Page images
PDF
EPUB

principes inflammables au lieu d'un feul; savoir, l'air inflammable aqueux

& le charbon.

3. Elle admet un principe inflammable dans beaucoup de fubftances où on n'en admet point dans l'autre doctrine; car elle eft obligée de reconnoître du charbon dans toutes les terres & pierres calcaires, dans l'argile & un grand nombre d'autres terres & pierres qui contiennent de l'air fixe, dans un grand nombre de mines minéralisées par l'air fixe, dans les alkalis aérés,

4°. Elle eft obligée auffi de reconnoître du charbon dans l'acier, dans le fer, dans le zinc, &c. dans la plombagine. On dit, il eft vrai, que le charbon eft étranger au fer, au zinc, & qu'ils peuvent être fans charbon, Cependant on n'en a jamais trouvé qui ne contienne de l'air fixe.

5. Elle admet dans l'eau un principe inflammable, & l'eau devroit cere le corps le plus combuftible de la nature, puifqu'elle est toute formée d'air pur & d'air inflammable. Or, l'eau eft partie effentielle de toutes les cristallisations falines & pierreuses, par conféquent l'air inflammable doit s'y retrouver.

Ainfi il n'y a donc, à proprement parler, que le foufre & le phosphore où on n'admette point de principe inflammable étranger à ces fubftances qu'on regarde comme élémentaires. Mais fi on n'admet point de principe inflammable étranger dans le foufre & le phofphore, on en reconnoît dans un grand nombre d'autres fubftances où on n'en admet pas ordinairement. Ainfi ce fentiment eft donc bien éloigné de détruire le phlogiftique, c'est-à-dire, un principe inflammable quelconque dans les corps, puifqu'il l'admet dans un bien plus grand nombre que ne le fait l'autre théorie,

En dernière analyse la question fe réduit donc à favoir, 1°. fi le foufre &le phofphore font élémens, ou s'ils contiennent un principe inflammable étranger; 2o, si les métaux font élémens, ou s'ils contiennent de l'air inflammable, & fi ce charbon qu'on veut fubftituer leur eft étranger; 3. fi le charbon est un élément; 4o. fi la combustion du foufre, du phofphore, des métaux & du charbon, eft une fimple combinaison de ces fubftances avec l'air pur qui perd la chaleur pour produire la flamme, & fi les acides qui en résultent font de fimples combinaifons de ces fubftances élémentaires avec l'air pur dépouillé de fa chaleur; 5. fi l'eau est compofée d'air pur & d'air inflammable; 6°. G Pair inflammable qu'on retire du fer, du zinc, du charbon, &c, vient d'une portion d'eau décomposée.

J'ai cherché à concilier les expériences anciennes avec les nouvelles, ne croyant pas que celles-ci détruififfent les autres. Voici un précis de ma doctrine.

1°. Le feu ou lumière, fubftance dite élémentaire,

2°. L'eau, fubftance dite élémentaire.

1

3°.

3°. L'air pur, fubftance dite élémentaire.

4. Matière de la chaleur compcfée de feu élémentaire & d'air pur. Cette matière de la chaleur doit être confidérée fous deux états différens, 1°. comme matière de la chaleur libre qui fe trouve répandue dans l'atmosphère, dans le globe, &c. Chaque corps de la nature pof ède une certaine quantité de cette chaleur libre en raison de fon affinité avec elle. Ainfi l'air pur en a une grande quantité. La matière de la chaleur doit être confidérée, 2°. comme combinée & faifant partie des corps. Elle fe trouve ainfi dans les acides, les alkalis, &c.

5°. Fluides. Union d'un corps quelconque avec une fuffifante quantité de la matière de la chaleur libre.

6°. Fluides aériformes. L'eau, les acides, &c. l'or lui-même, peuvent être réduits à l'état aériforme par une plus grande quantité de la matière de la chaleur libre.

7. Solides. Les corps paffent à l'état de folidité par l'évaporation d'une fuffifante quantité de chaleur.

8. Air inflammable. Compofé d'air pur & d'une grande quantité de matière de la chaleur : ce que prouve fa grande légèreté.

C'eft cette grande matière de la chaleur qui eft caufe de l'inflammation de cet air, lequel air fe retrouve dans tous les corps inflammables. 9°. Air phlogistiqué ou impur. Compofé de l'air pur & de l'air inflammable.

10°. Air acide ou fixe. Compofé de l'air pur & de la matière de la chaleur combinée.

11o. Air nitreux. Combinaifon de l'air inflammable, de l'air phlogiftiqué, de l'air pur, (peut-être de l'air fixe) & de la matière de la chaleur combinée.

Tous ces airs, l'air pur, l'air inflammable, l'air impur, l'air acide, l'air nitreux, &c. contiennent tous beaucoup d'eau, qui peut-être leur est effentielle. La grande quantité de feu qu'ont ces airs, eft cause qu'ils confervent leur légèreté malgré cette abondance d'eau.

12o. Acide végétal. Jufte combinaison de la matière de la chaleur combinée avec l'air inflammable, l'air phlogiftiqué, l'air pur, (peut-être l'air acide) & l'eau.

Tous les autres acides, foit végétaux, foit animaux, foit minéraux, tels que l'acide vitriolique, l'acide nitreux, l'acide marin & les acides métalliques, contiennent à-peu-près les mêmes principes, & ne different que dans les combinaisons.

13°. Acide phlogiftiqué. Le même compofé que ci-dessus avec excès d'air inflammable, tel eft l'acide fulfureux.

14°. Acide déphlogistiqué. Le même compofé que le N°. 12, avec excès d'air pur, tel eft l'acide marin déphlogiftiqué.

15°. Huile. Saturation d'un acide végétal par l'air inflammable.

16°. Soufre. Saturation de l'acide vitriolique par l'air inflammable. 17°. Phosphore. Saturation de l'acide phofphorique par l'air inflam

mable.

18°. Régules métalliques. Saturation de leurs acides particuliers par l'air inflammable.

19°. Chaux métalliques. Les acides métalliques avec un certain excès d'air inflammable, ainfi que les acides phlogistiqués.

Dans les foufres végétaux, c'est-à-dire, les huiles, il eft facile de brifer l'union de l'acide avec l'air inflammable. Ainfi en diftillant dans les vaiffeaux fermés fans accès de l'air pur le fuccin, le benjoin, la gomme copal, &c. on retire beaucoup d'air inflammable & un acide très-piquant.

Mais dans les foufres minéraux, c'est-à-dire, le vrai foufre, le phofphore, les régules métalliques, l'acide a une grande affinité avec l'air inflammable, comme le prouvent tous les phénomènes. L'acide arfenical mis en contact avec l'air inflammable, fe révivifie promptement. Les chaux d'argent, de bifmuth, &c. noirciffent dès que l'air inflammable les frappe. L'acide vitriolique & l'acide phofphorique chauffés légèrement fur l'air inflammable, donnent ou de l'acide fulfureux, ou du foufre, ou du phosphore. C'eft pourquoi le feu feul ne peut défunir ces acides d'avec l'air inflammable dans les vaifleaux fermés. Il faut employer les doubles affinités. Ainfi les alkalis, les chaux calcaires, les chaux métalliques, &c. brifent l'union des acides vitrioliques, phosphoriques avec l'air inflammable, comme dans les hépars fulfureux & phofphoriques, dans la détonation des chaux de mercure & du foufre, &c.

Mais ce que ne peut le feu feul dans les vaiffeaux fermés, il le fera avec le concours de l'air pur, parce que celui-ci par fon affinité avec l'air infammable facilitera cette féparation. Auffi dans la combustion du foufre, du phofphore, des métaux, &c. il y a abforption d'air pur. Une partie de cet air fe combinant avec l'air inflammable de ces fubftances, laiffe dégager l'eau. Mais ces fubftances retiennent toujours une portion d'air inflammable. C'eft pour faire difparoître cet excès d'air inflammable qu'il fe combine une portion d'air pur avec une grande quantité de matière du feu. C'eft pourquoi je l'ai appelé matière de la chaleur, & pour lors on a les acides phlogistiqués & les chaux métalliques. Fournit-on une plus grande quantité d'air pur & de matière du feu, on a les acides ordinaires, parce que cet air pur fait difparoître entièrement cet excès d'air inflammable.

Et ce qui confirme ceci, c'eft que ces acides repaflent à l'état de foufre & de régules métalliques par la feule absorption d'air inflammable fans dégagement d'air pur. L'acide arfenical en contact avec l'air inflam-. mable devient régule fans perdre d'air pur, ainfi que la chaux d'argent, &c.

M. de Morveau dans fon bel ouvrage fur la Chimie dans l'Encyclopédie, a embraflé un troisième fentiment. Il admet avec moi l'air inflammable dans les métaux ; mais il penfe que ceux-ci ne peuvent paffer à l'état d'acide que par le principe acidifiant ou air pur. Auffi, fuivant lui, le foufre, le phofphore, les métaux, dans leur combuftion perdent leur air inflammable, il est vrai, mais ils ne peuvent devenir acides ou chaux que par l'union d'une certaine quantité d'air pur; en forte que l'acide vitriolique, par exemple, eft le foufre moins l'air inflammable, plus une portion d'air pur, & ainfi des autres. Il penfe auffi que l'eau qu'on obtient dans ces combuftions eft réellement produite; car il admet l'eau eft compofée d'air pur & de phlogistique.

que

On voit en quoi different & fe rapprochent tous ces fyftêmes fur les acides & les chaux métalliques. Il eft certain, comme l'avoient observé les anciens Chimistes, tels que Geber l'Arabe, & fur-tout Jean Rey, que les métaux acquièrent du poids dans leur calcination, que les chaux mé talliques pèlent plus que le métal qu'on a employé, que l'acide vitriolique & l'acide phofphorique pèfent plus que le foufre & le phofphore qu'on a brûlé; enfin, qu'il y a eu abforption d'air pur. Voilà le fait fur lequel on eft univerfellement d'accord. On ne varie que fur l'explication.

Je dis les huiles, les réfines, telles que le fuccin, le benjoin, &c. le foufre, le phofphore, les métaux, font des acides furchargés d'air inflammable. Si je diftille les réfines dans, les vaiffeaux fermés, je fépare l'air inflammable de l'acide. Mais la même chofe n'a pas lieu pour le foufre, le phofphore, les métaux.

Si je brûle ces réfines, par exemple, le benjoin à l'air libre, je n'ai plus d'air inflammable, mais de l'eau & un acide. J'en ai brûlé fous une cloche au-dessus du mercure, j'ai eu de l'eau & un acide, comme lorfque je brûle du foufre, du phofphore, du fer, du zinc, &c. qu'arrive-t-il dans cette opération? L'air inflammable de ces fubftances brûlant avec une portion d'air pur, il s'en dégage cette grande quantité d'eau. L'acide de la réfine fe trouve pour lors à nud.

Mais dans la combustion du soufre, du phofphore & des métaux leurs acides retiennent toujours une portion de leur air inflammable qui eft très-adhérent, & pour lors elles abforbent avec avidité l'air pur, & le feu, (ce que j'appelle matière de la chaleur) avec lefquels ils ont beaucoup d'affinité.

De l'air pur & du feu fe combinant fous forme de la matière de la chaleur, font difparoître l'excès d'air inflammable, & on a pour lors les chaux métalliques & les acides phlogiftiqués. Cet air pur & cet air inflammable dans leurs combinaifons abandonnent leur eau qui fe retrouve dans ces acides phlogistiqués & dans les chaux métalliques. On retrouve encore dans celles-ci de l'air fixe. Ces acides phlogiftiqués, tel que l'acide fulfu-. reux, s'il eft en contact avec l'air pur, l'attirera encore par fa grande

affinité, & paffera ainfi à l'état d'acide vitriolique, comme les chaux métalliques pafferont à l'état d'acides métalliques. Mais pour ces derniers il faut des procédés particuliers & l'action du feu; car autrement elles attirent, il eft vrai, l'air pur, mais le changent feulement en air fixe, comme le font le minium, l'ochre, &c. ainfi que la chaux vive.

Dans la nouvelle théorie tous les acides font compofés d'une fubftance élémentaire quelconque, avec une portion d'air pur dépouillé de fa chaleur, ou principe oxygine. Cependant cette bafe dans les acides végétaux eft l'huile dans laquelle on admet l'air inflammable. Ainfi je ne vois pas pourquoi la bafe des acides niinéraux & métalliques ne contiendroit également pas de l'air inflammable. Mais on convient que quelques métaux, tels que l'acier, le fer, le zinc, &c. contiennent du charbon.

On pourroit donc faire cette modification à cette théorie, comme on en a fait dans un autre point. J'avois dit que tous les phénomènes prouvoient que les acides contenoient la matière de la chaleur. Il paroît qu'on a fenti la force de mes raifons, & qu'on convient que la matière de la chaleur fe combine avec l'acide nitreux, lors du mêlange de l'air pur & de l'air nitreux : & fans doute la même matière de la chaleur fe retrouve dans tous les acides. Ainfi il faudra dire dans ce fyftême que les acides minéraux & métalliques font compofés, 1°. d'une fubftance élémentaire, 2o. du principe oxygine, 3°. de la matière de la chaleur. Mais dans les métaux où on admet le charbon, il faudra ajouter que cette chaux métallique eft, 1°. le métal, 2°. moins le charbon, 3°. plus l'air pur, 4°. plus la matière de la chaleur ; & fi au lieu de ce charbon on admettoit l'air inflammable dans les métaux, dans le foufre, dans le phosphore, comme dans la bafe des acides végétaux, on feroit bientôt d'accord fur le point important des acides.

Les chaux métalliques ne différant des acides métalliques que par une calcination portée plus loin, doivent donc, comme ceux-ci, contenir non-feulement de l'air pur, mais encore la matière du feu. C'est ce qu'on ne fauroit nier, même dans la nouvelle théorie. Ainfi on a tort de dire que la chaux métallique eft le métal plus l'air pur. Il faut encore ajouter plus la matière de la chaleur.

Tel eft l'état d'incertitude où eft maintenant la théorie de la fcience: & ce qu'il y a de plus fâcheux encore, eft qu'on fait plier fouvent l'expérience à la théorie; en forte qu'il y a un certain nombre d'expériences fur lefquelles on n'eft point d'accord, comme on l'a vu dans les Journaux précédens.

Le grand nombre de fubftances élémentaires qu'on eft obligé d'admettre dans la nouvelle doctrine, eft bien éloigné des idées reçues par les Philofophes de tous les fiècles. Si ce n'eft pas une raison pour la rejetter, c'en eft au moins une d'examiner fcrupuleufement les motifs fur lefquels on se fonde.

« PreviousContinue »