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L'enseignement primaire était autrefois dévolu, à Paris comme dans toute la France, à l'autorité ecclésiastique. Un statut de l'archevêque de Paris, en date de 1670, ordonne que «<les maistres et maistresses d'école seront établis dans la ville, fauxbourgs et banlieue par le chantre de son église, et ailleurs par les curés, qui auront soin que les maistres ne reçoivent en leurs écoles que des garçons et que, s'il se fait autrement, les curés en advertiront, si c'est dans Paris ou la banlieue, le chantre de son église. » A côté des écoles du chantre se trouvaient les écoles de charité, fondées par des particuliers et régies par les curés. Le chantre de la cathé drale ayant prétendu avoir le droit exclusif d'institution sur ces écoles, l'affaire fut déférée au Parlement, qui « permit aux prestres préposés par les curés des paroisses et aux femmes de continuer d'instruire, à la charge de ne montrer qu'aux enfants des pauvres et par charité. » Quant aux filles, les religieuses Ursulines, dames de la congrégation de Notre-Dame, sœurs de la Croix, tenaient de leurs statuts, approuvés du Saint-Siège ou d'arrêts du Parlement, le droit exclusif de les instruire (1).

(1) Un arrêt du Parlement, du 3 mars 1651, permettait aux sœurs de la Croix de continuer d'instruire les filles et personnes du sexe, » et contenait << défenses de les troubler. »

Cependant, grâce aux dotations des particuliers, des écoles gratuites s'élevaient, qui ne relevaient que de leurs fondateurs. Les écrivains avaient aussi le droit d'enseigner les enfants << tant à l'écriture qu'au ject et calcul », et un arrêt de 1661 leur assura, contrairement aux prétentions des maîtres d'école, « qu'ils peuvent avoir des écrits ou livres imprimés pour montrer l'orthographe. »

En 1725, des lettres patentes autorisaient la société des frères des écoles chrétiennes. Elles se réfèrent à une bulle du pape Benoît XIII, où il est dit que l'institution de cette société a pour but de « prévenir les désordres et les inconvénients sans nombre que produit l'ignorance, surtout parmi ceux qui, accablés par la pauvreté, se trouvent, faute d'argent, privés de toutes connaissances humaines. >>

Hormis la protection accordée à cet Institut, le gouvernement de la France, au xvшe siècle, ne semble pas s'être occupé de l'instruction du peuple. Quelques efforts seulement furent tentés par des particuliers. Le chevalier Paulet fonda," vers 1772, un établissement où il réunit jusqu'à deux cents enfants pauvres, presque tous fils de soldats ou de pauvres gentilshommes, et à l'instruction desquels il appliqua la méthode de l'enseignement mutuel. Son institution fut protégée par la faveur personnelle de Louis XVI et se maintint jusqu'à la Révolution.

On sait que la Révolution de 1789 adopta et proclama le principe de l'instruction populaire. La loi des 3 et 14 septembre 1791 porte: « Il sera créé une instruction commune à tous les citoyens, gratuite à l'égard des parties de l'enseignement indispensable à tous les hommes. » Le décret du 29 frimaire an II déclarait l'enseignement libre et le plaçait sous la surveillance des municipalités; tous les enfants devaient être envoyés aux écoles primaires. L'année suivante, un décret du 27 brumaire an III portait qu'il serait établi une école primaire par mille habitants.

Dans quelle mesure ces prescriptions ont-elles été exécutées à Paris? Les renseignements manquent malheureusement sur ce point. Tout fait croire cependant qu'à la fin du siècle dernier et pendant le premier quart de ce siècle, l'état de l'instruction primaire à Paris était peu florissant. Un rapport manuscrit adressé au préfet de la Seine en l'an IX constate qu'à cette époque Paris n'avait que vingt-quatre écoles pri

maires fréquentées par 2,400 élèves, soit une moyenne de 2.92 élèves pour cent enfants de 2 à 14 ans. Vingt ans après, il y avait cent trente-deux écoles, mais la plupart n'étaient que de petites écoles de charité où l'instruction était presque nulle, et le nombre total des élèves n'était évalué qu'à 15,000 environ (1).

C'était beaucoup cependant pour une époque où le budget de l'État ne comprenait, pour l'instruction publique, qu'un crédit de 50,000 francs destiné, dit l'ordonnance du 29 février 1816, « à établir temporairement des écoles modèles dans les pays où les bonnes méthodes n'ont point encore pénétré ».

Jusqu'en 1854, les écoles primaires publiques de Paris ont été divisées en écoles du mode mutuel et en écoles du mode simultané.

D'après les résumés de M. Martin Saint-Léon et les publications qui les ont suivis, le nombre des écoles du mode mutuel (2) était, en 1840, de 48, où l'on recevait 8.980 élèves gar(1) Levasseur, rapport sur l'instruction primaire à l'Exposition de Vienne, 1873.

(2) Nous empruntons à un ouvrage préparé pour l'Exposition de 1878 par M. Gréard, alors directeur de l'enseignement primaire à la Préfecture de la Seine, et intitulé: « l'enseignement primaire à Paris et dans le département de la Seine, de 1867 à 1877 », les renseignements qui suivent sur le mode d'enseignement mutuel.

« Au milien de la salle, dans toute la longueur, des rangées de tables de 15 ou 20 places chacune, portant à l'une de leurs extrémités, celle de droite, le pupitre du moniteur devant lequel se trouvait une planchette portant en gros caractères les modèles d'écriture et surmontée d'une tige, appelée télégraphe, qui servait à assurer, par des inscriptions d'une lecture facile, la régularité des mouvements; sur les côtés, et tout le long des parois, des séries de demi-cercles autour desquels se répartissaient les groupes d'enfants; sur les murs, à hauteur du regard, un tableau noir sur lequel se faisaient les exercices de calcul et où s'accrochaient les tableaux de lecture et de grammaire; tout à côté, à portée de la main, la baguette dont s'armait le moniteur pour diriger la leçon; enfin au fond de la salle, sur une vaste et haute estrade, accessible par des degrés et entourée d'une balustrade, la chaire du maître qui, s'aidant tour à tour, suivant des règles déterminées, de la voix, du bâton ou du sifflet, surveillait les tables et les groupes, distribuait les encouragements et les réprimandes..... Les mouvements transmis par le moniteur général avec une mimique expressive étaient exécutés par la troupe des enfants avec une exactitude ponctuelle. La préparation aux exercices avait ses règles comme l'exercice et presque plus que l'exercice luimême. On passait d'un groupe à un autre, de la lecture à l'écriture, de l'écriture au calcul, non seulement en ordre, mais en mesure. »

Les écoles congréganistes n'avaient pas adopté le système de l'enseignement mutuel, qui resta en vigueur dans les écoles laïques jusqu'en 1853. C'est à

çons et filles. En 1850, il existait 65 écoles fréquentées par 13.285 élèves.

Le personnel comptait 65 instituteurs ou institutrices laïques aux émoluments fixes de 1.800 à 2.400 fr., pour les écoles de garçons et de 1.500 à 2.100 pour les écoles de filles, plus dix places de suppléants à 1.300 et 1.400. La dépense totale des écoles était, en 1840, de 285.784 fr., et en 1850, de 387.382 fr., dont 185.195 pour le personnel et 202.187 pour le matériel, y compris le loyer des établissements pris en location. Les écoles du mode simultané étaient dirigées celles des garçons par les frères de la doctrine chrétienne, et celles des filles par des sœurs de diverses congrégations religieuses. En 1840, on en comptait 55 suivies par 12.816 élèves des deux sexes. En 1850, il y en avait 58, contenant 14.300 élèves, dirigées par 95 frères instituteurs aux appointements de 750 fr., et par 88 sœurs institutrices payées 600 fr., chacune.

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Les autorités préposées à la direction de l'enseignement primaire, dans le département de la Seine et à Paris, sont : le préfet de la Seine, le vice-recteur de l'Académie de Paris et le Conseil départemental de l'instruction publique.

Le départ des attributions entre les autorités départementale et académique a été fait d'une façon très nette par une circulaire ministérielle du 24 mai 1876, qui commente l'art. 8 de la loi du 14 juin 1854.

La loi confie au préfet la nomination des instituteurs, des institutrices publics et des directrices des écoles maternelles; elle lui donne le droit d'infliger à ces maîtres des peines disciplinaires dont elle indique exactement la nature. Mais elle réserve au recteur (à Paris, au vice-recteur) la surveillance et la haute direction des études de l'enseignement primaire public, le maintien des bonnes méthodes, l'examen des mesures à proposer au Ministre pour l'amélioration des procédés d'enseignement soit dans les écoles primaires publiques, soit dans les écoles normales.

cette époque seulement que la division des écoles en deux cours, cours supérieur, cours élémentaire, permit d'augmenter le nombre des écoliers qui pouvaient recevoir simultanément la leçon du maître.

Mais à côté du préfet est placé un fonctionnaire de l'Université, l'inspecteur d'Académie, dont le supérieur hiérarchique immédiat est le vice-recteur, auquel doit aboutir directement toute l'administration scolaire et qui prépare la solution de toutes les questions de personnel.

L'un des inspecteurs d'Académie du département de la Seine, placé auprès du préfet, a le titre de directeur de l'enseignement primaire du département.

En dehors des attributions que lui confère la loi, il exerce, par délégation du préfet, son autorité sur les établissements d'enseignement spéciaux à la ville de Paris (collèges Rollin et Chaptal, écoles professionnelles, écoles Turgot, etc.). Il reçoit les déclarations d'ouverture d'écoles libres, des pensionnats, des écoles maternelles, fait visiter les locaux, etc... Il donne des instructions aux maires d'arrondissement au sujet des attributions qu'ils exercent en matière d'enseignement: délivrance des bulletins d'admission aux écoles primaires et maternelles, présidence des comités de patronage, établissement de la liste de tous les enfants soumis à la loi de l'obligation, etc...

Le directeur de l'enseignement primaire a sous ses ordres des inspecteurs primaires, fonctionnaires de l'État, et chargés de donner leur avis sur les secours et encouragements de tout genre relatifs à l'instruction primaire, de surveiller le personnel des écoles, d'inspecter les écoles normales primaires et les écoles libres, etc...

Avant 1882, le nombre des inspecteurs primaires attachés au département de la Seine était de 15:2 pour la banlieue, 13 pour Paris. A cette époque, le Conseil municipal, en vue d'assurer une inspection plus régulière et plus complète, demanda qu'il fùt attribué un inspecteur à chaque arrondissement et inscrivit les traitements de sept inspecteurs au budget de la Ville.

L'organisation du conseil départemental de la Seine est réglée par l'art. 11 de la loi du 15 mars 1850, combiné avec l'art. 6 de la loi du 14 juin 1854. Ce Conseil se compose du préfet, président, du vice-recteur de l'Académie de Paris, vice-président, de deux des inspecteurs d'Académie attachés au département de la Seine, de deux inspecteurs de l'instruction primaire, de l'archevêque de Paris ou son délégué, de trois ecclésiastiques désignés par l'archevêque, d'un ministre de l'Eglise réformée, d'un membre de l'Eglise de la confession

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