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néraux d'attaquer l'amiral anglois dans la baye même de Gibraltar, quoi qu'il ait 15 vaiffeaux qui y font emboffés. S'il eft vrai que S. M. Cath. ait donné cet ordre, & qu'il foit exécuté, tion fera des plus fanglantes.

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Extrait d'une lettre de Bayonne du 22 Février, inférée dans la Gazette de Liege du 6 Mars.

Un courier parti le 19 de Madrid, & allans en toute diligence à Versailles, a paffe par cette ville. On affure pofitivement qu'il porte l'agréable nouvelle que la flotte espagnole commandée par Don Cordova & Don Gafton a totalement défait une efcadre angloife commandée par l'amiral Digby, qui eft fait prifonnier, ainfi que le prince Guillaume, fils du roi d'Angleterre. On dit huit vaiffeaux anglois pris ou coulés à fond. On peut juger de l'impatience avec laquel le nous attendons la confirmation de cette grande nouvelle

Les lettres de Paris ne confirment point cette nouvelle, & n'en parlent que comme d'un bruit qui s'eft répandu quelques heures après l'arrivée d'un courier efpagnol chez le comte d'Aranda.

Celles de Londres du 29 Février font contradictoires. Suivant les unes, Rodney a trouvé le moment de mettre à la voile, d'éviter les Efpagnols & de partir pour fa deftination. Suivant les autres, ce même amiral a remporté une nouvelle victoire fur les Efpagnols. La gazette de la cour. de Londres du 28 Février contient enfin la relation du combat du 16 Janvier.

Un citoyen de Soiffons nous a envoyé quelques obfervations fur l'établiffement d'un port de roi dans la Manche. On peut fe rappeller qu'il a été queftion de ce projet (2e. quinz. d'Août 1779, page 40), & que l'emplacement Mars, ze. quinz. 1780. D

du baffin, dont la nature à fait en partie les frais, étoit la Foffe-Colleville, fur les côtes de Normandie, à la gauche de l'embouchure de l'Orne, à environ 3 lieues oueft de Caen. On voit dans ces obfervations des élans de patriotisme, infpirés par l'intérêt preffant que prend l'auteur à la gloire & à la profpérité générale de la nation. Animés du même fentiment, nous allons faire connoître les vues & les projets louables du citoyen de Soiffons. C'eft ainfi qu'il s'énonce :

Un port nouveau dans la Manche eft très-néceffaire : tout le monde en convient, & il ne s'agit que de lui affigner une place avantageufe. Je crois, d'après mes foibles lumieres, que la pofition propofée ne remplit pas tout le but du miniftere, qui eft fans doute, 1o. de bri der un rival actif & puiflant, ennemi par une antipathie, naturelle, irréconciliable par une haine d'éducation, fé✅ paré de nous par un canal étroit où il concentre toutes fes forces navales, & d'où il peut inopinément tenter une invafion, facile au commencement d'une rupture., parce qu'il eft toujours prévenant. Un fecond port redoutable par fa marine Y mettroit obftacle; voilà un premier point auquel fatisferoit le port de Colleville. 2. Mais il faut de plus épier, arrêter les mouvemens de cet adverfaire au-delà de la Manche; il eft à propos de l'y renfermer; & pour lors foyons à fa portée, placons-nous à fa hauteur. 3°. Le plus fûr, à fon exemple eft de prévenir; conféquemment, ne nous cachons pas der riere lui. 4°. Le fuccès d'une expédition dépend de fa célérité & de fon fecret; & de Colleville il nous faudra paffer fous les yeux des Anglois, & courir le rifque d'être interceptés. 5. Si l'on croife ou fi l'on fe bat dans la Manche, on a besoin d'un abri voisin dans les tems facheux, ou d'un refuge afluré & facile dans le cas d'une défaite l'ira-t-on chercher jufqu'à Colleville? Il y a près de 100 lieues de mer depuis l'embouchure du détroit. Dans une retraite forcée d'une ou d'autre façon, on a à doubler le Contentin, dont l'avancement d'environ 25 lieues au-delà des côtes de Bretagne nous rapprocheroir trop de l'Angleterre, & nous expoferoit à un fecond danger. Il faudroit paffer à 20 lieues de Portsmouth, & nous retirer encore 15 lieues par-delà plus au fond de la Manche; ne nous y enfonçons pas tant, & nous en Aprons mieux. 6o. Les illes de Guernesey, Jersey, &c.2

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demandent une protection, fi elles retournent à leurs viaïs maîtres; ou fi elles reftent à leurs anciens ufurpateurs, l'intérêt du commerce exige qu'on s'empare dans les premieres opérations d'une guerre, des pirates à qui ces ifles fervent de repaires, & qu'on ne les laiffe pas impunément enlever & y ramener tranquillement nos navires

marchands.

De ces obfervations il me paroît réfùlter que le port proposé seul ne peut fatisfaire à toutes ces vues ; & deFa je crois pouvoir inférer qu'il en faut un autre plus avantageufement placé, & qu'il faut plutôt l'établir fur les côtes de Bretagne, où les rades font en plus grand nombre & plus profondes que fur celles de Normandie; là on ett à la portée de fortir de la mer Franco-Angloife, ou d'y rentrer; on feroit bien en avant, & on pourroit l'être même de Plymouth. L'avantage alors, c'eft de pouvoir être inftruit plutôt des expéditions de l'Anglois pour les déconter, c'eft d'intercepter les jonctions de fes forces d'un port avec celles d'un autre. Et quelle plus grande impor tance encore d'être peu éloigné de Breit, qui fourniroit plus aifément des renforts? Car quoi qu'on faffe partout ailleurs, ce port fera toujours le plus fûr, le plus vake, lë plus formidable, &c.

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Parmi les différentes criques qui fe rencontrent affez fréquemment fur les côtes de Bretagne dans la Manche j'en diftingue 8 principales ; c'est aux marins à les fonder. L'académie des fciences & arts, &c., établie, il y a peu d'années, par les états de Bretagne, ne pourroit-elle pas prendre cette matiere en confidération, & la propo fer pour fujet d'un prix ? Cette province s'en reffentiroit la premiere il conviendroit fort à quelque patriote riche d'en faire les frais. Mes foibles moyens, il y a quelques mois, m'cuffent permis d'en avancer une partie; j'avois même écrit à un journaliste en conféquence; mais depuis, un devoir preffant d'humanité m'a retiré ce pouvoir; il ne me refte que la volonté inutile.

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En entrant dans le canal, on trouve d'abord, 3 lieues de diftance, à l'oppofite de Breit, le havre d'Abrevack prefqu'au 13e. degré de longitude; 2°. 10 minutes plus loin, le havre du Corrigeou; 3°. encore 10 au-deflus, l'anfe du Goulven; ils confervent tous trois entr'eux à peu-près le même éloignement d'environ 4 lieues ; 4°. fous le 13e. degré 34', la baie de Port-Chrift, plus vafte, préfente dans fon fond un iflot qui pourroit fervir d'em placement à une ville maritime prefqu'en face de Plymouth, qui eft sous le 13e, degré 30'; 5°. 23 lieues en

viron dans le golfe eft une rade plus vafte, la sade de Tomiet; 6. la baye de Paimpol, en defcendant plus de 15 lieues au fud-eft, feroit peut-être plus favorable, parce que la pointe émouffée des diocefes de Tréguier & de St. Brieux la couvre des vents d'oueft, & qu'en outre elle eft protégée par un cap long & coudoyé; 7o. PortGouet préfente une belle anfe au milieu d'un vafte enfoncement des côtes; 8°. Enfin, fi vous remontez la Manche jfqu'au 15e. degré 23' environ, la rade de la Frenaye vous offrira peut-être l'emplacement le plus avantageux; éloignée de 50 à 60 lieues du débouquement du canal, fituée entre St. Brieux à l'oueft & St. Malo à l'eft, elle a près d'une lieue d'enfoncement fur moitié d'ouverture. Le château de Latte, bâti fur un rocher ifolé, en défend l'entrée à la pointe occidentale, & l'orientale eft celle de St. Caft, village à 5 lieues oueft de St. Malo, remarquable par la perte qu'y firent les Anglois dans une defcente le 11 Septembre 1758 là on établiroit un fort pour protéger cette partie.

Le port breton ne nuiroit point au normand dont il eft à propos que l'art acheve ce qu'a commencé la nature il y en auroit trois alors fur les côtes feptentrionales de la France, les plus intéreffantes pour la défenfe, & ce ne feroit certainement pas trop. Je crois que plus on multipliera les ports-de-roi dans les différentes. plages du royaume, plus auth on facilitera les expéditions,

plus elles pourront être fecrettes & fûres : car, en partant de differens endroits en divers tems pour fe réunis à un point de ralliement convenu, la deftination des vaiffeaux fera moins connue; & l'ennemi, incertain où il-portera le fecours, ne pourra point faire avorter l'entrepri fe. Je crois encore conféquemment, qu'en raffemblant un moindre nombre de vaisseaux dans un même havre, il y aura moins d'embarras & moins de retard dans les prépa◄ ratifs, moins de maladies, foit fur la flotte, foit parmi les gens de terre, les vivres feront à meilleur compte, comme de meilleure qualité; l'air fera plis falubre, les équipages plus fains & mieux traités, & les malades mieux foignés. L'avantage qui reviendroit encore de la multiplicité des ports, feroit d'entretenir plus de forces maritimes, en divers endroits, d'être partout fur fes gardes, & de faire ou d'empêcher un coup de main.

Après avoir expofé fon opinion fur l'établiffement de quelques ports, le citoyen de Soiffons remarque à regret que la nation françoife, fi dé

vouée de tous les tems au fervice de fes rois n'ait pas joint plus directement fes efforts à ceux du reftaurateur de la marine; il s'étonne de ce qu'elle n'ait pas imité ou plutôt devancé les Anglois qui ont fignalé leur patriotifme. (I auroit pu citer encore les villes d'Efpagne, les corporations, les chapitres, les feigneurs, &c., qui ont porté au pied du trône la majeure partie de leurs revenus.) Il defireroit, par exemple, que les Dunkerkois euffent offert au roi un vaiffeau fous le nom du fameux Jean Barth, les Dieppois fous celui de l'illuftre Duquesne; les ma louins fous celui du brave Duguai-Trouin, parce que ces grands hommes méritent bien, par les fervices qu'ils ont rendus à la patrie, que leurs concitoyens leur confacrent un monument fi honorable & fi avantageux à l'état, en ce qu'il les rendroit encore redoutables à l'ennemi après leur mort & qu'il exciteroit l'émulation des militaires & des marins françois.

Mais il eft encore tems, continue l'auteur, de réparer ces fautes; & je propofe pour cet effet, des foufcriptions qui pourront être remplies avec beaucoup d'empreffement. Animons, pour ainfi dire, & rendons agiffantes contre nos úers rivaux les vertus de notre bon roi ; il a pacifié les puiffances étrangeres; il nous fait fentir la bienfa.fance naturelle dans toutes les occafions en public, & peutêtre plus encore en fecret; il venge lui feul le droit des nations pour rétablir l'équilibre des forces navales, pour rendre au commerce fa liberté, & enlever aux tyrans des mers leur fuprématie ufurpée; il récompenfe le mérite, encourage le talent; un de fes miniftres reftaure notre marine délabrée; l'autre releve notre crédit, & par fon éco nomie & fes réformes, nous épargne des impôts; un général, par fa bravoure, répand la terreur, bat les Anglois, & leur enleve des ifles. Eh bin ! que tardons-nous d'immortalifer ces faits glorieux, & d'en perpétuer la mémoi re par des monumens avantageux ? Conftruifons en l'honneur du roi le Pacificateur, le Bienfaifant, la Rompen fe, Equilibre, le Populaire, le Jufte, de 94 canons chaçun; barisons, à la gloire des miniftres & du vice-ami¬ ral, trois vaiffeaux de 84 pieces d'artillerie, fçavoir : la

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