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Traduction de la Lettre du Lieutenant WILLIAM PATERSON,
à Sir J. M. JOSEPH BANCKS, Préfident de la Société Royale,
contenant la defcription d'un nouveau Poiffón électrique.
Du premier mai 1786.

Lorfque j'étois aux grandes Indes avec le quatre-vingt-dix-huitième Régiment, je trouvai dans l'île de Jean (1), près de celle de Comore, un poiffon électrique que les Naturaliftes n'ont pas encore obfervé, & qui differe de tous ceux qu'on a connus ou décrits jufqu'à préfent. Malgré fe peu de talent que j'ai, j'ofe entreprendre fa defcription: heureux fi mon obfervation peut mériter l'attention de la Société Royale à qui j'ai l'honneur d'en faire hommage. La fituation d'un Officier fubalterne occupé fans ceffe de fon fervice, follicitera pour moi fon indulgence fur l'imperfection de l'efquiffe que je vais faire de ce poiffon véritablement

étonnant.

Il a fept pouces de long, (planch. II, fig. 3) deux & demi de large; la bouche très-longue & avancée, & il me femble pouvoir être mis dans la claffe des tetrodons. Son dos eft de couleur brune foncée, fon ventre verd de mer, fes côtés jaunes, fes nâgeoires & fa queue rouffes; fon corps moucheté a des taches rouges & vertes, & fingulièrement brillantes. Il a les yeux grands, l'iris en eft rouge & jaune; les nuances en font exceffivement tranchantes.

L'île de Jean eft fituée au 12,13 degré de latitude fud; fes côtes font entièrement compofées de rochers de corail qui font creufés dans plufieurs endroits par les flots battans de la mer. On trouve dans ces cavités unę grande quantité de ces poiffons électriques. L'eau y eft de la température du 56 ou 60 degré du thermomètre de Fahrenheits. J'en pêchai deux dans une espèce de fac de toile fait pour la pêche. Je les pris à la main, & la commotion que je reçus fut fi forte, que je fus obligé de les quitrer. Je les ramaffai cependant avec précaution, les mis dans un filet & les apportai au camp, qui étoit à deux milles de diftance. A mon arrivée j'en trouvai un mort, l'autre dans un état de foibleffe étonnant; mais cependant encore affez en vie pour prouver fon électricité. Je le mis dans un vafe rempli d'eau de mer. J'appelai le Chirurgien du régiment, je P'engageai à le prendre dans fes mains, il reçut une commotion électrique aufli forte que celle que j'avois reçue. L'Adjudent du régiment le toucha implement avec le doigt fur le filet, & éprouva la même fenfation. J'en citerois d'autres qui éprouvèrent le même effet; mais ces deux exemples.

fuffifent.

Recevez avec bonté & indulgence cette courte defcription; elle doit

(1) L'ile de Jowanna.

engager ceux qui viendront dans l'île à obferver avec plus de détail ce poiflon fingulier. Je ne fais pas affez d'Hiftoire-naturelle pour entreprendre

de décrire fes organes intérieurs.

J'ai l'honneur d'être, &c.

SUITE DES EXPÉRIENCES

DE M. KIRWAN,

SUR LE GAZ HÉPATIQUE,

Traduites par Madame PICARDET (1).

SECTION QUATRIÈME.

La manière dont le Gaz hépatique fe comporte avec les Acides, les Alkalis & les Liqueurs inflammables.

UNE mefure d'acide vitriolique, dont la pefanteur spécifique étoit 1,863, abforba deux mefures de gaz hépatique, à l'exception d'un dixième de mefure. L'acide étoit blanchi par un dépôt abondant de foufre. J'introduifis encore, fur le mercure, une mefure d'acide nitreux rouge, dont la pefanteur spécifique étoit 1,430, avec une égale mefure de gaz hépatique; il s'éleva fur le champ des vapeurs rouges, & il ne refta que le dixième ou le douzième d'une mefure en forme de gaz; mais comme l'acide agiffoit fur le mercure, je fus obligé de porter la jarre dans l'eau; par ce moyen tout fut abforbé. Il n'y eut point ici de foufre précipité.

Je répétai cette expérience d'une autre maniere. Ayant fait paffer 4,5 mesures de gaz hépatique fur le mercure, je les tranfportai dans la cuve d'eau, & à l'inftant, par le moyen d'un fyphon, j'y introduifis une mesure de l'acide nitreux concentré dont j'ai parlé ci-devant; mais quoique j'euffe opéré avec toute la promptitude poffible, le gaz hépatique étoit un peu diminué, avant que l'acide ne fût entré dans le vaiffeau qui contenoit le gaz. Je bouchai alors le récipient avec un difque de verre dreffé, & je le laiffai en repos pendant 12 heures; après lefquelles je trouvai dans le récipient la liqueur blanche & trouble, & l'acide fort

affoibli, parce qu'il y étoit entré beaucoup d'eau, malgré mes efforts pour en empêcher. Ce qui reftoit de gaz détonna foiblement, lorsqu'on lui préfenta une chandelle allumée; & il avoit l'odeur hépatique. Mais, comme ce gaz hépatique avoir été obtenu d'une pâte de foufre & de fer, il n'en réfulte pas que le gaz inflammable entre dans la compofition des autres gaz hépatiques produits par l'union du foufre avec les fubftances qui ne donnent pas le gaz inflammable.

Trouvant tant de difficultés à foumettre le gaz hépatique à l'action directe de l'acide nitreux concentré, je délayai cet acide précisément au degré auquel il ne pouvoit agir fur le mercure fans le fecours de la chaleur, & je paffai à travers cet acide un volume égal du même gaz hépatique, l'acide devint blanc, & huit dixièmes furent abforbés; le réfidu étoit détonnant. Ayant répété la même expérience avec le gaz hépatique du foie de foufre, j'en trouvai encore plus d'abforbé par l'acide; mais le réfidu ne détonna pas davantage; il brûla au contraire avec une Aamme bleue verdâtre, & le foufre se dépofa fur les côtés de la jarre.

Ayant obfervé que cet acide affoibli avoit abforbé près de trois fois fon volume de gaz hépatique, je dégageai ce gaz par la chaleur, je n'obtins qu'un fixième de celui qui avoit été absorbé, & une chandelle brûloit naturellement.

у

Deux melures de gaz hépatique alkalin, ayant été mifes en contact avec une mesure d'acide muriatique concentré, furent abforbées à un cinquième de mefure près, au moyen d'une légère agitation. J'y ajoutai pour lors une troisième mesure de gaz, il n'y eut abforption que d'une demi-mefure, malgré l'agitation. Le foufre fut précipité comme à l'ordinaire; mais le mercure, fur lequel l'acide repofoit, l'avoit attiré de l'acide; car il étoit noirci, ce qui n'étoit pas arrivé avec les autres acides: le réfidu brûloit exactement comme du gaz hépatique pur.

Le vinaigre distillé abforba près de fon propre volume de gaz & fut légèrement blanchi; mais il pouvoit par l'agitation en prendre environ deux fois fon volume, & alors il devenoit fort trouble.

Une mefure de potaffe cauflique, dont la pefanteur spécifique étoit 1,043, abforba près de quatre mesures de gaz hépatique alkalin, il la rendit d'abord brune; mais, quelque tems après, elle s'éclaircit. Le foufre fe dépofa à la furface du mercure noirci: ce qui prouve que les alkalis ne font pas déphlogistiqués par l'argent ni par les autres métaux, comme M. Baumé l'avoit imaginé, mais qu'ils font feulement purifiés d'une partie de foufre qu'ils récèlent communément; celui-ci étant formé par le vitriol de potaffe contenu dans les plantes & par le charbon, pendant la combustion.

Une mesure d'alkali volatil cauflique, dont la pefanteur spécifique étoit 0,9387 en abforba 18 de gaz hépatique. Si la liqueur cauftique contenoir plus d'alkali, elle abforberoit plus de gaz hépatique, parce que

alkalin; ainfi

6 mefures de gaz hépatique s'uniffent à 7 mefures de gaz la force des liqueurs alkalines & la quantité d'alkali réei qu'elles tiennent, peuvent être déterminées par-là mieux que par toute autre méthode. La liqueur fumante de Boyle, qu'il eft difficile de préparer par le procédé ordinaire, peut encore fe faire aifément en mettant l'alkali volatil dans le vaiffeau du milieu de l'appareil du Dodeur Nooth pour faire les eaux minérales artificielles, & décompofant les pyrites artificielles ou le foie de foufre, dans le vafe inférieur, par l'acide muriatique. L'huile d'olive abforbe près de fon propre volume de ce gaz, & prend une couleur verdâtre.

Le lait récent abforbe à peine un dixieme de fon volume de ce gaz; &, ce qui eft fort remarquable, il n'eft pas le moindrement coagulé. L'huile de térébenthine abforbe un égal volume de ce gaz & même plus; mais alors elle fe trouble, l'eau femble auffi en féparer le gaz, car quand on l'agite avec elle, il paroît un nuage blanc.

De l'efprit de vin dont la pefanteur fpécifique étoit 0,835, absorba près de trois fois fon volume de ce gaz & devint brun. Par ce moyen le foufre peut être combiné avec l'efprit de vin beaucoup plus aifément que par la méthode de M. le Comte de Lauragais, la feule connue jufqu'à préfent. L'eau précipite le foufre en partie.

L'efprit de vin chargé de foufre ne rougit pas l'infufion de tournefol; mais il précipite l'eau de chaux, comme l'efprit de vin très-rectifié le fait feul. Il précipite encore en brun la diffolution d'acète barotique; ce que l'efprit de vin pur fait de même. Il change la diffolution d'argent en noir & brun rougeâtre. L'acide vitriolique concentré en précipite le foufre, ce que ne peut faire ni l'acide nitreux ni l'acide muriatique.

Lorfqu'on mêle le gaz hépatique avec un égal volume d'éther vitriolique, le volume du gaz,eft d'abord augmenté; mais enfuite la moitié en eft abforbée & il paroît un peu de précipité. L'odeur de l'éther eft mêlée de celle du gaz hépatique; mais lorsqu'on ajoute de l'eau, elle devient très-défagréable & reffemble à celle des fubftances animales putréfiées.

J'ajoutai à une mefure de gaz hépatique 1,5 de diffolution nitreufe d'argent, le gaz fut fur le champ réduit à une demi-mefure, fans le fecours de l'agitation, & la diffolution noircit. Le résidu gazeux présenté à une chandelle brûla naturellement. Le gaz hépatique fut encore abforbé, mais non pas fi promptement ni en auffi grande quantité, par les diffolutions vitrioliques de fer & argent; celle d'argent noircit ; celle de fer blanchit d'abord, mais, au moyen de l'agitation, elle devint noire. Le réfidu gazeux brûla avec flamme bleue, comme le fait ordinai rement le gaz hépatique.

SECTION CINQUIÈME.

Des propriétés de l'eau faturée de Gaz hépatique.

Cette eau rougit l'infufion de tournefol.

Elle n'agit point fur l'eau de chaux.

Elle ne forme point de nuage dans la diffolution de muriate barotique, quoiqu'elle en donne dans l'acète barotique.

Les diffolutions des autres terres dans les acides minéraux n'en font point altérées.

Si on en verfe dans une diffolution de vitriol de mars ou de muriate de fer, elle produit un précipité blanc.

Dans le nitre de cuivre elle produit un précipité brun, & la liqueur passe du bleu au verd. Le précipité fe rediffout par l'agitation.

Elle précipite la diffolution régaline d'étain, d'un blanc jaunâtre; celle de l'or en noir; celle d'antimoine en rouge & en jaune; celle de platine en rouge mêlé de blanc.

La diffolution d'argent dans l'acide nitreux, les diffolutions nitreuse & acéteufe de plomb font précipitées en noir. Si ces diffolutions n'étoient pas parfaitement faturées de métal, les précipités feroient bruns ou bruns rougeâtres, & pourroient être rediffous par l'agitation.

La diffolution nitreufe de mercure eft précipitée d'un brun jaunâtre ; celle de muriate mercuriel corrofif d'un jaume mêlé de noir; mais en l'agitant elle devient blanche.

La diffolution nitreufe de bifmuth devient, par fon mêlange avec l'eau hépatique, d'un brun rougeâtre, & même elle prend une apparence métallique. Celle de cobalt fe noircit; celle de zinc prend une nuance d'un blanc fale; celle d'arfenic, dans le même acide, paffe au jaune mêlé de rouge & de blanc, à caufe de l'orpiment & du réalgar qui

fe forme.

Lorfque j'ai verfé dans de l'eau hépatique de l'acide vitriolique dont la pefanteur fpécifique étoit 1,863, elle s'eft légèrement troublée, mais fi l'on y verfe de l'acide vitriolique volatil, il fe forme dans l'eau un nuage très-denfe d'un blanc bleuâtre.

L'acide nitreux concentré, phlogistiqué ou non, produit un précipité blanc abondant, mais l'acide nitreux affoibli n'occafionne aucun changement. De l'acide nitreux verd dont la pefanteur fpécifique étoit 1,328 en précipita fur le champ le foufre.

L'acide muriatique concentré produifit un léger nuage; mais le vinaigre diftillé ni l'acide faccharin ne firent aucun effet.

M. Bergman dit que de l'eau rendue hépatique produit une diffolution de fer au bout de quelques jours dans un vaiffeau fermé; mais cette expérience répétée plufieurs fois ne m'a pas réuffi. Je n'ai pu diffoudre.

non

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