers, en intitulant tout uniment la réimpression qu'il donna du Loyal Serviteur : Histoire du chevalier Bayart; mais on était alors au 17. siècle, où la qualification de chevalier se rapportait à celle de baron et de comte, et cet historiographe, si fécond en commentaires, aurait bien dù nous faire part du sens qu'il y attachait.

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Nous n'avons donc point donné à Bayart un titre hors des usages de l'époque que nous avons essayé de reproduire en sa personne, titre que ni lui, ni aucun de ses contemporains n'ont porté, et qui ne conviendrait alors qu'à un héros de roman; mais le mot chevalier, précédé du mot bon change de sens. Bon Chevalier devient un surnom et nous nous en sommes servi, à l'exemple des chroniqueurs, toutes les fois qu'il a pu être indifféremment le synonyme de Bayart.

La famille Terrail n'est point éteinte, ainsi que l'ont affirmé les nombreux historiens de Bayart. Il nous a été communiqué des titres authentiques qui prouvent d'une manière incontestable l'existence d'une branche dite de Terrail - Couvat, provenant d'un Charles Terrail (vivant en 1540), dont le nom a été omis à tort par tous les généalogistes de cette maison. Nous sommes d'autant plus heureux de relever cette erreur, qu'au nombre des descendans de Charles Terrail, se trouven deux jeunes officiers (MM. Antoine et Pierre Terrail), qui suivent avec honneur et distinction les traces de leurs ancêtres.

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PROGRAMME DES PRIX POUR L'ANNÉE 1830.

Aucun des prix mis au concours pour 1829, n'a été remporté.

L'Académie a fait une mention honorable du seul mémoire admis au concours de statistique. Ce mémoire est relatif à l'histoire ecclésiastique et porte cette épigraphe : « Dulciùs ab unoquoque accipitur quod de patriâ patrioque sermone narratur.

CASSIOD.

L'Académie propose, pour 1830, les sujets de prix

suivans:

1. Prix fondé par M. BABOIN DE LA BAROLLIÈRE.

Une médaille d'or de 500 fr.

Déterminer la meilleure organisation à donner à l'école de la Martinière, destinée aux arts et métiers, et principalement à ceux qui ont des rapports avec les manufactures lyonnaises.

Indiquer en conséquence la nature et le mode d'enseignement, soit des garçons, soit des filles, et les avantages ou les inconvéniens d'appeler de jeunes filles aux études de l'institution; le nombre, la qualité et le sexe des professears ou maîtres; la division de l'enseignement en théorie et en pratique; la police et le gouvernement intérieur de l'établissement; le nombre des élèves internes et des élèves externes ; les avantages ou les inconvéniens de conserver ou de rendre public le secret des procédés; les essais de perfectionnement des procédés actuellement connus qu'on pourrait introduire dans l'enseignement.

Les concurrens combineront leurs vues avec les principaux élémens d'organisation arrêtés par l'Académie, et avec l'esprit du testament du major-général MARTIN. Ils supposeront un revenu de 40,000 fr. applicable au service de l'établissement, et, s'ils le jugent à propos, revenu plus élevé résultant des chances prévues par le testament ou d'autres ressources.

un

L'Académie déclare qu'en appelant l'attention des con

sur plusieurs objets particuliers de discussion elle n'a pas l'intention d'assigner des bornes au développement de leurs idées. 1

1 Les concurrens qui désireraient avoir une connaissance positive de la délibération de l'Académie du 10 septembre 1822, et des termes du testament qui y sont consignés, pourront en faite prendre communication dans le lieu des séances de l'Academie, an palais du Commerce et des Arts, et même faire demander des exemplaires imprimés de cette délibération.

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