l'intérêt de ces embranchements et de ces prolongements. Elle les avait communiquées à la compagnie qui n'avait pas voulu les admettre; la Commission avait persisté à les exiger, tant elle les croyait utiles, mais, sur un refus nouveau de la compagnie, la majorité de la Commission est revenue sur ses décisions précédentes. Ainsi des dispositions discutées et arrêtées par les Commisions à plusieurs reprises différentes furent modifiées, parce que la.compagnie Leconte ne voulait pas les adopter; le projet en un mot fut fait en vue de cette compagnie et pour cette compagnie, dans la persuasion où l'on était qu'elle l'exécuterait mieux que toute autre. Qu'est-il résulté de cette préférence ? Quelle garantie vous ont donnée ces noms honorables sur lesquels on s'appuyait, ces banquiers et ces capitalistes sur lesquels le Gouvernement et les Chambres avaient tant compté? Vous le savez, Messieurs, aujourd'hui ils se refusent à exécuter si l'on ne vient à leur secours ou si l'on ne modifie leur contrat. Les actions qu'ils ont réservées, en outre de celles que le cahier des charges les obligeait de prendre, ils les possèdent au même titre que les autres actionnaires, et ils ne veulent pas payer au delà de 25 pour cent. Que vous propose aujourd'hui le Gouvernement? De dégager cette compagnie de l'obligation d'aller à Orléans, de substituer au chemin de Paris à Orléans un chemin de Paris à Corbeil, et on lui donne de plus l'espérance que l'on viendra l'année prochaine à son secours. Je sais, Messieurs, que l'on a renoncé à cette dernière disposition; que M. le ministre et la Commission consentent à l'amendement de M. Pascalis. (Oui!) Voyons quelle est la portée de cet amendement d'ôter de la loi cette espèce d'obligation morale qui résultait du texte du projet et des commentaires si explicites du rapport. Mais en définitive le Gouvernement n'en demeure pas moins à la discrétion pleine et entière de la compagnie, si elle ne veut pas exécuter le chemin de fer de Paris à Orléans. En effet, examinons quelle sera la position de la compagnie après l'adoption du projet de loi: elle ne sera plus tenue que de continuer les travaux nécessaires à la confection du chemin concédé dans la partie comprise entre Senlis et Juvisy et de l'embranchement sur Corbeil. Au 1er janvier 1841, elle pourra renoncer à la concession pour tout le reste de la ligne jusqu'à Orléans et, dans ce cas-là, elle sera relevée de toute déchéance, et la portion correspondant au surplus des chemins lui sera rendue. Evidemment, la compagnie ne court aucun risque; elle pourra travailler en toute assu ses, et se mettre à leurs lieu et place pour les engagements qu'ils auront contractés. Que fera alors le Gouvernement? Exécutera-t-il par lui-même ? Mais vous savez que ce systeme a été repoussé par les Chambres? Concédera-t-il à une autre compagnie! Mais quelle compagnie voudra prendre à des conditions aussi désavantageuses que de payer toutes les dépenses qui auraient été faites sans contrôle, que de se mettre aux lieu et place des concessionnaires pour tous les engagements qu'ils auront contractés ? La compagnie actuelle aura évidemment un avantage immense sur toutes les autres compagnies, et elle en profitera pour faire la loi au Gouvernement ainsi votre projet de loi, loin de faciliter l'exécution du chemin de fer de Paris à Orléans, ne fait que créer un obstacle. Comment, il vous faudra traiter par la suite avec la compagnie pour la continuation jusqu'à Orléans, et vous commencez par la dégager de l'obligation d'y aller; vous contractez un engagement et elle n'en contracte aucun; elle fera ce qu'elle voudra, vous lai laissez l'option. Mais avant de la dégager de ses obligations primitives, il fallait en avoir contracté de nouvelles avec elle, et venir devant la Chambre avec ces nouvelles conditions; nous les eussions examinées et jugées, tandis que l'on ne nous propose rien de définitif; nous ne faisons que du provisoire, dont nous ne pouvons même pas calculer la portée. Pour la compagnie, la position est claire: rar l'effet des circonstances que l'honorable M. Billault vient d'exposer, la compagnie se trouve chargée de 17 millions, c'est une grande responsabilité; elle ne demande pas mieux que de s'en débarrasser, voilà tout le secret. Elle demande donc de substituer aux engagements qu'elle avait pris pour le chemin de Paris à Orléans, ceux pour le chemin de Paris à Corbeil. Dans cette circonstance, elle ne court aucun risque, elle se retirerait indemne de toutes ses dépenses quand l'Etat voudrait se mettre à son lieu et place. Et qu'on ne dise pas qu'il y aura des garanties, que des estimations seront faites, et que l'on ne paiera que les dépenses utiles. Le fait est que les sociétés, lorsqu'elles contractent avec le Gouvernement, savent fort bien, lors même qu'il y aurait eu mauvaise gestion, mauvaise administration, se faire rembourser de l'intégralité des dépenses qu'elles ont faites. Permettez-moi de vous citer un exemple qui ne se rapporte plus au chemin de fer, mais qui s'applique parfaitement à la circons tance. En 1825, une compagnie puissante, composée de riches capitalistes, d'hommes influents, du syndicat des receveurs généraux, contracta avec le Gouvernement et obtint la concession des salines de l'Est. Il y eut également des illusions comme pour les chemins de fer; les engagements de la compagnie lui devinrent onéreux; elle eut le pouvoir, en 1830, de les faire modifier illégalement par ordonnance, et de se faire remettre une somme de 600,000 francs sur le prix de son bail; depuis, se voyant sur le point de succomber, elle a voulu améliorer les conditions de son bail, et trois ans de suite le Gouvernement, qui tenait la compagnie à sa disposition, est venu vous proposer de se mettre à sa discrétion. Trois ans de suite, les Chambres ont repoussé les projets qui lui ont été présentés; il a fallu venir vous proposer la résiliation du bail de la compagnie. Eh bien! dans cette circonstance, que vous a-t-on demandé avant tout? De restituer intégralement le capital social de la compagnie, et de la rendre indemne de toutes ses dépenses. Il en sera de même, Messieurs, pour les chemins de fer. Personne aujourd'hui n'ose proposer la confiscation de leurs cautionnements, personne ne demande l'exécution rigoureuse de leurs engagements; l'on ne voudra pas davantage leur iaisser supporter la moindre perte lorsqu'il s'agira de se mettre à leur lieu et place, et on leur remboursera toutes leurs dépenses, quelles qu'elles soient. Ce que je demande en définitive, c'est que le Gouvernement ne se mette pas à la discrétion de la compagnie pour la continuation du chemin de fer de Paris à Orléans, qu'il ne substitue pas l'obligation d'aller à Corbeil au lieu d'aller à Orléans; et pour montrer combien je suis disposé à favoriser l'exécution du chemin d'Orléans, je demande que la Chambre accorde à la compagnie toutes les facilités désirables pour son exécution. Je vais même plus loin que la Commission, je propose d'autoriser le Gouvernement à décharger la compagnie des embranchements d'Arpajon et de Pithiviers dans les circonstances que j'ai désignées, et par conséquent de borner les obligations de la compagnie aux chemins de Paris à Orléans. M. Berryer. Lisez l'amendement. M. Luneau. L'art. 2 serait ainsi conçu, et remplacerait les articles 2, 3 et 4 : «Le ministre des travaux publics est autorisé à affranchir la compagnie concessionnaire de l'obligation d'exécuter les embranchements de Pithiviers et d'Arpajon M. Berryer. A l'année prochaine! M. Lunean. Soit, à l'année prochaine! Le Gouvernement n'est pas obligé d'agir de suite; c'est une faculté. M. Dufaure, ministre des travaux publics. Je ne viens dire qu'un mot, et c'est sur l'amendement de l'honorable M. Luneau. Je ne rentrerai pas avec lui dans la discussion générale; j'examine si vous devez autoriser le Gouvernement à dispenser la compagnie de faire l'embranchement de Pithiviers et d'Arpajon. : L'année dernière, vous avez fait une concession il vous a paru utile de déterminer qu'il y aurait des embranchements sur le chemin de Paris à Orléans, un embranchement pour Pithiviers et un autre pour Arpajon. Que vient-on demander maintenant? Sans cxamen, sans qu'on sache quelle est l'importance de ces embranchements, on vient vous demander d'autoriser à ne pas faire ces embranchements sans aucun motif. Ainsi, tandis que l'on reproche à notre projet de loi de permettre éventuellement, temporairement, seulement quelques modifications au cahier des charges, on vient demander d'autoriser définitivement des modifications très importantes au cahier des charges Je ne pense pas que la Chambre adopte oet amendement. M. le Président. L'amendement est-il appuyé? (Non! non!) L'amendement n'étant pas appuyé, je n'ai pas à le mettre aux voix. (M. le président donne une nouvelle lecture de l'article 2 de la Commission.) M. Dufaure, ministre des travaux publics. Le Gouvernement adhère à la rédaction de la Commission. (L'article 2 est adopté.) M.le Président. Je donne lecture de l'art. 3 de la Commission qui est ainsi conçu : Art. 3 (de la Commission). « Si, dans le cours de la prochaine session, une loi n'était pas rendue pour assurer à la Compagnie concessionnaire le concours qu'elle réclamerait de l'Etat pour l'achèvenent de ses travaux, la Compagnie pourra renoncer jusqu'au 1er janvier 1841, à la concession pour toute la partie du chemin de fer au delà de Juvisy. « Elle sera, si elle use de ce droit, relevée de toute déchéance, et la portion de son cautionnement correspondant au surplus du chemin lui sera rendue. » M. le Président. M. Pascalis propose de supprimer la première phrase de cet article, laquelle est ainsi conçue : «Si, dans le cours de la prochaine session, une loi n'était pas rendue pour assurer à la compagnie concessionnaire le concours qu'elle réclamerait de l'Etat pour l'achèvement de ses travaux. » Voilà la phrase dont on propose la suppression. L'article serait alors ainsi rédigé : « La compagnie pourra renoncer, jusqu'au 1er janvier 1841, à la concession pour toute la partie du chemin de fer au delà de Juvisy. «Elle sera, si elle use de ce droit, relevée de toute déchéance, et la portion de son cautionnement correspondant au surplus du chemin lui sera rendue. M. Dufaure, ministre des travaux publics. Quelques uns des membres de la Chambre ont cru que la rédaction du projet était telle, qu'elle engageait le Gouvernement et les Chambres à accorder l'année prochaine un concours de l'Etat à la compagnie. Cela n'était pas dans les intentions du Gouvernement; l'amendement de M. Pascalis est de nature à lever ces scrupules, je l'adopte complètement. Mais il est bien entendu, comme l'a dit lui-même l'honorable auteur de l'amendement, que rien n'est préjugé, que le Gouvernement reste maître de vous proposer, et que vous restez maîtres d'accepter, l'année prochaine, un concours de l'Etat pour les compagnies. Quant à présent, la rédaction de l'article est telle qu'il n'est rien préjugé; la question est entière et j'accepte l'amendement. M. Pascalis. C'est tout à fait dans cette pensée que j'ai proposé mon amendement. M. le Président. Je mets aux voix l'article tel qu'il est rédigé par M. Pascalis, et qu'il est accepté par le Gouvernement et par la Commission. (L'article 3 ainsi rédigé est adopté). M. le Président. L'article 4 est ainsi conçu : Art. 4. «En ce cas, l'Etat aura la faculté de racheter la partie du chemin qui aura été confectionnée, en remboursant aux concessionnaires leur dépense, et en se mettant à leur lieu et place pour les engagements qu'ils ont contractés jusqu'à ce jour sur la ligne de Juvisy à Orléans. Les contestations qui pourraient s'élever entre l'Etat et la compagnie sur la fixation de la somme à rembourser seront jugées conformément à l'article 53 du cahier des charges. » M. Berryer. On a fait, dans le cours de la discussion, une observation grave sur cet article, qui me détermine à le combattre. On a dit que cette rédaction exposait l'Etat à être entraîné, dans le cas de rachat, à payer un prix exorbitant. Je crois, en effet, que cet inconvénient est justement signalé. D'une autre part, je crois qu'il est mauvais, quand la Chambre prend la résolution de manifester de l'intérêt pour les compagnies, de les placer immédiatement sous une loi de dépossession. La loi d'expropriation pour cause d'utilité publique est le droit permanent de l'Etat, sans qu'il soit hors de la loi commune, dans la fixation des droits à payer. Je crois qu'il faut laisser cette disposition dans le droit commun, dans le cas où on rachèterait un chemin. M. Teste, garde des sceaux, ministre de la justice. Je conçois que, sur la question abstraite du rachat des chemins de fer par l'Etat, dans des circonstances données, il puisse y avoir deux opinions, que les uns soient pour cette faculté stipulée au profit de l'Etat, et que les autres ne veuillent pas de cette faculté. Mais ce que je ne comprendrais pas, c'est que, la faculté de rachat étant admise, on voulût en assujettir l'exercice à toutes les formalités, à toutes les chances de la loi de juillet 1833, relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique. Ce serait ouvrir un abîme, et jamais cette faculté ne pourrait être ainsi exercée. Remarquez que je ne parle pas seulement des délais, ils sont assez courts; mais les formalités sont innombrables. Or, l'Etat pourrait-il faire dépendre l'exercice de la faculté de rachat d'une appréciation qui serait faite par un jury? C'est impossible. La faculté de rachat ne paraît bonne et utile à l'Etat qu'autant que toutes les formalités qui peuvent y conduire seront abandonnées à une juridiction spéciale, à la juridiction administrative, c'est-à-dire au conseil de préfecture avec recours au conseil d'Etat. Sans cette condition, la faculté de rachat serait une faculté qui devrait inspirer de l'effroi, et qu'il vaudrait mieux abandonner en principe que de conserver avec de telles condi tions. M. Bérigny. Je désirerais que le rachat ne pût s'effectuer que quand le chemin de Paris à Corbeil aurait été complètement achevé. M. Vivien, rapporteur. Le rachat pourra être un moyen d'achever le chemin; conséquemment, il ne faut pas le subordonner à l'achèvement préalable du chemin. M. Dessauret. Je pense que la rédaction de cet article n'est pas assez claire pour assurer d'une manière absolue les droits de l'Etat. Cet article porte : «En ce cas, l'Etat aura la faculté de racheter la partie du chemin qui aura été confectionnée, en remboursant aux concessionnaires leur dépense, et en se mettant à leur lieu et place pour les engagements qu'ils ont contractés jusqu'à ce jour sur la ligne de Juvisy à Orléans. » Au lieu de pour les engagements contractés jusqu'à ce jour, je dirais pour les engagements ayant date certaine, etc. Plusieurs voix : C'est de droit! M. Charlemagne. Jusqu'à ce jour, est-ce jusqu'au jour de la promulgation de la loi? M. Pascalis. Sera-ce seulement les dépenses utiles ou toutes les dépenses indéfiniment faites à l'occasion du chemin de fer? M. Dufaure, ministre des travaux publics. Je demande à la Chambre la permission de répondre en très peu de mots aux diverses objections qui ont été faites. Quant à ce que demande M. Pascalis, si les dépenses que remboursera l'Etat sont seulement les dépenses utiles, cela me paraît indubitable. La juridiction administrative appréciera cela; elle verra quelles sont les dépenses utiles pour la confection du chemin de fer que l'Etat rachète, et alors l'Etat remboursera. Il n'y a pas sur ce point de difficulté. Quant à la difficulté proposée par Messieurs Dessauret et Charlemagne, voici ce qui s'est passé. La compagnie avait acheté ses approvisionnements pour un chemin plus long que celui de Paris à Corbeil et quelques terrains en dehors du tracé de Paris à Juvisy. Et quant à ces terrains, elle les avait achetés à l'amiable, parce qu'elle sentait qu'il valait mieux les acheter immédiatement, et qu'elle les aurait à meilleur prix que par expropriation publique. Il a paru utile, dans l'intérêt de l'Etat, de se faire subroger à ces acquisitions, afin de profiter des bénéfices que la compagnie pourrait avoir faits par avance. Voilà pourquoi on a dit les dépenses faites jusqu'à ce jour, L'honorable M. Dessauret demande si c'est jusqu'à la promulgation de la loi. Non, Messieurs, nous n'avons pas voulu que ce fût jusqu'à la promulgation de la loi; on en comprendra les motifs. Je n'attribue aucune mauvaise intention à la compagnie; mais entre le jour de la présentation de la loi et la promulgation, elle aurait pu faire des acquisitions qu'il ne nous conviendrait pas de payer. Nous avons demandé, le jour de la présentation de la loi, un état signé des administrateurs de la compagnie, ayant date certaine, et contenant la nature des dépenses qui avaient été faites. Plusieurs voix de gauche Mettez alors jusqu'au jour de la présentation. M. Dufaure, ministre des travaux publics. Quelques-uns de nos honorables collègues ne se contentent pas de la rédaction de l'Etat et de la date qu'il a reçue, ils demandent que l'on remplace ces mots jusqu'à ce jour par ceux-ci jusqu'au jour de la présentation du projet de loi. Plusieurs voix : La date, la date! M. Barbet. Les explications données par M. le ministre me paraissent incomplètes. S'il ne s'agissait que d'engagements pris par la compagnie pour différents achats de terrains, il ne se présenterait pas de difficulté ; mais il y a d'autres sortes d'engagements pris par la compagnie, et je crains que ces engagements ne soient compris dans ces mots : jusqu'au jour de la présentation, ou de toute autre date qui pourra être indiquée. L'honorable M. Billault vous a parlé de forêts qui ont été achetées; est-ce que le Gouvernement va prendre ces forêts pour les exploiter? Avez-vous la certitude que tout a été bien acheté, bien calculé? Il y a, Messieurs, dans cette rédaction des termes qui peuvent engager l'Etat plus qu'il ne doit être engagé. Je voudrais savoir aussi, par exemple, quels sont les engagements pris pour les wagons, pour les locomotives; je voudrais savoir comment cela a été fait, et nous n'avons rien, la rédaction est vague, et voilà ce qu'il ne faut pas. Quant l'Etat s'engage, il faut savoir jusqu'à quel point. Je demande, par ces motifs, un changement de rédaction. M. Dufaure, ministre des travaux publics. Voici l'état qui a été remis au Gouvernement et transmis par le Gouvernement à la Commission; il a pour date le 18 mai 1839, il est signé par les administrateurs de la compagnie; il peut rester annexé à la loi; il indique les dépenses faites c'est sur cet état que les remboursements se feront. : M. Monnier de La Sizerane. Je propose de substituer aux mots jusqu'à ce jour, ceuxci: jusqu'au 18 mai 1839, date de l'état remis entre les mains de M. le ministre des travaux publics. M. Luneau. J'ai ici un renseignement à demander. Plus nous avançons dans la discussion, et plus nous voyons que le Gouvernement, quand il devra acheter, sera entièrement à la discrétion de la compagnie. Ensuite une autre explication, c'est que j'avoue que la rédaction de l'article 4 n'est pas tellement claire, qu'en le lisant on ne puisse croire que le Gouvernement n'est autorisé à acheter que la partie de Juvisy à Orléans, ou que la partie de Corbeil. Ce ne peut être l'intention du Gouvernement; mais la rédaction de l'article est telle, qu'on pourrait induire cela. Je demande que M. le ministre s'explique sur ce point; qu'il dise s'il n'entend pas se réserver par là le droit d'acheter les travaux faits sur la route de Paris à Juvisy et au delà. M. Vivien, rapporteur. L'article du projet porte qu'on aura le droit de racheter la par tie du chemin qui aura été confectionnée. Ainsi, tout ce qui aura été fait, l'Etat aura le droit de le racheter; et il serait absurde de supposer qu'il eût le droit d'acheter la partie du chemin de Paris à Juvisy, et que si on en avait fait une ou deux lieues au delà sur la route de Corbeil, il n'eût pas le droit de le racheter. M. Dufaure, ministre des travaux publics. M. Luneau dit que toutes ces difficultés prouvent qu'on veut mettre l'Etat à la discrétion des compagnies. Je soutiens le contraire; je dis que toutes les précautions sont prises à cet égard. Nous nous sommes d'abord réservé une juridiction, la juridiction administrative, à laquelle M. Luneau ne fera pas le reproche d'être trop favorable aux particuliers contre l'Etat. En outre, nous avons exigé un état des dépenses qui ont été faites; en voici le chiffre total 11,694,882 fr. 05. Et remarquez bien que le Gouvernement ne s'engage pas à payer toutes les dépenses mentionnées dans cet état. Voix au centre: A la bonne heure! M. Dufaure, ministre des travaux publics. Il s'engage à payer toutes les dépenses utiles, faites; mais il ne vise pas l'état signé par les administrateurs, de sorte que s'il s'était glissé des dépenses étrangères au chemin de fer, le Gouvernement ne serait pas obligé de les rembourser. Voilà ce qu'il m'a paru nécessaire d'indiquer. M. Barbet. S'il en est ainsi, il ne faut pas annexer l'état à la loi. M. Deslongrais. M. le ministre vient de dire quel est le montant des dépenses faites; je désirerais savoir quel est le montant des engagements qui ont été pris. M. Dufaure, ministre des travaux publics. Dans l'état que j'ai indiqué, tout se trouve et les dépenses faites, et les engagements pris. M. Dessauret. La discussion qui vient de s'engager, et à l'occasion de laquelle M. le ministre a donné des explications dont, pour mon compte, je demeure satisfait, démontre cependant qu'il y a dans la rédaction de cet article quelque vice qui doit être corrigé. Ainsi, il faut qu'il soit bien spécifié que ce sont seulement les dépenses utiles dont il doive être tenu compte; il faut qu'il n'y ait aucune espèce d'amphibologie sur la date. Une nouvelle rédaction me paraît indispensable; et je demande le renvoi de cet article à la Commission. (Réclamations.) M. le Président. M. Dessauret propose d'ajouter au mot dépenses le mot utiles; de remplacer ces mots : « les dépenses faites jusqu'à ce jour, » par ceux-ci : « jusqu'au 18 mai 1839. »> Alors la date de l'état n'est rapportée que pour empêcher qu'aucun des travaux qui n'auraient pas été compris dans cet état, soient mis à la charge du Gouvernement; mais il n'en résulte nullement que le Gouvernement doive prendre à sa charge toutes les dépenses qui auraient été portées dans l'état, puisque les contestations qui pourraient avoir lieu sur ce point sont, aux ter M. le Président. Insiste-t-on pour ajouter le mot utilement contractés. Voix nombreuses : Oui, oui! le Gouvernement y adhère. M. Fulchiron. Voici ce que je propose. Je crois qu'il y aurait plus de correction à mettre les mots dépenses nécessaires, au lieu de ceux-ci, dépenses utiles. (Non! non!) Je crois que l'amendement par ces mots est un peu plus restrictif, et qu'il mettra en même temps le Gouvernement plus à l'aise pour le garantir de payer, s'il est dans le cas de le faire, des dépenses inutiles. M. le Président. L'amendement de M. Fulchiron est-il appuyé? (Non! non!) M. Guyet-Desfontaines. Il y a peut-être un moyen de sortir du vague... Plusieurs voix : Il n'y a pas de vague! M. Guyet-Desfontaines. Quant à moi, il me paraît que le mot utiles laisse quelque chose de vague. Je propose de spécifier encore davantage en disant : « la valeur des travaux, terrains et matériel. » De cette manière, je crois qu'on sortirait de la question. M. le Président. L'amendement est-il appuyé? (Non! non!) Ainsi, je mets aux voix l'article 4 présenté par la Commission et consenti par le Gouvernement, avec les amendements de M. Dessauret et de M. Charlemagne, qui consistent à ajouter le mot utiles après le mot dépenses, à substituer aux mots : « les engagements qu'ils ont contractés », ceux-ci : « les engagements qu'ils auront utilement contractés », et enfin à remplacer les mots jusqu'à ce jour » par les mots : « jusqu'au 18 mai 1839. »> (L'article 4, ainsi amendé, est mis aux voix et adopté.) M. le Président. Je donne lecture de l'article 5 qui est ainsi conçu : Art. 5 «En cours d'exécution, la compagnie pourra proposer toutes les modifications qu'elle jugera utiles au tracé général du chemin de fer et à sa largeur, au maximum des pentes et au minimum des courbes, au nombre des gares d'évitement, à la hauteur ou à la largeur des ponts sur les chemins vicinaux et d'exploitation, au mode de construction des ponts à la rencontre des routes royales et départementales, enfin à la pente des routes royales et départementales déplacées; mais ces modifications ne pourront être exécutées que moyennant l'approbation préalable et le consentement formel de l'autorité supérieure. L'administration est également autorisée à statuer provisoirement sur les mo difications que la compagnie pourrait demander aux tarifs réglés par le cahier des charges. » M. le Président. Sur cet article, M. Baumes a présenté un amendement. M. Luneau. Je demande à faire une observation. En demandant la suppression de la faculté accordée au Gouvernement par cet article 5, de modifier les pentes et de les porter de trois à cinq millimètres, voici quelle était mon but c'est que la ligne du chemin de fer de Paris à Orléans est située dans une des positions les plus favorables qu'il soit possible de trouver, et pour ainsi dire nivelée dans toute son étendue. Ainsi, depuis Etampes jusqu'à Orléans, c'est une ligne droite sur laquelle les travaux de terrassement ressembleront partout aux travaux ordinaires des grandes routes. Eh bien! il n'y a d'obstacle à la pente de 3 millimètres que la vallée de Juvisy par où il faut passer pour arriver à Etampes. Les avantages de cette pente de trois à cinq millimètres sont plus grands qu'on ne saurait le penser; comme ils ne nécessiteront pas de locomotive de renfort, la même locomotive pourra parcourir toute la distance. Eh bien! vous nécessitez des locomotives beaucoup plus fortes pour toute l'étendue du parcours et, par conséquent, vous nécessitez une dépense beaucoup plus considérable; car le premier objet que vous devez vous proposer dans les chemins de fer, c'est la vitesse et l'économie; or, ce ne sont pas seulement les frais de construction des chemins de fer qui constituent les plus grandes dépenses, mais les frais d'exploitation, le combustible et les moyens de traction. Eh bien! l'expérience en a été faite en Angleterre entre Manchester et Liverpool; il y a eu dans cette partie du chemin de fer des dépenses plus considérables qu'entre Manchester et Birmingham. On a calculé que les frais du matériel, de l'exploitation, des rails, des locomotives étaient d'un tiers plus considérables. J'ai cru devoir signaler ces observations à la Chambre et particulièrement à M. le ministre des travaux publics. Je suis d'ailleurs peu préoccupé de l'adoption ou du rejet de mon amendement, sur lequel je n'insiste pas; mais j'appelle toute l'attention du ministre, parce que c'est le Gouverne |