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« Monsieur le Président,

« Je m'empresse de me conformer au décret du 16 de ce mois, qui rappelle ceux des 4 janvier et 18 décembre 1790. Je vous prie de vouloir bien rappeler au souvenir de l'Assemblée nationale, qu'en exécution de ses anciens décrets, M. de Fleurieu avait informé, le 16 mars et le 16 avril 1791, l'Assemblée constituante de la radiation de M. de Sade, lieutenant de vaisseau, et de M. de Labintinaye, major.

« Quant à ce qui tient à mon administration, je vous prie de faire connaître à l'Assemblée: 1° qu'ayant appris que M. d'Assas, major de vaisseau, après avoir prêté le serment civique, l'avait rétracté; sans m'arrêter à la considération du nom de cet officier, dont la famille avait mérité la bienveillance de l'Assemblée constituante, j'ai pris, le 28 décembre, les ordres du roi, pour le faire rayer de la liste des capitaines de vais

seau.

2° Qu'ayant été averti par la voix publique que M. Vaudreuil l'aîné, compris dans la nouvelle formation du corps de la marine, avec le grade de vice-amiral, était du nombre des signataires d'une protestation contre la Constitution, quoique je n'eusse à cet égard aucune certitude ni aucun moyen de me la procurer, j'ai proposé au roi de laisser en blanc, sur la liste, le nom de cet officier général, et je lui ai écrit le 18 de ce mois, pour qu'il eût à rétracter cette protestation s'il est possible qu'il l'ait signée, et qu'il se soit laissé aller à un premier mouvement d'erreur;

3° Que je n'ai actuellement aucune connaissance que d'autres officiers militaires du département de la marine se soient mis, par le refus de serment ou protestation ou autres contradictions aux lois, dans le cas de la radiation;

«4° Que les consuls et agents français, employés dans le département de la marine, en pays étrangers, ont prêté le serment civique, et que les ministres, mes prédécesseurs, en ont fait passer successivement les certificats à M. le président de l'Assemblée nationale, à mesure

qu'ils leur sont parvenus; que celui de M. de Laquillière, consul à Madère, a été annoncé par une lettre de lui, en date du 20 mars 1791, à‍laquelle il ne s'est cependant pas trouvé joint, sans doute par oubli; l'observation Jui en a été faite sur-le-champ pour qu'il réparât cette erreur; que le consul de France à Baltimore et le vice-consul en Virginie sont les seuls dont le département de la marine n'ait pas encore reçu le serment; mais il est possible, ou qu'ils les aient adressés directement à l'Assemblée nationale, ou que les paquets aient été égarés en route. Ce devoir leur a été rappelé par une lettre du 6 décembre, expédiée par duplicata;

« 5° Que les administrations civiles des ports du royaume ont successivement adressé à mes prédécesseurs les certificats de serments civiques prêtés par leurs subordonnés, et qu'aucun n'a rendu compte qu'il ait été commis de contravention à la loi à cet égard;

6° Que depuis l'organisation des bureaux de ce département, j'ai demandé et obtenu que tous les chefs et commis qui y sont employés prêtassent le serment civique. Je sais aussi que presque tous ceux qui sont inscrits sur les rôles de la garde nationale ont acquitté les deux tiers de leur contribution patriotique et ont rempli les autres devoirs de citoyen avec une exactitude qui a fait faire des sacrifices à un grand nombre. Je vous prie, Monsieur le président, de vouloir bien assurer l'Assemblée nationale de ma scrupuleuse attention à faire exécuter les lois dans mon département.

་་

Permettez-moi de profiter de cette occasion pour supplier l'Assemblée de s'occuper de la discussion de l'affaire qui m'est personnelle : je l'attends avec une grande confiance. « Je suis avec respect, etc.

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M. Jagot. Je demande, Messieurs, que vous décrétiez que tout officier de marine qui ne sera pas à la mer, ou employé en pays étranger pour affaires de l'Etat, enverra sous trois semaines à son département, un certificat de sa municipalité attestant sa résidence dans le royaume; à défaut de quoi il sera rayé du tableau de la marine.

M. Maribon-Montaut. J'ai des preuves en main que plusieurs officiers de marine, notamment de mes parents, que l'Assemblée me dispensera de nommer, sont à Coblentz, et néanmoins sont inscrits sur la liste du ministre pour former, d'après le décret du 15 mai, la nouvelle organisation de la marine. Pour obvier à cet inconvénient, je demande que la motion du préopinant soit mise aux voix.

Plusieurs membres demandent le renvoi au comité de marine de la lettre du ministre de la marine.

M. Cambon. J'appuierais la proposition de M. Jagot si elle ne tendait à affaiblir la responsabilité du ministre, qui est prononcée par une loi du 15 décembre 1790. Par une loi, en date de ce jour, l'Assemblée constituante ordonna que les ministres rayeraient tous les officiers sortis du royaume, ou qui auraient refusé de prêter le serment civique. Le 1er décembre 1791, vous avez ordonné que les ministres vous présenteraient l'état de cette radiation. Il y a 4 ou 5 jours, M. Grangeneuve a réclamé l'exécution de cette dernière loi; vous avez ordonné que

l'état de radiation vous serait présenté sous 3 jours, et les ministres n'ont pas obéi. Je la réclame aujourd'hui, et je m'oppose à la proposition du préopinant, parce qu'il est inutile de faire de nouvelles lois, lorsqu'il en existe déjà plusieurs sur le même sujet. Je demande, en conséquence, que tous les officiers qui sont absents seront déchus dès ce jour.

M. Broussonnet, secrétaire. C'est ce que je viens de lire; car la lettre remplit cet objet.

M. Sers. J'appuie d'autant plus fortement la motion de M. Cambon que cette lettre du ministre est un piège pour vous faire approuver indirectement des radiations partielles au lieu d'une radiation générale qu'il aurait dù faire en vertu du décret du 15 décembre 1790, et je m'engage à démontrer combien le ministre est coupable de n'avoir pas exécuté la loi qui ordonne la radiation de tous les officiers absents.

M. Rouyer. Je demande le renvoi de la proposition de M. Jagot au comité de marine.

M. Grangeneuve. Ce n'est pas le renvoi au comité, c'est l'ordre du jour qu'il faut réclamer. Veuillez bien ne pas perdre de vue, Messieurs, qu'il y a un décret qui porte que tout fonctionnaire public qui ne sera pas présent et résidant dans le royaume perdra son grade et ses droits. Ce décret est rendu et il est très ancien.

Le ministre de la marine, dans le discours qu'il a prononcé devant l'Assemblée nationale, a dit lui-même ces propres mots : « Je sais trop qu'il y a beaucoup d'officiers de marine qui ont abusé de leurs congés pour passer en pays étranger. » Or, tout officier qui est passé en pays étranger, sans mission particulière, est censé avoir renoncé à son emploi. C'est donc au ministre à exécuter la loi à l'égard de ces officiers de marine. D'après cela, je demande l'ordre du jour sur la motion de faire une nouvelle loi contre les officiers de marine.

(L'Assemblée, consultée, passe à l'ordre du jour et renvoie la lettre du ministre de la marine au comité de la marine.)

M. Broussonnet, secrétaire, fait lecture d'une note des décrets récemment sanctionnés par le roi (1).

M. Broussonnet, secrétaire, donne lecture d'une lettre de la municipalité de Beaucaire qui se plaint de n'avoir pas reçu de fusils et de ce qu'elle n'en a pas pour armer 1,800 hommes qui composent sa garde nationale. Elle annonce, en même temps, qu'un curé constitutionnel a été assassiné près d'Arles.

(L'Assemblée renvoie cette lettre au pouvoir exécutif.)

M. Broussonnet, secrétaire. Je demande à réparer une erreur dans la lecture que j'ai faite des décrets sanctionnés. La notice porte en marge que le roi examinera le décret, sous la date du 29 septembre 1791, qui accorde aux présidents des tribunaux criminels le droit de nommer les huissiers desdits tribunaux.

M. Bigot de Préameneu. Il faut vous instruire d'un fait relatif à la nomination des huissiers. L'Assemblée nationale constituante avait rendu sur cet objet un décret qui n'avait point été porté à la sanction. Votre comité de législa

(1) Voir ci-après, cette note aux annexes de la séance, page 680.

tion ignorait ce premier décret, et, en conséquence, dans le dernier décret que vous avez rendu, il a été dit que les huissiers des tribunaux criminels seraient nommés par les tribunaux, de manière que ces deux décrets se trouvaient en contradiction.

Il s'agit de savoir si le veto opposé a pour objet cette contradiction. C'est un fait à examiner, et demain matin votre comité de législation s'en occupera et vous en fera le rapport. Je vous observe encore, autant que je puis me rappeler les sanctions faites, que le décret que vous avez rendu a été sanctionné et envoyé. Celui de l'Assemblée nationale constituante n'ayant point été sanctionné, il est fort simple qu'on ait dit : le roi examinera.

M. Prouveur, orateur de la députation chargée de porter au roi le décret relatif à l'office de l'empereur. Messieurs, le roi a répondu à la députation qui lui a présenté hier soir l'invitation que vous avez décrétée le matin, qu'il la prendrait en grande considération.

M. Jean Debry. Je demande si tous ceux qui composaient la députation ont été admis. (Oui! oui!) Je sais que non; il y en a qui ne sont pas entrés. (Murmures.)

M. Quinette. On ne peut pas laisser passer sans explication le fait qu'on vous dénonce. Le préopinant a dit que toute la députation n'avait pas été reçue. J'en étais, et il est constant que la disposition du local où nous avons été reçus était telle que nous y étions très pressés. D'ailleurs, comme il n'y avait qu'un battant d'ouvert, cela a forcé plusieurs membres de rester dehors. Je crois qu'il est nécessaire de faire cette observation. Il serait peut-être plus convenable, et à la dignité de l'Assemblée nationale et à la dignité du roi, de choisir un local plus commode pour que toute la députation pùt entrer librement; car ce n'est pas celui qui présente le papier qui est député par l'Assemblée nationale; ce sont les 24 membres qui composent la députation.

M. Jean Debry. A présent, je demande que l'on passe à l'ordre du jour.

Plusieurs membres: L'ordre du jour!

M. Prouveur, orateur de la députation. La députation a été introduite en partie dans la salle, mais la présentation et la lecture du décret au roi ont été si courtes qu'on n'a pas eu le temps de s'en apercevoir.

M. Delacroix. Je demande qu'on passe à l'ordre du jour; et j'observe que si toute la députa tion n'est point entrée, c'est sa faute. Elle ne devait pas entrer que les deux battants ne fussent ouverts, car elle représente l'Assemblée nationale.

(L'Assemblée passe à l'ordre du jour.)

L'ordre du jour appelle le rapport des comités de législation et de l'extraordinaire des finances réunis, sur la déchéance des titres des créances qui ne seraient pas produits dans un délai déterminé.

M. Guyton-Morveau. Je demande que le rapport du comité des assignats et monnaies sur les moyens de hâter le fabrication des monnaies soit fait immédiatement après celui du comité de l'extraordinaire des finances. On nous menace d'émeutes dans tout le royanme, et il y a 400,000 marcs prêts à être frappés.

(L'Assemblée décrète la motion de M.GuytonMorveau.)

M. Debray-Chamont, au nom des comités de législation et de l'extraordinaire des finances réunis, soumet à la discussion un projet de décret sur la déchéance des titres de créance qui ne seraient pas produits dans un délai déterminé; il s'exprime ainsi :

Messieurs, vous avez chargé votre comité de l'extraordinaire des finances de vous présenter une nouvelle rédaction du considérant de votre décret relatif à la remise des titres de la dette constituée de quelques articles additionnels renvoyés à son examen (1). Je vais vous faire lecture de ces articles et de la rédaction définitive du décret entier (2).

« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de l'extraordinaire des finances, considérant que, malgré les décrets qui enjoignaient aux propriétaires des offices et charges de toute espèce, de cautionnements d'emplois et de dimes inféodées, supprimés, et aux autres créanciers de l'Etat, de présenter leurs titres de créance pour en faire connaître et fixer la valeur, plusieurs d'entre eux n'y ont pas encore satisfait; considérant qu'un plus long retard, contre lequel réclame l'intérêt public, ne pourrait avoir d'excuses légitimes; considérant combien il importe à la tranquillité publique d'avoir une prompte et parfaite connaissance de l'étendue des dettes de l'Etat, et combien, par conséquent, il est urgent de savoir l'importance de tous les titres non liquidés, pour pouvoir former en même temps, et dans le plus court délai, un état exact de toutes les dettes exigibles et de toutes les ressources de la nation, d'après lequel on puisse arrêter définitivement un plan général de liquidation fondé sur des bases certaines, d'é

crète :

«Art. 1er. Les propriétaires d'offices, de cautionnements d'emplois et de dimes inféodées, supprimés par les différents décrets rendus sur ces objets par l'Assemblée nationale constituante; ceux qui ont à réclamer des droits ci-devant seigneuriaux et autres, rachetables par la nation, et enfin tous autres propriétaires de créances déclarées exigibles à là charge de la nation, pour telle cause que ce soit, qui n'ont pas encore fait connaître leurs titres, sont tenus de les produire dans le délai porté à l'article 3. (Décrété.)

«Art. 2. Les propriétaires de créances sur l'arriéré, ceux des offices, charges et cautionnements supprimés, fourniront leurs titres au commissaire du roi, directeur général de la liquidation; les propriétaires des créances exigibles sur les ci-devant biens, corps et communautés ecclésiastiques, de dimes inféodées; ceux des différents droits féodaux ou fonciers dus sur les domaines nationaux, ou supprimés avec indemnité, les produiront au directoire du district où lesdits biens sont situés, suivant qu'il a été prescrit par les précédents décrets; et il sera à cet effet ouvert et tenu un journal d'enregistrement paraphé par les procureurs-syndics des districts, lequel sera clos et arrêté par eux à l'expiration du délai ci-après. (Décrété.)

«Art. 3. Le terme prescrit pour la production desdits titres est fixé, pour ceux qui résident en France, au 1er mai prochain; ceux qui habitent les colonies en deçà du cap de Bonne-Espérance,

(1) Voy. Archives parlementaires, 1r série, t. XXXVI, séance du 24 décembre 1791, page 333.

(2) Bibliothèque nationale: Assemblée législative, Dette publique, P.

sont tenus de les produire d'ici au 1er mai 1793; et ceux qui demeurent au delà du cap de BonneEspérance, les produiront d'ici au 1er mai 1794.

«Les directoires des départements seront tenus d'adresser, avant le 15 du mois de mai prochain, audit commissaire du roi, directeur général de la liquidation, un état sommaire, d'eux certifié, du capital des sommes réclamées au terme des titres qui auront été portés sur les journaux d'enregistrement des districts, lesquels journaux resteront déposés aux archives des départements. (Décrété.)

«Art. 4. Le terme de rigueur fixé par l'article 7 du décret du 1er juillet 1790, pour la présenta tion des titres des créanciers prétendant à être portés dans l'arriéré des départements, est prorogé jusqu'audit jour 1er mai prochain. (Les bases en ont été décrétées.)

«Art. 5. Tous ceux qui, dans ces délais, n'auront pas effectué lesdites productions de titres seront censés avoir renoncé à leurs créances sur le Trésor public, et ils ne pourront être admis, sous aucun prétexte ni dans aucun temps, dans aucune classe ni état de remboursement. (Dẻcrété.)

« Art. 6. L'intendant de la liste civile, en exécution de l'article 8 du décret du 26 mai dernier, fournira, d'ici au 1er mars prochain, aux commissaires du roi, directeur de la liquidation, les états mentionnés dans ledit article.

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Et les titulaires desdites charges ou offices et brevets de retenue également tenus de produire leurs titres de créance en original au commissaire-directeur de la liquidation, d'ici au 1er mai prochain, au plus tard, sous les peines portées dans l'article 5 du présent décret.

« Art. 7. Les villes et communes remettront, d'ici au 1er mai prochain, au directoire de leur district, un état détaillé contenant l'énonciation de leurs dettes, tant en capitaux qu'intérêts, avec l'époque à compter de laquelle les intérêts sont dus aux créanciers; ensemble celui de leurs biens, propriétés foncières, créances actives et autres ressources, y compris leur bénéfice du 16° sur le prix des biens nationaux. Elles y joindront un extrait des actes qui les auraient autorisées à contracter lesdites dettes, avec indication des fonds qui auraient été destinés pour y pourvoir.

« Les directoires des districts les enverront avec leur avis, dans la quinzaine suivante, aux directoires de leur département, à qui il est enjoint également de les faire passer avec leurs observations, avant la fin du même mois, audit commissaire directeur général de la liquidation.

«Art. 8. Faute par les villes et communes d'avoir satisfait aux dispositions de l'article précédent, elles seront déchues du bénéfice de la loi du 5 août dernier; et, dans ledit cas de déchéance, les maire et officiers municipaux et les membres des directoires desdits corps administratifs qui ne justifieraient pas avoir fait en temps les diligences nécessaires, en demeureront responsables, chacun en ce qui le concerne.

« Art. 9. L'Assemblée nationale se réserve de statuer sur la demande des créanciers qui prouveraient d'une manière authentique l'impossibilité où ils ont été de présenter leurs titres dans le délai prescrit, par des obstacles qu'il n'aurait pas été en leur pouvoir de surmonter; à la charge toutefois, par ces derniers, de remettre dans le délai prescrit, au commissaire du roi, directeur général de la liquidation, un mémoire signé d'eux, contenant le détail de leur récla

mation, et des raisons qui les empêchent de produire leurs titres.

«Art. 10. Le commissaire-directeur de la liquidation est spécialement chargé d'accélérer les opérations qui lui sont confiées, et de rendre compte tous les quinze jours, à l'Assemblée nationale, de l'état de son travail.

« Art. 11. Le commissaire-liquidateur présentera, le 15 juin prochain, à l'Assemblée nationale, sous peine de responsabilité, un relevé sommaire de tous les titres qui auront été liquidés ou présentés. Il y joindra l'aperçu des états de situation des villes et communes, qu'il aura reçus, afin de constater, d'une manière certaine et précise, le montant de toutes les dettes de l'Etat, de toute espèce, déclarées exigibles.

«Art. 12. Le présent décret sera porté dans le jour à la sanction du roi. »

Plusieurs membres observent qu'on a fait quelques changements à ce projet de décret et qu'on ý a intercalé des articles additionnels.

D'autres membres demandent l'impression, la distribution et l'ajournement de ces articles additionnels.

Plusieurs membres: La discussion fermée sur l'ajournement!

(L'Assemblée ferme la discussion sur l'ajournement.)

Plusieurs membres demandent la question préalable sur l'impression et l'ajournement.

(L'Assemblée rejette la question préalable, ordonne, l'impression du projet de décret et ajourne la discussion à samedi prochain.)

M. Lavigne, au nom du comité des assignats et monnaies, fait un rapport et présente un projet de décret sur les moyens de hâter la fabrication des monnaies, par l'envoi de moutons dans les ateliers de flaons; il s'exprime ainsi :

Messieurs, vous avez renvoyé à votre comité des assignats et monnaies deux pétitions qui vous ont été présentées, l'une par la municipalité de la ville de Riom, département du Puy-deDôme, l'autre par le directoire du département de la Côte-d'Or, pour établir l'établissement d'un battage de la monnaie de cuivre dans les villes de Riom et de Dijon, comme possédant l'une et l'autre dans leur sein un hôtel des monnaies propre à cet établissement.

Ces deux administrations vous exposent, Messieurs, que quoique les hôtels de Riom et de Dijon aient été supprimés en 1772, époque où les hôtels des monnaies du royaume furent réduits à 17, les bâtiments, les balanciers et les ustensiles qui y servaient s'y sont conservés en bon état, qu'ils n'ont besoin, pour être mis en activité, que de très légères réparations, et les administrateurs de la Côte-d'Or ajoutent qu'ils ont encore dans leur ville tous les officiers attachés autrefois à leur hôtel des monnaies, dont la plupart, disent-ils, offrent gratuitement leur surveillance et leur travail.

Elles exposent qu'ayant été formé dans leur sein des établissements pour la fabrication des flaons en métal de cloches, il ne serait ni expéditif, ni économique de les obliger à transporter leurs flaons aux hôtels des monnaies de Lyon ou de Limoges placés à une distance très éloignée pour y recevoir l'empreinte monétaire.

Elles exposent enfin que, dans les circonstances où se trouve leur département, le moindre retard apporté dans la fabrication de la monnaie produirait de dangereux effets et porterait

le plus grand préjudice au commerce, à l'agriculture et au recouvrement des contributions publiques.

La loi du 6 août 1791, en déterminant les règles de la distribution entre les différents départements, de la monnaie de cuivre et de celle provenant de la fonte des cloches, détermine aussi les villes qui devront recevoir les cloches envoyées par les différents districts, ainsi que la part que chaque département doit avoir à la distribution de la monnaie. A ces mesures générales, il en a été joint de particulières dans l'objet de hâter la fabrication par l'établissement d'un certain nombre d'ateliers de flaons dont le battage est réservé exclusivement aux hôtels des monnaies.

Ainsi, tandis que le coulage et le battage se font à la fois dans les hôtels des monnaies, on ne peut que fabriquer des flacons dans les ateliers de Romilly, Maronne, Mines-de-Saint-Bel, Besançon, Arras, Roanne, Saumur, La Charité, Dijon, Clermont-Ferrand. Ces flaons doivent être ensuite transportés de ces ateliers dans les hôtels des monnaies les plus voisins pour y recevoir l'empreinte monétaire. Mais quelquesuns de ces hôtels sont si éloignés des ateliers des flaons, que la dépense des transports et le retard sont infiniment grands et nuisibles.

Cette manière de procéder avait été adoptée d'abord dans des vues d'économie. On avait trouvé quelque danger à multiplier les établissements d'une fabrication complète, parce que cette opération ne devant être que momentanée dans les lieux où il n'y a pas d'hôtels des monnaies, il ne fallait pas moins employer des moyens de surveillance. On ne comptait pas d'ailleurs pouvoir former ces nouveaux établissements autrement qu'en y construisant des balanciers et en leur donnant tout le caractère d'un hôtel des monnaies, ce qui aurait augmenté le retard et la dépense.

Mais l'expérience ayant fait adopter l'usage du mouton pour le battage, ce nouveau système, plus simple et plus économique, ayant été substitué dans les hôtels, même aux balanciers, votre comité a vu moins de difficultés et de dangers dans les moyens d'accroître les ateliers de battage. Le mécanisme, plus simple et plus économique du mouton permet donc à l'Assemblée nationale d'être favorable aux réclamations qui lui sont adressées, sans porter atteinte à la surveillance nécessaire; et au point où en est venue la rareté de la monnaie, il n'est plus possible de se refuser aux mesures proposées pour en hâter la fabrication.

Si l'on veut considérer, en effet, que le transport des cloches envoyées, par les districts, dans les lieux qui leur sont indiqués, coûte à la plupart des frais considérables; que fondues et converties en flaons elles supportent un nouveau transport pour arriver aux hôtels des monnaies, souvent très éloignés; que les flaons, frappés dé l'empreinte monétaire, supportent un troisième transport pour revenir aux districts auxquels ils appartiennent, on sentira aisément que cette triple opération accroit la dépense et ralentit l'activité de l'émission.

Le besoin de la petite monnaie devient chaque jour plus pressant. De toutes parts, Messieurs, les murmures et les réclamations s'augmentent. Plus les amis de la liberté redoublent de courage pour surmonter les obstacles par lesquels on veut lasser leur patriotisme, plus les malveillants cherchent à multiplier ces obstacles. Les cam

pagnes se plaignent de ne voir plus que du papier pour signe unique d'échange; les opérations commerciales se ralentissent, les pauvres souffrent. Hatons-nous, Messieurs, de prévenir le découragement qui pourrait naître d'un pareil état de choses et que des circonstances particulières rendent chaque jour plus aggravant. Vous ne l'ignorez pas, Messieurs, tandis que vous portez l'application la plus active aux moyens de rassurer la confiance publique, et que, pour prévenir les dangers d'une confiance commandée par la nécessité, vous substituez un papier national aux divers papiers dont la capitale est inondée, de nouvelles spéculations monétaires jettent scandaleusement dans la circulation des valeurs métalliques doublement fictives qui, sous une forme embellie par l'art, attirent les valeurs réelles et sont peut-être une des principales causes du resserrement de la monnaie nationale. Ainsi, sous l'empire du vrai souverain, on ose attenter aux droits sacrés du souverain, exercer, s'abandonner aux excès de l'anarchie sous le règne heureux de la loi.

Votre comité s'est donc bien facilement déterminé, Messieurs, à vous proposer d'accueillir les réclamations de la ville de Dijon; il avait cru convenable aussi de placer dans la ville de Riom l'établissemen du coulage et du battage; les considérations présentées par la municipalité de cette ville, auraient obtenu votre approbation; mais l'artiste chargé de la conduite de l'atelier placé dans le département du Puy-deDôme a fait changer nos résolutions, en nous annonçant qu'il avait fait son établissement dans la ville de Clermont-Ferrand.

Mais votre comité n'a pas cru devoir s'arrêter à la mesure proposée pour ces deux villes, pour y assurer la fabrication complète de la monnaie. Il a cru seconder vos vues d'utilité et de bienfaisance en vous invitant à établir le mouton dans la plupart des ateliers de flaons et de mettre ainsi les administrations à portée de surveiller sans déplacer la fabrication et l'émission. Par cette mesure, préférable à tant d'égards, la monnaie sera mise tous les jours et à tout instant à la disposition des citoyens; leur confiance en sera accrue par la certitude de l'emploi du métal de leurs cloches dont ils seront les témoins; il se montreront plus empressés de les transporter euxmêmes aux ateliers par l'effet prompt et avantageux qui en résultera pour leurs échanges.

Je vous ai dit, Messieurs, qu'il avait été formé des établissements de flaons à Romilly, Maronne, Mines-de-Saint-Bel, Besançon, Clermont, Arras, Roanne, Saumur, La Charité, Dijon. Mais votre comité, qui ne cherche qu'à abréger les délais, n'a pas trouvé la même nécessité à placer le mouton dans tous ces lieux. Romilly et Maronne sont aux portes de Rouen; Mines-de-Saint-Bel aux portes de Lyon; Roanne et La Charité également à portée du battage. Votre comité se borne done à vous demander l'établissement du mouton à Besançon, à Clermont, à Arras, à Saumur et à Dijon. Trois de ces villes vous le demandent avec instance; il convient à toutes par leur éloignement des hôtels des monnaies, par le besoin du commerce et des campagnes.

Le battage, ainsi rapproché des ateliers de flaons, exigera la surveillance d'un commissaire du roi. Mais il ne faudra pas pour cela créer de nouvelles places, puisqu'il se trouve dans chaque hôtel des monnaies des adjoints du commissaire du roi, lesquels pourront se transporter sur les ateliers, et y exercer les fonctions de commis

saire pendant la durée du travail. Déjà, dans toutes ces villes, le coulage des flaons est en pleine activité. Eh! combien cette activité ne sera-t-elle pas ranimée par l'opération du battage et par la surveillance et le zèle des corps administratifs et municipaux.

Vous jugerez nécessaire, Messieurs, d'autoriser le ministre des contributions publiques à doubler et à tripler s'il le faut, dans les hôtels des monnaies, le mécanisme du mouton, afin que la fabrication, poussée avec la plus grande activité sur tous les points à la fois, produise le plus promptement possible une circulation de monnaie tellement abondante, qu'elle résiste à l'intrigue des accaparements.

Décret d'urgence (1).

L'Assemblée nationale désirant accélérer la fabrication de la monnaie de cuivre et en rendre la circulation dans tout le royaume aussi prompte qu'abondante; considérant que le transport des flaons, des villes où ils sont fabriqués, dans les hotels où ils doivent être frappés, augmente et retarde l'émission; considérant que l'établissement du mouton dans les ateliers mêmes de flaons, doit rendre la fabrication plus active et mettre dans un plus court délai, à la disposition des citoyens, la monnaie provenant du métal des cloches, décrète qu'il y a urgence.

Décret définitif.

L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des assignats et monnaies et décrété l'urgence, décrète ce qui suit :

Art. 1er. Les flaons provenant du métal des cloches, fabriqués dans les villes de Besançon, Clermont-Ferrand, Arras, Dijon et Saumur, y recevront sans déplacement l'empreinte monétaire au coin des nouvelles empreintes. Il sera placé, dans chacun des établissements formés dans lesdites villes, une machine destinée à frapper les flaons, suivant le procédé adopté par la ville de Paris.

་་

Art. 2. Le ministre des contributions publiques fera parvenir dans le plus court délai aux établissements ci-dessus, les ustensiles qu'il jujera nécessaires et leur procurera le nombre d'artistes et d'ouvriers convenable.

«Art. 3. Ces nouveaux établissements seront mis, par les soins du ministre des contributions publiques et sous sa surveillance immédiate, sous la surveillance des adjoints des commissaires du roi près les hôtels des monnaies les plus voisins des villes de Besançon, de Clermont, d'Arras, de Saumur et de Dijon.

« Art. 4. Immédiatement après l'entière fabrication de la monnaie provenant du métal des cloches, dans l'arrondissement où sont placés les établissements, ils demeureront supprimés; les coins et ustensiles seront, par l'adjoint du commissaire du roi, envoyés aux administrations de département, qui les feront passer aux hôtels des monnaies, aprés en avoir prévenu le ministre des contributions publiques.

«Art. 5. Le ministre des contributions publiques est autorisé à envoyer dans les hôtels des monnaies, le nombre de moutons qu'il croira nécessaire pour hater le battage de la monnaie

(1) Bibliothèque nationale: Assemblée législative, Assignats et monnaies, L.

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