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MEMOIRE

Du Baron de BOTH MAR Envoié Extraor· dinaire de S. A. Electorale d'HANNOVER touchant la PAIX, tel qu'il fut préfenté à la Reine de la Grande-Bretagne le 9. Decembre 1711.

Son

on Alteffe Electorale de BrunswickLunebourg ayant renvoyé le fouffigné fon Miniftre d'Etat, & de fon Confeil Privé le Baron de Bothmar, auprès de Sa M. la Reine de la Grande-Bretagne, lui a ordonné principalement de remercier très-humblement Sa Majefté de l'honneur qu'Elle lui a fait de lui communiquer ce qui s'eft paffé depuis peu touchant la Négociation de la Paix, par une perfonne de diftinction & de la confiance de Mr. le Comte de Rivers, & de la nouvelle marque de l'honneur de fon amititié, qu'Elle a bien voulu donner à cette occafion, à lui & à fa Sereniffime Famille, par fes généreux foins pour fes interêts.

Monfeigneur l'Electeur fe rapporte particulierement aux fentimens qu'il a fait connoître à Mylord Rivers, & à la réponfe. qu'il lui a fait donner par écrit fur fes

Pro

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Propofitions, dont une Copie eft ci-jointe. Il croit que ce feroit manquer au re fpect dû à la confiance dont Sa Majefté la honoré, s'il n'y répondoit pas avec la fincerité qu'Elle doit attendre de fon plus véritable & de fon plus zelé Serviteur & Ami, qui s'intéreffe pour fa gloire & pour fon interêt, plus que perfonne du monde. Il efpére que Sa Majefté lui fera l'honneur de recevoir dans ce fens & felon cette intention, tant ce qu'il a pris la liberté de lui faire dire de fes fentimens

par le fufdit Lord Rivers, que ce qu'il a ordonné au foufigné fon Miniftre de fe donner l'honneur de représenter encore à ceux de Sa Majesté.

Les fentimens de Son Alteffe Electorale fur la Paix & fur la Négociation font: Que les Alliez ont befoin non feulement de Déclarations pofitives, mais encore de fûretez réelles, fur tout ayant à faire à un Ennemi, dont les manieres d'agir font affez connues. C'eft à quoi les Préliminaires précédens avoient pourvû, en obligeant la France à reftituer préalablement des Places de fûreté. Ici il n'y a ni füretez réelles, ni aucunes Déclarations claires & précises. Tout fe reduit à des K S

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generalitez vagues,qui au fonds ne veulent rien dire, & fur lefquelles on pourroit négocier des années. On laiffe à juger quel eft le moyen le plus für pour mettre une prompte fin à la guerre, ou d'exiger préalablement de la France de telles conditions, qu'il n'y ait plus rien à faire dans l'Affemblée Générale, que de leur donner la forme de Traité, ou d'ouvrir cette Assemblée fur des Articles captieux & obfcurs, qui laiffent le champ libre à la France de mettre en ufage fes intrigues & fes chicannes ordinaires.

Il n'y a qu'une parfaite union entre les Alliez, pendant qu'on traitera la Paix Générale, & la garantie mutuelle qu'ils fe donneront de ce qui y aura été conclu, qui puiffe les mettre en fûreté pour l'ave nir.Sans cela toute l'Europe tombera'dans. la confufion, & tôt ou tard dans l'Efclavage; fur tout fi on laiffoit l'Espagne & les Indes à un Prince de la Maifon de Bourbon. On ne pourroit pas fe flater, que même après la Paix concluë de telle maniere, la Grande-Bretagne put être en fûreté, & fe maintenir dans un état tran◄ quille & floriffant, à moins qu'Elle ne demeurât avec les Etats Généraux & avec

les

Tes autres Alliez, dans une union qui les mît tous ensemble à couvert des entreprifes de la France. Toutes leurs Forces u

nies ont à peine fuffi pour s'en garantir, d'ou l'on peut juger de ce qui arriveroit, fi cette Couronne venoit à bout de les diviser, & de ce qu'elle feroit capable d'éxecuter,après avoir refpiré pendant quelques années, & après s'être renforcée par l'Efpagne & par les richeffes des Indes. On ne doute donc pas que S. M. Britannique nese propose d'agir dans toutes fes affaires conjointement & de concert avec fes Alliez conformément aux affurances qu'Elle leur a données. Mais pour bannir toute défiance il feroit bon qu'il n'y cut aucune Négociation fecrete, qui pût donner lieu de foupçonner, que l'un ou l'autre des Alliez pourroit faire fon Trai té séparément.

Tous les Alliez concoureront avec plai fir à conclure la Paix, pourvu qu'elle leur procure leur fûreté, n'y en ayant point qui ne foit las des dépenfes & des incom moditez de la Guerre, & qui vçüille la continuer lorsqu'elle ceffera d'être néceffaire. De plus, il n'y en a point parmi eux, qui ne se faffe un plaifir de contriK. 6. buen

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buer de tout fon pouvoir, à obtenir à fa
Grande-Bretagne les Conditions & les a-
vantages qu'elle peut prétendre de la Fran-
ce. Son Alteffe Electorale fe fera en par-
ticulier un devoir d'y aporter tous les foins
qu'on pourra defirer d'Elle; rien au mon-
de n'étant plus jufte, après tant de gran-
des chofes, que Sa Majefté Britannique
a faites avec fa belliqueufe Nation pour
la Cause Commune, depuis le commen-
cement de fon glorieux Regne. Et cette
voye paroît plus fûre à Son Altefle Elé-
corale pour parvenir à ce but, & pour fe
conferver fes avantages, que fi la Gran-
de-Bretagne y travailloit fans la concur-
rence de fes Alliez par une Négociation
féparée. Rien ne feroit auffi plus avan-
tageux à la France, que fi par fon habi-
leté elle pouvoit éblouir l'une des deux
Puiffances Maritimes, jufqu'au point de
lui faire accepter quelque avantage, qui
fût tellement au préjudice de l'autre,
que
la jaloufie qui en naîtroit, devint un ob
ftacle à leur union pour l'avenir, laquelle
faifant leur fûreté reciproque, paroît à la
France le plus grand obstacle à fes vastes
deffeins.

Son Alteffe Electorale peut répondre

que

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