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expédition, ils retournerent à Jaffa. Le cheïk-Daher, qui s'étoit affuré d'avance, des Arabes, & qui, par leur moyen, fe trouvoit maitre de la campagne, prit la réfolution de marcher contre Jérufalem, dans l'efpérance que les divifions qu'il y avoit fomentées, & la famine qui commençoit à s'y faire fentir, lui en ouvriroient les portes. De fon côté, Ali-bey déterminé à faire tous fes efforts pour rentrer en Egypte, où i il a toujours entretenu des intelligences, avoit fait partir, dès le 27 du mois dernier, Tentauvi-bey, un de fes principaux officiers, avec 300 cavaliers & 20 bannieres de Maugrebins ou Barbarefques (environs 200 hommes) pour tenter de fe rendre maitre de l'Aris, château fitué fur le bord de la mer, à trois journées de Gaza, & la premiere place de l'Egypte dans le défert. Ce projet eut le plus heureux fuccès. Tentauvi-bey fut reçu dans l'Aris fans éprouver de réfiftance, & s'y établit. Sur cette nouvelle, Ali-bey fe mit en marche pour l'Egypte, accompagné de Cheleby, de Daher, & de Ketim, fon neveu. Naffif, grand cheïk des Mutualis, & Abbas-Méhémet, autre cheïk de la même nation, à qui Sour (Tyr) appartient, devoient auffi le feconder avec un corps d'environ 800 chevaux; mais ils font reftés à Acre auprès du cheïk-Daher, qui s'eft rendu dans cette ville pour attendre les premieres nouvelles de cette grande entreprife. On croit qu'Ali a le projet d'attaquer la caravane è fon retour de la Mecque, pour s'emparer des qu'elle porte avec elle, & lution par ce coup d'éclat. Aulieu der à Jérufalem, le cheïk-Daher eft revenu à Acté. Son inaction n'est qu'apparente, & il prend des moyens pour fe rendre maitre de la premiere ville. Les Arabes de fon parti & divers corps de troupes, difperfés, aux environs, empêchent que rien ne puiffe y pénétrer, & l'on com

Ommen

&

mence à y reffentir les horreurs de la famine. Le gouverneur en a fait fortir tous les pauvres & les gens inutiles. Les villes de Rama & de Jaffa font remplies de ceux qui s'y font réfugiés. Plufieurs de ces malheureux, privés de toute reffource, n'ayant pour aliment que les brins d'herbes qui percent, par intervalle, à travers les fables dont ce pays eft couvert, font morts d'inanition fur la route, & les chemins font jonchés d'hommes expirans & de cadavres. L'intérieur de la cité fainte n'éprouve pas de moindres calamités ; & quelques précautions que l'on ait prifes, il eft à craindre que la difette abfolue de vivres ne réduife bientôt à la néceffité de fe rendre.

ALEXANDRIE ( le 1er. Mai.) Nous fommes à la veille de voir l'Egypte devenir le théâtre de la guerre qui défole la Syrie depuis plufieurs années. On vient d'apprendre qu'Ali-bey, après avoir rétabli quelques fortifications de Jaffa, & affemblé toutes fes forces auprès de cette place, s'étoit avancé jufqu'à Gaza, ville très-ancienne', renommée dans l'écriture fainte, & fituée fur les confins de la Palestine, à l'entrée du défert qui fépare la Syrie de l'Egypte. Gaza, une des fatrapies des Philiftins, éloignée de 20 ftades de la mer, & bâtie fur une élévation, avoit été affiégée par Alexandre & par Ptolomée, ruinée par ces conquérans, rétablie par Gabinius, rendue à Hérodote par Augufte, poffidée fucceffivement par les Juifs, les Romains, Grecs, Arabes, les croifés, fortifiée smers; prife fur eux par Saladin. Elle et aujourd'hui comme la plupart des villes de ces contrées, fortifications, & mal peuplée. Ali-bey a dû en partir le premier jour de la lune, qui répond au 22 du mois d'Avril dernier, pour venir attaquer ce royaume. Notre caimacan n'a pas été effrayé

fans

de cette nouvelle. Informé des projets de fon compétiteur, il avoit fait, depuis longtems, & fans éclat, des levées de foldats. Au premier bruit de la marche d'Ali, il s'eft trouvé en état de lui oppofer une armée plus nombreuse que celle de l'ancien caimacan. Trois beys font partis fucceffivement du Caire, avec les troupes qui forment l'avant-garde, & Méhémet Abou-daab a dû les fuivre, le 27 du mois dernier, avec le refte de l'armée. Le rendez-vous général est à Birk-el-Hadgi (le lac des pélerins), lac, fur les bords duquel s'affemble la caravane des pélerins de la Mecque. C'eft dans cet endroit que fultan Selim I remporta, en 1517, fur Thoman-bey, une victoire fignalée qui le rendit maitre du Caire & de toute l'Egypte, & qui mit fin à la domination des Mammelus, dynaftie qui fuccéda à celle des Ayoubites, fondée par faladin ben Ayoub, c'est-à-dire, fils d'Ajoub ou de Job. Méhémet Abou-daab veut prévenir Ali-bey, avant que ce dernier puiffe pénétrer en Egypte. Il oppofera, à la fortie du défert, des troupes fraîches à celles de fon rival, qui feront haraffées par une marche longue & pénible dans des lieux arides. On affure qu'il eft dans le deffein de combattre Ali partout où il le rencontrera. Toute l'Egypte eft dans l'attente de l'événement de cette nouvelle entreprise. Malgré fon affurance, le caïmican n'a pas voulu expofer fes tréfors au hazard de la guerre. On dit qu'il les a fait tranfporter, fous une garde fûre, ds le Saïdi (Haute-Egypte.)

TRI T de Barbarie (le 12 Mai. ) Le 15 du mots der er, le pacha reçut d'un capidgi-bachi de la Porte, arrivé à Tunis, une lettre par laquelle cette officier demande, conformément à la commiffion dont il eft chargé, que ce prince envoie inceffamment à Conftantinople, des canonniers,

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des roys ou capitaines cortaires, & 6 cens matelots. On doute ii qu'on puiile fournir ce fecours, ta marine et int réduite a quatre petites galiores mil équipées. Tripoli n'eft plus tel qu'il étoit au refois, lorfque le nom re & les entreprifes de fes corfaires lui avoient auis une réputation jufte ment méritée.

RUSSIE.

PETERSBOURG (le 4 Juin. ) L'impératrice vint en cette capitale le 22 du mois dernier, & dina chez le général comte Gzagar Czernichew à qui elle fit préfent de 50 mille roubles. S. M. 1. retourna, le même jour à Czarsko-Zelo.

On s'apperçoit ici depuis quelque tems, que les feigneurs de la cour forment deux partis, dont l'un eft attaché au comte de Panin, & l'autre aux comtes d'Orlow. Ces partis ne préfagent rien de dangereux à l'état; ils different feulement d'opi`nion fur les changemens arrivés en Pologne Le premier trouve que le traité de partage conçu avec équité & exécuté avec autant de prudence, établit un parfait équilibre entre les illuftres co-partageans, & il paroit fe contenter des provinces que l'exécution de ce grand projet ajoute à l'empire. L'autre prétend que le lot de la Ruffie eft trop inférieur à celui des deux autres puiffances, & que ce partage inégal eft le fruit de la modé ration déplacée du miniftere. Le peuple, peu accoutumé à fe mêler des affaires d'état, prononce néanmoins affez hautement dans cette circmance. On dit librement ici que la Ruflie effet éloignée d'avoir un équivalent raifonnable de toutes les dépenfes que les affaires de Pologne lui ont occafionnées; qu'elle s'eft donné imprudemment des entraves, en interrompant, entre ses états & la Pologne, la communication qu lui étoit toujours ou

verte par ferre pour paffer en Allemagne; on trouve que la communication par mer eft fujette à beaucoup d'inconvéniens. On ajoute, enfin, que fi la triple alliance qui exifte aujourd'hui venoit à fe rompre, ce qui eft très-poffible, la Ruffie feroit à la merci de fes amis actuels.

SUE DE.

STOCKHOLM ( le 16 Juin.) Les troupes def tinées à former le camp tracé dans la plaine qui eft à l'extrémité du faubourg de Ladugard, s'y étant raffemblées fucceffivement, le roi & les princes, fes freres, y font entrés le 6 de ce mois, & S. M. campe au centre du régiment de fes gardes. C'eft dans la tente du roi que fe tiennent les confeils, & que fe donnent les audiences. Le chevalier Goodricke, miniftre de la Grande Bretagne, & le Sr. Van-Haeften, envoyé des états-généraux des Provinces- Unies, ont eu l'honneur d'y prendre congé de S. M. pour retourner, pendant quelque tems, dans leur patrie. Ce camp, qui doit durer jufques vers le 24 de ce mois, n'eft formé que des troupes qui compofent la garnifon de cette capitale: - dès qu'elles y feront rentrées, le rot, après un court féjour à Ekolmfund, fe propofe d'aller faire la revue de fes troupes qui font en Scanie. Les habitans de cette capitale s'y portent en fou- le; c'est un spectacle qui a tout le piquant de la nouveauté pour eux qui, depuis tant d'années d'anarchie

On avont vu que des dietes inutiles.

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ce camp une ordonnance du roi, qui affure toldats la liberté de fe retirer au bout d'un certas tems de fervice. Plufieurs articles tendent à les fixer longtems fous leurs drapeaux, puifqu'ils leur font aimer leur état, leur affignent une fubfiftance abondante dans le tems de leurs travaux militaires, & pourvoient à leurs befoins

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