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Moulins en Bourbonnois, font de mauvaise qualité & pechent, tant par
le défaut de proportion, que par la nature de leurs fondans terreux mis
inutilement en excès pour fuppléer aux fondans falins, dont j'ai à peine
retrouvé quelques veftiges dans les différentes criftallifations que j'ai
obtenues. Elles ont donc gâté & décompofé le vin qu'on y avoit mis

On fent trop combien il est important de faire choix de boiffons
pures & faines, & de n'employer que des vaiffeaux propres à les confer-
ver telles! Je ne m'étendrai donc pas fur les dangers & les inconvéniens
qui peuvent réfulter de l'ufage des bouteilles attaquables & folubles par
le vin & les acides. Je rapporterai feulement l'obfervation fuivante,
laquelle en eft une preuve frappante. Un domestique, fatigué & al-
féré, prit un refte d'une des bouteilles en question, l'avala précipitam-
ment, & jufqu'à la lie, ou plutôt jusqu'à la diffolution de la bouteille
même il en fut très - incommodé & tourmenté par de violentes
coliques,

DISSERTATION
SUR LE THOS;

Par M. MILLIN DE GRANDMAISON,

De l'Académie d'Orléans.

SYNONIMI E.

us, Homeri, 1. & Odiffea paffim, & præfertim, II. 1. XI, v. 474.

os, Ariftotel. hift. animal. 11, c. 19, n. 130, VI, c, 35, ¤. 426———428, IX,
C. 70, n. 473 - 475.

Thos, Plinii, hift. nat. 1. VIII, c. 34.

Canis aureus, L. fyft. nat. ed. XII, 1, p. 57, n. 7.

Le fchacal, M. de Buff. hift. nat. XIII, p. 255.

Os, Oppiani, Arriani, Æliani, Euftathii, &c,
Λικοπάνθηρ, eorumdem autorum,

Thos, Plinii, 1, VIII, c. 19.

The ftripped hyena, Penn. Synopf. p. 161, n°. 118, hift. des quad. p. 250, no. 149.
Tigre-loup, Sparman, t. 1, p. 208 & 215 de la traduct. franç. in-8°.

LE Thos dont il eft fi fouvent parlé dans les vers d'Homère, de
Théocrite, de Virgile & des autres Poëtes, eft un des animaux fur
lefquels les anciens nous ont laiffé les notions les plus imparfaites. Il
n'est pas aifé de déterminer, d'une manière bien précise, quel eft le qua-

drupède auquel ils ont donné ce nom. Les modernes ne font pas d'accord fur ce point. Je vais examiner leurs différentes opinions, les difcuter, & tâcher de confirmer la plus probable, par de nouvelles autorités.

Homère eft le premier Auteur qui ait parlé du thos. Ariftote en a donné une defcription très-peu détaillée. Aucun d'eux ne défigne cet animal par des caractères parfaitement marqués. Les anciens s'attachoient plus à faire connoître les mœurs des animaux que leur conformation. Ce n'eft donc que d'après une analogie, à-peu-près exacte pour les mœurs, que nous pouvons rapporter ce quadrupède à quelqu'un de ceux connus par les modernes.

Homère peint les thos allant en troupe. Les deux Ajax volant au fecours d'Ulyffe, dont ils ont entendu les cris, le trouvent preflé par les Troyens (1), « qui marchoient réunis comme des thos montagnards, »avides de carnage, autour d'un cerf percé par les traits d'un chaffeur. » Les thos affamés de chair crue le dévorent fur la montagne, dans un » lieu ténébreux; mais le hafard amene en cet endroit un lion vigoureux, les thos prennent la fuite, & le cerf devient la proie du lion», Ariftote dit (2), le thos reffemble au loup par les parties intérieures. Il a le corps altongé vers la queue, & plus ramaffé vers la tête. Il aime les hommes (3), ne leur fait aucun mal & ne les craint point. Il eft » l'ennemi du lion, & fe nourrit des mêmes alimens »».

Telle eft la defcription fimple que le Philofophe nous a laiffée de la conformation de cet animal, & que le Poëte nous a tracée de fes

mœurs.

Les Auteurs qui font venus après eux ont plutôt embrouillé qu'éclairci Phiftoire du thos, par leurs définitions vagues & peu exactes: & il faut avouer qu'en général elles s'éloignent beaucoup de ce qu'Homère & Ariftote nous en avoient appris; mais la plupart ont été faites par des hommes qui n'avoient aucune connoiffance de l'Hiftoire-Naturelle. Ils favoient feulement que le thos avoit à-peu-près la figure du loup, & ils attribuoient fon nom à tout ce qui avoit quelque reffemblance avec cet animal ce font ces fauffes définitions qui ont auffi égaré quelques modernes qui ont été chercher le thos dans des genres auxquels il n'a jamais pu appartenir. Nous devons donc examiner quel eft le degré de confiance que méritent les écrivains qui ont parlé de cet animal avant de donner quelque crédit à leur décifion.

Le thos, felon Hefychius (4), eft une bête féroce (5) de petite espèce,

(1) II. 1. XI, v. 474, &c.

(2) Arift. hist. animal. 1. VI, c. 35%.

(3) Id. L. IX, c. 44.

(4) Voce Wes.

(5) Onpia mixpa. Le mot np fignifie tout animal vivant de chaffe il revient au

femblable au loup: il eft engendré d'un loup & d'une hyène. Suidas eft du même fentiment (1). Euftathe dit dans un endroit que le thos est femblable au loup (2), dans un autre, qu'il approche beaucoup de la hyène (3). Oppien, que fouvent le loup s'accouple avec la panthère cruelle, ce qui produit la race robufte des thos, qui ont une couleur double & mêlangée, la peau de leur mère & la tête de leur père (4) », Euftathe prétend auffi que felon les anciens le thos reffemble à un loup, ce qui fait que plufieurs Auteurs l'ont appelé loup-panthère. Il ajoute pourtant que ceux-là fe trompent qui croient que le thos & le louppanthère font un même animal. Le loup-panthère, dit-il, eft frugivore & timide, tandis que le thos eft courageux, & qu'il attaque même le lion (5). Gratien dit la même chofe (6). On lit dans le vocabulaire manufcrit de Cyrille, cité par Bochart (7), que le thos eft un louppanthère très-léger, quoiqu'il ait les jambes courtes. Il paroît que cette defcription eft celle de Pline qui, felon fon ufage, a copié la fienne d'Ariftote. « Le thos, dit-il, eft une espèce de loup qui a le corps plus allongé & les jambes plus courtes; il faure avec agilité, vit de chasse, & ne fair pas de mal à l'homme (8) ». Il dit ailleurs que ce fut « pendant les jeux donnés au peuple par le grand Pompée qu'on vit pour la première fois à Rome un thos, que les Gaulois appeloient ruftum, ayant la figure du loup & les taches de la panthère (9) ». Le Scholiafte d'Oppien (10) appelle le thos loup-panthère. Arrien faifoit une diftinction entre les véritables thos & ceux qu'on appeloit loups-panthères. « Ces » animaux, dit-il, que nous nommons tigres, font des thos tachetés & plus grands que les autres thos (11).

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Voilà à- peu près tout ce que les anciens nous ont appris du thos. On voit combien il eft difficile de débrouiller parfaitement ce chaos; mais je crois qu'il eft aifé d'appercevoir que les Auteurs qui font venus après Ariftote & Homère ont chargé & défiguré leur description, & qu'ainfi quelque foibles que foient les éclairciffemens que nous en pouvons tirer, c'eft cependant à ces deux premiers Auteurs qu'il taur recourir pour avoir l'idée la plus exacte du thos, & n'adopter des autres que ce qui peut convenir à leur récit, & n'eft point oppofé aux loix immuables de

(1) Voce OES.

(2) In II. 1. XI, v. 474, p. 856, 1. 51.

(3) Euft. p. 922, 1. 51.

(4) Cynegeticon, I. III, v. 336.

(5) Euft. p. 846, 1. 51, & p. 922, 1. 51.

(6) Grat. Cyneg. v. 256.

(7) Herozoicon, t. I , p. 849.

(8) Hift. nat. 1. VIII, c. 34.

(9). Id. c. 19.

(10) Halienticon, 1. II.

(1) Arriani, hift, indica, p. 326,

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la mature. Je rechercherai enfuite quels font les animaux qui par leur reflemblance avec le loup & la panthère ont pu donner lieu à certe confufion; mais avant de procéder à cet examen, il faut expofer les divers fentimens des modernes, & dire à quel animal ils ont rapporté le thos.

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Aldovrande (1) & Céfar Scaliger (2) ont cru que c'étoit le lynx ou loup-cervier. Belon (3) que c'étoit te papion. Bochart (4), d'après Gefner (5)5 dit que c'eft le fchacal, & cette opinion a été adoptée par M. de Buffon (6). M. Belin (7), dernier éditeur d'Oppien, affure que le thos n'eft aucun de ces animaux, & qu'il ignore à quelle efpèce connue il faut le rapporter (8). L'Auteur des Commentaires de Leipfic eft du même fentiment (9). "

L'opinion d'Aldovrande que le thos eft le loup-cerviér a été adoptée par plufieurs Auteurs; elle eft pourtant la plus infoutenable, puifque le loup-cervier eft du genre des animaux armés de griffes, du chat (10), & que le fchacal eft du genre du chien. Il ne faut d'ailleurs chercher le thos que parmi les animaux foibles, timides & du fecond ordre (11).

L'opinion de Scaliger, de Belon & de Bochait, qui font du thos le papion, n'eft pas plus recevable. Le papion eft un finge (12), & tous les anciens s'accordent à nous montrer le loup comme le point de ralliement pour trouver le thos. La forme de la tête de ce finge qui approche de celle d'un chien, a trompé ces Auteurs (13).

Bochart qui croit que le thos eft le papion, dit que c'eft auffi le

(1) Hift. quadrup. digit. p. 91.

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(2) Comment. Cæf. Scalig. in Aritt. hiftoriam de animalibus, p. 273.

(3) Obfervat. 1. II, c. VIII.

(+) Hierozoicon, 1. III, c. XII. Il affure auffi que le tas, le rxuxa, le xavoup & le Auxorávenp des anciens, le papion, ou le babouin des modernes, font le même animal. (5) Hift. quadrup. p. 767.

(6) Hift. du fchacal, t. XIII, p. 268.

(7) Oppiani Cenegyricon. Nota in v. 338, 1. III.

(8) M. Pennant penfe que le thos des Grecs eft l'animal décrit par Oppien, L. III, v. 297, fous le nom de xuxos os, loup jaune, Penn. Synopfis of quadruped. 4. 2, p. 246.

(9) Commentario de rebus in fcientia naturali geftis, 1786..

(10) Felis lynx, L. Syft. nat. ed. XII, t. I, p. 62.

(11) C'eft probablement la comparaison du cerf attaqué par des thos dans l'Illiade & imitée par d'autres Poëtes, qui a fait rapporter le thos au loup-cervièr,iquadrupède d'un autre genre, ainfi nommé en effet, parce qu'il attaque les cerfs."

(12) Simia (phinx, L. Syft. nat. XII, p. 35. Papio fpinx Erxlebeni mammalia, p. 15. (13) Les queftions propofées fur le thos aux voyageurs Danois en Arabie par M. Michaëlis, font d'un très-favant orientalifte, mais prouven: des connoiffances bien peu approfondies en Hiftoire-Naturelle; elles fe bornent à tâcher d'apprendre fi les thos ne font pas les renards de Salomon, & en quoi le ths differe effentiellement de l'hyène.

fchacal (1), & il a été fuivi par M. de Buffon, qui n'a rapporté que les preuves alléguées par Bochart. Les Mémoires qu'il avoit alors fur le fchacal étoient peu exacts & peu confidérables. M. Gmelin dans fes voyages a été plus à portée de bien l'obferver (2), & M. Güldenftaedt a publié dans les Mémoires de l'Académie Impériale de Pétersbourg, one differtation très-intéreflante fur ce quadrupède (3). Cette excellente differtation qui fait parfaitement connoître les mœurs & la conformation du fchacal, m'a fait faire de nouvelles réflexions, d'après lesquelles je penfe que c'eft véritablement le thos des anciens.

LL'AGie mineure eft la patrie du fchacal (4). Il devoit donc être trèscommun dans les pays dont Homère avoit connoiffance, & ce Poëte & Ariftote devoient en avoir des notions exactes. On trouve encore une grande quantité de ces animaux dans la Turquie (5). Ils font trèsmultipliés aux environs de Conftantinople (6).

IL.. Ariftote dit que le thos aime les hommes, qu'il ne leur fait aucun mal, & ne les craint point (7). Manuel Phile (8), Pline (9), Solin (10),

(1) Canis aureus, L. Syft. nat. d. 1o, p. 60.

(2) Voyages, t. III. p. 8o.

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(3) Novi Cominentarii Acad. Scient. Imper. Petropol. t. 26, p. 440, ann. 1775. Cette differtation a été traduite en françois dans le Journal de Phyfique, novembre 1786, p. 353, par M. Van-Berchem qui y a joint d'excellentes obfervations; c'eût de fa traduction que j'ai fait ufage.

(4) Zimermann fpecim. Zool. geogr. p. 363.

(5) Niebu n'. Voyage d'Arab. p. 166.

(6) L'Afrique nourrit auffi des fchacals. M. Desfontaines en a rapporté un 'Alger; il eft à la Ménagerie du Roi. Hérodote compte les thos parmi les animaux de la Lybie, 1. IV, c. 192. Theocrite, Idyll. 1, v. 70, fait pleurer aux thos la mort de Daphnis. Il fe pourroit à la rigueur que des thos euffent paffé d'Afrique en Sicile; mais je penfe plutôt que ces Auteurs plus grands Poëtes que Naturaliftes, ont fait entrer ces animaux dans leur compofition, parce qu'ils avoient emprunté leur nom d'autres Poëtes. C'est ainsi qu'ils leur ont uni pour compagnons de leurs Tarmes les lions d'Afrique :

Τηνῖν μὲν θεές, Τηνῶν λύκοι πορύσαντο,

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Τηνον χ' ωκ. δρυμαῖο λέων ανέκλαυσε θανόντα..

Le Scholiafte veut corriger dexaurs. Les lions auroient pu pleurer la mort de Daphnis, s'ils avoient exifté en Sicile. H. Etienne paroit avoir adopté cette leçon; mais quoi qu'en dife le Scholiafte, il faut lire vixλavre d'un feul mot, puifqu'purar n'eft pas fufceptible d'une pareille excufe, & que le thos ne foit pas plus commua en Sicile que les lions. C'eft pour enrichir leur defcription que Théocrite, & Virgile après lui, ont nommé ces derniers animaux.. Voici le vers de Virgile calqué fur le fecond de Théocrite, auquel il doit tant d'autres vers.

Daphni tuum panos etiam ingemuiffe leones
Interitum..... Virg. Eglog, v. 27.

(7) Hift. animal. 1. IX, c. 44+

(8) Phil. c. 44.

(9) Plin. 1. VIII, c. 34

(10) Solin. Polyhi.

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