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pu y contribuer en facilitant l'évaporation de l'huile effentieile néceffaire à la liquéfaction, fi les habitans n'avoient obfervé que l'incruftation eft plus ou moins confidérable fuivant le fol où l'arbre fe trouve; fur le fable, par exemple, il la conferve moins, & fur la terre noire il la conferve davantage, fur-tout fi l'arbre eft jeune.

Pour enlever cette incruftation, l'ouvrier fe fert d'un fer tranchant, courbé, large de deux pouces & demi, attaché à un manche de bois fuffifamment long pour atteindre au haut de l'incifion. Cet outil fe nomme en terme vulgaire barrefquit, l'opération barrefea, d'où peut avoir dérivé le nom de barras que l'on a donné à cette matière.

Pour procéder à cette opération, on étend une toile mouillée au pied de l'arbre pour recevoir la matière que l'on détache en grattant fortement du haut en bas la furface de l'incifion; on la met en mafle fous des engards, pour l'exploiter lorfque les propriétaires croyent en tirer meilleur parti.

La térébenthine & le galipot ont befoin d'être féparés des corps étrangers; l'on purifie la térébenthine, l'on purifie & on cuit le galipot. Je vais indiquer la manière dont on s'y prend.

Purification de la Térébenthine.

Il y a deux manières d'y procéder: la première, qui eft celle qu'on pratique dans le Maranfin, près de Bayonne, confifte à avoir un fourneau fur lequel eft placé une chaudière de cuivre qui contient ordinairement trois cens livres de matière ; on enduit le tour, de forte que la flamme ne puiffe circuler au dehors: on remplit prefque la chaudière de térébenthine; on la chauffe à petit feu ; & lorfqu'elle est absolument liquide, on la pafle fur un filtre de paille fait exprès; placé fur une auge ou cuve, on la laiffe refroidir pour la mettre dans des vafes ou futailles, foit pour l'envoyer ainfi, ou pour en extraire l'huile effentielle. Cette purification lui donne une couleur dorée, & peut fe faire en tout tems.

La feconde manière, & qui ne fe pratique que dans la montagne & à la Terre de Buch, à dix lieues de Bordeaux, confifte à avoir un grand couloir en planche d'un quarré de fept à huit pieds, dont le fond elt percé de petits trous; on le place à une certaine hauteur fur un réservoir éga lement conftruit, mais fans trous, parce qu'il fert de récipient.

On expofe le couloir le plus qu'il eft pollible, de manière qu'il puisse avoir l'ardeur du foleil toute la journée. On le remplit aux deux tiers de térébenthine, & à mesure que le foleil l'échauffe, elle fe liquefie, & tombe par les petits trous dans le récipient qui eft au-deffous, & les corps étrangers qu'elle contenoit reftent dans le couloir; la térébeuthine purifiée de cette manière est beaucoup plus dorée que la précédente, plus liquide & beaucoup plus eftimée.

Ceux qui purifient la première ne connoiffent pas cette manière. Les propriétaires ne l'ignorent cependant pas; mais ils ne la font pas pratiquer,

parce qu'elle ne peut fe faire qu'en été, & se faire qu'en été, & qu'ils peuvent faire leur purifi

cation en tout tems.

Huile effentielle de Térébenthine.

Pour extraire l'huile effentielle, on a un alambic à ferpentin, comme ceux dont on fe fert pour la diftillation de l'eau-de-vie. Il eft ordinairement d'une capacité à contenir deux cens cinquante livres de matière ; on le place fur un fourneau, & on le charge à cette quantité de térébenthine purifiée; après avoir pris la précaution d'ufage, ils mettent le feu au fourneau, & donnent doucement d'abord un degré de chaleur fuffifant pour faire promptement bouillir la matière, & l'entretiennent à ce degré jufqu'à ce qu'ils s'apperçoivent qu'il ne paffe plus d'huile effentielle, alors ils arrêtent le feu, fans l'éteindre : ils retirent l'huile du récipient qui n'eft autre chofe qu'un baquet placé à côté du tonneau qui fert de réfrigérent & fous le conduit du ferpentin; cette quantité de térébenthine produit ordinairement foixante livres d'huile, & l'opération finit dans le jour.

Réfidu de cette Diftillation.

J'ai fait obferver plus haut que les ouvriers n'avoient fait qu'arrêter le feu, parce qu'ils ont befoin de la chaleur pour retirer le réfidu de Falambic. Pour cet effet, ils ouvrent un tuyau en cuivre qui eft pratiqué pour cet ufage à l'alambic, & le réfidu coule dans une auge placée exprès, & fuffisamment grande pour le contenir, afin de l'y laiffer un peu refroidir. Cette auge eft également percée d'un trou à fon extrémité; on forme une rigole au-deffous fur le fable pour la faire couler dans des moules plus loin & dans du fable bien frais, & on la laiffe refroidir pendant deux jours au moins afin de pouvoir l'enlever. C'eft ce réfidu qui eft connu fous le nom de bray fec, & nous l'employons dans nos pharmacies fous celui de colophonne : elle eft d'une couleur brunâtre, très-sèche.

On peut lui enlever cette couleur & la rapprocher de celle de la réfine jaune, fi on a foin de jeter de l'eau bien chaude dans l'alambic lorsque la matière eft encore bouillante, & qu'on l'agite long-tems: c'eft ce que l'on fait avec une torche de paille mouillée & bien chaude. Alors on la vend pour de la réfine, mais elle n'eft de la réfine, mais elle n'eft pas auffi eftimée, parce qu'elle eft abfolument dépourvue de fon huile effentielle.

Purification du Galipot.

Pour purifier le galipot on fe fert de la même chaudière que pour la térébenthine: on la remplit aux deux tiers de galipot, on le fait fondre à un feu très-doux, & on le paffe fur un filtre de paille; n'étant pas dépourvu de fon huile effentielle, il conferve toujours une confiftance grasse

& prend alors le nom de poix jaune, & nous l'employons fous celui de poix de Bourgogne.

Réfine jaune.

La réfine jaune fe fait également avec le galipot & dans le même vaiffeau, alors on la fait cuire à petit feu, ayant le foin de remuer fouvent la matière, afin qu'elle ne fe brûle pas; quand elle a la confiftance que l'on defire, on la pafle fur un filtre de paille pofé fur une auge de même que pour la colophonne; ce qui fe fait avec une forte cuiller à pot en cuivre à manche de bois affez long pour ne pas être expofé.

Quand cette matière eft paffée, elle eft noire; mais on lui fait perdre cette couleur en y mettant par gradation huit à dix pintes d'eau bouillante & on l'agite fans ceffe jufqu'à ce que la matière foit prefque froide.

Elle acquiert par cette opération la belle couleur jaune fi defirée, & qui la fait tant eftimer.

On ouvre enfuite le trou qui eft prefque à l'extrémité inclinée de l'auge, & on la fait couler dans des moules de même que le bray fec.

Comme ces moules donnent à la matière la forme d'un pain bis, on les nomme pain de réfine ou de colophonne. Les uns & les autres ne doivent pas pefer plus de deux cens cinquante livres. Il feroit trop long de détailler ici les raifons qui ont engagé la police de Dax à les fixer à ce poids.

La pègle qui veut dire poix ou bray gras, eft fynonime pour les acheteurs étrangers, mais non pas pour les ouvriers qui en font, avec raison, une grande différence, ainfi que nous allons le voir.

Poix noire.

La poix noire fe fait avec les craffes de réfine, telles que celles qui fe trouvent fur la paille qui a fervi de filtre pour la purification de la térében thine & de la réfine, ainfi que des copeaux que l'on a retirés en faisant l'incifion à l'arbre. On a un four de fix à fept pieds de circonférence fur huit à dix de haut: on garnit ce four des fubftances ci-dessus, & lorsqu'il eft entièrement plein, on met le feu au fommet, de manière que la flamme confommant le bois & la paille, force la matière réfineuse à defcendre à mefure que la chaleur la liquéfie, à tomber fucceffivement dans un canal qui eft pratiqué au fol du four, & qui la conduit dans une cuve à demipleine d'eau, qui eft placée à l'extérieur : elle eft d'une couleur très-rouffe, prefque liquide. Les ouvriers s'en fervent avec grand fuccès pour les plaies, & ne connoiffent pas de meilleurs fuppuratifs.

Quand on ajoute à ces fubftances du bois de goudron, la matière a une couleur abfolument brune, eft plus épaifle, & perd des propriétés que les Ouvriers lui connoiffent.

Pour exploiter cette matière on eft dans l'ufage de lui donner une confiftance néceffaire pour être moulée: pour cela on la transporte dans

une chaudière de fonte placée fur un fourneau femblable à celui de la réline; on l'y fait cuire de même, mais avec beaucoup moins de précaution, & il faut le double de tems; on la coule enfuite dans des moules formés dans de la terre noire; on l'y laiffe refroidir: c'eft ce que l'on nomme poix noire, & elle eft beaucoup plus eftimée que la fuivante.

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Bray gras & Poix bâtarde.

Le bray gras eft un mélange de partie égale de bray fec, de poix noire & de goudron, On met le tout enfemble dans la même chaudière de fonte; on fait cuire ce mêlange, & on le met enfuite dans des futailles de bois de pin, contenant deux cens cinquante livres, ou bien on fait des moules fuivant que le propriétaire trouve à l'exploiter avec plus d'avantage; quand on la met dans des futailles, elle eft très-liquide & porte le nom de bray gras.

Quand au contraire elle eft moulée, & qu'on y a ajouté plus de bray fec, elle prend alors le nom de poix bâtarde, à caufe de fa compofition: d'où l'on doit conclure qu'il y a trois efpèces de poix dans le commerce, & que l'on doit toujours préférer la première pour l'ufage pharmaceutique; elle eft plus noire & plus caflante.

Du Goudron,

Pour faire le goudron, on ne prend dans les arbres déjà épuifés par les incifion's que les parties incifées; on fend le bois par éclats & en petits morceaux, le plus petit poffible: ce qu'on appelle efcailla. Cette préparation fe fait ordinairement l'hiver, le mettant en talus fans aucune précaution, & le laiffant ainfi sécher jufqu'au tems des fortes chaleurs, comme étant le plus propre à faire le goudron.

Le bois ainfi préparé & féché, on le met à plat & rang par rang dans un four qui a la forme d'un cone ou pain de fucre renverfé & évafé, dont le fol eft carrelé; on le remplit, & quand le bois eft au niveau du four, on continue à mettre du bois en forme d'un fecond cone renversé fur le premier; quand le bois eft ainfi arrangé, on le couvre de gafon, on met le feu de tous les côtés.

A mefure que le bois fe confomme, il laiffe échapper la fubflance réfineufe qu'il contenoit, & filtre perpendiculairement jufqu'au fol du four, & fult alors la pente, & fe réunit dans un trou qui eft au centre. Ce trou eft le commencement d'un canal fouterrain qui conduit le goudron dans un réfervoir extérieur."

On nomme le goudron fait à ce four goudron de Chaloffe, parce qu'on le loge dans des futailles qui viennent de cette province; elles font en bois de châtaigner.

Il faut fept à huit jours de travail pour chaque fournée, qui produifenț

plus ou moins fuivant la grandeur du four & la quantité de bois. Les fournées ordinaires produifent douze futailles de quarante veltes chaque.,

On en retire avec plus d'avantage encore des fouches & racines des mêmes pins. Il eft plus eftimé que le précédent; mais il faut que ces racines foient purgées par la terre, pour fe fervir de leur expreffion pendant dix à douze ans après la coupe de l'arbre: il fe fait de même qu'avec le bois.

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Il y a une autre manière de faire le goudron, qui confifte à laiffer le bois beaucoup plus gros & de cinq à fix pieds de long; le bois ainfi préparé porte le nom de thède & en latin theda. On en remplit le four à poix noire en le laiffant debout, & on y allume le feu de même.

Mais le goudron fait ainfi ne vaut pas à beaucoup près celui de Chalosse; il eft plus dur, par conféquent moins recherché.

Auffi ne le fait-on de cette manière que quand on n'a pas fuffisamment de bois pour remplir le four à goudron. Tout le monde connoît l'ufage que l'on fait de la poix noire, du bray gras & du goudron pour les vaiffeaux & les cordages; mais il faut obferver que l'on fait toujours pour les conftructions un mêlange de tout, quelquefois de deux, fuivant le cas, mais il est très-rare que l'on emploie l'une fans l'autre.

CONTINUATION DES EXPÉRIENCES ÉLECTRIQUES

Faites par le moyen de la Machine Teylerienne;

Par M. VAN-MARUM, Dodeur en Philofophie & en Médecine Directeur du Cabinet d'Hiftoire-Naturelle de la Société Hollandoife des Sciences, des Cabinets de Phyfique & d'Hifloire-Naturelle, & Bibliothécaire du Mufeum de Teyler, Correfpondant de l'Académie Royale des Sciences de Paris, Membre de la Société Hollandoife, de celles de Rotterdam, de Flesfing & d'Utrecht. A Harlem, chez Jean Enfchedé & fils, & Jean Van-Wabre, 1787, I vol. in-4°.

EXTRA I T.

Nous avons donné dans le cahier du mois d'août 1785, la defcription de la grande machine électrique du Museum de Teyler à Harlem; nous avons fait connoître les expériences intéreflantes que M. Van-Marum avoit commencé de faire avec cette machine, la plus puiffante qui ait encore

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