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confirment ce récit. Alien (1) ajoute que fi le thos rencontre un homme il le refpecte & le défend même contre tout autre animal qui voudroit l'attaquer. M. Güldenftaedt n'a pas obfervé que le fchacal pouffa fi loin l'attachement pour l'homme. Mais il dit : « Le fchacal s'approche des voyageurs, foit pendant le jour, foit pendant la nuit fous des tentes. Il les accompagne même affez long-tems; c'eft ce que je puis affurer par mon propre témoignage & par celui de tous les voyageurs (2). Il ajoute ailleurs (3) Le (chacal s'apprivoilé aifément, il devient caref » fant, & voit les hommes avec plaifir. Il reconnoît parfaitement fon

maître, & eft attentif au nom qu'on lui a donné. Il faute fur une » table quand on l'y invite (4). Peut-être Alien parle-t-il du thos apprivoifé, quand il dit qu'il défend des hommes. Cette manière dé s'exprimer, fi par hafard il en rencontre un (5), pourroit faire conjecturer qu'il eft question d'un thos fauvage; mais n'eft-il pas poffible qu'Elien ait parlé d'un thos apprivoilé & perdu, qui fuit les hommes & les défend, parce que comme le chien il a contracté avec eux une forté de liaison & d'amitié. Quoi qu'on doive penfer de ces récits, ils ne prouvent pas moins un rapport très-grand entre le thos & le fchacal.

III. Selon Ariftote le thos eft plus petit que le loup (6). Pline dit de même, & d'après lui,"qu'il eft plus allongé, mais moins haut que le loup (7). Helychius nomme les thos des petites bêtes féroces (8). Pollux en parlant des bêtes féroces de la petite efpèce, compte te renard, le thos & le loup (9). M. Güldenftaedt dir que le fchacal et d'une grandeur » moyenne entre les plus grandes & les plus petites variétés du chien (10) ».

(1) El. de nat. animal. 1. 1, c. 7«s

(2) Mem. cité, P. 363.

(3) Mem. cité, p. 364.

P.

(4) M. le Camus dit que dans l'hiftoire du fchacal de M. de Buffon il voit clairement démentie cette amitié du thos pour l'homme, fi vantée par Phile, Alien, &c. Trad. de l'hift. des animaux d'Ariftote, t. 2, p. 304. Le Mémoire de M. Güldenstaedt & ce que MM. Pennant, Pallas, Gmelin ont écrit du fchacal, confirment pourtant cette particularité de l'hiftoire du thos.":

(5) STAY MEV TEρITUX avтρány, Æl. de animal. 1. I, c. 7. 91. dd 2) (6) Hift. animal. I. VI, c. 35.

(7) L. VIII, c. 34.

(8) Onpia uxpa. Hefychius. Voce boss. Ludolphe Kufter, dans fa note fur le mot Bes de Suidas confeille de lire npiá μixтa, des bêtes férocés mélangées, à caufe de la double origine que les anciens attribuoient au thos. Je ne pense pas qu'il faille rien changer à ce paffage d'Hefychius. Les thos ne font pas auffi grads ni auffi vigoureux que les éléphans, les lions, &c. que les anciens appeloient pas voilà pourquoi il le nomme Onix des petites bêtes féroces.

(9) Mémoire cité, p. 365.

(10) Rochart prétend que Pollux nomme le thos,entre ces animaux, parce qu'il tient par fa taille le milieu entr'eux. Rien n'indique pourtant que cette pofition du mot thos ne foit purement l'effet du hafard.

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Et les plus grands chiens font tout au plus de la taille du loup. Il y a donc une conformité de taille très-marquée entre le thos & le fchacal. IV. Homère (1) & Oppien (2) nous montrent les thos marchant en troupe. M. Gmelin dit que les fchacals ne paroiffent jamais qu'en compagnie de quelqu'un de leurs camarades (3).

V. Homère repréfente les thos entourant & dévorant le cadavre d'ua cerf percé par les traits d'un chaffeur (4). M. Güldenstaedt nous apprend que le fchacal fe repaît des cadavres des animaux, même de ceux des hommes. (5).

VI. Homère appelle les thos mangeurs de chair crue (6) & avides de carnage (7); mais cette expreffian ne fignifie point qu'il attaque les hommes, avec qui Homère ne le met jamais aux prifes, comme il fait Je lion, le loup, &c. Elle indique que le thos chaffe les animaux moins forts que lui. M. Güldenftaedt (8) dit que le fchacal eft un animal carnaffier, qu'il tue & mange les petits animaux frugivores.

VII. Homère place le thos dans les montagnes (9), M. Güldenf taedt dit que l'inftinet du fchacal le porte à fe tenir dans les endroits montagneux plutôt que dans ceux qui font bas & champêtres (10).

VIII Homère point les thos, dévorant un cerf dans un bois ombragé (11) M. Gmelin, dit que le fchacal fe tient le jour dans les bois (12). 9.bit av od tame th

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- IX. Homère définit par le même mor (13) le cri du thos & celui du chien, ce qui prouve qu'il a remarqué de l'analogie dans leur manière de fe faire entendre. I ett vrai que M. Güldenftaede n'a pas obfervé cette analogie, mais il penfe que l'aboiement du chien eft un effet de fa domefticité. Il prouve que les chiens de la zone torride & de la zone boréale n'aboient point, mais qu'ils hurlent feulement quand la faim les tourmente. L'aboiement qu'Homère, & Pollux d'après lui, attri

(1) f. 1. XI, v.474.

(2) Halieuticon, 1. II, Oppien dit les thos raflemblés autour d'un grand cerf'; c'eft ainfi que le Scholiafte expliqué le mon αγριμόνιο

(3) Hift. des découvertes, t. 2, P. 242.

(4) II. 1. XI, v. 475.

(5) Mém. cité, p. 365.

(6) ὠμοφάγοι, II. 1. XI, ν. 477 ο

(7) Δαφνινοί, Ι. ΧΙ, ν. 474.

(8) Mém. cité, p. 365..

(9) ωσεί τε δαφοινοί θώες ὄρεσφιν, Η. 1. ΧΙ, ν. 4740

(10) Mém. cité, p. 363-

2.

(II) iμε σxpII. 1. XI, v. 480.

(Γ) ἐν νέμει σκιερώ

12) Hift. des découvertes, t. 2, P. 242

(13) ὑλακτέιν, οι

buent au thos, ne doit pas le faire regarder comme différent du fchacal (1). M. Pallas a vu à Londres un fchacal apprivoifé, dont les cris reffembloient à l'aboiement du chien (2). M. Van-Berchem a remarqué que le chien hurle comme le fchacal dans le tems du rut (3). M. Gmelin dir que les cris que le fchacal pouffe pendant la nuit, font fi horribles & fi infupportables, qu'ils reffemblent à d'affreux hurlemens, qu'ils entrecoupent par des aboiemens pareils à ceux du chien (4). Ce rapport dans la voix eft donc encore une conformité de plus entre cee animaux ( 5 ), (6).

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-X. Homère & Ariftote difent que le thos eft en guerre avec le lion. Mais il est beaucoup plus foible, puifque nous avons vu une troupe thos fuyant devant un feul lion, & lui abandonnant fa proie. L'expreffion dont fe fert Homère prouve que le lion pourfuit le thos, mais non pas que celui-ci puiffe lui réfifter (7). Quintus de Smyrne a imité plufieurs fois cette comparaifon dans fa petite Iliade; mais il décrit auffi

(1) Les anciens avoient obfervé de l'analogie entre le thos & le chien, puifqu'ils défignoient leurs cris par le même terme. MM. Pallas & Güldenstaedt regardent le fchacal comme l'origine des chiens. Ils croient que le fchacal eft le chien fauvage; & L'opinion de ces grands Naturaliftes paroit bien probable. On trouve les conformités les plus grandes entre le chien & le fchacal apprivoilé; mais je n'entrerai pas dans ces détails, n'ayant pour but dans cette differtation que de prouver par le plus d'autorités. poffibles, que le fchacal des modernes eft véritablement le thos des anciens.

(2) Ipfe quoque ejulatus ejus, cum latratu canum ejulabundo magnam habet analogiam. Spic. Zool. fafc. XI, p. 4, note. Il dit ailleurs: Vocem defiderii canine fimillimam habet.

(3) Obfervation fur le Mém. cité de M. Güldenftaed, p. 365+ (4) Hiftoire des découvertes, t. 2, p. 242.

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(5) Le cri du thos fe rend quelquefois en grec par o que Suidas explique par MaxT, aboyer. Bochart en tire l'étymologie de thos, bus. N'eft-il pas plus probable que le verbe on vient du fubftantif bos, & qu'il fignifie crier comme un thos quelques Auteurs dérivent le mot thas de bé, je cours, à caufe de l'agilité de ce) quadrupede; mais je crois qu'il en faut chercher l'étymologie dans les langues de. l'Afie. Peut-être les anciens avoient-ils obfervé cette double manière de crier du thos remarquée par Gmelin, qu'ils appeloient la première essen, parce qu'elle étoit particulière au thos, & la feconde ante, parce qu'elle avoit du rapport avec l'abboyement du chien. L'obfervation des modernes fur le rapport de la voix dul fchacal & du chien, fe trouve toujours confirmée par l'habitude des anciens d'expri-! mer les cris du thos & du chien par le même mot.

(6) M. Jean Hunter regarde le loup, le fchacal & le chien comme de la même efpèce. Il dit qu'ils s'accouplent & engendrent, & que leur progéniture peut fe multiplier. Nous avons déjà que le chien & le loup s'accouplent & engendrent des métis qui multiplient leurs races. Note de M. de la Métherie.

(7) Samue! Bochart prouve très-bien par plufieurs exemples que xa s'employe pour défigner la guerre que des animaux plus vigoureux font à des animaux plus

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un fanglier écartant un thos de fes petits, ce qui indique que le thos eft inférieur en force, & cela doit être du fchacal' ( 1 ),

Tels font les rapprochemens qui m'ont engagé à regarder avec Bochart & M, de Buffon, le thos des anciens comme le fchacal des modernes; mais il faut examiner les objections qu'on peut oppofer à cette opinion.

On ne peut difconvenir, & je l'ai déjà dit, que plusieurs Auteurs ont rapporté du thos des chofes tout-à-fait différentes de ce qu'Homère & Ariftote nous en avoient appris. Mais la plupart de ces Auteurs ont mêlé à leurs récits des détails fi évidemment fabuleux, qu'ils ne méritent aucun crédit fur le refte.

La plupart d'entr'eux difent que le thos eft tacheté; c'eft ce qui a engagé M. Belin (2) à avancer que ce ne peut être le schacal, qui, comme il le dit en effet, n'est pas racheté; mais ces Auteurs prétendent qu'il l'eft, parce qu'il eft né d'un loup & d'une panthère : or, on fait combien l'accouplement d'animaux de genres fi oppofés répugne à la marche de la nature; ce qu'ils nous apprennent des taches du thos ne mérite donc pas plus de confiance que ce qu'ils racontent de fon origine; n'eft-il pas très-probable qu'ils ont donné le nom de thos à des animaux qu'ils avoient mal obfervés, qui avoient en effet des taches fur le corps, & dont la reffemblance avec le loup, reffemblance qu'Homère, Ariftote & tous les Auteurs s'accordent à donner comme le caractère diftinctif du thos, a occafionné leur erreur,

Si ces taches étoient naturelles à l'animal décrit par Homère, ce grand Poète n'auroit pas manqué de les indiquer dans la defcription qu'il fait de cet animal, & de les caractérifer par quelqu'épithète particulière. Ariftote en auroit fûrement parlé. Les Auteurs qui font mention de ces taches, ont donc confondu le thos avec des efpèces congénères, & cela n'a rien d'étonnant.

L'adive (3), le corfac (4), ont beaucoup d'analogie avec le schacal. Ces animaux ne font pas encore bien connus: fi quelqu'un les a vus alors, il a pu les confondre facilement avec le thos, ainfi que toutes les espèces qui ont quelque rapport avec le chien, & par conféquent avec le loup; mais il faut trouver un animal tacheté, femblable au loup, qui ait pu être pris pour le thos, & lui faire donner le nom de Loup-panthère.

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Cet animal me paroît devoir être celui que M. Pennant a fait con

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noître fous le nom d'Hyène tachetée (1), ce quadrupède joint à la conformation à peu près femblable du chien & du loup, les taches dont parlent Oppien & les Auteurs du moyen âge M. Sparman appelle cet animal tigre-loup, & il affure que c'eft une espèce très-différente de l'hyène (2) & du fchacal (3)

J'ajouterai que cette diftinction entre les thos tachetés & ceux qui ne l'étoient pas a été établie par quelques Auteurs anciens, & qu'elle eft confirmée par le témoignage précis d'Arrien. « Ces animaux, dit-il, » que nous nommons tigres, font des thos tachetés & plus grands que les autres thos (4)

D.

Je penfe donc, d'après ces obfervations, qu'il faut féparer en deux claffes les Auteurs grecs & latins qui ont parlé du thos, qu'Homère & Ariftote ne font pas entrés dans de grands détails, à la vérité fur cet animal, mais que ce qu'ils en ont dit eft clair dans l'ordre de la nature, & s'accorde très-bien avec ce que les modernes nous ont appris du fchacal; que les Auteurs poftérieurs, Arrien, Oppien & les Grammairiens du moyen âge, car ces Ecrivains ne méritent pas le nom de Naturaliftes, ont embrouillé les notions qu'on avoit fur le thos, ont adopté toutes les fables qu'on en débitoit, & fouillé leurs récits d'ab furdités qui doivent les décréditer entièrement, & qu'enfin l'animal qu'ils ont pris pour le thos eft l'hyenne tachetée de M. Pennant, le tigre-loup de M. Sparman.

(1) Synopfis of quadruped. t. p. 161, No. 118.

(2) Canis hyena, L.

(3) Canis aureus, L.

(4) Arriani, hift. indica, p. 329.

EXTRAIT D'UN

MÉMOIRE

Sur l'irritabilité des organes fexuels d'un grand nombre de Plantes (1) 3

Par M. DESFONTAINES, de l'Académie des Sciences, Profeffeur de Botanique au Jardin public des Plantes de Paris. ON appelle irritabilité la propriété que la nature a donnée à certains

corps

de fe mouvoir d'eux-mêmes, principalement lorfqu'on les touche. Cette force contractile qui nous offre dans les animaux des phénomènes

(1) Ce Mémoire a été préfenté à l'Académie des Sciences en 1782

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