Page images
PDF
EPUB
[ocr errors]

jamais que dans les fchiftes ou grès fchifteux, & les filons métalliques fe trouvent auffi le plus fouvent dans ces mêmes fchiftes ou kneifs, quoique quelquefois il y en ait dans les granits & même dans le calcaire. On a fuppofé que les couches de montagnes en fe defféchant ont éprouvé une retraite qui y a produit des fentes, & que ces fentes ont enfuite été remplies poftérieurement par les fubftances métalliques & bitumineuses.

D'abord cela ne peut le foutenir pour les charbons. Quiconque a vu ces mines fent l'impoffibilité que ces fentes aient pu fubfifter avant que les charbons aient été dépofés. Car dans une même montagne on trouve huit, dix, quinze, vingt lits & plus de charbon de differentes épaiffeurs; car ordinairement plus on creufe, plus on en rencontre. Entre ces lits fe trouvent interpofés d'autres lits ou grès fchitteux, qui fervent de murs & de toîts (1) aux couches de charbon. Toutes ces couches, foit celles de charbon, foit celles de fchiftes, font ordinairement parallèles, quoique différemment inclinées (2). Quelques-uns font prefqu'horifontaux, d'autres prefque verticaux; mais fouvent un lit qui plonge fe relève tout-à-coup, en faisant un angle plus ou moins confidérable. Quelquesuns de ces lits n'ont que quelques pouces d'épaiffeur, tandis que d'autres ont plufieurs pieds, plufieurs toifes, tels font ceux de Mont-Cenis auxquels on fuppofe quarante-cinq pieds. Certainement ces fchiftes font trop tendres, ont trop peu de confiftance pour que de pareilles fentes aient pu y fubfifter avant que le charbon ait été dépofé. Le tout fe feroit bientôt affaiffé, fur-tout dans le cas où les couches de charbon fe relèvent ; car les couches fupérieures à celles-ci, femblables à un coin, n'auroient eu aucun fupport: il faut donc que le charbon ait été déposé en même tems que le fchifte, c'est-à-dire, une couche de fchifte, une couche de charbon, &c. Enfin, prefque toujours le mur eft différent du toît, ce qui feroit difficile à expliquer dans l'autre hypothèse.

Mais, dit-on, comment fuppofer la formation de couches parallèles fous des angles très-inclinés à l'horifon, & qui fouvent approchent de la verticale? Mais la même difficulté ne fubfifte-elle pas pour le mur & le toît, c'eft-à-dire, pour les couches où fe trouvent les matières bitumineuses? Ou plutôt cette difficulté eft générale pour toutes les couches de

(1) On appelle mur la partie fur laquelle repofe le filon, & toit celle qui le recouvre. La tête du filon eft la partie fupérieure la plus proche de la furface de la

terre.

(2) L'inclinaifon d'un filon fe mefure par l'angle que fait le filon avec l'horifon. La direction d'un filon fe prend relativement à la méridienne, fe mesure par la bouffole. On fuppofe la circonférence de la bouffole divifée en deux fois douze parties qu'on appelle heures. Le nord & le fud font marqués par o, & 12, & le levant, & le: couchant par 6. Un filon qui court du nord au fud eft dit être à 12 heures. Celui qui court du levant au couchant eft dit à 6 heures.

la terre. Les lits de pierre calcaire, de craie; de plâtre, de fchifte, ne font prefque jamais horifontaux, mais toujours plus ou moins inclinés. Nous avons vu qu'il y en a même dans les Alpes & dans les grandes montagnes d'abfolument verticaux. Cette direction verticale ne peut vraisemblablement provenir que d'affaiflemens poftérieurs à la formation de la montagne. Peut-on étendre cela à toutes les montagnes, & dire qu'elles fe font toutes plus ou moins affaiffées, pour expliquer l'origine de ces lits fi inclinés?

que

Quelle foit la caufe de l'inclinaifon de ces lits, je ne crois pas qu'il puiffe y avoir de doute pour quiconque a vu les mines de charbon qu'elles n'aient été déposées en même tems que les montagnes où elles fe

trouvent.

Ces charbons n'ont pu être formés de forêts enfouies; car des arbres amoncelés pêle-mêle avec des argiles, des fchiftes, ne pourroient point former des couches auffi régulières que le font celles de charbon. Nous connoiffons des forêts enfouies en Angleterre, en Allemagne, qui fe trouvent dans des marais, mais ne forment point de lits. Il faut donc que les matières animales & végétales qui forment les bitumes euffent déjà fubi un mouvement de décompofition qui leur ait fait perdre leur forme première. Mélangées pour lors avec les argiles, elles fe font déposées par couches comme nous les voyons.

Quant aux filons métalliques, quelques-uns fe comportent, il eft vrai, différemment que les charbons. Leur épaiffeur n'eft prefque jamais aufi confidérable en général. Leurs toîts & leurs murs ont auffi plus de folidité. Leur direction coupe quelquefois celle des bancs de pierre où ils se trouvent, en forte qu'on conçoit qu'il a pu y avoir dans ces montagnes des fentes qui ont pu être remplies par des matières métalliques.

Cependant il eft d'autres filons métalliques dont l'origine paroît avoir été la même que celle que nous avons affignée au charbon. Le filon de Pompean en Bretagne, par exemple, tel que l'a décrit M. de Laumont, a plus de douze toifes de largeur, & qu'on a déjà fuivi à fix cens pieds de profondeur. Son mur eft un fchifte argileux qui n'a pas une confiftance bien confidérable; mais le toît fur-tout eft une argile molle, qui n'auroic pu fe foutenir au-deffus d'une fente de douze toifes de largeur & de fix cens pieds de profondeur. Il faut donc que le minérai ait été déposé avant ce toît. La même chofe fe préfente dans plufieurs autres mines.

Il est d'autres endroits où le fiton ne fait pas une maffe continue, mais fe trouve par rognons, c'est-à-dire, qu'on trouve des morceaux de minérais difperfés çà & là dans la gangue du filon. Telles font les mines d'or' d'Allemont, & un grand nombre d'autres. Ces maffes métalliques difperfées par rognons ont donc dû être auffi déposées en même tems que leur. roît & leur mur.

Quant à ceux dont la direction coupe celle des bancs où ils fe

trouvent, & qui ont peu de largeur, dont le toît & le mur ont de la folidité, il est peut-être poffible qu'il y ait eu d'abord des fentes pro'duites par la retraite, & que la matière métallique ait rempli poftérieurement ces fentes. C'eft à l'obfervateur à confirmer ou détruire cette conjecture.

Il refteroit maintenant à rechercher l'origine des matières métalliques, Je croirois affez volontiers que produites d'abord, elles ont été difféminées avec les terres & les pierres, que comme dans la criftallifation générale de celles-ci, chaque fubftance s'eft féparée, là les granitiques, ici les fchifteufes, ailleurs les calcaires, de même les matières métalliques fe font auffi féparées pour criftallifer à part, & ont formé ainfi dans le fein des montagnes différens filons qui fouvent fe coupent, mais chaque minéral a criftallifé féparément. Si la matière métallique n'a pas été affez abondante pour former un filon continu, elle n'aura formé que des rognons. Enfin, de grandes caufes locales ont pu détruire quelques-uns de ces filons pour en aller former de fecondaires, & donner l'origine à ce qu'on appelle mines de tranfport. S'il fe trouve des cavités, des vuides dans ces filons, il arrivera comme dans les grottes, les geodes, &c. que des eaux filtrant à travers les gangues, & tenant en diffolution différentes matières pierreuses, viendront former ces belles criftallifations pierreufes que l'on rencontre dans beaucoup de mines, tels que les fpaths calcaires, les fluors, les fpaths pefans, les cristaux de roche, &c. Ces mêmes eaux décompoferont fouvent une partie du filon pour aller former ailleurs de nouvelles fubftances. Ainfi les eaux qui traverfent les filons de plomb en décompoferont pour aller former les plombs blancs, les plombs verts, &c. dans les cavités qu'elles rencontreront; celles qui trouveront les mines de cuivre en décompoferont également, & iront former des malachites, &c. car la nature toujours active travaille dans le fein du globe comme à fa furface.

En attribuant l'origine des filons métalliques à une formation pre-. mière, je n'entends pas nier qu'il ne puiffe s'y former tous les jours des fubftances métalliques; car nous voyons s'en produire continuellement, chez les végétaux & les animaux. Ainfi il est à présumer qu'il s'en forme également dans le fein de la terre.

Il refteroit maintenant à rechercher la manière dont s'eft fait cette criftallifation générale. Il eft certain qu'il a fallu que les eaux aient couvert tout le globe, par conféquent qu'il y ait eu une couche d'eau de plus de trois mille toifes dé hauteur au-deffus du niveau actuel des mers. Chimboraco a trois mille deux cens-toifes de hauteur. Il eft vrai c'est un que pic volcanique, dont le fommet a pu être exhauffé par l'irruption du volcan; mais on trouve des granits criftallifés à de grandes hauteurs; & M. le Blond a vu une mine de charbon de terre au-deffus de Santa-Fée de Bogota, à une hauteur qui doit être à-peu-près de deux mille toifes.. . . .

Que

Que font devenues ces eaux? Tel eft le grand problême à réfoudre. Newton croyant que l'eau fe changeoit en terre, difoit que cette convertion devoit diminuer la maffe des eaux. Aujourd'hui on ne croit plus à cette converfion; mais il eft vrai que dans toutes les terres & pierres de feconde formation, comme kneifs, fchiftes, plâtres, marbres, craies, &c. il y a beaucoup d'eau de criftallifation. Néanmoins ceci ne peut fatisfaire aux phénomènes; car ces fubftances nouvelles occupent le même efpace qu'occupoit l'eau. D'ailleurs, il y auroit encore une compenfation à faire pour les dégradations continuelles qu'éprouvent les montagnes, ce qui en diminue les hauteurs.

On pourroit encore dire que l'atmofphère contient une plus grande quantité d'eau que dans les premiers tems, ou même que l'eau s'eft changée en air. Mais toute la colonne de l'atmosphère n'équivaut qu'à trente-deux pieds d'eau. Ainfi cette cause eft absolument insuffisante.

La partie de glace & de neige qui ne se fondent point, amoncelée fur les hauts pics & dans les pays du nord, eft encore une très-petite cause, qui ne peut avoir qu'une très-légère influence.

Quelques Physiciens ont prétendu que les eaux pouvoient par l'évaporation paffer jufqu'aux autres globes; mais la rareté de l'air à une certaine hauteur, & le froid qui y règne, paroiffent y apporter un obftacle

infurmontable.

Il refte donc à dire que ces eaux qui ont difparu de deffus la furface du globe ont pénétré dans fon intérieur, où elles fe rendent dans des cavités fouterraines, comme on en connoît plufieurs dans le fein des montagnes, où elles ont une circulation intérieure qui nous eft peu connue. Ce qui eft certain, c'est que nous connoiffons plufieurs courans fouterrains qui coulent au-deffous du niveau des mers, puifque même quelques-uns vont fe rendre dans les mers, où ils forment des fontaines d'eau douce. Ainfi il est à préfumer qu'il y en a qui fe rendent dans l'intérieur du globe. Une petite portion de ces eaux eft peut-être enfuite volatilifée par la chaleur centrale, par les feux fouterrains, dans les éruptions des volcans, ce qui établiroit une espèce de communication entre les eaux intérieures & les eaux extérieures..

Un grand nombre de phénomènes m'a fait préfumer que la rotation du globe peut éprouver des variations, tels que la partie plus relevée de l'équateur qu'elle ne devroit l'être, fuivant la théorie des forces centrales, l'accourciffement du pendule à l'équateur, &c. Lorfque la rotation étoit plus rapide, les eaux devoient affluer vers les tropiques, abandonner les régions polaires, &c. Les jours augmentant de longueur, les eaux ont dû quitter l'équateur pour se reporter aux pôles, &c. & ainfi alternativement. Elles ont pu par conféquent s'élever fucceffivement à des hauteurs où elles n'auroient pu parvenir au même inftant..... Cependant, comme nous avons dars les régions tempérées des montagnes

[ocr errors]

d'une grande hauteur, telles que le Mont-Blanc, &c. cette cause n'a pu fuffire feule. Il faut abfolument qu'une partie des eaux foit entrée dans l'intérieur du globe (1).

Phyfique. Le Naturalifte fe contente de décrire les différens objets; animaux, plantes & minéraux qui fe préfentent à lui. Il cherche à les reconnoître par des caractères extérieurs, sûrs & faciles, & qui ne puiffent jamais l'induire en erreur. Tel eft le but de toutes les méthodes: lefquelles ne doivent pas être regardées comme l'ouvrage de la nature, mais comme celui de l'art, pour fuppléer à la mémoire.

Là où finit le travail du Naturalifte, commence celui du Phyficien. Le premier fe borne à décrire : celui-ci recherche quelles font des loix qui animent tant d'êtres divers, & fuivant lefquelles les uns font mus & les autres exercent toutes leurs fonctions.

La Phyfique eft également cultivée avec zèle. Et cette année nous avons plufieurs faits nouveaux.

M. de la Place a calculé l'action des fatellites de jupiter les uns fur les autres, & fur leur planète principale. Il a fait voir que l'accélération obfervée dans l'année de jupiter, étoit due à cette caufe, ainfi que l'alongement de l'année de faturne, lefquelles années après un certain tems reviendroient à la même période.

M. Achard a fait congeler le mercure par un froid artificiel feulement de 31 degrés au-deffous de o.

M. Cavallo croit avoir rendu le laiton magnétique en le battant fur une enclume; mais il eft très à craindre que ce laiton ne contînt du fer, qui fe trouve prefque toujours dans la calamine.

M. Senebier nous a donné de nouveaux moyens de perfectionner la Météorologie.

M. Ingen-Houfz a avancé, contre le fentiment d'un grand nombre de Phyficiens, que l'électricité n'influoit fur les mouvemens de la fenfitive que comme toute autre force mécanique. J'ai voulu répéter les expériences. Voici les réfultats que j'ai obtenus:

J'ai touché légèrement une fenfitive (mimofa pudica) avec des bâtons de cire d'Espagne, des tubes de verre, des tiges métalliques, foit aiguës, foit terminées en globes. La plante n'a donné aucun figne de fenfibilité.

J'ai touché la plante avec les mêmes corps & en donnant une petite fecouffe. Elle a donné également dans tous les cas des marques de fenfibilité.

(1) Il y a un fecond grand problême â réfoudre dans la théorie de la térre. On trouve dans tout le nord de l'ancien continent les débris d'animaux & de végétaux qui ne peuvent vivre aujourd'hui qu'entre les tropiques, tels que l'éléphant, le rhinoce ros, &c. En fuppofant que la diminution de l'obliquité de l'éclipt que aille jufqu'au point de rendre l'axe de la terre parallèle à celui du monde.... il y aura pour lors un equinoxe perpétuel; les régions polaires feront affez échauffées pour que ces animaux & ces plantes puiffent y vivre....Je développerai ailleurs ces idées,

« PreviousContinue »