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& des femelles dont on ne peut révoquer en doute l'existence & les fonctions. Tout autre que Schmiedel les auroit peut-être confondus les uns avec les autres; car ils ont à peu-près la même forme extérieure, celle d'un petit parafol cu chapiteau pédonculé Cependant certains chapiteaux font prefqu'entiers, ayant leurs bords feulement finués, tandis que d'autres font fendus & divifés en buit à dix rayons. Les chapiteaux feulement finués font des fleurs mâles d'une ftructure fingulière. En les examinant attentivement avec une bonne loupe, on appercevra fur leur partie fupérieure des pores fort petits. Si l'on fend perpendiculairement le chapiteau, pour découvrir où conduifent ces pores, on verra manifestement qu'ils font les ouvertures de perites cavités ovales ou petites follicules polliniferes, qui font les vraies anthères de cette plante.

L'organe femelle eft bien autrement conformé. Sous chaque rayon du chapireau eft cachée une petite rangée de germes, que la maturité change en capfules de la nature de celles dont j'ai parlé plus haut. Mais le fruit de la Marchantia est ainsi très-différent de celui des Bryum, Hypnum, Jungermannia, &c. Dans ces genres, il n'y a qu'une feule capfule portée par un feul pédoncule & libre: dans la Marchantia un même pédoncule porte plufieurs capfules, & ces capfules, au lieu d'être libres, font recou vertes d'un abri qui les renferme diversement, felon les diverses espèces.

Si les Ouvrages de Schmiedel & d'Hedwig avoient donc été plus connus en France, M. Reynier n'auroit point donné comme nouvelle la reproduction de la Marchantia par des corpufcules vivipares fans le concours des fexes, il auroit cherché à voir par lui-même l'existence des étamines & des capfules décrites par ces deux Botaniftes; & d'un autre côté, M. l'abbé P*** n'auroit pas avancé que les chapiteaux n'ont été confidérés jufqu'à préfent que comme les organes du fexe mâle, puifque ceux qui font au courant des nouvelles découvertes favent qu'une partie de ces chapiteaux font de véritables fruits, dont je viens d'indiquer la Aructure.

M. l'abbé P*** dit que M. Sahlberg a obfervé le mouvement élastique des anthères dans l'inftant de l'éjaculation. Il auroit fallu dire: Le mouvement des femences. Mais pourquoi n'avoir pas plutôt cité Marchant à qui eft dû l'honneur de la découverte? Ce Botanifte françois nous a le premier appris qu'on découvroir au dedans des cap!ules des filets foyeux très-fins, comme chiffonnés & repliés, lefquels s'allongeant peu à-peu, & s'épanouiffant vifiblement, laiffent échapper une infinité de trèspetites particules jaunes, à-peu près rondes, qu'on apperçoit aduellement fortir par bouffes d'entre les filets foyeux de cette houpe, & fe répandre dans l'air, ainfi que feroient les étincelles d'un tifon enflammé qu'on frapperoit coup fur coup.

C'est encore Marchant que l'on doit le premier foupçon des vraies femences de cette plante, qui eft à fi jufte titre décorée de fon nom. I

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dit: « Il eft affez vraisemblable que les petites particules jaunes dont on vient de parler, font les graines de cette plante, puifqu'on voit naître, » des millions des jeunes plantes de la même efpèce aux environs des » anciennes, ce qui arrive, non-feulement fur la furface de la terre, mais auffi contre des murs graveleux, dans des cours, entre les joints out » fentes du pavé, même jufques fur des toîts voifins expofés au nord, & principalement pendant l'automne, ou autres tems frais, ce qui nous fait appeler ces femences, graines errantes ou vagabondes, à caufe qu'elles fe difperfeat dans l'air, où elles font invifibles ». Voyez les Mémoires de l'Académie des Sciences, année 1713, & les Collections académiques, part. franç. tome 3.

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Je ferois cependant très-fâché que la crainte d'avoir incomplertement obfervé, ou de ne pas dire des chofes neuves, empêchât les obfervateurs françois de publier leurs travaux. On ne peur trop fournir d'observations de tout genre aux Naturaliftes. D'ailleurs, je ne crains pas de le dire, 'Hiftoire-Naturelle & la Botanique ne font que de naître. Combien ne faudra-t-il pas de fiècles pour que la fcience atteigne la perfection, pour que notre pierre philofophale, je veux dire la méthode naturelle, foit enfin parfaitement trouvée, pour que les efpèces des quatre parties du monde foient toutes déterminées, nettement diftinguées de leurs variétés, pour que tout amateur ou commençant puiffe fans maître, à l'aide d'un feul livre élémentaire, trouver imperturbablement le nom de l'objet qu'il cherche. Il faut donc reconnoître cette vérité : l'Hiftoire-Naturelle eft encore au berceau Du tems des Bauhins feulement on a commencé à concevoir ce que c'étoit que la Botanique. Les Tournefort, Rai, Morifon, &c. lui ont donné la naiflance. Linné, l'immortel Linné lui a fait faire un grand pas ; mais je crains bien que malgré toutes les découvertes de nos jours la fcience ne refte long-tems à languir. On peut diftinguer prefque tous les Naturaliftes en deux clailes. Les uns, pénétrés du mérite de Linné, font fes adorateurs ferviles & ne peuvent s'écarter d'un pas du chemin qu'il a tracé, quoique ce grand homme lui-même changeâr ou corrigeât fouvept fa route. Par exemple, il avoit d'abord voulu que le nom de chaque plante comprît, avec la dénomination du genre, les caractères qui la diftinguoient de toutes les autres efpèces. Ainfi il ne vouloit d'abord admettre que les noms spécifiques. Bientôt après il reconnut l'impoffibilité de l'exécution & fe fervit de noms triviaux, leur commodité fait aujourd'hui affez généralement adopter. Dans la conftruction de fes genres, de fes espèces, de fes variétés, que de changemens n'a t-il pas opérés ! Malgré cet exemple, une multitude de Botaniftes voudroient qu'on s'en tînt ftrictement à ces dernières idées tandis qu'il n'auroit fans doute pas manqué de les améliorer encore s'il eûr pu toujours vivre.

que

Il est une claffe de Naturaliftes dont la conduite eft toute oppofée.

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Voyant que dans la pratique on obferve bien des chofes qui contredifent plufieurs principes de Linné, ils concluent que tout ce qu'il a donné eft condamnable, & dans tous leurs Ouvrages ils s'acharnent contre lui. Quel dommage que de bons obfervateurs, tels que les Crantz, les Medikus, &c. cherchent par-tout à détruire entièrement la gloire du célèbre Suédois. Ce font, il eft vrai, des Botaniftes fort habiles; mais on les appelera toujours des enfans qui déchirent le fein de leur

nourrice.

Entre ces deux excès la route eft difficile.

Il faudroit tâcher de conferver tout ce que Linné a donné de bon, & cependant, s'il a fait un pas, d'en faire tout de fuite deux ou trois. Cela ne fe pourroit fans de grandes innovations; mais qui ofera proposer ces innovations? Qui ofera dire aux vieux Botaniftes: il faut renoncer à votre routine? Qui ofera dire à d'autres: vous n'êtes que des échos qui rendez les fons on ne peut mieux, mais qui n'en fentez pas la valeur? Voltaire l'a dit: la foule crédule eft long-tems l'écho d'un feul homme. Ayant mis une fois fa confiace en un feul, elle ne peut plus changer d'avis. Tout le monde vous crie: mais nous avons Linné qui fuffit. Eh non! il a fuffi pendant fa vie, maintenant il ne fuffit plus : il a fait faire un pas à la fcience; pourquoi ne voulez-vous pas lui en faire faire un autre?"

C'eft peut-être à Paris qu'il exifte un plus grand nombre de ces échos. On fait les reproches fairs depuis long-tems aux Parifiens. Croiroit-on qu'au fujet de quelques idées d'innovation que je propofois modeftement, un homme verfé dans la fcience, mais habitant de Paris, & me prenant fans doute pour un provincial, dit de bonne foi que c'étoit toujours de la province qu'on propofoir de telles innovations? Effectivement ce n'eft pas dans la capitale de Suède que Linné conçur les fiennes. Il s'agiffoit d'infectes: j'aurois voulu qu'on réformât ce qui m'en fembloit fufceptible dans le fyftême de Linné; & cependant il me renvoyoit toujours à ce même fyftême: je parlois de ne s'attacher qu'à la méthode & aux genres naturels; & cependant il me renvoyoit toujours à Fabricius, qui eft leur antipode. Quand ce font les gens inftruits dans la science qui répondent ainfi à ce que vous propofez, que peut-on efpérer ? Il faut fe taire; mais je dirai toujours: Nonne pudet Phyficum, id eft fpeculatorem venatoremque natura, ab animis confuetudine imbutis, petere teftimonium veritatis? (Cicer. de Nat. Deor. 1. 1, n. 83. )

Je fuis, &c.

ESSAI

Sur les avantages qu'on peut tirer du chalumeau à bouche lorfque fe fervant de fupports de verre, on veut tenter avec le fecours feul de l'air commun la fufion per fe des fubftances réfractaires expofées à la flamme fous des parcelles de la plus extrême petitesse.

Par M. DODUN.

LE fréquent ufage que je fais du chalumeau à bouche avec l'air commun, la difficulté que m'avoient toujours fait éprouver certaines fubftances prefentées à la flamme fous des volumes indiqués, me faifoient defirer un ufage plus étendu de cer inftrument, vu fa grande commodité. Déjà depuis long-tems je préfumois que l'impoffibilité de la fufion per fe des fubitances réfractaires pouvoit provenir de ce que les morceaux expofés fur le fupport étoient trop volumineux pour le coup de feu qu'on pouvoir leur appliquer : je brifai donc mes fubftances; je les eus fous la forme de petits fragmens de la groffeur de la tête d'une très-petite éguille, & fouvent plus menus. J'ai même fenti la néceffité de n'offrir à la flamme du chalumeau qu'une poudre impalpable, & j'ai retiré de cette méthode les plus grands avantages, foit que la fubftance fût fimple ou qu'elle fûr compofée. J'ai toujours vu qu'une molécule très déliée qui cède au premier coup de feu entraîne le plus fouvent avec elle la fufion d'une fubftance plus grofle qui lui est voifine, & pour laquelle il eût fallu un tems aflez confidérable pour en opérer feule la fufion. L'agrément d'avoir fous les yeux, & pour ainsi dire dans la minute, les différens états d'une fubftance dont partie eft en pleine fufion, lorsqu'une autre est à peine calcinée, m'a le plus fouvent fait adopter de préférence ce moyen très-court, ainsi qu'on va le voir, & tout-à-la-fois fi fatis taifant dans fes résultats.

Je me fers ordinairement des recoupes de verre de vitriers: ce font mes fupports, ils ont l'avantage de me préfenter toujours dans leur fracture une pointe ou un éclat très-délié que le tube ne fauroit me donner, & que la flamme de la bougie mer facilement en fufion, Je leur donne la forme d'un coin, ou d'un triangle ifofcèle de deux à trois pouces de longueur fur environ trois à quatre lignes de base. Le fommet, en eft toujours aigu. Je mouille légèrement cette pointe acérée, je la préfente au fragment ou à la poudre de la fubftance que je veux éprouver. L'un ou l'autre s'y attachent auffi-tôt, & dans l'inftant avant de faire ufage de mon chalumeau, j'offre la pointe du fupport à la

flamme qui eft toujours affez puiffante pour le faire entrer de fuite en contact avec le verre en incandefcence. Je prends alors le chalumeau de la main droite, pofition qui eft plus commode pour moi que celle du pied, employé par le célèbre Profeffeur de Genève, & de l'autre je tiens mon support.

Mon premier coup de feu eft ordinairement mou & foible: il ne doit fervir qu'à fixer folidement le fragment, & dès l'inftant que de petit globule eft formé, je me fers d'une loupe ou d'une forte lentille pour en examiner l'effet, & j'en tiens note auffi-tôt. Je continue mon feu en le pouffant plus fort que ci-devant: cette tenue eft communément de deux à trois minutes lorfque la fubftance eft réputée réfractaire, & qu'il importe d'en bien faifir les différens états: mon fupport eft examiné de nouveau, & les changemens éprouvés décrits de fuite. Enfin, un troifième coup de feu eft dirigé, puis un quatrième, &c. Il eft très-rare que j'en emploie plus de huit. On va voir que les fubftances regardées jufqu'ici comme les plus infufibles, en ont exigé beaucoup moius: je continue jufqu'à la fin à tenir note de tous les phénomènes qui fe préfentent.

Je crois devoir prévenir que les parcelles infiniment tenues que j'expofe fur le fupport, & qui fouvent font plus fines qu'une pointe d'épingle, ne doivent cependant point paroître trop petites, ainfi qu'on pourroit le croire. Leur effet fous de fi foibles dimenfions eft remarquable même à la flamme & beaucoup plus à la loupe. On connoît l'effet des réfractions fur les corps cylindriques: on fait comme ils accroiffent le volume, & comme ils le développent à l'œil. C'eft à l'aide de cette magie de l'optique qu'on obferve diftinctement les divers changemens que ces parcelles éprouvent au feu. On va juger du degré d'intensité & de force que la flamme acquiert & pofsède fur d'auffi petites furfaces; mais il est nécessaire avant de faire connoître ces effets, de montrer la manière dont le fupport de verre fe comporte feul expofé à la flamme du chalumeau, Cette première expérience fervira à diftinguer les phénomènes propres au verre dans fa fufion, de ceux qui font particuliers aux différentes fubftances éprouvées.

Fufion du verre de fupport, & phénomènes qu'il préfente à la flamme pour fervir à faire diftinguer ceux qui lui font propres, de ceux qui font particuliers aux fubftances, & auxquels fans cette indication on pourroit les rapporter.

Le verre verd commun de vitrier expofé à la flamme du chalumeau donne & présente au premier coup de feu quelques bulles d'air qui pénètrent l'intérieur du verre: on y diftingue auffi quelques filers compofés de globules infiniment petits qui fe rangent fur la circonférence, Généralement les premières bulles d'air acquièrent du volume par une chaleur continuée, tandis que les filets difparoiffent à ce même degré

de

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