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de l'air extérieur; la cloche étant enfuite foulevée, le mercure tombe dans la foucoupe, & le charbon fe trouve dans l'eau. Je le fais paffer auffi-tôt fous une autre cloche pleine d'eau. L'air fe dégage en quantité, néanmoins on n'en n'obtient environ que le quart de ce qui a été abforbé, & cette quantité dépend beaucoup de la nature du charbon, ainfi que du tems qu'on laiffe le charbon avant de l'introduire dans l'eau : car lorfqu'on tarde plufieurs heures avant de faire paffer le charbon dans l'eau, il donne moins d'air que lorfqu'on attend moins de tems.

Cet air introduit dans le tube de l'eudiomètre, & bien agité n'est point diminué.

Il ne précipite point l'eau de chaux.

Comme il fe pourroit que l'air fixe fût abforbé par l'eau à mefure qu'il fe dégage, j'ai employé l'eau de chaux au lieu d'eau ordinaire, & j'ai porté le charbon dans une cuvette d'eau de chaux, & l'ai fait paffer avec les mêmes précautions que dans l'expérience précédente fous une cloche pleine d'eau de chaux. L'air qui s'eft dégagé ne l'a point précipité.

J'ai répété ces expériences un grand nombre de fois, parce que M. l'Abbé Fontana croit avoir obfervé que cet air contient de l'air fixe ou acide. Mais il fera fans doute arrivé à cet favant obfervateur ce que j'ai auffi vu quelquefois, lorfqu'on emploie un charbon un peu gros bien incandefcent, & qu'on ne le laiffe pas quelques inftans dans le mercure, il s'allume dans la cloche, & pour lors il y a de l'air pur changé en air acide, & ce qu'il y a encore de particulier, c'eft qu'il brûle peu.

J'ai effayé avec l'air nitreux, l'air pur ainfi abforbé, & enfuite dégagé du charbon. Une mesure de cet air dégagé du charbon qui n'avoit été chauffé qu'un quart-d'heure, & trois de bon air nitreux m'ont donné dans un grand nombre d'expériences 2,60: 2,80 : 2,50. Plus il a féjourné dans le charbon, plus il eft vicié.

Les résultats font bien différens lorsque le charbon a été tenu long-tems à l'état d'incandefcence. J'ai mis du charbon dans un creufet luté & recouvert d'un autre creufet. Je l'ai tenu plufieurs heures à l'état d'incandefcence. J'ai éteint enfuite ces charbons dans le mercure, fans qu'ils euffent ceffé d'être incandefcens; puis introduits dans une cloche d'air pur, ils l'ont abforbé; portés enfuite dans la cuvette à eau, l'air qui s'est dégagé étoit beaucoup moins vicié que dans les premières expériences: car une mesure de cet air & trois de bon air nitreux ont donné dans différens effais 0,50: 0,60: 0,80, &c.

Je craignois que le charbon fimplement chauffé jufqu'à être bien rouge ou chauffé un quart-d'heure, retînt une portion d'air impur. Mais je m'af furai du contraire par les expériences fuivantes,

Je chauffai un quart-d'heure un gros charbon que je partageai en deux. J'éteignis les deux morceaux dans le mercure. Je portai l'un dans l'eau fans lui laiffer de communication avec l'air, il ne s'en dégagea

point d'air. L'autre morceau introduit dans une cloche d'air pur l'aba forba; puis porté dans l'eau il laissa dégager un air très-vicié: car une mefure de cet air & 3 d'air nitreux donnèrent 2,70. Cette expérience répétée très-fouvent, m'a toujours donné à-peu-près les mêmes résultats. Le charbon par une incandefcence long-tems foutenue perd donc une grande partie d'un principe quelconque qui vicie l'air pur.

II. Un charbon d'un pouce cubique chauffé un quart d'heure, & éteint dans le mercure, puis introduit dans une cloche d'air commun, en abforbe environ 4 à 5 fois fon volume; mis dans l'eau de chaux ou dans l'eau commune avec les mêmes précautions que ci-deffus, il se dégage environ un cinquième de l'air abforbé qui ne précipite point l'eau de chaux, & n'eft point diminué dans l'eau.

Une mesure de cet air & une de bon air nitreux, m'ont donné dans différentes expériences 1,60: 1,64: 1,65: 1,72: 1,84, &c.

III. J'ai éteint un charbon dans le mercure & l'ai introduit dans une cloche qui contenoit de l'air impur ou phlogistiqué par l'air nitreux. Une mefure de cet air & une de bon air nitreux m'avoient donné 1,97. Le charbon a abforbé environ deux fois fon volume d'air. Introduit fous l'eau, il s'eft dégagé un fixième ou un feptième de cet air. Une mefure d'air nitreux, & une de cet air m'ont donné 1,99: 2,00.

IV. Un charbon d'un pouce cubique, chauffé un quart-d'heure, & éteint dans le mercure, a été introduit fous une cloche contenant 12 pouces cubiques d'air nitreux. L'abforption a été très-prompte, & il y a eu environ 9 pouces cubiques abforbés; le charbon mis enfuite dans l'eau a laiffé dégager environ un fixième de cet air.

J'ai effayé une mefure de cet air avec une d'air commun, il n'y a pas eu d'abforption fenfible: ce qui indique que l'air nitreux avoit été dénaturé.

J'ai essayé une autre mesure de cet air avec une d'air nitreux, il y a eu une abforption de 20 à 30 degrés dans différentes expériences & même quelquefois plus.

Ve. Un charbon chauffé un quart-d'heure, éteint dans le mercure & introduit fous une cloche pleine d'air fixe ou air acide, l'abforbe avec avidité dans les premiers momens. L'absorption peut aller à environ 12 fois fon volume.

J'ai enfuite porté ce charbon avec les précautions décrites ci deffus dans un vafe d'eau de chaux, & l'ai fait paffer fous une cloche égale ment remplie d'eau de chaux. Il s'eft dégagé de l'air acide qui a précipité l'eau de chaux; mafs il y en a eu une partie qui n'a pas été abforbée. Une mesure de cet air & une d'air nitreux ont donné dans différens effais 1,75: 1,78: 1,80: 1,88.

Vle. Un charbon chauffé un quart-d'heure, éteint dans le mercure, & introduit dans une cloche pleine d'air inflammable, en abforbe presque

le double de fon volume. Plongé enfuite dans l'eau avec les précautions ordinaires, il fe dégage environ le quart de l'air abforbé.

Deux mefures de cet air & une d'air pur ont détonné foiblement, le réfidu a été 0,80 0,88: tandis que deux mefures du même air inflammable avant d'avoir été fur le charbon, & une du même air pur avoient donné 0,26.

VII. Le charbon ordinaire, tel qu'il fert aux ufages économiques, mis dans l'eau fous une cloche, laisse dégager beaucoup d'air. J'ai éprouvé cet air avec l'air nitreux un très-grand nombre de fois, & je l'ai trouvé conftamment à-peu-près auffi bon que l'air atmosphérique.

VIIIe, Un charbon incandefcent plongé dans l'eau fous une cloche, laiffe dégager dans les premiers momens une petite quantité d'air inflammable, puis n'en donne plus. Cet air inflammable détoné avec l'air pur, laiffe un réfidu très-confidérable, ce qui annonce qu'il eft très-impur. Il eft vrai qu'on ne peut compter fur cette expérience, parce qu'on eft obligé de plonger promptement le charbon dans l'eau. Ainfi on peut entraîner une portion d'air atmofphérique. Il peut encore fe dégager par la chaleur une portion de l'air contenu dans l'eau.

IX. Le charbon ordinaire ou celui qui a absorbé les différens airs; plongé dans le mercure, ne laiffe point échapper d'air.

Je dois obferver que ces expériences ne donnent jamais des résultats rigoureux en les répétant. On en trouvera facilement la raifon, dans les différentes efpèces de charbon, dans la durée du tems qu'ils ont été chauffés; enfin, parce qu'il n'eft pas poffible de mefurer exactement le volume d'un charbon incandescent.

Toutes ces expériences nous préfentent les faits les plus intéresfans. Il paroît que dans l'incandefcence du charbon une partie de fes principes eft volatilifée, ce qui forme un vuide dans fon tiffu; par conféquent loriqu'on plonge ce charbon dans un fluide, le fluide s'infinue auffi-tôt dans ces vuides & les remplit, comme l'eau remplit les vuides d'une éponge, C'eft affez curieux de voir un charbon éteint dans le mercure & qu'on y laiffe long-tems. Tous fes vaiffeaux font fi pleins de mercure qu'on le diroit injecté.

Les airs s'introduifent auffi dans ce charbon ainfi éteint; mais leur abforption eft accompagnée de circonftances auxquelles on ne fauroit faire trop d'attention. Il paroît que le vuide qui exifte dans le charbon ne peut abforber qu'une affez petite quantité de certains airs, tandis qu'il abforbe plufieurs fois fon volume de certains autres ; mais ils font pour lors dénaturés : ce qui indique combinaison. L'air pur (1) & l'air nitreux font

(1) C'eft cette altération de l'air pur abforbé par le charbon qui eft cause qu'un charbon mal éteint dans le mercure & introduit dans une cloche d'air pur, brûle mal, & finit bientôt par s'éteindre, comme nous l'avons vu dans la première expérience. C'eft encore par la même raifon que du charbon embrasé, & qu'on a renfermé lous une eloche pour l'éteindre, fe rallume enfuite difficilement,

très

très-viciés. L'air fixe ou acide & l'air inflammable le font auffi; mais un peu moins. Enfin, l'air impur ou phlogistiqué ne l'est pas, & dans cette opération tous les autres airs font ramenés à celui-ci ; d'où nous pouvons conclure,

1°. Que l'air pur, l'air nitreux, l'air inflammable, l'air acide, passent plus ou moins à l'état d'air impur ou phlogistiqué par l'abforption du charbon éteint dans le mercure à l'état d'incandefcence, & que par. conféquent tous ces airs ont pour base un feul & même principe différemment modifié.

2°. Que ce même charbon, quelque part qu'on le fuppofe, s'il n'est pas incandescent, ne change point l'air pur en air fixe.

Il exifte donc dans le charbon un principe quelconque, qui, 1°. dans le charbon à l'état d'incandefcence change l'air pur en air acide ou air fixe; 2°. dans le charbon éteint dans le mercure change cet air pur en air impur ou phlogistiqué, ainfi que tous les autres airs. Lorsque le charbon a été tenu long-tems à l'état d'incandefcence, une partie de ce principe eft volatilifée. La partie qui demeure est très-adhérente à la ferre & autres principes du charbon, & pour lors vicie beaucoup moins les airs qui font abforbés. Ainfi le charbon par une incandefcence foutenue long-tems, perd autre chofe que de l'eau. Ce principe eft ce que Stahl appeloit phlogifton.

Le charbon, fuivant moi, contient beaucoup d'air inflammable qui ne jouit plus de fon état aériforme. Cet air inflammable dans cet état se combine avec l'air pur, & le change en air impur ou phlogistiqué.

Mais ce même air inflammable, fous cette forme, n'eft que la matière de la chaleur, le feu combiné ou caufticon, uni à d'autres principes qui lui ôtent une partie de fon énergie. L'acte de la combuftion le dégage de tous ces principes étrangers: il reprend fa première énergie, fa caufticité, devient brûlant, & paffe à l'état de caufticon. Pour lors il fe combine avec l'air pur, & le change en air acide ou air fixe.

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Il faut que M. Reynier mette bien de l'importance à fes découvertes, puifqu'il croit devoir fe munir d'un certificat de la Société de Lausanne, qu'il conftate même la date de fon envoi à votre Journal du mois dernier,

pour prouver l'antériorité de fes idées fur la nature de la formation de la terre verte, dans lesquelles je me trouve parfaitement conforme à celles qu'il a propofées dans une notice remife à la Société Physique de Laufanne, le 16 Décembre 1785. Sans vouloir difputer à M. Reynier fes nombreufes découvertes fur la terre verte qui fixe l'attention des Minéralogiftes, je lui repréfenterai que j'ai cru pouvoir parler de cette terre verte d'après mes propres idées & obfervations, fans exciter fa réclamation, ainfi que j'en avois fait mention dans un Difcours fur L'Hiftoire-naturelle de la Suiffe, fervant d'introduction aux Tableaux topographiques, pittorefques & phyfiques de la Suiffe, in-fol. imprimé en 1777, enfuite in-4°. 1780 (1). J'y parle de la terre verte à l'article Cristal de roche du mont Saint-Gothard. M. Reynier voudra bien être perfuadé que je ne pouvois prévoir qu'il donneroit en 1785 une notice à la Société de Lausanne, & que je ne mets pas de prétention aux découvertes, puifque je n'avois pas mis mon nom à ce Difcours. Il eût été plus inftructif que cet obfervateur eût répondu à quelques problêmes que je propofois aux favan's Naturaliftes dans mon Mémoire du mois d'août dernier, fur la nature du diffolvant de la terre verte, du quartz & du feld-fpath: ces objets étoient plus dignes d'occuper fa fagacité qu'une réclamation d'antériorité.

NOUVELLES LITTÉRAIRES. EXPÉRIENCES fur les Végétaux, spécialement sur la propriété qu'ils possèdent à un haut degré, foit d'améliorer l'air quand ils font au foleil, foit de le corrompre la nuit ou lorsqu'ils font à l'ombre, auxquelles on a joint une méthode nouvelle de juger du degré de falubrité de l'atmosphère; par JEAN INGEN HOUsz, Confeiller Aulique, & Médecin du corps de Leurs Majeftés Impériales, Membre de la Société Royale de Londres, &c. &c. traduites de l'Anglois par l'Auteur: nouvelle édition, revue & corrigée. A Paris, chez Théophile Barrois le jeune, Libraire, quai des Auguftins, No. 18; 1787, 1 vol. in-8°.

Les favans ont porté leur jugement fur cet Ouvrage, qu'ils ont claffé dans le petit nombre de ceux qui font faits pour avancer nos connoif

(1) Ce Difcours a auffi été traduit & imprimé à Leipfick en 1782, imprimé à Berne en 1786, fous le titre de Manuel pour les Savans & Curieux qui voyagent en Suiffe. Cette contrefaction s'eft faite, à mon grand regret, fans ma participation, 'parce que j'y aurois donné volontiers des corrections & des augmentations néceffaires, ces éditions n'ayant pas été faites fous mes yeux, & la compofition du Difcours fort précipitée.

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